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MessageSujet: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeLun 13 Jan - 11:46



welcome to my head
" but reputation means nothing here "

Enfin dehors. Je lançais un dernier balayage visuel autour de moi pour vérifier que personne n'allait se mettre à hurler en s'approchant dans ma direction pour me dire de retourner dans ma chambre, puis me redressais pour me lancer au pas de course dans la première rue qui s'ouvrait au-devant. Malgré ses airs austères, la petite allée ne représentait ni plus ni moins qu'une bouffée d'air frais pour l'animal en cage que j'étais depuis maintenant près d'une semaine. D'accord, fuguer de la sorte n'avait pas été ma plus brillante idée, mais je n'en pouvais plus d'être sans cesse entouré de personnes qui m'obligeaient à peser systématiquement mes mots au moment de leur adresser la parole, de peur de trahir cette couverture que l'on m'avait conseillé d'adopter pour le bien de mon entourage. Au début, j'avais trouvé ça plutôt drôle de jouer à l'adolescent qui ne se rappelait de rien. Ça me permettait de voir les réactions émue de tout le monde et intérieurement, en réaction à ça, je me disais que manipuler était d'une facilité déconcertante lorsqu'on s'y prenait bien. « C'était à ma portée ». Oui... à court terme, certes. Mais après quelques jours déjà, je m'étais retrouvé dans une impasse. Pas des moindres, d'ailleurs, puis-ce que la seule personne à qui je pouvais parler de mes ressentis était moi-même. C'est là que j'ai compris dans quoi je m'embarquais si je décidais de m'enfoncer dans le mensonge et pour un garçon de seize ans, c'était encore plus effrayant que de passer la nuit seul dans un arbre, alors qu'un tas d'autres jeunes armés jusqu'aux dents se baladaient aussi dans la zone. Seul. J'étais désormais seul. J'allais évoluer seul et j'allais mourir seul. Peut-être qu'il était encore temps de changer de décision, mais qu'allait-il advenir de ma famille et de mes amis, si je rentrais au District un et que j'annonçais publiquement que j'avais retrouvé la mémoire perdue temporairement pour cause de traumatisme ? Est-ce qu'on allait m'enlever mes parents ou ma petite-amie ? Je ne pouvais pas me résoudre à ça... c'était plus simple de me livrer directement et de mon plein gré au Capitole pour qu'on laisse mes proches en paix. Entre fuir et faire face, je préférais la solution qui aurait le coût le plus bas en sang. De toute manière, on m'avait bien expliqué que peu importe quelles étaient mes aspirations d'avenir, j'allais de toute façon devoir les laisser tomber maintenant que j'étais ressorti vivant de cette arène. Alors soit, autant faire des dégâts minimes et épargner ceux qui ne devaient pas être mêlés à cette histoire de chantage. Je pourrais très bien supporter le prix à payer pour ce choix, je me devais d'être assez solide pour ça. Voila... je n'étais pas une petite nature, je me suffirais à moi-même et tout se passerait à merveille... mais dans l'immédiat je n'en n'étais pas sûr à 100%... visiblement.

Qu'est-ce que je ficherais là dehors, sinon ?

Mes jambes s'arrêtèrent net lorsque j'eus l'impression qu'on m'épiait sur la gauche. Ennemi ?! Par réflexe, je disparus derrière une palissade et braquais mon regard en direction de la « menace » qui n'était autre qu'une femme tirant un chariot derrière elle. Je soupirais. Ce n'était qu'une hallucination de plus de ma part... rien d'autre. Hé, je venais de terminer les Hunger Games, ne vous montrez donc pas si durs dans vos jugements... j'aurais bien voulu vous y voir, à ma place. Dans ce lieu inconnu, où chaque ombre devenait un prédateur potentiel et où chaque regard me semblait malveillant. J'en était même arrivé au point de craindre que le premier passant de cette ville pouvait me dégainer une arme au visage pour essayer de m'attaquer, ce qui en soit était aussi stupide qu'insensé. Pourquoi diable voudrait-on me tuer ? Pour venger leurs tributs morts ? Non non non... ça n'aurait pas changé grand chose de toute manière. Ce qui est décédé est décédé, point. M'éliminer n'aurait rien changé.

Fatigué par ma propre angoisse permanente, qui m'avait d'ailleurs transformé en véritable boule de nerfs, je me laissais glisser au sol en position assise et me mis à fixer un point devant moi, ceci après avoir lâché un gros soupir. Je n'étais pas prêt à assumer toutes ces responsabilités, en fait... pas à mon âge... c'était trop tôt. Maintenant que je connaissais la sensation de se retrouver dans les jeux, j'aurais donné n'importe quoi pour profiter de mon quotidien simple encore quelques années... quel idiot je faisais. Pourquoi diable avais-je refusé qu'on prenne ma place, lors de la Moisson? J'avais tellement peur de ce que l'avenir me réservait dans ce grand et effrayant Capitole que ça m'ôtait presque tout les mots de la bouche lorsque je me retrouvais face aux gens de là-bas. Est-ce que j'allais devenir comme eux ? Avec leurs perruques et tout le tralala ? Berk, jamais de la vie. Enfin j'en savais rien, dans le fond... dans l'immédiat, je voulais juste évacuer toutes les émotions qui voudraient bien sortir hors de mes poumons et... et... et m'enfuir. Peut-être que si je me cachais assez bien on ne me retrouverait pas. En désespoir de cause et parce que je n'arrivais pas à ordonner mes pensées, la meilleure chose que je trouvais à faire fut de pousser un long cri étouffé dans ma manche. Je gardais ensuite mes dents plantées dans mon avant-bas tellement fort que ma mâchoire se mit à trembler. S'il existait un dieu sur cette terre, qu'il m’entende et m'envoie un miracle pour me sortir de cette situation à sens unique, par pitié. N'importe quoi. N'importe qui. Je ne supportais pas ce sentiment d'être abandonné à moi-même alors que la pression se faisait si grande et que je ne connaissais rien à ce monde nouveau. Je ne voulais pas qu'on me laisse seul. Ne me laissez pas seul. Ne me laissez pas seul. Je ne peux pas faire ça, je ne sais pas faire ça. Plus tard... je deviendrais suffisamment fort pour assumer, je le promets ! Mais en attendant, ne me laissez pas seul.


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MessageSujet: Re: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeLun 13 Jan - 18:38


yes, we're sinking.


When will our consciences grow so tender that we will act to prevent human misery rather than avenge it ? – Eleanor Roosvelt.

F L A S H B A C K


Il n’y avait rien de pire que cette sensation lui tordant l’estomac, lui retournant l’esprit. Il ne parvenait plus à en détacher son attention, à la laisser de côté. Pourtant, la journée était censée être terminée. Il lui fallait lâcher prise, passer à autre chose. Quitter l’uniforme blanc, rentrer dans la misérable chambre qu’on lui avait attribuée, et prendre un peu de repos. Fermer l’œil, dormir sur une unique oreille cependant, au cas où une urgence paraîtrait. Faire confiance à la relève, et se laisser emporter par Morphée, jusqu’au lendemain tout du moins. Jusqu’à la prochaine fois. Mais il ne le sentait pas. N’y parvenait pas. Ses pas se faisaient plus lents, alors qu’il était simplement censé regagner la petite pièce prévue pour ses besoins les plus simples. Il se retourna finalement, ce regard inquiet et cet air tendu affichés sur ses traits fins. Y avait un truc qui clochait. Et rien d’autre ne pouvait plus pénétrer son esprit que cette évidence qui faisait bondir à grands coups son cœur dans sa poitrine.

Demi-tour. Il avait laissé tomber le casque, seul l’uniforme blanc le rappelait désormais à sa condition. Pacificateur, ou presque. Il était à l’essai, sur le terrain. Dernière étape de sa formation, année sur le tas, à mettre en exercice l’apprentissage qu’on lui avait inculqué, à appliquer les consignes données. Participer à la Tournée du Vainqueur était une aubaine sans nom, et une preuve de confiance ayant flatté brusquement ses capacités. Enfin, il se sentait utile. Et il avait approché ce vainqueur. Ce nouveau gosse, sorti des Jeux, et à peine plus jeune que lui. Quatre ans, lui semblait-il. Quatre pauvres années. Il était même plus vieux que Neela. Et il avait seize ans. L’âge exact auquel Jules, lui aussi, avait été tiré au sort. L’âge auquel il aurait dû mourir, mais où il avait continué de vivre. Sauvé par un coup du sort, par un abruti fou de gloire, et simplement désireux de pouvoir tuer, et prouver sa valeur. Tuer, tuer. Jusqu’à être tué, à son tour. Jusqu’à retomber au sol, dans une mare de sang, sous le regard vitreux et terrifié du jeune Jules, derrière son écran. Parce que ç’aurait dû être lui. Lui. Mort. Abattu comme un misérable chien. Un jouet du Capitole. Lui. Lui. Lui. Ce n’était pas lui.

Un frisson parcourut son échine, lorsqu’il arriva au niveau de la chambre où le jeune vainqueur était censé dormir. Censé se reposer. Quelque chose n’allait pas. Il le savait, le sentait. Et il ne pouvait pas s’empêcher d’être curieux. S’empêcher de baisser les yeux vers le sol poussiéreux, et de remarquer les traces indistinctes, mais ressemblant vaguement à des pieds, s’éloigner. Il avait entendu du bruit. Entendu la peur, le désespoir, et le désir de solitude. Il fit quelques pas, remontant la piste de la douleur, ne pouvant s’empêcher de sentir son cœur se serrer. Amnésique. C’était le fardeau dont ce gosse avait hérité. C’était son poids, son prix à payer pour être ressorti vivant de cet enfer dans lequel il s’était retrouvé plongé. Le voyant ainsi, il avait ressenti la pitié. Une pitié et une compassion sur lesquelles il peinait à mettre encore un nom, interdit par le rôle qu’il était censé avoir à son égard. Le protéger. L’encadrer. Mais les fonctions ne changeaient pas l’homme. Et le cœur de cet homme pleurait à chaque fois que le regard douloureux du vainqueur appuyait son sourire menteur.

Un bruit. Comme un cri, comme une supplication. Un hurlement de l’âme, une souffrance impossible à contenir, mais tout de même tentée. Les yeux du Pacificateur se posèrent sur la silhouette recroquevillée contre ce mur. Sur cette boule d’anxiété et de désespoir. L’espace d’une fraction de seconde, il se demanda ce qu’il foutait là. Pourquoi ses pieds se posaient l’un devant l’autre, pourquoi ; silencieusement, il s’approchait de ce garçon à peine plus jeune que lui, mais marqué au fer rouge par la mort pour le restant de sa vie. Il titubait presque, la peur le gagnait à son tour. La crainte d’être repoussé, celle de se faire interpeller par l’un de ses supérieurs, et d’être viré. Mais, par-dessus tout, ce désir de soulager quelques instants le poids qui broyait les épaules de cet adolescent. Il refusait de réfléchir aux conséquences. Il refusait de se dresser de toute sa hauteur, et de jouer de ses fonctions pour lui ordonner de retourner dans sa chambre, et de rester enfermé. Il peinait à comprendre comment il était possible de garder la tête haute de la sorte. De continuer de sourire, d’être heureux de s’en être sorti. De saluer la foule, de lever le menton et d’avoir le regard droit. Avec tout ce qu’il pouvait vivre, avec tout ce qui lui était arrivé. Jamais il n’aurait pu lui reprocher cette faiblesse. Jamais il n’aurait imaginé se retrouver à ce moment, pourtant ; debout à quelques mètres, silencieux, les épaules voûtées. Une présence indésirable dans cette solitude que recherchait très certainement le jeune vainqueur. Un silence criant de vérité, de compassion et de douleur partagée.

Ses dents refermées autour de son bras. Il l’avait vu, le voyait. Il ne pouvait l’empêcher de souffrir, ne pouvait l’empêcher de craquer. Il n’avait aucun moyen de le comprendre, ou de le secourir. Aucun moyen de l’aider. Alors que faire ? Le malaise le gagnait, à son tour. Chagrin contagieux, désespoir épidémique. Une main tendue vers le jeune vainqueur, en un geste rassurant et clamant ses bonnes intentions, il approcha d’un pas supplémentaire. D’un dernier pas. On ne brusque pas les animaux blessés. On ne donne pas un coup de pied à un cerf à l’agonie. On ne le force pas à encaisser notre présence. Jamais.

Est-ce que ça va ?
La question lui brûlait les lèvres. Mais il n’osait pas la poser. Il n’aurait jamais pu. Bien sûr que non, ça n’allait pas. Ça crevait les yeux, ça lui en aurait tiré des larmes, à lui aussi. Il n’y aurait rien eu de plus stupide que de lui demander ça. Il déglutit, lentement. Ses mains retombèrent le long de son corps. La fatigue faisait trembler légèrement ses genoux, aidée par l’anxiété dont il faisait preuve à l’idée d’être repoussé. Bien plus que la peur d’être surpris ici. « … Ça va aller … » Au final, ce ne fut qu’un murmure. Murmure étranglé, à peine convaincu. Mais que dire d’autre ? Il ne comptait pas l’empêcher de souffrir. Il ne comptait pas l’obliger à sourire, et à rentrer dans sa chambre. L’être humain n’était pas fait pour intérioriser. Pas fait pour s’auto-détruire.

T’en fais pas, Tywin. On ne dira rien.
Les secrets, c’est fait pour être gardés.


Dernière édition par J. Siegfried Leews-Raine le Lun 14 Avr - 21:26, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeLun 27 Jan - 16:26

Dansantes, les silhouettes des tributs tombés au combat il y a de cela quelques semaines à peine se frayèrent lentement un chemin jusqu’à mes pensées, certaines s’arrêtant à mes côtés pour s’asseoir et me tenir compagnie, d’autres poursuivant leur route jusqu’à disparaître plus loin. Je revoyais ce grand athlète du district deux happé par une nuée d’insectes génétiquement modifiés, cette fille du dix qui s’était écroulée au sol devant moi après avoir trébuché sur une racine ou encore l’ombre de ce garçon … celui que je n’ai pas vu mourir mais qui avait poussé un cri tellement sordide juste avant le coup de canon annonçant son décès que j’en ai eu des sueurs froides et une modification de comportement sans retour-arrière possible . « Les pauvres », aurais-je sans doute du penser.

Heh.
Ce n’est pas vraiment ce qui s'était passé.

Même maintenant, le souvenir de ces adolescents que j’avais parfois personnellement poursuivis sur quelques dizaines de mètres pour les inciter à se précipiter d’eux-mêmes dans les pièges de l’arène me décrocha un rictus à la limite de la démence. Est-ce que cela faisait de moi une mauvaise personne ? J’avais complètement perdu contact avec la réalité à partir du moment où le hurlement du type dont je vous ai parlé plus haut avait raisonné dans mes oreilles… et c’est là que ça avait commencé. La boucherie. Le sang, encore du sang, un peu plus de sang. Oh, les gens de mon district devaient avoir été tellement fiers à ce moment-là.

Un bruit. Mes dents relâchèrent leur prise sur ma chair au moment-même où j’entendis ce son sur ma droite et que je vis un uniforme blanc apparaître. Pacificateur. Pas maintenant! Pas juste au moment où mes 23 amis tributs avaient décidé de me rendre visite pour pallier à ma solitude.

Presque instantanément, je passais en position accroupie et me mis à reculer au rythme des pas de l’homme en face de moi. Enfin non, ce n’était pas un homme. Il s’agissait simplement d’un personnage ayant une fonction bien définie. Une forme immaculée mais ô combien stricte. Dans l’immédiat, une part de mon cerveau mit en état d’alerte me dictait de me saisir du premier objet pointu qui trainait au sol pour attaquer et neutraliser l’employé du Capitole, mais je savais très bien que ce n’était pas le bon comportement à adopter. Réprimer l’animal, réprimer l’instinct… voila quelle était ma première urgence.  Autant vous dire que je n’avais jamais eu affaire à un exercice mental aussi difficile que celui-ci, surtout après la sortie d'une arène où le principe était de s'entretuer, et que pendant quelques fractions de seconde, j’avais même fléchi un peu plus mes jambes pour me donner de l’élan dans le cas où je décidais de tenter une strangulation.

Mais enfin, Tywin, reprends-toi !
Non, il est juste-là !

C’est ma chance! Il suffirait juste de lui fracasser la tête contre le mur et ensuite, je pourrais m'échapper jusqu’à la forêt. Je rentrerais alors à la maison à pied, m’enfuirais avec Lilas et ma sœur… personne ne nous retrouvera et peut-être même bien qu’il existerait des gens à l’extérieur de Panem pour nous accueillir et nous offrir une vie plus agréable que cette misérable dictature.

L’inconnu finit par tendre une main dans ma direction et prononça ensuite quelques paroles qui chassèrent peu à peu les silhouettes fantomatiques encore présentes dans ma tête. Je ne savais pas comment il était parvenu à un tel exploit avec mon esprit rigide, mais une chose est certaine, c'est que je n'allais plus jamais l'oublier. Où était-on…? Je me laissais retomber en position assise et plissais les yeux pour mieux identifier mon interlocuteur. Grand, brun, l’air inquiet sur le visage. Zut… qu’est-ce qu’il allait penser de mon attitude et rapporter à son supérieur ? Est-ce que j’avais eu l’air trop hostile ? Par je ne sais trop quel miracle, mes mécanismes de défense se mirent enfin en route pour tenter de rattraper mon comportement de fauve. Ainsi, ce réflexe de me poser une main devant les paupières et d’éclater de rire sortit de je ne sais où pour sauver les apparences, même si en vrai, j’avais plus envie de pleurer et de le supplier de me laisser partir (parce qu’il avait l’air un peu gentil et manipulable) qu’autre chose. « Oh mon dieu… hahaha… j’ai cru que je m’étais perdu pour de bon… » Prenant mon courage à deux poings, je laissais retomber mon bras pour dévoiler un visage à l’expression soulagée parfaitement maitrisée, puis me relevais en essayant de ne pas retomber immédiatement par terre. En moins de temps qu’il le fallut pour le dire, je parvins à forcer toutes les fonctions de mon corps à se calmer et réussi même à dévoiler un sourire gêné. Comment est-ce que je faisais ça, je n’en savais rien… ma mentor devait avoir sacré coup d’œil pour être parvenue à percevoir mon don pour l’adaptation d’urgence aux situations. J'étais quand même un putain de génie pour la gestion de mes émotions... ou alors étais-ce l'instinct de survie?

Avec tout ça, je me rendais compte que je n’avais toujours pas pris le temps de regarder le Pacificateur dans les yeux. Ce genre de contact franc étant vital lorsqu’on désirait convaincre une personne de son honnêteté, je ne me fis pas prier pour tourner mes pupilles droit sur celles de l’employé des forces de l’ordre, histoire de lui prouver ma bonne volonté.

Hm… je n’aurais pas du faire ça.

Je ne sais pas tellement ce qui ne tournait pas rond chez ce type, mais sa façon de m’observer manqua de m’ôter mon masque d’assurance comme s'il me l'avait arraché lui-même, à main nue. Est-ce que ça vous était déjà arrivé de vous retrouver en face de quelqu’un et d’avoir cette certitude, au fond de la poitrine, que vous pouviez lui faire confiance ? Personnellement, moi pas. C’est bien pour ça que je fus désarçonné devant cet homme et manquais de reculer d’un pas pour l’empêcher d’empiéter sur mon espace personnel, de me toucher, de me transmettre son énergie bienveillante. Du haut de mon mètre soixante-quinze, à l’époque, je m'étais alors redressé en espérant dégager suffisamment de "force de caractère" afin de le maintenir à distance. « Merci pour tout… on devrait peut-être rentrer ? »
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MessageSujet: Re: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeLun 27 Jan - 19:05


yes, we're sinking.


When will our consciences grow so tender that we will act to prevent human misery rather than avenge it ? – Eleanor Roosvelt.

Le voir reculer, comme tenter de s’échapper. T’en étais pris aux tripes, sur le coup. Continuer d’avancer, et le regarder. Capter son regard de bête apeurée, et comprendre son erreur. Pourtant, il n’arrivait plus à reculer. Pourtant, quand bien même tous les écriteaux du monde auraient convergé vers cet endroit, vers ce jeune homme, pour lui indiquer le danger, pour lui indiquer sa fin, il n’aurait pas reculé. Une étrange sensation. Un sentiment qui prend aux entrailles, qui les tord, les remue. Ce moment où l’on se sent obligé de s’approcher, obligé d’insister. Il y a quelque chose. Il y a à gratter. Et si on le fait, c’est qu’il le faut. C’est qu’il y a une raison. Qui n’est ni physique, ni psychologique. C’est autre chose. Et ça t’ordonne de t’approcher. T’as pas le choix. Tu le fais. Provoque l’animal blessé. Tend-lui la main et il te mangera le bras. C’est le risque. Tu le prends. Tu t’y perdras.

Il n’y a plus rien à faire. Il semble que ce soit terminé, et que personne ne puisse plus rien lui offrir pour ce sortir de ce pétrin. Hormis le Capitole, qui le fera crouler sous l’argent, sous la célébrité. Et l’uniforme blanc, lui n’a rien à lui apporter. Jules, lui, ne devrait même pas être là. Il n’y a rien à faire. Il ne l’aidera pas. Il ne le peut pas. Ne le connaît pas, ne lui a jamais parlé. L’a vu de loin, se battre, est au courant. Mais qu’a-t-il d’autre, à son propos ? Des rumeurs, des ouï-dire. Ce que l’on veut bien lui raconter. Mais jamais la vérité. Et même s’il l’avait. Même s’il la connaissait, même si on la lui avait donné, qu’il apprenait le moindre détail de sa vie. Tout cela ne servirait à rien. Rien. Il ne restait plus rien. Le voir retrouver consistance aussi facilement le déconcerta tout d’abord. Il pensa s’être trompé, avoir mal interprété ce qu’il avait pu apercevoir, de loin. Mais, rapidement, le doute qui avait fait pulser son cœur un peu plus rapidement s’estompa. Non. C’était un mensonge. Il n’avait techniquement aucun moyen de le savoir. Aucun moyen d’en avoir le cœur net. Mais c’était une intuition. Un flair. Son moyen de fonctionner.

Un rire qui le déconcerta. L’espace d’un instant, il battit des cils, surpris. Perdu, et hagard. Il le regarda se relever, retrouvant progressivement une mine plus neutre. Pourtant, une flamme dansait au fond de son regard. Minuscule, à peine plus lumineuse qu’une luciole. Mais suffisante pour animer un intérêt certain, et raviver cette curiosité à l’égard du jeune homme. Le sourire, les paroles. Jules esquissa un sourire assez large, resserrant rapidement le poing, sans comprendre nécessairement pourquoi. Un spasme, simplement. Il voyait les attitudes défiler sur le visage de l’adolescent face à lui. Adolescent. Un bien grand mot, de la part de quelqu’un de quelques pauvres années de plus que lui. De la part de quelqu’un qui jamais ne pourrait vivre un enfer ayant une quelconque similarité avec le sien. Quelqu’un qui jamais ne comprendrait cette douleur, cette horreur. Les voix qui habitent l’esprit, fantômes qui dansent, lancinants, harassants. Insistants. Ceux qui poignardent, ceux qui veulent danser. Ceux qui hurlent, ceux qui pleurent. Ceux qui voudraient encore rire. Ceux qui se demandent ce qui se passe. Ceux qui voudraient se venger, et ceux qui se lamentent de leur sort. Les fantômes, aussi nombreux soient-ils, hantaient tous et chacun. Mais ceux de Tywin n’avaient rien à voir avec tout ce que Jules pourrait jamais imaginer. Rien. Et, pour cette raison probablement se sentait-il également intrigué et fasciné. Compatissant et inquiet. Il ne comprenait pas. Et n’était pas certain qu’il y ait quoi que ce soit à comprendre. Il ne lâcherait pas l’affaire. Et la seule raison qui poussait encore son vis-à-vis à jouer la comédie était justement qu’il l’ignorait. Jules n’avait pas peur. Pas de ça. Jamais. Rarement.

Un maigre sourire flirta avec les commissures de ses lèvres. Son regard se fit plus perçant, plus insistant. Il ne lâchait plus, ne cillait plus. Il ne disait rien, ne le jugeait pas non plus. Il semblait juste attendre. Le plus simplement au monde, debout, dans cette rue. Attendre. Le silence en disait parfois plus qu’il ne le fallait. Et un regard jouait parfois bien plus que tout le reste. Lorsqu’il recula d’un pas, cependant, la situation venait de prendre un tout autre tournant. Il essayait de retrouver l’avantage, de gagner à nouveau du terrain. Terrain perdu face à une simple paire d’yeux ; déconcertant, et blessant, probablement. Merci pour tout. Jules secoua lentement la tête, le regardant toujours, un sourire sincère accroché aux lèvres, cette fois. Il jouait bien. Il y était sûrement obligé. Mais on ne l’était pas tout le temps. « Je n’ai absolument rien fait qui mérite un remerciement. » Restes de sourire. Simplicité. « Et j’avais pas prévu de rentrer. » Une économie de paroles révélatrice. Il abaissa très légèrement la fermeture éclair de son col, se permettant une respiration plus facile. Il ignorait totalement à quoi il jouait. Mais il y jouait. Jeu dangereux, le risque de se brûler les doigts à chaque instant. Le risque de se faire reprendre, plus tard, par ses supérieurs. À son vis-à-vis, il n’arriverait rien. Pas pour le moment. À lui, rien n’était moins sûr.

Mais ça valait le coup. Il en était persuadé. Assez con pour y croire, peut-être. Lui qui suivait toujours les règles imposées, lui qui épousait la forme du moule pour ne jamais être repris. Il s’adaptait pour survivre. Et son instinct lui laissait paraître que, face à lui, le jeune vainqueur faisait exactement la même chose. Finalement, il détourna son regard perçant, l’ombre d’un sourire toujours aux lèvres, regardant autour d’eux. Il n’y avait personne. Pas le moindre bruit, tout aussi attentivement tendait-il l’oreille. Il reporta son attention sur le jeune homme. Le voir se redresser de toute sa hauteur, se hisser à la même taille que lui, lui fit l’impression d’un lion n’ayant plus d’autre moyen que de rugir pour convaincre qu’il avait l’ascendant. Mais le jeu ne prenait pas. La force ne comptait pas. Plus maintenant. Car le Pacificateur ne s’y prêtait pas. Il se contentait d’offrir une place à ce célèbre inconnu, de lui proposer de poser pied à terre. De redescendre. Quelques instants. De souffler. D’arrêter de mentir. Mais peut-on seulement demander cela à celui qui le fait pour sa survie ? « Si tu veux vraiment rentrer, je te raccompagnerais. Je pensais simplement que t’en aurais marre d’être enfermé. » Marre de faire semblant, marre de jouer à leur jeu. Marre de sourire, et marre d’être bridé. « La journée est terminée. » Conclusion, phrase simple. Mais qui disait tout. Racontait tout. La journée est terminée. La tournée est finie pour aujourd’hui. Et, pour l’homme d’armes, son service avait pris fin.

Il ôta ses gants, avec précaution, avant de les glisser dans la poche de son uniforme. Il releva ses prunelles brunes vers le jeune homme. Un nouveau sourire. Bref. Mais sincère.

La journée est terminée. Tu peux souffler. Reprendre une bouffée d’air frais, crier un bon coup si tu en as envie.
Tu peux cesser de jouer, cesser d’offrir ces airs décontractés alors que la folie te bouffe, que le poids des responsabilités te ronge.

Pourquoi faire confiance ? Pourquoi faire tomber un mur, à ce moment précis, alors même que le lendemain, son cadet aurait pu le dénoncer, et lui valoir la perte définitive de son poste ? Il n’y avait plus rien à comprendre. Pas quand les tripes emmenaient. Pas quand l’instinct guidait.

Et, alors, tu peux arrêter de faire semblant.
Rien qu’un instant.
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MessageSujet: Re: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeLun 27 Jan - 21:19

« Qu'est-ce que vous me voulez ? »

Cette question, je me l'étais posée à peu près tous les jours depuis que j'avais rompu les rangs pour rejoindre le maire de mon district et l'hôtesse qui venait de prononcer mon nom pour la Moisson. Qu'attendait-on de moi ? Les habitants avaient applaudit leurs deux tributs ce jour-là, à l'exception peut-être de nos familles respectives qui voyaient leurs enfants, leur frère ou leur sœur, partir pour le Capitole avec plus ou moins de chances d'en revenir vivants (District un oblige, nous n'étions pas défavorisés non plus). Pour ma part, même en faisant partie de cette communauté qui était si fière de participer chaque année aux Hunger Games, je ne comprenais pas ce qu'il y avait de si génial à envoyer deux gamins dans une arène remplie de jeunes prêts à tout pour ne pas mourir, y compris d'éliminer d'autres êtres humains. Oui... en fait, je vous dis ça, mais sur le coup, je n'avais pas tellement eu l'occasion de me faire la réflexion. La vérité, c'est que j'étais bien trop content d'être le centre d'attention pour quelques minutes, aussi stupide que ça puisse paraître. C'était la première fois que tous les regards étaient braqués dans ma direction, la première fois que j'avais un peu d'importance aux yeux de ma région et des gens de mon âge... et dans un autre registre, c'était aussi la première fois que Lilas s'était décidée à m'embrasser sur la bouche, devant tout le monde. Autant dire que le grand rêveur que je suis s'était senti super chevaleresque, ce jour-là, pour la simple et bonne raison que tout ce qui ressemblait de près ou de loin à ce qu'on pouvait voir dans les films était sur ma liste de fantasmes à assouvir depuis que j'étais un petit garçon et que du coup.. j'avais pu en vivre quelques un en dix minutes chrono seulement. L'excitation du début avait cependant finit par retomber lorsque je me suis retrouvé face à toutes ces têtes d'adolescents qui me fixaient sur la grande place avec des airs que je n'arrivais pas toujours à décrypter, car une question à laquelle je ne m'attendais pas, mais qui allait désormais me poursuivre toute ma vie, s'imposa. Que me voulaient-ils ? Que je me batte ? Que je rende ce district fier ? Que je reste en vie ? Que je gagne ? Qu'est-ce que je devais faire ?

Ou peut-être voulaient-ils juste du spectacle.

Si j'avais su ce qui m'attendait par la suite, autant dire que j'aurais évité de jouer au plus malin et que j'aurais simplement laissé ce Carrière prendre ma place sur scène, au lieu de refuser catégoriquement qu'il touche à mon instant de gloire, par pur souci d'ego. Mais voila. Je n'avais aucune idée des conséquences qu'allait avoir cette course à la survie, donc j'ai pris ça à la légère et j'ai levé un poing triomphant, comme si la victoire m'appartenait déjà, puis j'ai souris à pleines dents en réprimant toute peur de mes yeux.

Ce même sourire flamboyant que j'arborais actuellement face au Pacificateur ne mit pourtant pas longtemps à tarir, ceci jusqu'à disparaître totalement au profit d'une expression que je n'aurais moi-même pas su décrire. En quelques mots, « mais qu'est-ce que tu me veux ? » était la meilleure manière de l'expliquer. Tiens, encore cette question.... néanmoins, cette fois, je n'arrivais pas à trouver quoi y répondre. J'ai pourtant essayé, vraiment. J'ai essayé de deviner quel comportement allait être le plus adapté face à ce jeune homme et à ses paroles étranges. J'ai essayé de le sonder pour trouver comment satisfaire sa curiosité, afin qu'il me laisse tranquille... mais ça ne marchait pas non plus. Qui était-il et pourquoi était-il ici, à oser me balancer à la figure que « j'en avais peut-être marre d'être enfermé ». Pourquoi est-ce qu'il me disait exactement ce que j'avais envie d'entendre ? Pourquoi, comment, qui, quand, où, qu'est-ce que je dois faire ? Un brin d'hésitation apparut dans mes yeux clairs, rapidement suivi par un battement de cils qui tenta en vain de chasser le fait que je risquais potentiellement de plier face à cet inconnu, s'il continuait sur sa lancée. Je n'aimais pas sa façon de me regarder, en plus... je ne voulais pas paraître vulnérable devant qui que ce soit et lui, là, on aurait dit qu'il cherchait à me pousser dans mes limites en étant gentil. J'avais pas le temps de me reposer sur quelqu'un, j'avais pas le temps de prendre une pause, pas le temps de décompresser. Il me restait tellement de choses à faire avant qu'on me fiche enfin la paix que si je m'arrêtais maintenant, alors que je venais de commencer à prendre le rythme, ça allait tout gâcher. Il allait tout gâcher!

C'est ainsi qu'après le Tywin souriant, son ami désintéressé prit la place. Je croisais les bras, puis soupirais en tentant de garder le regard fixé sur celui du Pacificateur de la manière la plus ennuyée possible. Cause toujours, tu m'intéresses, mon gars. Maintenant, laisse-moi passer et arrête de me donner de faux-espoirs. Si ça se trouve, il le faisait même exprès et c'était un piège. Moi, trop méfiant ? Allez donc dire ça aux 23 gamins de mon âge qui sont morts parce qu'ils n'avaient pas fait assez attention.

« La journée est terminée. »

Je n'avais jusqu'alors jamais échangé un contact visuel avec quelqu'un aussi longtemps, surtout sans rien dire... pourtant, les quelques mots de mon interlocuteur me rendirent muet. Il y était parvenu. Je craquais. Ses paroles firent trembler mes lèvres, puis mes mains. La journée était-elle vraiment terminée ? Je l'observais, mais il ne cillait pas. Il me souriait, même... et alors, j'ai eu envie de le croire. La journée dont il était question avait duré presque un mois, monsieur... qui pouvait décider qu'elle venait de se terminer tout à coup ? Vous ? Toi ? Tu en avais le pouvoir, toi ? Je levais finalement mes yeux bleus au ciel pendant une fraction de seconde pour y voir passer deux oiseaux, eux que rien ne retenait au sol, que rien n'enfermait dans une chambre, que personne ne condamnait à obéir. Deux oiseaux, pas un... est-ce que ma demande avait été entendue ?

J'ai eu un trou noir entre le moment où je me trouvais encore debout face à mon futur ami et celui où mes genoux se sont écrasés au sol, juste devant ses pieds. De longs soupirs tremblotants s'échappèrent de mes lèvres les uns après les autres, mais je fus incapable d'en faire plus. Ni de crier, ni de pleurer, ni de rire pour exprimer mon soulagement. Je me suis simplement redressé à grandes peines pour m'adosser au mur derrière-moi, un peu comme si je trainais le poids du monde à mes chevilles, puis j'ai relevé la tête en direction du grand brun pour lui offrir enfin une expression sincère. Pas de joie, pas d'enthousiasme, pas d'envie quelconque. Seule la flamme enragée que je maintenais au fond de mon cœur subsistait encore pour redonner de la couleur à cet individu ternit qui avait prit le contrôle de mon corps. Intérieurement, je savais qu'il était différent des autres, ce Pacificateur. Il se comportait différemment, il parlait différemment, il dégageait quelque chose de différent. J'étais encore trop éreinté par tout ça pour me rendre compte de ce qui était en train de se produire entre lui et moi, mais si cette étincelle, cette voix étrangère qui avait surgit de nul part pour chasser les fantômes était parvenue à me ramener à la réalité, quand bien même j'avais fais le choix de me complaire dans ma folie naissante, qui sait les miracles qu'elle était capable d'accomplir avec mon esprit tourmenté si j'acceptais de l'écouter, au lieu de seulement l'entendre ?

Je penchais lentement le visage sur le côté et commençais enfin à vraiment voir qui se trouvait face à moi. « ... comment tu t'appelles ? » Et je lui souris. Un pauvre sourire, certes, mais c'était mieux que rien.
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MessageSujet: Re: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeLun 27 Jan - 23:36


yes, we're sinking.


When will our consciences grow so tender that we will act to prevent human misery rather than avenge it ? – Eleanor Roosvelt.

Il découvrait le monde. Peut-être découvraient-ils même le monde. Lui, en uniforme blanc. Lui bien habillé, bichonné par les intervenants du Capitole, qui ne lui laissaient pas la moindre seconde de répit. L’un se contentait d’obéir aux ordres, et avait été formé pour ça. L’autre n’avait reçu que l’instruction de la vie ; celle de la mort et de la souffrance, de la peur et de l’horreur. Les injonctions du Capitole, leur pression et leur cruauté. Il suivait à la lettre ce qu’on lui disait. Et, en l’espace de quelques semaines, il y avait quelques temps de cela, il était devenu leur nouvelle marionnette. Leur nouveau jouet. Pantin désarticulé, plié à leur volonté, manipulé par leurs gestes si sordides et par leur désir de sans cesse s’amuser, de sans cesse découvrir de nouvelles choses. Jules le plaignait. Il l’admirait, d’avoir réussi à revenir, de s’être battu pour survivre. Mais il avait mal pour lui. Mal au cœur, de le voir si faible, si perdu. Alterner entre les diverses expressions, les divers sentiments, pensant que cela pourrait le sauver de la simplicité et du naturel qu’il n’avait plus le droit d’afficher. C’était en vain. Une bataille qu’il ne pouvait gagner. Pas ce soir. Pas alors que son interlocuteur avait entraperçu sa faiblesse, quelques minutes auparavant. Ça n’avait duré qu’une fraction de secondes. Mais c’était suffisant, pour quelqu’un de compréhensif, à savoir que toute émotion positive qu’il pourrait désormais tenter de dégager ne serait qu’un mur de mensonges, tissé habilement à la force de son instinct de survie.

Tu mens, Tywin. Je le sais. Pas la peine de te cacher. Pas la peine de chercher à le dissimuler, ni de te nicher dans tes retranchements. Pas la peine de fuir. Pas la peine d’avoir peur.
Je ne te veux aucun mal.


Mal. C’était le Mal qui semblait s’être emparé de son esprit, de son corps, de sa vie. Le Mal et ses doigts crochus, s’enroulant insidieusement autour de la moindre parcelle de son âme, la noircissant, l’étouffant jusqu’à en avoir le contrôle, et obtenant gain de cause. Le sourire avait disparu. L’air désintéressé et méprisant venait de prendre sa place. Et, pour une fois, ce genre de sentiments n’atteignit pas le Pacificateur, ordinairement si sensible à l’indifférence. Mais ce fut une phrase qui changea le court des choses. Le pouvoir de quelques mots, leur impact soudain et inattendu. Lorsque les genoux du jeune vainqueur s’écrasèrent au sol, toute trace de compassion ou de pitié avait disparu du regard du jeune Pacificateur. Instinctivement, il effectua un pas inquiet, rapide, vers l’avant. Le cœur battant. Ne s’attendant pas à le voir tomber. Cependant, il se força à conserver une distance raisonnable. La colère l’animait désormais. Une colère sourde, traduite par ses mâchoires serrées et ses poings crispés. Une rage que son vis-à-vis ne pouvait, fort heureusement, pas apercevoir. Les soupirs lui brisaient le cœur. Le comportement du jeune homme lui en aurait tiré des larmes de haine, s’il avait eu le cœur à pleurer. Mais il resta immobile. Silencieux. Le moment cristallisait, et le relâchement des nerfs semblait apprécier l’absence du moindre son, si l’on exceptait leurs deux respirations agitées de sentiments contradictoires. Parler aurait tout gâché. C’est tout du moins ce que Jules se répétait, tout en fermant les yeux, appréciant une fraction de seconde l’air frais de la nuit sur sa peau.

Progressivement, ses poings se relâchèrent, ses épaules s’abaissèrent. Il se détendait. Se forçait à le faire. Il prenait sur lui, s’empêchait de lever la tête vers le ciel, à son tour, et de hurler de toutes ses forces. Leur hurler leur monstruosité, leur exprimer toute sa rage. Ils n’avaient pas le droit de faire ça. Pas le droit de lui arracher sa vie, de lui voler tout ce qu’il avait, et de le dévorer à petit feu, jusqu’à la folie, la dépression, voire parfois pire. Ils n’avaient pas le droit. Mais ils le prenaient. Oui, il aurait voulu hurler. Mais non, il ne le ferait pas. Il ne le fit pas. Se tut. Regarda Tywin se redresser et s’adosser au mur derrière lui. Le regard, le sourire et la question. À son tour, il laissa un rictus étirer la commissure de ses lèvres, en une réponse polie mais sincère. Il le tutoyait. Et, à vrai dire, cela venait de le surprendre. Il se contenta d’approcher d’un pas, à nouveau. Ses mains dans les poches, son air détendu, sa peur de laisser paraître ce que lui aussi avait sur le cœur. Mais ce n’était pas le moment. Ce n’était pas sa soirée. Ça ne l’était jamais. Il ne connaissait pas le vainqueur, et celui-ci n’avait pas à savoir. Pas maintenant.

Son cri lui brûlait les lèvres. Mais il resta immobile, silencieux. Il essaya de lâcher prise. Difficilement. « Jules. » Pourquoi ton prénom ? Pourquoi ne pas lui donner ton adresse, directement, histoire que vous puissiez boire un café ? C’était un vainqueur, bordel. Il n’appartenait pas à la même classe que toi. Il n’appartenait pas au même monde que toi. Oui, mais il était humain. Humain, blessé et ravagé par ce qu’on lui avait fait subir. Et il n’y avait pas besoin de venir du même monde pour comprendre la souffrance de celui qui lui faisait face. Surtout lorsqu’elle laissait en son sillage un écho démesuré, un écho qu’il parvenait à saisir et à garder. « Tu devrais t’asseoir. » Ça t’éviterait de te fracasser le crâne en tombant. Ça fait moins haut. « Enfin, à ta guise, hein. » Il avait le choix. Ce choix de, pour une fois, être enfin ce qu’il désirait. S’asseoir ou rester debout, parler ou se taire. Pleurer ou crier, rire ou trembler, gémir ou sourire. Regarder le ciel ou ses pieds, écouter ou devenir hermétique à toute parole. Il n’y avait plus de sourire forcé à afficher, plus de discours à réciter. Envolés les petits papiers de son hôte, les laïus tout prêts et les mondanités capitoliennes. Il n’y avait plus que lui. Lui-même.

Et, pour ce soir-là, il avait le choix.
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MessageSujet: Re: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeMer 5 Mar - 21:39

Jules. Premier lien que je créais dans ce monde dénué d'humanité. Je me souviens de tout cela comme si ça s'était passé hier. La simple prononciation de son prénom avait suffit à libérer un peu de place dans ma poitrine et cette flamme au fond de ses yeux, que je n'avais pourtant pas remarquée sur le moment, avait attiré toute mon attention, caressant mon esprit d'une main bienveillante pour lui assurer que nous étions dans le même camps. À l'époque, je n'avais rien compris à l'ampleur de notre échange, car j'étais trop effrayé et submergé par les informations pour faire le tri dans mes idées... mais il était en colère. Un brasier ardent hurlait dans son silence, une tempête intérieure perçait au-travers de son immobilité. Je ne l'ai compris que plus tard, car cette même colère m'a moi-même animé par la suite, à chaque fois que je me retrouvais face à un vainqueur des jeux, face à un tribut. Face à quelqu'un qui ne comprenait pas ce qui lui arrivait mais qui n'avait pourtant pas d'autre choix que de suivre la danse qu'on lui imposait. Une colère chaque année un peu plus forte, chaque année un peu plus hargneuse. Je grandissais dans cet univers étrange qu'on nommait Capitole. J'y vieillissais imperceptiblement ou presque, le temps commençant néanmoins peu à peu à marquer mon visage de traits adultes pour m'éloigner de cet adolescent trop vif et irréfléchi que j'étais lorsque le public m'avait découvert pour la première fois. Et plus les grains du sablier de ma vie s'écoulaient, plus je rencontrais des visages voués à mourir ou a survivre à une politique médiatique implacable, plus la rage s'installait en même temps que le recul vis-à-vis de la situation. Ceci jusqu'à ce qu'au fond de moi, les battements de mon coeur ne fassent plus qu'un avec ceux de ce Jules qui, il y a bientôt quinze ans de cela, m'avait simplement proposé de m'asseoir contre ce banal mur de pierre.

Mon ami, qui serais-je aujourd'hui sans toi ? Combien de temps aurais-je supporté le poids de mes mensonges sans avoir tes oreilles pour m'écouter ? Quel genre d'homme ton absence aurait-elle fait de moi?  

Mon cher ami, mon frère. Saches que tu ne nous a pas quittés, car tu es toujours dans mon coeur. Dans chacun de mes mots, dans chacune de mes pensées. Je sais que tu te trouves aujourd'hui dans un endroit où ton sourire mélancolique a retrouvé son éclat et je ne te demanderai qu'une chose. Je ne te demanderai que d'ouvrir les yeux pour moi une dernière fois, lorsque l'heure viendra de faire face à ce Mal qui a noirci nos âmes humaines et allumé le feu de la colère. Ce jour-là, je serai ta main vengeresse. Puis, si le destin en décide ainsi, nous nous retrouverons.

Mais d'ici là, Jules... si tu veut parler... ou juste passer un moment avec moi, saches que je suis ici et que je t'attends à bras ouverts.


* * *

Mon dos prit lourdement appuis contre le mur avant que j'entoure mes genoux de mes bras, en soupirant. « Jules ? » Mon front s'était posé contre mes jambes quelques instants avant que je lève la tête vers le jeune homme qui se tenait à mes côtés. L'innocence avait définitivement quitté mon regard depuis quelques temps, à présent, ne laissant ainsi plus la place qu'à un épuisement psychique presque trop évident pour être nié par un oeil extérieur. Même au fond de moi, je me sentais complètement désemparé face à tout cela, face à cette situation, face à ce futur incertain. Seul et surtout esseulé. Je n'étais plus un enfant. Je n'étais pas un adulte. Je ne sais pas ce que j'étais. Un pantin, peut-être. Avec des émotions et des sentiments à gérer en silence. Et lui, ce gars, il l'avait vu. « ...merci. »

Merci.
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MessageSujet: Re: (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED    (Reputation means nothing here) ft. SIEGFRIED  Icon_minitimeJeu 10 Avr - 10:48

Comment pouvait-on se sentir proche de quelqu’un de la sorte ? Comment pouvait-on simplement avoir cette envie de secourir un être qui en avait tué tant d’autres ? Pourtant, le Pacificateur avait pleinement conscience que c’était pour sa survie que le jeune vainqueur avait tué. Il savait qu’il n’y avait aucune raison valable de lui en vouloir ; pas pour lui du moins. Alors, il ne lui en voulait pas. Alors, il le regardait simplement, tentant de le faire sortir de ce délire sauvage et violent. Et ça marchait.

Tywin répéta son prénom. Et un sourire vint s’épanouir sur les lèvres du jeune homme. Oui, Jules. C’est un joli prénom, n’est-ce pas ? Et cette expression douce et sympathique sur son visage, ce petit sourire qui l’incitait à poursuivre, à dire ce qu’il avait à lui dire. Lorsqu’il le remercia, il sentit un pincement violent lui attaquer le cœur. Il soupira longuement, détournant son regard de lui. Il ne voulait pas être remercié. Pas pour un simple geste d’humanité. Même s’il fallait avouer que l’humanité était devenu un fait rare, et peut-être convoité par ceux qui en avaient besoin. Comme Tywin. Tywin qui avait souffert de ses Jeux, et qui continueraient sûrement d’en souffrir jusqu’à la fin de sa vie. Qu’était devenue l’humanité ? Un simple terme, un propos balancé comme ça, et qui partait véritablement à vau-l’eau. Il était beau d’en donner une définition, mais bien plus encore d’appliquer ladite définition. Et ça se perdait. Ça disparaissait. Tywin en souffrait. Et peut-être alors pensait-il son remerciement justifié. Ce n’était pas le cas du Pacificateur. Il avait fait quelque chose de normal. Rien de plus. Rien de moins. Normal, tout simplement.

Humain.

« C’est normal. »

De rien.


e n d .

HJ :
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