79th HUNGER GAMES, JOUR 04
FORÊT (NORD-EST - E6), 14h ~ EVKJÄA & EURYDICE

Eurydice ne parvenait pas à être entièrement tranquille en compagnie de la tribut du douze. Joshua faisait confiance à Evkjäa, et Eurydice faisait confiance à Joshua, cela aurait pu être suffisant mais pourtant cela ne l'était pas entièrement. Ce n'était pas de sa faute à elle, pourtant, mais la gente féminine Eurydice ne lui faisait par principe pas confiance ... Elle savait bien, elle, comme les filles pouvaient être fourbes entre elles. C'était toujours les filles, à l'école, qui venaient l'embêter lorsqu'elle ne demandait rien à personne. Pourtant, lorsqu'il avait été décidé de répartir les tâches et qu'Eurydice et Ev avaient été envoyées toutes les deux d'un côté la blonde n'avait pas bronché. Parce qu'elle était docile, et qu'elle n'allait de toute manière pas protester concernant son incapacité à traquer un bout de viande ; Son domaine à elle c'était les plantes, et préférant s'associer à la hache d'Andro Joshua avait laissé son alliée féminine partir avec elle. Alors Eurydice faisait contre mauvaise fortune bon cœur, elle essayait de faire la conversation en espérant ne pas être agaçante, et elle distillait de bon cœur ses maigres connaissances avec Ev. Elle lui parlait des pissenlits et de leurs vertus, du plantain qui faisait des miracles mais qu'elle n'avait encore trouvé nul part malgré qu'on leur en ait présenté durant les entrainements, et de ces champignons noirs que l'on n'osait pas forcément ramasser à cause de leur aspect mais qui remplissaient pourtant l'estomac à merveille.

La température était plus clémente que la veille, et l'humidité - bien que présente - moins handicapante qu'elle n'avait pu l'être les précédents jours également. La plaie sur son flanc gauche piquait un peu Eurydice, mais au moins elle ne saignait plus désormais, c'était encore le principal. Découvrant quelques brins de muguet la blonde avait eu un moment d'hésitation, ne sachant pas si elle devait ou non en révéler les - funestes - vertus. Silencieusement elle avait préféré passer son chemin, Ev' à sa droite, mais sans crier gare elle l'avait soudainement attrapée par le poignet pour la faire s'immobiliser. « Les corbeaux ... » avait-elle alors simplement expulsé à voix basse, l'air angoissé. Les griffures sur son avant-bras avaient peut-être presque disparues, mais la jeune fille avait encore un souvenir précis de la manière dont ces oiseaux de malheur s'étaient attaqués à elle, peu avant son affrontement avc Tom près de la voie ferrée. Outre les corbeaux, trois paires d'yeux perçants s'étaient tournées vers les deux filles, la faible luminosité leur permettant seulement de distinguer la fourrure rouge rappelant celle du renard. « A trois on court ... ? » Elle n'avait pas de meilleur plan à proposer, elle voulait juste déguerpir le plus vite possible avant que les corbeaux ne décident de venir leur crever les yeux.

Un, deux ... trois. D'un même pas les deux tributs avaient fait demi-tour et s'étaient élancées, persuadées que quelques enjambées suffiraient sans doute à les éloigner de ces animaux de malheur, qui ne voudraient assurément pas leur bien. La force invisible qui leur avait barré la route et les avait fait tomber au sol les avait donc prises par surprise, Eurydice légèrement sonnée mais la main toujours solidement serrée autour de celle de son alliée temporaire.

79th HUNGER GAMES, JOUR 04
FORÊT (NORD-EST - E6), 14h ~ EVKJÄA & EURYDICE

Le choc, puis la chute, l'avaient laissée sonnée un moment, papillonnant des yeux pour tenter de chasser les étoiles qui semblaient danser devant sa rétine. Incapable de lâcher la main d'Ev comme si sa vie dépendait du fait de rester attachée à elle, la blonde avait utilisé son autre main pour passer son épaule endolorie par le choc, tentant de toutes ses forces de retenir les larmes de douleur qui perlaient aux coins de ses yeux bleus. « Qu'est-ce que ... qu'est-ce qui s'est passé ... ? » Elle ne parvenait pas à voir autour d'elles ce qui aurait pu provoquer leur chute commune. Finissant malgré tout par se relever, bien qu'encore un peu chancelante, elle avait lâché la main de l'autre tribut et fait un pas en avant, puis deux, les mains bien venant elle comme si elle tentait d'attraper du vide. « Oh ... ! » Ses doigts avaient appuyé contre quelque chose. Quelque chose qu'elles ne voyaient pas, qui semblait ne pas exister, mais qui pourtant l'empêchait de parcourir le moindre centimètre supplémentaire. Après ses doigts c'était sa main toute entière qu'elle avait tenté de faire avancer, mais rien n'y faisait et la paroi invisible ne semblait pas vouloir les voir aller plus loin « On est enfermées ... On est enfermées ! Comment on va faire ? On doit rejoindre Andro et Joshua, comment on va ... » La fin de sa complainte avait été étranglée par le regard de frayeur qu'elle avait posé sur les animaux s'étant approchés d'elles. Les corbeaux volaient à bonne distance et semblaient pour le moment se contenter de les observer, leurs yeux rouges et leurs croassements sinistres provoquant sous la combinaison d'Eurydice une chair de poule incontrôlable.

Mais ce n'étaient plus les corbeaux qui l'inquiétaient, elle qui s'en terrorisait encore quelques instants plus tôt n'avait désormais d'yeux que pour les renards qui les encerclaient Ev' et elle, leur museau frémissant comme s'ils se délectaient de leur odeur, et une bave mousseuse s'échappant de leurs gueules acérées. Elles n'étaient pas armées. Ou du moins Eurydice ne l'était pas, et priait maintenant silencieusement pour que son acolyte soit mieux lotie qu'elle. « Ev' j'ai peuu-uur ... » avait-elle confié d'une voix étranglée, incapable de s'en empêcher, obligée de verbaliser la moindre de ses pensées pour se concentrer sur autre chose que son envie de pleurer à nouveau. Balayant les environs du regard à la recherche de quelque chose, n'importe quoi qui pourrait les aider à tenir les renards à distance, elle s'était saisie d'une branche d'arbre couverte de mousse et l'avait brandie devant elle comme une épée. Bien loin de s'en inquiéter pourtant, les deux renards les plus à sa droite avaient bondi « Ah noon ! » Perdant bêtement l'équilibre la blonde s'était retrouvée les quatre fers en l'air dans la boue, assommant l'un des renards mais ne parvenant pas à éviter l'autre suffisamment vite pour empêcher ses crocs de se planter dans son mollet droit. « Aoutch ... » Vive, la douleur l'avait prise comme une mauvaise crampe et semblait se propager à tout le bas de sa jambe, les larmes de douleur qu'elle retenait depuis tout à l'heure coulant désormais silencieusement sur ses joues. D'une rage subite, pourtant, Eurydice avait agité à nouveau son bâton et entendu un CRAC sinistre tandis que la branche rompait les cervicales de l'animal.

Tremblante, la blonde avait cherché dans les poches, dans son décolleté, fébrilement et malgré la brûlure dans sa jambe. Elle était là, elle était certaine de l'avoir encore sur elle, elle ne pouvait pas l'avoir perdue, elle ne pouvait pas ... « Je l'ai ! » Sortant sans triomphe la boite d'allumettes qu'elle avait difficilement récupéré à la corne d'abondance le premier jour, elle avait tenté tant bien que mal d'en allumer une avant de la faire tomber au sol. Pleurant de frustration, elle en avait sorti une seconde qui s'était rompue avant de s'allumer, et finalement une troisième qu'elle avait réussi à enflammer. Approchant la flamme de la mousse verdâtre qui recouvrait une partie de son bâton, elle avait vue l'orange lécher le vert et finalement l'embraser, d'abord un peu, puis à l'aide d'un peu de mouvement plus véritablement. Les animaux avaient peur du feu, Eurydice le savait bien et au district sept on craignait le feu presque autant que les animaux, car un incendie de forêt c'était le chômage pour des dizaines voir des centaines d'habitants et la famine pour une partie de la population. « Attention ! » Aux prises avec ses propres renards, Evkjaä n'avait pas vu fondre sur elle le corbeau aux serres crochues, devant lequel la blonde avait brandi sa torche à la flamme presque aussi vacillante que ses jambes.

"Je suis là, t'inquiète pas," t'as essayé de réconforter la blonde.

Les monstres furent bientôt tout autour de vous. Leurs apparences déformées, cauchemardesques, ne ressemblaient en rien à ceux qu'ils rappelaient et que tu avais souvent vu errer dans les rues grises du district Douze. T'avais beau te répéter les mêmes paroles que t'avais dit à Eurydice, au fond, t'arrivais pas à te convaincre toi-même ; quelque chose de profondément malsain émanait des mutts, comme si elles s'étaient enfuies des superstitions que t'avais jugé stupides avant aujourd'hui. T'as entendu parlé de la Hère ?, elle avait dit, la vieille à la Plaque. Quand tu lui regardes les yeux, tu disparais et on entend plus jamais parler de toi. À cet instant précis, tu pouvais pas t'empêcher de comparer la fourrure automnale des renards à la queue rouge du monstre que seule la Vieille semblait vraiment connaître. T'avais pensé qu'elle l'avait inventée, mais à présent, ça te passait plutôt comme un savoir ancien et irréprochable.

Soudain, le feu prit juste à tes côtés alors que tu relevais ton gros couteau dentelé. Tu pouvais pas te servir de ton épieu, il était trop important pour te tenir en équilibre, et de toute façon tu préféras le brandir comme une défense alors que tu déposais ton dos contre le champ de force (dans votre gueule, Juges ; tu te servais de leur piège comme appui). Tes yeux admiratifs étaient posés contre le bâton qu'avait ramassé la blonde du Sept et qu'elle avait foutu en feu. Et ça fonctionnait ; la plupart des monstres reculaient, mal à l'aises devant l'énergie pure et contrôlée par celle que tout le monde jugeait comme étant la conne de l'édition.

"Eury, t'es une putain de génie."

À cet instant, le combat éclata. Un renard bondit sur toi et s'empala contre l'épieu entre vous, puis même un deuxième (et c'était drôle parce que ça ressemblait à une grosse brochette, alors malgré l'endroit peu opportun, tu ricanas quand même avec ton air fasciné et malade). Puis un coup, puis un autre dans le vide, et l'un d'entre eux sur un renard trop proche. Ils contournaient Eurydice pour venir t'attaquer, le feu semblant moins menaçant de ton côté malgré les tentatives de cette dernière. L'adrénaline pompait si fort dans ta tête que tes dents semblient sur le point de se briser entre elles.

"Attention !"

Le bâton enflammé frappa de plein fouet un corbeau qui fondait sur ta tête au dernier moment. Eh merde ils s'y mettent aussi, maintenant. De multiples griffures s'accumulaient sur ta peau cendreuse, avec une teinte de rouge qui détonnait sur le gris de ton teint. Tu te sentais faiblir, et déjà la tâche semblaient impossible ; et pourtant s'y attelèrent également les corbeaux.

"Les arbres ! Grimpe sur un arbre !"

T'allais pas te laisser attaquer sur deux fronts. Les renards pouvaient bien se branler avant que le dernier corbeau ne tombe. Tu poussas un énorme cri de guerre en multipliant les mouvements exacerbés malgré la douleur que ça t'entraînais (mais en même temps, ça te donnais du jus pour gueuler encore plus fort), t'essayas d'avoir l'air la plus énorme et bruyante possible. Les mutts eurent certains mouvements de recul, incertaines avec leur tout petit cerveau rikiki si t'étais pas devenue un ours. Ce fut l'opportunité recherchée (et pis t'allais pas attendre un autre dix minutes non plus, les mutts étaient pas des animaux normaux et seraient pas vraiment effrayés ; c'était la surprise, le truc) pour bondir de façon peu gracieuse avec ta jambe boiteuse vers l'arbre le plus proche et t'y précipiter le mieux possible. Ce qui était pas très glorieux.

Bordel de jambe blessée, j'suis douée pour ça d'habitude.

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