Paige Iseult Farnsworth

❝ WHO AM I LIVING FOR? ❞

about games and relative.

➺ TA MORT TU LA VOIS COMMENT ?

Dans le train l'amenant vers son destin tragique, Paige avait fait un travail sur elle-même. Elle avait tenté d'accepter sa mort funeste, se réconfortant dans le fait que des milliers de personnes verraient ses dernières minutes, et qu'elle aurait ainsi l'occasion de prononcer quelques adieux aux êtres chers à son coeur. La jeune fille se répétait inlassablement que, quoiqu'il advienne, la Mort l'attendrait toujours. Qu'elle survive ; ce qui s'avérait particulièrement ridicule ; ou qu'elle meure dans l'arène, Paige finirait par s'éteindre. Il s'agissait là d'une terrassante fatalité à laquelle personne n'avait le pouvoir de déroger. C'est ainsi qu'elle avait commencé la 74ème édition des Hunger Games, avec cette force tranquille, cette nostalgie et une once de regret à l'idée de ne pas avoir l'occasion de vivre quelques grandes premières fois, dont le mariage de sa soeur, la naissance de ses propres enfants. Elle allait mourir, à quoi bon espérer ? Elle ne ferait que se mentir à elle-même, et le déni n'avait jamais été quelque chose dont elle était particulièrement friande. Paige était satisfaite de sa fin. Se sacrifier, une mort héroïque digne de ses fantasques rêveries.

➺ POUR QUI POURRAIS-TU MOURIR ?

Sans doute pourrait-elle mourir pour sa famille ou ses proches amis. A vrai dire, elle n’y a jamais véritablement songé, et ne connait donc guère ses limites. Il y a deux ans, Paige s’est portée volontaire pour remplacer sa cousine de dix-huit ans aux Hunger Games. Ayant un handicap assez lourd à la jambe gauche qui l’empêchait de courir et qui la faisait boiter atrocement, la cousine n'avait aucune chance d'en réchapper vivante. Saisie par une pulsion d'éternelle altruiste, Paige s'est alors naturellement portée volontaire pour la remplacer. C'était la dernière année d'Alice en tant que potentielle participante aux Hunger Games, elle était fiancée, profondément amoureuse. Paige, elle, n'avait rien. Comment pouvait-elle rester de marbre, alors qu'elle avait le pouvoir d'offrir une vie heureuse et épanouie à un être aussi inestimable qu'Alice ?

➺ QUEL PETIT PLUS T'AIDE DANS LES JEUX ?

La jeune fille n'a certainement pas remporté les Jeux grâce à une stratégie offensive comme la plupart. C'est sa discrétion et son talent pour le pistage qui l'a fait remarquer par les Carrières, l'enrôlant ainsi dans leur alliance éphémère. Protégée par les plus forts, elle s'est assurée une place parmi les huit premiers, avant que des dissensions ne se fassent sentir entre les Carrières, tensions dont elle était d'ailleurs complètement responsable. Son tempérament a en effet désarçonné l'un des Carrières mâles qui s'est laissé - selon un autre tribut - berner par la sympathie de la jeune fille. Une explosion s'en est suivie entre les deux hommes, et une fois le chef du groupe mis hors-jeu, les Carrières se sont entre-tués. Les spectateurs des Jeux ont de suite pensé à une ruse de la part de Paige, venant alors à lui attribuer des traits de caractère qu'elle ne possédait certainement pas. Manipulatrice et séductrice, une parfaite veuve noire selon le commentateur des jeux. Diviser pour mieux régner, fut la première chose à laquelle on pensa en regardant la scène.

➺ COIN A ANNONCÉ LORS DES DERNIERS JEUX PAR MESSAGE PIRATE QUE LE TREIZE EXISTAIT TOUJOURS. TU ESSAIES DE TE JOINDRE À EUX OU AU CONTRAIRE, TU FAIS TOUT POUR STOPPER CETTE RÉVOLTE ?

Ayant assisté en direct à la barbarie du Capitole, l’esprit de rébellion latent de la jeune femme s’est peu à peu éveillé depuis sa victoire. Malheureusement, elle n’a jamais osé prendre parti, se contentant d'appliquer docilement les directives du Capitole, puisque la crainte de voir sa famille décimée est bien trop grande. Néanmoins, elle ne va pas sans doute guère tarder à se rendre compte que sa décision finale va être influencée par la force des choses, puisqu'on a déjà vendu sa première soirée en tant que femme de dix-huit ans, aux plus offrants du Capitole. Il est alors plus qu'évident qu'elle se rangera parmi les rebelles et le district 13, mais son avenir et sa fonction parmi eux restent encore incertains.

JE VIENS D'UN MILIEU défavorisé..., AINSI, POUR MOI, LA NOURRITURE tient bien plus de la légende.... DU COUP, MON NOM AVAIT pas mal de chance d’être tirée au sort. J'EXERCE LE MÉTIER DE mannequin ET POUR TOUT VOUS DIRE, Je n’aime pas du tout, mais suis contrainte de continuer pour épargner mes proches du Capitole.. JE SUIS DANS LE onze ÈME DISTRICT. AYANT dix-sept ans, bientôt dix-huit J’ ai déjà PARTICIPE AUX HUNGER GAMES ET j'appréhende la prochaine moisson. ENFIN, J'ATTESTE QU'EN CRÉANT CE PERSONNAGE, J'ACCEPTE DE LE LIVRER À LA BARBARIE DES JEUX S'IL EST TIRÉ AU SORT.

reality is here.

tell us your story.

❝ Put under the pressure of walking in your shoes,
I'm tired of being what you want me to be. ❞

Tu ne seras jamais meilleure qu'elle, Paige.

« Ce qu’on appelle violence n’est rien. C’est la séduction, la véritable violence. »

Un éclat de rire cristallin accompagna les paroles prétendument philosophiques de sa sœur aînée, Bonnie. Emmitouflée dans les draps blancs, Paige se cala davantage dans son lit alors que les chuchotements se firent plus impétueux dans la pièce attenante, qui faisait office de salon aux Farnsworth.

Un énième gloussement.

La jeune blonde enfouit son visage dans le coussin, les joues rosies. Il était impossible d’ignorer ce qu’il se passait, et elle ne put alors empêcher une bouffée de jalousie l’envahir, lorsque le garçon - dont le nom lui était inconnu - grogna quelque chose d’intelligible. Bonnie semblait plus que douée, semblait-il. Ce n’était guère étonnant au fond. L’aînée avait toujours eu un talent pour tout ce qu’elle pouvait entreprendre. Elle avait ce don pour charmer n’importe qui, et se délectait de cet avantage sans aucune parcimonie. Contrairement à Paige, l'insignifiante petite Paige sur laquelle personne ne s'attardait, tant l'aînée était rayonnante et parfaite. Oui, malgré leur vie des plus modestes dans le District 11, Bonnie avait tout ce qu’elle pouvait souhaiter. Séduire un garçon de son âge dans le salon de ses parents, alors que sa propre soeur était dans une pièce voisine, n’était assurément pas un obstacle à ses caprices.

Jalousie.

Ce sentiment rongeait insidieusement tout son être. Paige se surprenait parfois à espérer que le nom de sa sœur vienne à être tiré au sort aux Jeux. Une pensée abominable, si exécrable qu’elle regrettait l’espace de plusieurs jours le simple fait d’y avoir songé. Mais les semaines avaient beau défiler, et le désir fourbe de l’adolescente persistait. Et lorsque Bonnie assista à la dernière moisson où elle serait éligible, la sentence tomba. La chance avait encore souri à la jeune femme. Ce n'était pas elle.
C'était leur cousine.

(...)

« Alice Farnsworth. »

Un silence pesant se répandit telle une traînée de poudre sur la place de la ville. Aucun murmure, aucune exclamation de surprise, rien. Le nom d’Alice venait d’être annoncé à la foule tétanisée. Alice, la boiteuse, l’handicapée, l’estropiée. Elle allait mourir. Ils n’avaient jamais ressenti une telle certitude lors des Moissons. Cette fois, le District 11 n’en ressortirait pas vainqueur, leur tribut allait mourir. Comment pouvait-il en être autrement ? Avec son handicap, Alice ne survivrait même pas la Corne d’Abondance, le bain de sang lui serait fatal. L’évidence était si criante que Paige voulut s’écrouler à terre et gémir devant tant d’injustice. Elle se retint cependant, et ne fit que contempler avec horreur sa pauvre cousine, qui prenait deux fois plus de temps à se diriger vers l’estrade que les tributs des années précédentes. Elle était trop lente, beaucoup trop lente, elle va mourir.

Oh mon dieu.

Personne ne se porterait volontaire pour elle. Paige savait qu'elle avait à peu près les mêmes chances qu'Alice de s'en sortir indemne aux Jeux, si elle venait à se sacrifier. Personne ne pouvait sauver la pauvre handicapée. Personne…à part…peut-être ? Une once d’espoir saisit soudainement Paige. Bien sûr ! Bonnie, brave et parfaite Bonnie ! Elle gagnerait sans peine. Elle n’allait pas hésiter à sauver leur tendre Alice. Les yeux noisette de l’adolescente cherchèrent alors frénétiquement la magnifique silhouette de sa sœur, leurs regards finirent par se croiser furtivement avant que Bonnie ne se détourne. Bonnie ? Bonnie, regarde-moi. Bonnie, porte toi volontaire bon sang, voulut-elle s’écrier. Tu as plus de chance qu’elle. Toi, tu gagnes toujours ! Les yeux de Bonnie ne se firent que plus fuyants, alors qu’elle baissait la tête, ses boucles brunes venant obscurcir son visage.

Elle n’allait pas bouger, restant aussi immobile que possible. Elle abandonnait leur Alice.
Pourquoi ?

« Excusez-moi » finit par souffler Paige, alors qu’elle bousculait les parfaits rangs que formaient les autres filles de son âge. Ces dernières ne comprirent guère ce que s’apprêtait à faire la blonde, tant l’idée était risible et irréelle. A vrai dire, elle-même ne réalisait seulement à peine l’ampleur de son geste. « Excusez-moi » répéta-t-elle toujours aussi doucement, alors qu’elle levait une main tremblante en l’air. « J’aimerais me porter volontaire, s’il vous plaît. » finit par annoncer fébrilement Paige, ignorant quelques rires moqueurs des Pacificateurs, face à la politesse déplacée de l’adolescente dans une telle situation. « Alice fait partie de ma famille. » expliqua-t-elle inutilement, comme si le simple fait de partager le même sang suffisait à ce qu’elle prenne sa place.
Pour Bonnie, cela n’avait pas été le cas.

❝ I believe in ordinary acts of bravery,
in the courage that drives on person to stand for another. ❞

C’était étrange, déconcertant de découvrir la force des mots. Paige avait toujours eu conscience de sa gentillesse excessive. C’était un fait établi depuis une dizaine d’années dans le district 11, si bien qu’elle avait pensé cette réputation acquise durant les Jeux. Naïve ou présomptueuse, elle ne s’était certainement pas attendue à ce que le Capitole et les tributs soient étonnés de son caractère. Elle comptait rester naturelle jusqu’aux portes de la mort, puisqu’elle n’avait pas la force et l’agilité nécessaires pour remporter les Jeux. Sans doute finiraient-ils par comprendre, après tout n’avait-elle pas explicitement avoué qu’elle ne pensait pas s’en sortir, mais qu’elle était heureuse d’avoir une fin si héroïque, durant son interview ? Paige parlait encore et toujours, mais tous ses mots n’avaient jamais eu véritablement d’impact, personne n’avait jamais pensé que son attitude n’était qu’une façade pour cacher des desseins plus fourbes. Un merci, un bonjour suffisaient à réchauffer le cœur de certains habitants du district 11, cela, Paige le savait parfaitement et n’hésitait alors jamais à leur montrer sa gratitude. L’honnêteté avait toujours semblé de mise, elle avait toujours pensé chaque mot.
Pourquoi le Capitole et les spectateurs semblaient-ils si étrangers à ce concept ?

(...)

Il y avait eu ce Carrière. Le chef de leur meute, l’alpha des survivants. Et il y avait eu la jalousie et les tensions qui allaient de paire avec cette responsabilité.

« Va baiser Miss Grain de Blé, et ferme ta grosse gueule. »

Tout s’était déroulé à une vitesse pharamineuse. Paige avait à peine saisi l’insulte de l’autre Carrière que le pseudo alpha se jetait sur lui. Un crochet du droit, d’autres insultes, des provocations, et la tension accumulée durant tous ces jours finit par exploser. Une scène de ménage aux Jeux, quel plaisir pour le Capitole. Tétanisée, Paige avait voulu leur faire entendre raison mais une tribut du même district que l’Alpha la bouscula avec une telle force que la 11 tomba douloureusement sur le sol boueux.

« Tu l’as fait exprès ! » Siffla la tribut.
« Arrêtez, bon sang. On en a encore trois autres à tuer. » Tenta de s’interposer calmement le dernier Carrière de la bande. Mais la tribut le poussa avec fougue, concentrant toute sa colère sur lui. Paige entendit quelques bribes de leur conversation des plus houleuses, et son instinct lui cria de s’enfuir le plus rapidement possible avant que cela ne dégénère davantage. L'Alpha et l'autre Carrière se querellaient toujours, mais elle ne s'en préoccupa guère alors qu'elle se levait précipitamment du sol. La peur et l’adrénaline furent beaucoup plus intenses que son désir de calmer la situation en éclaircissant le quiproquo, et Paige détala le plus rapidement possible, après avoir glissé une ou deux fois dans la vase. Le souffle court, la cœur battant la chamade, elle n’avait jamais couru aussi vite de toute sa vie. Et n’avait jamais été aussi lâche, surtout.

C’est ainsi qu’elle gagna les Hunger Games. Par la lâcheté.
Tu es aussi pourrie que Bonnie.

(...)

« Nous avons tous été surpris de voir comment l’alliance entre les Carrières s’est terminée. Un coup de maître ! » La complimenta allègrement le présentateur télé, confortablement assis dans son fauteuil en cuir noir. Paige fronça imperceptiblement ses sourcils fins, l’hôtesse du district 11 l’avait prévenue de la vision du public sur son comportement dan les Hunger Games, mais cela restait étrange de réellement y faire face. « Un seul s’en est sorti vivant. Etait-ce intentionnel de ta part que l’un d’eux réussisse à survivre, pour qu’il puisse tuer quelques tributs isolés des autres districts restants ? » Demanda-t-il finalement. La survivante jeta un bref coup d’œil aux visages avides du public, derrière les caméras et les cadreurs. Déglutissant péniblement, son attention revint très rapidement vers le présentateur. « Ou pensais-tu que ta petite ruse anéantirait les quatre Carrières d’un seul coup ? Tu avais vraiment tout orchestré depuis le début de ton alliance avec eux ? »

Que faire ? Que dirait Bonnie ?

Paige haussa les épaules. « Hm...ce qu’on appelle violence n’est rien. C’est la séduction, la véritable violence. » Répéta-t-elle mot pour mot les paroles que sa sœur avait prononcé peu de temps avant la Moisson. Et elle offrit à Panem un faible sourire, qu’ils trouvèrent pourtant tous mutin, provocateur.
Le jeu des apparences ne faisait que commencer.