Elle n’avait envie de voir personne. Les quelques mots échangés avec Laurel l’avaient profondément chamboulée, et pour son propre bien, la jeune fille avait décidé qu’elle ne prendrait pas le risque d’un nouvel adieu. Le trajet jusqu’au train avait été suffisamment pénible – ignorer la main tendue d’Isaac ressemblait à s’y méprendre à une déchirure au niveau du cœur – et une confrontation directe avec Ethan était exclue. Restait donc Gargaria. A cette pensée, Ambre s’enfouit plus profondément encore sous les couvertures. Elle s’était entièrement déshabillée dès qu’elle en avait franchi le seuil, abandonnant par la même occasion robe et ce qui lui restait de dignité. Adieu district sept. Bon débarras. Il lui semblait qu’ainsi, le malheur se faisait plus désirable dans des draps de satin. Dire qu’avant, elle ne connaissait le satin que de nom. Mais Freaks se trompait : ses petits méfaits avec Amarinda Carter l’avaient amenée à traiter avec du satin, elle ne l’avait juste pas reconnu. Carter… Elle aussi serait au rendez-vous. Combien de vainqueurs devrait-elle encore ignorer, au juste ? Il existait une façon très simple de répondre à cette question. Mais visionner des extraits de la moisson était au-dessus de ses forces pour le moment. Cela rendrait les choses trop réelles et la sanction de mort irrémédiable. Ce soir, peut-être. Ou avant, si elle s’ennuyait. Du temps, elle en aurait à tuer dans cette chambre. En attendant, Ambre savourait le fait d’être dans un vrai lit, protégée du monde extérieur. Après tout, le monde entier voulait la voir crever. Bientôt, elle eut besoin d’air. Cela ne faisait pas trente minutes qu’elle était là qu’elle se senti déjà étouffer. Elle n’avait pas besoin de l’air stérilisé du Capitole, non. Ambre ressentait le besoin immédiat d’être à la maison. Dans la forêt. Elle se rendit compte qu’elle n’avait même pas pris la peine de faire le tour de la Cabane une dernière fois. Pourquoi l’aurait-elle fait, d’ailleurs ? La moisson aurait dû être un exercice de routine. On toqua à la porte. N’avait-elle pas dit qu’elle ne voulait pas être dérangée ? Non, elle ne l’avait pas dit. Et c’était bien ça le problème. Comme quoi, même en cherchant à se faire oublier on souhaitait l’obliger à participer à cette mise en scène. Peut-être que si elle réussissait à se planquer suffisamment longtemps on la laisserait tranquille pour de bon. Quand bien même, ils devaient bien se douter qu’elle n’avait envie de voir personne. C’était comme se faire convier à son propre enterrement, la délicatesse en plus. Il lui semblait entendre des bruits de pas s’éloigner. Soulagement. Le besoin d’air se fit moins urgent. Ce n’est que lorsque la porte s’ouvrit qu’elle comprit qu’elle s’était une fois de plus trompée. S’attendant à voir Isaac, elle s’apprêtait à lui coller une de ses remarques acerbes dont elle avait le secret. Ayez pitié des mourants.

Ambre. Il faut s'occuper d'Ambre. Non il ne faut pas. Elle occupe tes pensées. Depuis le démarrage du train qui vous mène aux tréfonds de l'Humanité moderne. Il t'est impossible de la sauver, il n'existe aucune échappatoire. Elle est perdue.
Tu te tournes et te retournes sans cesse dans ton lit, cherchant avec le plus grand volontariat à dormir, mais tes pensées sont trop vives pour se laisser amadouer par les calmants avalés au dîner. Ambre. C'est tout ce que tu as retenu, impossible de mémoriser sont nom ou son visage en si peut de temps. Tu n'as rien retenu parce qu'il n'y a rien à retenir. Lors de la moisson, elle paraissait, du coin de l’œil, petite, menue, et fragile. Elle n'a probablement aucune chance de sortir de cette arène autrement qu'entre les griffes d'un hovercraft remontant son cadavre lacéré de coup de lames, ou laminé par une mutation. Comme tous les autres avant elle.
Tu abandonnes finalement l'idée de dormir; lasse de lutter contre un ennemi plus gros que toi. Le sol froid agit comme un électrochoc quand tes pieds se posent à terre alors que d'un bras tu rejettes la couverture de velours qui te recouvrait pour sortir. Tu enfiles négligemment un short et un pull, et tu t'engouffres dans le long couloir du train. Au wagon restaurant, tu t'arrêtes voler trois beignets et une petite bouteille d'eau fraîche. Ça peut être utile pour calmer les ardeurs d'une jeune fille offerte en sacrifice contre son gré.
Et tu arrives. Devant la porte de sa chambre. Tu restes plantée devant une longue minute, réfléchissant à ce que tu pourrais lui dire, à ce que tu comptes faire. Au fond, tu ne serais pas venue si elle ne t'empêchait pas de dormir. Tu es égoïste, Khloé. Tu frappes. Tu souffles une fois, tout doucement, longuement, puis une deuxième fois d'une traite en ouvrant la porte.
Personne. Qu'est-ce que...? Ah si, dans le lit. Puis, l'espace d'un court instant, tout te revient; c'est toi dans cette chambre, au septième étage de cette tour maudite. Tu te revois enfiler une robe, t'allonger sur le lit, et t'apprêter à mettre fin à tes jours toi-même, avant même d'être entrée dans l'arène. Et tu l'aurais fais, si la Muette n'était pas entrée à ce moment là. Le mouvement d'Ambre dans le lit te ramène à la réalité dans un léger vertige, et tu poses la boîte de beignets pour te retenir sur le meuble le plus proche. Tu n'es plus une tribut, elle si, aide-la, comme tu as voulu aider l'année dernière. L'année dernière qui fut une hécatombe.
Tu reprends tes esprits aussi rapidement que possible. Et tu la vois, là, qui se redresse, surprise de te voir. Tu mémorises son visage. Elle a les traits doux, parsemés de tâches de rousseurs, les cheveux blond vénitien totalement hirsutes sur sa petite tête ronde. Elle est assez jolie dans son style. Elle pourrait faire les yeux doux à certains sponsors. Tu t'avances pour t'asseoir sur une chaise, une jambe légèrement replié vers l'extérieur et les mains qui pendent négligemment devant toi, tenant la bouteille d'eau. Tu la lui tends, comme pour rompre un lourd silence. « Bois, gave-toi. C'est un luxe auquel tu n'auras pas accès dans l'arène. L'eau sera rare, ou gardée par les carrières. » Tu tentes un sourire en témoignage de sympathie, paradoxal avec tes propos peu rassurants. Tu te penches pour attraper la boîte contenant les beignets, prends celui au glaçage vert, et pose les deux autres sur la table de chevet. Tu la toises tout en continuant de manger. Puis entre de deux bouchées tu lâches ton rapport. « Tu sais, t'es faible. Ça se voit. Ou alors t'es bonne actrice et tu caches un talent utile. Si c'est le cas, continue comme ça. Si t'arrives à me convaincre que t'es faible, tu pourras convaincre tout le monde, et les carrières te foutront la paix. A l'inverse s'ils voient que tu représentes une menace, tu seras leur première cible. » tu déglutis en la pointant du doigt. Ce genre de conseils, il y a des années que tu ne les avais pas prodigués, et tu t'étonnes de la facilité avec laquelle les mots sortent naturellement de ta bouche. « T'es assez jolie pour pouvoir attirer quelques sponsors au grand coeur. Fais en sorte de pas trop t'amocher, parce que je peux rien pour toi. En toute honnêteté, je suis incapable de te trouver des sponsors.  » C'est cru, mais vrai. Et elle mérite la vérité, dans ses derniers instants.

Spoiler:

Gargaria. C’était peut-être la personne qu’elle aimait le moins dans ce train. Jusqu’à preuve du contraire même son hôtesse avait quelque chose de divertissant – ne serait-ce que dans sa manie de s’enrouler les cheveux autour de ses doigts-, il fallait bien le reconnaitre. Mais la vainqueur n’avait rien à offrir, si ce n’est de la méchanceté. Ambre se souvenait de son rire comme si elle venait de l’entendre ; pas étonnant que le district entier ne se bouscule pas pour répandre des éloges à son encontre. Gargaria qui s’installait comme si de rien n’était, comme si elle était conviée. Elle pouvait tout aussi bien repartir comme elle était venue. C’était une étrangère et Ambre n’aimait pas les inconnus, encore moins lorsqu’elle était vêtue d’un simple drap.  L’observant du regard d’une manière plutôt farouche, elle la vit s’installer sur une chaise, tout à fait à l’aise. Cette façon de repousser aussi loin les limites de son intimité l’agaça profondément, et la jeune fille tenait à le lui faire savoir d’une manière ou d’une autre. Pourtant, Gargaria n’avait pas l’air de s’en soucier le moins du monde. Elle se contentait de débarquer, qu’on accepte sa présence ou non semblait ne pas faire partie de ses priorités. Quant au respect de la pudeur d’autrui, c’était un fait bien contestable, surtout depuis qu’elle avait été désignée comme nouvelle marionnette. Freaks releva un peu le buste, laissant le satin glisser à son aise. Une manière de lui montrer qu’elle camperait sur ses positions jusqu’au bout. Elle accepta négligemment la bouteille d’eau qu’on lui tendait mais n’y toucha pas, toujours préoccupée à jauger l’inconnue. L’eau se faisait poison.  « Bois, gave-toi. C'est un luxe auquel tu n'auras pas accès dans l'arène. L'eau sera rare, ou gardée par les carrières. »  Elle lui apportait de l’eau, un faux conseil amical et une occasion de parler. Ambre la fusilla du regard, mais Gargaria semblait agir de telle sorte qu’elle se demanda si elle la regardait vraiment.  De l’eau. Non mais franchement. Ne pouvait-elle pas lui fournir autre chose ? Comme si il fallait avoir les idées claires pour écouter sa tirade. Son discours de bienvenue n’était pas nécessaire, pas plus que sa présence. Était-elle devenue à ce point indésirable pour que ce soit elle qui vienne et non Nash ? ? « Je n’ai pas peur des carrières. Je n’ai peur de personne. » minauda-elle, les yeux rivés sur les friandises. Tu dis ça parce que tu ne les a pas encore vus. La tentation d’allumer la télévision se fit plus grande encore. Mais non, tu ne dois pas participer à tout ça. Tu ne dois même pas en envisager l’idée.

La sanction fut presque immédiate. « Tu sais, t’es faible. Ça se voit » Le plus tu en apprends, le moins tu en sais. » Ethan ne lui avait donc rien dit. Parce que tu n’es rien, Ambre. Mais le ton était donné : elle la regardait manger, avalant chaque bouchée comme elle avalerait les morts. La haine qu’elle ressentit pour cette femme fut si intense qu’elle lui brula la gorge. Elle devait apprécier le spectacle, éliminant déjà ses chances de survie au profit d’un autre, le tout couvert sous un étalage de sucre et de paroles mielleuses. Gargaria agissait exactement comme sa mère. Elle n’avait pas pu se battre contre cela. Cependant, la violence accumulée menaçait d’exploser à tout instant. En particulier devant cette femme dont elle ne connaissait rien. Cette femme aux manières si inadéquates. Ambre n’était pas faible. Elle ne lui donnerait pas cette satisfaction. Que faisait Ethan ? Pourquoi lui imposait-il cela ? La colère lui ôta les mots de la bouche. « Ce n’est pas parce que vous avez gagné les jeux en vous planquant que tous les autres sont faibles. Je ne gagnerais pas. Mais je ne me planquerais pas » Elle marqua une pause. Elle tiendrait bon. « C’est ce qu’ils veulent. » A l’évidence, c’était ce que le Capitole voulait. On l’avait conviée à l’anniversaire de Panem. Ambre était bien stupide d’avoir pensé qu’il n’y aurait pas de paiement. Elle le payerait de sa vie. Le regard d'une autre se fit inadéquat, lui aussi. Freaks ne supportait plus de se faire observer de la sorte. Elle sorti du lit et se posta devant la fenêtre, arrachant le drap avec. Dehors, les paysages défilaient, se confondant dans le flou le plus total. Comme le temps qui lui restait à vivre. « De quoi ont-ils l’air ? » C’est fini, accepte-le. « Les autres. »

« Je n’ai pas peur des carrières. Je n’ai peur de personne. » est de toute évidence la phrase de tous les tributs casse-couilles et trop sûrs d'eux. Ce que l'on peut raccourcir par "les suicidaires". Et c'est typiquement le genre de trucs qui te donnent envie de foutre le camp et de laisser ces gosses crever comme ils sont supposés le faire, hein Khloé ? Comme quoi tu trouverais ta place au Capitole.
« Ce n’est pas parce que vous avez gagné les jeux en vous planquant que tous les autres sont faibles. Je ne gagnerais pas. Mais je ne me planquerais pas » Le choc est brutal, et un frisson te parcourt jusqu'aux ongles alors que tu te figes. Tes Jeux, Khloé. Elle l'a fait, elle en a parlé, elle a mentionné tes Jeux. C'est étrange cette sensation, pas vrai ? Pendant un court instant, tu savais tout, mais surtout rien. Tu savais que tu étais mentore, que tu étais là pour aider Ambre de mieux que tu peux, mais tu as réussi à oublier l'espace d'une fraction de seconde que tu étais là parce que tu avais survécu à des Jeux. « C’est ce qu’ils veulent. » Mais c'est trop tard, elle a fait un pas de travers, la jeune. Tu viens de perdre toute l'envie d'aider les autres que t'avait apportée la mort d'Athos, pour le moment du moins. C'est finit. Elle n'avait pas le droit de parler des Jeux, de te cracher ça gratuitement. Ce qui t'énerve le plus, en fait, c'est que ses paroles sont fausses. Sa version de tes Jeux, tu la préfères à la vraie. Elle te fait rêver d'une vie où tu n'aurais pas commis de meurtres, comme si tu aurais pu remporter les Jeux les mains propres. Mais qu'est-ce qu'elle croit ? Qu'on te surnomme La Barbare parce que le crime le plus horrible que tu aies commis est d'avoir découpé un lapin pour le manger ? La colère te fait serrer les lèvres, mais tu tentes de garder l'air calme pour ne rien laisser paraître. Aide-la. Mais venge-toi.
Tu la suis quand elle se lève pour se diriger vers la fenêtre, prenant appuie sur un autre mur. « De quoi ont-ils l’air ? Les autres. » qu'elle demande enfin. Tu hésites vraiment à lui répondre. La colère a beau être invisible, elle n'en est pas moins présente et violente. Dans un élan de stupidité, tu t'approches d'elle à pas de chat, croisant les bras sous la poitrine, le sourire aux lèvres et le ton sarcastique. Tu es persuadée qu'elle sent ta nervosité, mais tu t'en fiches et te dis que cela ajoute un effet dramatique à la situation. « Ambre, Ambre, Ambre... » tu avances d'un pas. « C'est à croire que tu n'as jamais entendu parler de moi. Tu crois que j'ai gagné en me cachant ? Les carrières se sont entretués, et les autres tremblaient à l'idée de me croiser. J'étais donnée gagnante avant le bain de sang, à cause de mon score. Un 10. Tout ça parce que je savais couper au bois, au District.  » tu continuer d'avancer lentement, jusqu'à arriver dans le carré de lumières de la ville projetées au sol à travers la vitre. « J'ai tué six personnes. Tu entends ? J'ai le sang de six personnes sur les mains chaque matin au réveil. Je les ai tuées. Brutalement. Tu as une idée de ce que l'on doit ressentir quand une hache s'abat sur notre bras, ou dans notre ventre ? Peut-être même dans la tête, car honnêtement, je n'en garde que de vagues souvenirs. » tu jubiles intérieurement. Puérile. Mais qui peut te reprocher de jouer les gamines quand on sait qu'on t'a volé les années où tu avais le droit de le faire ? T'es de plus en plus proche. « J'ai perdu la tête. Je continuais de frapper bien après le son du canon. Même au Capitole ils aimaient pas trop ça, certains. On m'a rapporté que les parents en venaient à cacher les yeux de leurs gosses. » tu termines avant de marquer une pause. Elle se tient pile devant, ne faisant même pas une tête de moins que toi. Tu lui prends le bras peut-être un peu trop fort que ce que tu voulais, pour lui murmurer. « Ne redis jamais que je me suis cachée, ce serait trop beau. » tu la lâches immédiatement et fais trois pas en arrière, pleinement satisfaite de ton petit spectacle. Haussant soudainement le ton, feignant qu'il ne s'est rien passé, tu te décides à répondre. « Les autres ? Je sais pas trop. Depuis quelques années, les carrières ont perdu en dangerosité, mais ils restent une menace. Je pourrai toujours aller soudoyer Tywin afin de savoir si le Un a remonté son niveau. L'année dernière, le carrière du Un était trop amoureux, et l'année d'avant, il était trop bête. A ta place je sous-estimerai pas le Trois, si l'arène est assez moderne. T'auras l'avantage dans une forêt, je suppose. »
Et tu pars chercher la bouteille d'eau qu'elle a délaissée.

Des mots, rien que des mots. Pendant un bref instant, Ambre réalisa qu’elle s’était trompée. Elle avait confondu ses jeux avec ceux d’une autre. La fatigue, le stress, sans doute. Mettez-le sur le compte de ce que vous voulez mais pas sur le sien. A l’entendre parler ainsi d’une voix trop doucereuse pour le personnage, Ambre ferma la bouche et fit mine d’avaler. Elle déglutissait ainsi son erreur. Gargaria était tout près, minimisant l’écart qui les séparait. Elle sentait sa présence derrière elle. En entendant ses mots, elle se tient plus fermement à la barre, regardant les paysages défiler avec la même intensité. C’est-à-dire aucune : son cerveau se focalisait sur la quantité d’informations à assimiler, rendant le reste inopportun. C’est de la même manière que son esprit lui avait joué ce mauvais tour, en associant des souvenirs crées de toute pièce. Et c’est de la même manière qu’elle recommençait à l’instant. C’est qu’elle n’apprendrait jamais, Ambre. Ce petit défaut de concentration allait lui coûter cher dans l’Arène, elle en était persuadée. Peut-être même dans la tête, car honnêtement, je n'en garde que de vagues souvenirs. Au moins, elle se rassura sur un point. Elle avait toutes ses chances de devenir un monstre, elle aussi. Son mentor lui ressemblait peut-être plus qu’elle ne l’imaginait. Mais elle n’en restait pas moins une tarée et une femme dont elle avait peur. Son corps se détendit imperceptiblement lorsqu’elle l’entendit changer de sujet, et elle osa à nouveau lui faire face. Après tout, elle ne risquait rien. Pas pour l’instant. On allait la choyer et la gaver comme une oie puis l’envoyer dans on ne sait quel abattoir.  Gargaria ne pouvait l’atteindre, aussi meurtrière soit-elle. La moindre parole, elle lui ferait payer plus tard. En ne faisant pas son boulot, en lui donnant des faux conseils ou en privilégiant la survie d’Isaac. Très bien, elle n’avait pas l’intention d’en sortir vivante, de toute manière.  Mais elle se promit de ne pas écouter tout ce que la Vainqueur lui dirait, juste au cas-où. Ambre resterait sur ses gardes.

« Les autres ? Je sais pas trop. Depuis quelques années, les carrières ont perdu en dangerosité, mais ils restent une menace. Je pourrai toujours aller soudoyer Tywin afin de savoir si le Un a remonté son niveau. L'année dernière, le carrière du Un était trop amoureux, et l'année d'avant, il était trop bête. A ta place je sous-estimerai pas le Trois, si l'arène est assez moderne. T'auras l'avantage dans une forêt, je suppose. » Ambre réfléchit un moment à ce qu’elle venait de dire. Le district Un l’impressionnait toujours, de par son statut et ses privilèges. La jeune fille aurait adoré y vivre. Elle n’aurait pas eu à faire dans l’illégalité avec Amarinda Carter au moins. Peut-être même qu’elle aurait directement travaillé pour elle. En tout cas, une carrière aurait gentiment offert sa place. Alors qu’au district sept, les autres ont sûrement pleuré de joie de ne pas être choisis. C'était une autre mentalité. Elle n’était pas meilleure, juste différente. « Je ne pense pas que le Trois gagnera cette année ». Gargaria l’interrogea du regard et Ambre se contenta d’hausser les épaules, baragouinant à moitié. Si Ethan n’avait rien dit, elle ne voulait pas révéler plus vite ses théories, à savoir qu’elle pensait que tout était truqué. Y compris les tributs. « Question de statistiques », dit-elle. Elle n’avait pas fait assez d’études pour confirmer ses dires mais n’était pas idiote à ce point. Cette conversation commença à titiller sa soif. Mais il n’était pas question d’eau ou d’alcool. Elle avait soif d’en apprendre plus.