Dormir. Dormir pour oublier. Dormir pour effacer les courbatures et les sentiments qui te rongent au plus profond de ton être. Voilà ce que tu te devais de faire en rentrant de ta fête ce soir là ou plutôt ce matin. L’heure approchait les 5 heures et ton corps te suppliait de rejoindre ton lit. Déjà lors de la soirée, tu n’avais qu’une envie : partir. Mais tu continuais à sourire aux invités comme si de rien n’était. Tes yeux semblaient pétiller de bonheur mais ton cœur, lui, n’était pas à la fête. Tu te traînais comme une pauvre malheureuse, donnant le change aux vieux pervers du Capitole. Tes cheveux roux accrochaient la lumière et les yeux semblaient tous tournés vers ta magnificence. Sourires, rires, accolades … Tant de gestes qui te donnaient envie de vomir. Une chose que ton rôle de Capitolienne hors pair ne te permettait pas de faire. Alors tu continuais à jouer la comédie, bravant tes ressentis et tes désillusions. Tu n’attendais que l’heure opportune pour te sortir de là mais quitter une soirée avant minuit promettait de futurs ragots et avec ton rôle d’infiltrée, tu ne pouvais décidément pas te le permettre. Alors tu vagabondais parmi les invités, prenant un verre par-ci, quelque chose à manger par là sans oublier les fameux médicaments qui te purgeaient bien mieux que n’importe quel autre. Tu étais repartie pour une nouvelle fournée. Puis ton regard se portait sur une horloge non loin. Les six heures approchaient doucement, bien trop lentement pour ta santé qui se trouvait mise à rude épreuve. Puis ça sonna. Six coups. Ta libération. Tout comme Cendrillon, tu partis de la fête. Ton carrosse ne se transformerait pas en Citrouille mais toi, tu risquerais de faire des ravages si tu restais un peu plus parmi toutes ces futiles personnes.

Des coups durement frappés à la porte de ma chambre me libèrent de mon tendre et si réconfortant sommeil. J’ai la bouche pâteuse et un puissant mal de crâne. D’ailleurs, c’est de là que viennent les bruits. Je grogne et m’adosse difficilement à la tête de mon lit, passant une main sans dynamisme dans mes cheveux emmêlés.  Le Soleil se trouve être déjà bien haut dans le ciel. Les yeux larmoyants, j’étouffe un bâillement tout en me sortant difficilement du lit. Le carrelage froid m’arrache un immense frisson qui se répand du bout de mes orteils jusqu’au sommet de mon crâne. Tremblante, je m’empresse  de me glisser sous les jets chauds de la douche. Je regarde ma peau rougir peu à peu sous la température bien plus élevée que le recommanderaient les médecins du Capitole. Au sortir de la douche, je me serais transformée en écrevisse prête à être dégustée mais qu’importe. J’inhale profondément la vapeur qui a empli la salle de bain. Une grimace de dégoût tord mes traits. Il serait peut-être temps de sortir. Les portes de la douche coulissent suite à mon approche et je me retrouve devant mon miroir à démêler mes longs cheveux indisciplinés. Je les sèche vite fait et me maquille légèrement. Aujourd’hui, pas de sortie de prévue et j’ai assez abusé sur les cosmétiques pour la soirée d’hier. Je revêts un petit ensemble blanc et or avant de me perdre dans la contemplation de mon ordinateur, cherchant quoi faire de mon après-midi déjà bien entamé. J’entends ma mère discuter en bas même si les voix se trouvent étouffées. Encore un de ses nombreux adeptes venu prendre le thé. Puis la porte qui claque. Qui est parti ? Des pas dans l’escalier, étouffés. Je me raidis. J’ai la plus grande horreur que l’on vienne me déranger dans ma tanière comme j’aime l’appeler. C’est mon endroit de repos, celui où je peux être vraiment moi. Sans faux-semblants, sans sourires forcés. Sans rien. « Eären, c’est Julia du district 8 » Cette phrase prononcée juste après les trois coups m’aidèrent à me détendre. Je relâchai la pression de mes épaules avant de laisser échapper tout l’air de mes poumons. Bien, ce n’était pas quelqu’un venu me parler de telle fête ou de telle soirée. « J’arrive de suite Julia ! » Je dompte mes cheveux en un petit chignon vit fait avant d’ouvrir la porte avec un grand sourire. « Je suis désolée mais je préfère que l’on redescende. Ma chambre est très en désordre. » Lui indiquais-je en plaçant une main sur ma bouche comme un signe de conspiration. Refermant la porte, je la précédai dans la maison. « J’ai entendu la porte, je suppose que Lyly-Rose est sortie. » Puis la salle à manger qu’elle avait quitté précédemment. Je touche les étoffes du bout des doigts, indiquant aux domestiques de sortir de la pièce d’un geste de la tête. Une fois qu’ils m’eurent obéis, j’allais docilement fermer les diverses portes de l’endroit. Mon sourire s’effaça et mon visage devint grave. « Que puis-je pour toi Julia ? »