| Sujet: IV,2 ≈ where the wild things are, cloom (j2) Mar 8 Juil - 5:56 | |
| ▽WE ARE WEREWOLVES WE ARE WEREWOLVES Tout ça me paraissait tellement inutile.
Apprendre, apprendre, apprendre et encore apprendre, apprendre pour tout oublier lorsque les vraies choses commenceraient. Ces règles qu'ils nous filaient n'auraient plus aucune substance une fois sur le terrain, mes expériences d'infirmière de combat me l'ayant bien appris. La plupart d'entre nous n'avaient jamais vu une seule blessure de leur vie et prétendaient être capable de charcuter un autre enfant sans sourciller ? J'avais envie de blâmer tout le monde mais n'en était même plus capable. Il y avait un air funèbre dans le fond de l'air, un requiem chanté par les fantômes de tous les jeunes qui étaient morts avant nous - mille sept-cent soixante-et-onze, avais-je calculé - et qui appelaient les vingt-trois prochains qui allaient les rejoindre dans peu de temps. Oh, je n'étais plus aussi honteuse de l'épisode calamiteux avec Bloom et le restant des carrières qui me voyaient désormais comme la dernière des idiotes, et Kylian et moi avions déjà commencé à creuser autour de nous à la recherche de possibilités d'alliance. Cette fille du Sept, Ambre, n'avait pas l'air trop mal et ne ressemblait pas à un ennemi trop puissant - je refusais de m'allier avec des gens plus forts que moi, désormais, réalisant l'erreur stratégique dans laquelle je me mettais. J'avais également essayé tout un tas d'armes pour n'en trouver aucune qui me convenais vraiment, sans parler que le simple fait d'en tenir une me donnait envie de vomir. J'étais mauvaise, et maintenant, certains tributs prenaient un plaisir malin à me le rappeler. Heureusement, on pourrait limite croire que je jouais un jeu et tenais une stratégie, et j'aurais sincèrement aimé que ce soit le cas. J'avais seulement caché mes talents en médecine, seule mon agilité m'ayant permise de briller un minimum lorsque je fus enfin convaincue de tenter la course à obstacles. Ce n'était pas bien différent des entraînements sportifs de chez nous, et avait réussi à me creuser une position intéressante à la ligne d'arrivée. Mais sans plus ; on m'avait déjà oubliée. Et je me débrouillais avec un fleuret, mais je n'étais pas aussi stupide et savais bien que ce n'était pas le cadeau qui m'attendrait à la Corne d'Abondance.
Je ne savais pas trop ce que j'espérais en restant après le couvre-feu dans la salle de formation. Ils nous laissaient encore quelques temps à tuer, ne fermant que les kiosques d'armes pour éviter une quelconque action irréfléchie. Ce soir par contre, les gens avaient préféré une bonne nuit de sommeil pour se préparer à notre entretien privé devant les Juges qui auraient lieu dans la journée et nous offriraient les fameux scores si décisifs. Et à vrai dire, cette idée me terrorisait tellement qu'après avoir frôlé la crise de panique - ma première depuis l'annonce de mon nom, un vrai succès -, je m'étais mise dans l'idée folle de trouver un moyen de sortir d'ici.
Je n'avais pas vraiment été bien servie. Un champ de force entourait visiblement le bâtiment, et je n'arrivais pas à trouver un quelconque moyen de fuir par les sous-sols. Impossible de sortir des pièces délimitées pour les tributs, impossible d'aborder un garde suffisamment dupe pour se laisser avoir. Ça me donnait envie de pleurer, de hurler, mais que pouvais-je faire d'autre que de baisser les bras ? Sauf que je ne me laissais pas ce loisir. Je m'accrochais à ma stupide idée comme un aigle sur sa proie, n'étais pas près de la lâcher. J'analysais chaque détail, chaque recoin, chaque ouverture et chaque tour de garde pour trouver mon échappatoire. Je commençais enfin à comprendre ce dont Pepper me parlait, dans le train. Car au moment où je sentis que je pourrais tenter de pickpocket la carte d'accès du dernier garde dans la pièce, qui s'en allait innocemment aux toilettes, je savais que j'étais capable de me battre pour m'en sortir. Voire même... Voire même tuer.
Mais au dernier moment, quelque chose me retint. La trouille, le trac, l'instinct ; peu importe, le garde était maintenant parti. Il ne se souciait même pas de ce que je pourrais faire, laissée toute seule dans la salle d'entraînement. Après tout, sans carte, où pouvais-je aller ? Nulle part. Et c'était ce qui me frustrait tant. Je me laissai choir contre le mur, submergée par le dégoût, l'impuissance. J'étais foutue. Je n'avais rien pour être tribut, encore moins pour être gagnante. Les règles de ce jeu étaient truquées d'avance pour m'enlever toutes mes chances et cette idée ne devenait que plus nette dans mon esprit. J'avais déjà perdu. J'avais déjà perdu. Je restai là un long, long moment. Le garde ne revenait pas. J'imagine qu'il savait que j'étais loin d'être du trouble et qu'il était déjà parti rejoindre son lit.
Puis j'entendis un grand bruit.
Je sursautai. C'était comme si on avait lancé un meuble contre le sol, comme si quelqu'un de particulièrement enragé laissait couler son impulsion un peu plus loin. D'où j'étais, il m'était impossible de voir le concerné. Je restai ainsi, immobile, fixant le vide avec peur comme un chevreuil sur la route (*). Le silence était pesant, semblait éternel. Le temps figé et les lumières toujours allumées me donnaient l'impression d'être dans une autre dimension, une dimension de danger, de danger et de mauvais augure. Qui était là-bas, un peu plus loin ? Un tribut, un membre d'équipe, un garde ? Quelqu'un d'autre ? Cette pensée me fit frissonner. Et si les rebelles n'étaient pas tous morts et qu'ils venaient accomplir leur vengeance ? Cette pensée me pétrifia comme jamais. J'avais vu ce que la guerre pouvait faire. Seulement supposer que ces images puissent revenir était au-delà de ce que j'étais capable d'endurer.
Des glapissements étouffés.
Je retins une exclamation d'horreur. Quelqu'un était en détresse. Quelqu'un avait besoin d'aide. Peu importe quelle était la menace, elle était maintenant plus que réelle ; une vie entrait désormais en jeu. Et... et j'étais la seule à pouvoir l'aider.
Une semaine auparavant, Claire, aurait bouché ses oreilles. Elle aurait attendu, les yeux serrés forts, retenant un flot de larmes, que tout s'arrête et qu'elle puisse tout oublier. Elle aurait pensé vouloir faire quelque chose, mais, écrasée et dominée par la peur, elle n'aurait levé aucun doigt.
Mais cette Claire-là n'était plus. Je ne pouvais pas me permettre de continuer comme l'ancienne Claire. Parce que j'étais coincée, perdue, faible, et que la seule vérité qui me restait était celle-ci : je ne voulais pas mourir. Je ne voulais pas affronter l'éventualité d'une vie après la mort, je ne voulais pas vérifier si tout se terminait en un grand vide. C'était une réalité presque phobique, et comme il ne me restait plus la possibilité de la faire taire, il me fallait l'apprivoiser. Dompter cette terreur pour me permettre de m'élancer vers l'avant et alors, peut-être, avoir une infirme chance de m'en sortir. C'était ironique, maintenant, de me dire que je faisais une action héroïque à des fins égoïstes. Alors qu'avant, j'aurais prétendu défendre l'abnégation en me cachant sous mes couvertures, grelottante d'effroi. Non, cette fois-ci, je me levai - lentement et tremblotante, certes, mais me levai tout de même -. Je me levai, et avançai prudemment vers la source du vacarme.
Je ne pris même pas le temps d'analyser la situation ; mon instinct primaire pris le dessus et je me jetai sur le pauvre jeune homme.
Il n'y avait pas d'assaut, pas de victime. Rien que le corps fragile d'un garçon et le contenu entier d'un kiosque jeté sur le sol dans la chute. Son visage était bleu, mais là où je m'attendais à découvrir le bleu de l'asphyxie, je reconnus celui de l'hématome. Il était pris dans une sorte d'état catatonique, violemment secoué de convulsions que je soupçonnai liées à la douleur. Je défis ma veste en vitesse pour la glisser sous la tête du pauvre garçon, penchai sa tête sur le côté pour éviter toute noyade dans de possibles reflux gastriques. J'avais déjà entendu parler d'un cas comme celui-ci, mais mes connaissances ne relevaient que d'un niveau académique. Je ne l'avais jamais vu en vrai, et je devais avouer que ça avait quelque chose de terrifiant.
Mais ma peur s'était toujours effacée devant la violence de la maladie.
Les procédures en cours de crise cardiaque étaient simples. J'apposai une main sur le torse de la victime, ignorant ses tentatives de me repousser sûrement associées à la panique - des réflexes parfaitement normaux. De mon autre main, j'immobilisai le front brûlant du patient avec chaleur, mais fermeté. Il ne me fallait aucune interruption pendant mes actions, sans quoi je risquais de lui briser des côtes, voire le blesser encore plus gravement. Puis j'appuyai contre son plexus solaire.
Une fois.
Deux fois.
Je sentis sa tension musculaire baisser de beaucoup. Il était encore loin d'être rétabli, mais au moins, il était sauf pour le moment. Un long soupir s'avéra être le mien, un soupir de soulagement. Je me détendis également, heureuse que la crise n'ait pas été plus forte que celle-ci. Lors de mes actions médicinales, j'avais pour habitude de complètement oublier la victime, comme si ce n'était qu'un mannequin sans nom et sans visage, ainsi je ne me rendis compte qu'à cet instant qu'il s'agissait d'un tribut. Un jeune homme, probablement mon âge ou plus jeune. Cheveux blond, le chiffre 1 cousu sur sa tenue d'entraînement. Bloom. Il devait être dans tous ses émois et même fou de rage que de tous les tributs, ce fut moi qui l'avait secouru. Et qui était fort probablement la seule à avoir les connaissances nécessaires pour l'avoir fait. Je ne pris même pas le temps de lui sourire ou de lui faire part de l'ironie de la situation. Je restais froide et détachée. Il restait en état précaire, et son statut n'était en rien changé à mes yeux.
"Ne bouge pas", lui commandai-je. "Il n'y a plus personne d'autre que nous deux, et je n'ai pas la médecine nécessaire pour traiter une rechute plus puissante."
- Spoiler:
(*) Comme elle vient du Six j'imagine que les voitures sont pas aussi rares qu'au Douze Surtout qu'elle vient d'une famille aisée ET PIS JE VIENS DE DÉCOUVRIR QUE CTRL+B OU +I ÇA FAIT GRAS OU ITALIQUE HIHIHI
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