« Je ne suis pas encore morte, dit le toi bien » Quand le train a quitté la gare, j'ai sentit mon coeur accélérer dans ma poitrine et un frisson me parcourir. L'angoisse? La peur? L'attente? Je n'ai jamais su quel était ce sentiment qui m'animait à ce moment. J'avais passé une heure dans la salle de l'hotel de justice sans personne venu me faire ses adieux. Je n'en avais pas demandé et je savais que je n'étais pas particulièrement apprécié chez moi et je ne faisais rien pour changer cette image de peste froide et détestable. J'avais vécu toute ma vie avec cette étiquette. Depuis le départ du train je n'avais pas parler, Titus étant dans sa cabine et notre mentor dans un état second. J'avais hésité à aller chercher l'autre tribut de notre district mais la rage de son regard m'avait dit préféré attendre un peu. En attendant qu'il réapparaisse, je pensais a mon petit frère. Si jeune, si petit qui était seul à présent après avoir vu ses deux aînés partir a la mort. J'aurai pu laisser quelqu'un d'autre partir mais je n'ai pas voulu, je n'aurai pas pu rentrer chez moi avec les regards de mon père. Après avoir regardé défiler la route sous mes yeux depuis un moment je m'installe dans le canapé et allume la télévision. Je regarde distraite les images et attend simplement que le trajet se passe. Les districts défilent, tous les ans je regarde les jeux comme tout le monde mais cette année me voir monter sur l'estrade me fait un choque. Je vérifie que rien ne laisse transparaître une quelconque faiblesse de ma part. Je regarde les autres districts, certains mourront, très rapidement c'est sure, ils sont frêle, tremble et n'ont aucun entrainement. Certains donne même envie de prendre pitié pour eux. Plongée dans mon détail des candidats, je ne remarque pas le jeune homme qui vient se mettre à côté de moi dans le canapé. A vrai dire mes sens sont comme éteins en ce moment. Ils se réveilleront dans l'arène, le fait de vivre recluse des autres à un avantage, vous sentez la présence des personnes accommodantes. Je remarque la présence du blond quand il presse le bouton d'arrêt. Je proteste et notre mentor semble s'éveiller. “ On se met au boulot ? Par où on commence ? ” Evidement ça ne m'est en aucun cas adressé et je le sais bien. Il va m'ignorer et ça jusqu'au bout, jusqu'à se qu'il puisse me tuer. Je ne sais pas si je devrai le dire devant notre mentor mais je me dis que finalement il faut qu'il sache aussi. Je soupire, j'ai peine a croire se que je vais demander à celui que j'ai toujours vu comme un rival un ennemi. "Bon, je ne t'aime pas, tu ne m'aime pas et je crois bien que c'est la seule chose sur laquelle nous pourrions être d'accord ici, mais j'ai un marché à te proposer. Je regarde Titus dans les yeux et son regard semble s’intéresser à mes paroles tout d'un coup. "Le fait est que je ne souhaite pas rentrer. J'en ai rien a faire de rentrer ou non, alors je te propose de faire équipe. Quand il ne reste que nous deux tu me tue et tu rentre retrouver ta chérie. Je dis ça très vite, d'une voix neutre et sérieuse, je ne ment pas, je ne mentirai jamais à ce point. J'ai beau le détester je n'ai qu'une parole. "Par contre, je n'ai qu'une chose à te demander si cet accord marche, occupe toi de mon petit frère. Le cerveau du jeune homme semble s'embrouiller et je me retourne vers le mentor pour adresser ma dernière phrase. ça devrait vous arranger de toute façon, vous ne voulez qu'une chose que je meurt et qu'il puisse rentrer. ça se voit dans vos yeux. je repousse une mèche blonde qui cache mes yeux et attend la suite.

Comme à mon habitude, j'évoluais dans un univers cotonneux. Pas de drogues excitantes, cette fois. Juste de quoi me calmer et planer tranquillement. Certains avaient un putain d'alcoolisme, moi j'aimais juste être défoncé comme il se doit. Ca m'aidait. Ca m'aidait à supporter l'idée que peu importe ce que je ferais, Titus allait crever. Si pendant la Moisson, je m'étais senti prêt à tout, cette sensation de toute-puissance s'était manifestement atténuée jusqu'à atteindre un point nul. Titus allait crever. Comme vingt-deux autres tributs. Je n'avais pas d'illusions de merde à me faire. Si j'avais incapable de sauver les tributs des dix dernières années, je n'allais pas en être capable pour cette édition. Titus allait disparaître comme le nuage de fumée que mes joints me faisaient recracher. Sous mes doigts, je pouvais sentir le moelleux d'un fauteuil qui ne devait pas être celui de ma maison. Je devais sûrement être déjà dans le train, et surtout, je devais déjà avoir fumé de quoi assommer un cheval depuis bien longtemps. La drogue me faisait perdre la notion du temps et putain, c'était ça que j'aimais le plus. Ca m'empêchait de me rendre compte que dans un peu plus d'une semaine, le seul ami que j'ai jamais eu se ferait défoncer le crâne par un tribut plus fort que lui. Cette idée était la pire de toutes celles que j'avais pu avoir depuis une paire d'années. Parce que je tenais à Titus. Un peu. Je fixais un point au loin, perdu dans mes pensées, perdu dans les souvenirs de mes propres Jeux. Chaque année me faisait revivre, à travers mes pauvres tributs, ce qui m'était arrivé. J'avais gagné parce que j'avais des couilles. Et je doutais que Titus en ait autant que moi.

Je me foutais cordialement de la blondasse de merde qui me faisait presque chier avec sa télévision de connasse. Regarder les rediffusions de la moisson? Pour voir à quel point elle faisait pitié? Peut-être que c'était son trip de se voir ridicule. Peut-être que niveau masochisme, elle avait dépassé mon seuil. Moi, j'aimais la douleur, mais pas me tourner en ridicule. Je tirai une bouffée sur mon joint, distraitement, dans mon petit univers cotonneux. Un univers où Titus, Rheagan et Satine seraient rangés dans une boîte invisible, à l'abri de tous ceux qui peuvent leur faire du mal. A l'abri de la mort et de la déception. Ehhhh merde. Je me transformais en un gros branleur, à penser ça. Encore des champignons que j'avais dû prendre et qui me mettait sans dessus dessous. Un gémissement aigü suivit d'un autre me sortit de ma rêverie - Hazel était en train de se faire prendre par derrière? Ah nan. C'était juste Titus, Dieu merci, qui avait éteint cette TV de merde. Alleluia, mon sauveur. « On se met au boulot ? Par où on commence ? » Un rire clair s'échappa de ma gorge, et j'écrasai mon joint contre l'accoudoir du fauteuil. Je me levai et allai à la rencontre de Titus et d'Hazel, avant de m'affaler minablement dans une chaise. « Tout doux, Titus, tu vas faire peur à notre blondasse nationale. » Je pouffai, avant d'ôter mes chaussures et de poser mes pieds à l'hygiène douteuse sur la table en verre. « Prends donc un truc à manger, Chamberlain. Ou bien un joint. Tu verras c'est bon, putain. »

Je laissai la blondasse papoter comme une merde. Pendant un instant, j'eus un vertige - sans doute parce que j'étais à jeun depuis une semaine.. ou deux, j'en savais rien, de toute façon j'étais trop gros, je méritais bien ça - mais je me repris bien rapidement. « Déjà avant de vous lancer dans votre trip "on fait équipe et après on mange des papillons, oh mon dieu prends soin de mon petit frère et laisse moi mourir!", prépare toi à l'idée de crever comme un chien et douloureusement. Parce que t'as vingt-trois chances de te faire défoncer comme un bleu. » Je ne savais pas à qui je m'adressais, mais ça ne changeait rien. « Blabla, vous devez aussi vous faire aimer du public, blabla, vous devez attirer les sponsors, blabla, tout ça c'est du blabla. Vous n'avez pas à vous faire aimer du public, vous devez vous faire aimer de moi. JE vais être VOTRE SEULE chance de survie dans l'Arène. Sans moi, vous êtes morts. Compris? »