Je me souviens encore du moment où mes parents se sont séparés. Je devais avoir 17 ans, et je comprenais parfaitement bien les choses. Ma mère était en larme, ma petite sœur également mais mon père semblait stoïque, aucun sentiment ne se lisait sur son visage froid. J’ignore pourquoi, mais mon père avait insisté pour que je parte avec lui, pour mon bien m’avait-il dit. « Non, je refuse de les laisser ! Maman ! Annabel ! » Je m’entends encore hurler dans la maison, prise de force par mon père qui me jeta dans la voiture. Un homme sans cœur, qui pourtant m’éloignait pour me protéger d’après lui. Mais il ne comprenait pas que je n’étais encore qu’une enfant, et que j’avais besoin de ma mère et de ma sœur pour aller bien. Je compris par la suite que mon père avait fui la misère, acceptant ainsi un travail au sein d’un grand groupe d’hommes, et laissant ma mère se débrouiller par ses propres moyens, sans argent ni même un toit sous lequel vivre. Assise sur mon lit, dans ma grande chambre, je pensais à ma sœur. Malade, elle avait besoin de soins et ma mère restait à ses côtés jours et nuits. Nous avions dix ans de différence, et pourtant je me sentais proche d’elle comme-ci nous étions jumelles. Pour tout vous dire, Annabel souffrait d’un handicap terrible : elle ne parlait pas et respirait très mal à cause d’une malformation au poumon droit. Elle avait constamment besoin de soins. Malgré tout, Annabel était intelligente, bien plus que moi parfois. Je savais qu’elle s’en sortirait, et que ma mère prendrait bien soin d’elle. Mais pas une seule seconde ne passait sans que je regarde vers l’horizon, où j’apercevais une forêt dans laquelle vivaient ma mère et ma sœur. Je restais là, à scruter l’horizon en me demandant pourquoi mon père m’avait emmené avec lui alors que je n’avais pas autant besoin de confort qu’Annabel en avait besoin. Perdue dans mes pensées, mon père fit son entrée dans ma chambre et m’attrapa par le bras. « Je t’ai déjà dit de t’éloigner de la fenêtre et d’arrêter de regarder par là-bas ! Oublie tout ça Abigail, elles n’existent plus pour nous. » Me dit-il d’une voix agressive. Mais je n’étais pas comme lui, je refusais de les oublier car elles étaient tout pour moi. Et je restais persuadée qu’un jour, je les reverrais. « Je voudrais te présenter quelqu’un, habille toi vite ! » Me dit-il de nouveau. J’étais pourtant habillée, mais il voulait que je sois présentable. Notre invité était un homme d’une quarantaine d’années, qui semblait aussi froid que mon père. Un certain monsieur Snow…

Depuis que je vis ici, les choses ont bien changées. Je me rends compte que mon père avait tout calculé, et a préféré sauver sa peau plutôt que celle du reste de ma famille. J’ai eu de la chance qu’il m’emmène certes, mais j’aurais préféré rester avec les miens. Le monde dans lequel on vit est atroce, le Capitole nous force à regarderr aux Hunger Games : des combats à mort entre enfants. Le gagnant devient riche, le perdant meurt. Quoi de plus horrible pour moi que de regarder cela. Ce soir-là, nous devions regarder un nouveau combat, opposant tous les enfants tirés au sort. J’ignorais encore tout ce qui allait se passer, mais c’est tout de même avec une certaine boule à la gorge que je me rendis dans une salle aux cotés de mon cher père, dans laquelle les jeux étaient transmis en direct. Nous, les habitants du Capitole, devions être devant nos écrans à admirer les combats mais je n'aimais pas cette règle. Je ne voulais pas assister au combat, encore moins le regarder depuis ma maison. Je ne faisais même pas attention aux enfants qui allaient s’opposer, mes yeux étant rivés ailleurs. Quand soudain, mon cœur se retourna. J’entendis le nom de ma petite sœur, qui devait probablement avoir 17 ans aujourd’hui. Je n’en cru pas mes yeux quand je la vis sur le terrain de combat. Elle était si maigre, et je savais qu’elle ne survivrait pas au combat à cause de sa maladie. Annabel portait une petite épée, et l'un des enfant qui était face à elle était beaucoup plus rude, beaucoup plus costaud. Je ne pouvais pas rester là sans rien faire, il s’agissait tout de même de ma sœur ! Le combat fut rapide, et lorsque l’épée traversa l’abdomen de ma sœur, je ne pus retenir mon hurlement. « Nooon !!! Annabel !! Lâchez-moi, c’est ma sœur ! … Annabel ! » Les gens du Capitole me retenaient, tout le monde me regardait et je ne pouvais retenir mes larmes. Mon père était là, mais ne bougea pas le petit doigt. Il me forçait simplement de me taire. Ma sœur venait de mourir devant mes yeux, et j’imaginais alors la tristesse de ma mère qui avait perdu ses deux filles et qui se retrouvait désormais seule. Je ne pouvais pas la laisser, il fallait que j’implore mon père de la faire revenir parmi nous, sinon elle en mourrait. Mais il refusa catégoriquement, et m’obligea à rester dans ma chambre le temps de calmer ma peine. Il me tenait comme une marionnette, et je ne pouvais rien faire. Je revoyais encore la mort de ma sœur, et je crois que la tristesse ne s’effacera jamais de mon visage. Il fallait agir contre ce gouvernement de tyrans, quitte à tuer le président Snow ou mon propre père.