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 we were just kids (billie&avalon)

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Avalon R. Sweenage
DISTRICT 9
Avalon R. Sweenage
△ correspondances : 13212
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△ multicomptes : dely, ridley, dahlia
△ à Panem depuis le : 23/04/2011
△ humeur : mélancolique
△ âge du personnage : vingt-deux ans
△ occupation : garde d'enfants


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MessageSujet: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeSam 29 Sep - 0:15




WE WERE JUST KIDS.
billie&avalon

Cela faisait à peine quelques heures que j'avais découvert le district Treize que tout avait déjà changé. Nous avions passé des heures, Rumer, Clay, Julian et moi, à marcher dans les forêts et les plaines inhabitées de Panem pour rejoindre ce district fantôme, voyage que j'avais par tous les moyens essayé de retarder. Cela n'avait pas été simple, les rebelles voulant quitter le plus vite possible le Neuf pour me mettre en sécurité, mais aussi Clay, le frère de Julian, qui avait été largement blessé lors d'une des parties de torture d'un pacificateur. Pourtant, j'avais réussi à nous bloquer au Neuf quelques jours, feignant des raisons plus diverses les unes que les autres bien qu'il n'y avait toujours eu qu'une seule. J'avais constamment refusé l'idée d'une fuite vers le district Treize, sauf pour Aiden, mais maintenant qu'il n'était plus là il était hors de question que j'aille contre tout ce que j'avais pu lui dire. Tant pis si Rumer n'était pas contente, elle ne pouvait pas comprendre. Et cela, je le voyais dans son regard plein de pitié et contrariété. Elle n'avait pas digéré ma relation avec Aiden, ou plutôt le fait que je la lui avais caché tout comme les informations que j'avais sur sa situation lorsqu'il avait dû se cacher chez lui. Cependant, je n'en avais rien à faire de ce qu'elle pouvait penser. Elle pouvait bien me prendre en dégoût pour avoir cédé à son charme alors que je n'avais pas encore dix-huit ans, elle n'était pas en mesure de me faire la moindre réflexion sous peine de passer pour la pire des sœurs.

Qu'ils en soient mécontents ou non, j'avais une nouvelle fois passé du temps avec Aiden alors que nous n'en avions pas le droit, et je me fichais bien de ce qu'ils allaient penser. De toute façon, il était hors de question qu'ils apprennent la vérité sur notre pseudo conversation puisque qu'aucun de nous deux n'avaient en projet de dévoiler ce qui s'était passé dans cette salle. C'était donc avec grands regrets que j'avais quitté le jeune homme après nos retrouvailles tout aussi étranges que notre relation l'était, pour retrouver ma sœur qui devait toujours se trouver à l'hôpital du district Treize. Je me retrouvai devant la porte de ce centre de soins, assez effrayés de la réaction de Rumer face à mon absence totalement injustifiable et qui de plus allait attirer des problèmes à Aiden. Je n'avais plus qu'à passer celle-ci, rejoindre mes compagnons de route et savoir ce qui m'attendait en cet endroit. On allait sûrement m’ausculter, me faire une prise de sang et toutes les autres manies des médecins qui voulaient à tout prix trouver quelque chose à soigner. Manque de chance, il ne trouverait chez moi que quelques carences et des tendances à l'insomnie, mais rien de bien grave, du moins je l'espérais. Après tout, je n'étais pas bien compétente dans le domaine, et ce n'était pas parce que je n'avais jamais été très malade que mon corps ne cachait pas quelques symptômes que nous avions pris pour de la simple fatigue jusque là. Mais bref, ce n'était pas le temps de me monter la tête avec toutes sortes de conjectures inventives qui n'en valaient pas la peine.

Les quelques instants d'angoisse passés, je me décidai à franchir cette porte. A peine étais-je entrer que j'entendis au loin la voix de Julian, sûrement au chevet de son frère assez mal en point. Bien que la raison aurait dû me pousser à aller le voir pour savoir ce que je devais faire, je me dis que ce n'était certainement pas la meilleure des solutions en pensant à toutes les questions auxquelles j'aurais droit ainsi que tous les reproches. Ils étaient en droit de penser cela, et je le comprenais tout à fait. J'avais tout de même disparue avec Aiden quelques temps sans prévenir ni rien, et même s'ils se doutaient bien que nous n'étions pas sortis narguer les possibles espions du Capitole, on ne savait jamais ce qu'il pouvait se passer. Je pris donc un autre couloir que celui d'où venait la voix du rebelle du Sept, qui me conduisit aléatoirement dans une salle. Il ne fallait pas que je continue à errer dans cet hôpital sans demander des informations aux personnes, savoir où je devais me présenter pour qu'on vérifie mon état de santé après ces heures de marche et des années de privations. C'est pourquoi je pris mon courage à deux moins et tournai dans la première chambre où semblait être une infirmière ou médecin. De dos, je ne pouvais juger de son âge, mais la fille ne devait pas être si vieille vue sa silhouette. J'espérais au moins ne pas me tromper en m'adressant à une patiente de l’hôpital, bien que je ne remarquais aucun bracelet comme Aiden portait. Frappant timidement à la porte déjà ouverte d'un doigt pour annoncer ma présence, je commençai par me présenter à la jeune femme. « Excusez-moi... Je m'appelle Avalon Sweenage, je fais partie des personnes du Neuf qui viennent d'arriver ici... » Bizarrement, je n'étais pas en train de bafouiller ou de marmonner quelques mots inaudibles, mais cela n'était pas pour me déplaire si je pouvais faire croire à mon interlocutrice que mon état psychologique était très bon. Après les présentations, il fallait bien que j'explique les raisons de ma présence, au cas où cette personne n'était pas en possibilité de m'aider elle-même, elle pourrait me rediriger vers un autre médecin du Treize. « On m'a dit que je devais venir ici pour... pour vérifier que tout aille bien chez moi... » Et voilà mes petits tocs de langage déjà de retour... Je recommençais mes hésitations, mais c'était surtout parce que j'avais peur qu'on ne m'autorise pas à sortir ce soir pour rejoindre Aiden qui m'avait promis de tout faire pour que nous puissions être enfin ensemble tous les jours et toutes les nuits.
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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeMer 3 Oct - 18:18





It's good to see you back home



« Veux pas. » Soupir blasé. Cinquième fois de la journée que cette gamine refusait d'avaler ses médicaments. Cinquième fois aussi que je tentais de diplomater avec elle – comment voulez-vous y parvenir ? elle a six ans – mais pas moyen de lui faire entendre raison. Sa mère la regarde, éperdue, gênée, aussi. Probablement. De faire perdre du temps au personnel médical, de ne pas être capable elle-même de persuader sa fille que c'est pour son bien. Mais non, la petite est têtue. Particulièrement têtue. Et voilà cinq minutes que je bataille avec elle pour finir de la convaincre qu'elle doit avaler ces foutus cachets pour se rétablir de son opération. « Ambroise, s'il te plait. » Le timbre de ma voix se fait exagérément suppliant tandis que mes yeux s'illuminent des larmes factices. La brunette, prise au dépourvu, semble prête à déclarer forfait, seulement pour me soulager ; ouvre grand la bouche pour finalement abdiquer quand une collègue entre en trombe dans la chambre et qu'Ambroise s'empresse de tourner la tête, évitant soigneusement de croiser mon regard pour ne pas céder une fois de plus. Je ramène mes lèvres, comme si j'allais envoyer un baiser, tandis que mes sourcils se froncent légèrement ; moue qui m'est propre depuis ma tendre enfance lorsque je suis contrariée. Un second bref soupir s'échappe de ma bouche et je décide de finalement me lever et de passer le relais à ma camarade guérisseuse aspirante – tout comme moi – pour me rendre aux consultations dont je suis chargée pour le restant de l'après-midi. Ambroise écarquille soudainement les yeux, presque paniquée. Sa mère tente de la réconforter, se répandant en excuses auprès de ma collègue alors que sa fille refuse obstinément de changer d'infirmière. Un léger sourire se perche sur mes lèvres tandis que je lui promets de revenir ce soir avant de retourner à ma chambre. Ambroise croise ses bras sur sa poitrine et fait mine de bouder tandis que je referme la porte derrière moi même si je suis déjà parvenue à déceler l'étincelle qui illumine ses iris lorsque je lui assure que je reviendrais plus tard. La gamine a sa fierté et son foutu caractère, elle ne se plaint jamais, même lorsqu'elle souffrait à cause de sa malformation congénitale, chose désormais terminée grâce à l'opération dont elle a pu bénéficier. Néanmoins, Ambroise s'obstine encore à garder ses faiblesses pour elle et ne s'ouvre que très peu aux autres depuis la mort de son père ; un événement tragique qui a pourtant été le déclic pour que je puisse finalement me rapprocher de ma patiente et gagner sa confiance. Un point que j'aurai pourtant préféré ne pas avoir en commun avec elle pour ne pas parvenir à accepter entièrement la mort de mon propre géniteur, en dépit du temps. Je n'avais pas été présente ce jour-là ; cette année. Je n'étais plus présente auprès des miens depuis trop longtemps. Six ans. Et, autant je me souvenais avec une précision étonnante des moindres détails de notre maison ou du visage de mes sœurs ; autant j'avais du mal à me rappeler que tous ces souvenirs qui heurtaient parfois ma conscience avec autant de force faisaient partie de la vie que je menais autrefois, au Neuf. La pensée seule de savoir que j'avais eu une vie avant le District treize me paraissait irréelle tant elle pouvait être lointaine.

Je pousse lentement la porte de la salle de consultations numéro neuf, celle que j'occupe habituellement lorsque je suis chargée d'accueillir les nouveaux venus, de plus en plus nombreux au fil du temps où la rébellion prenait de l'ampleur. La matinée se déroule assez paisiblement, comme de particulier à noter. Je n'ai pas pu déjeuner avec Kathleen ou Aiden, aujourd'hui. La première parce que son emploi du temps la forçait à se rendre à la salle de restauration à onze heures ; quant au second, j'en ignore complètement les raisons. Je comptais néanmoins mettre ce repas en solitaire à profit, embarquant un épais dossier avec moi, histoire d'avoir moins de paperasse à faire ce soir et plus de temps à consacrer à Ambroise. Il ne me fallut, en tout et pour tout, qu'une vingtaine de minutes pour engloutir la salade que j'avais eu aujourd'hui et, aussitôt, j'étais retournée au centre de soins. Je m'arrêtais dans la salle de garde, généralement vide à cette heure-ci car la plupart du personnel était en train de déjeuner à cette période creuse de la journée et peu de gens affluaient pour se faire ausculter dans les alentours de midi. M'installant à la table qui trônait au centre de la pièce, je déposais tous les papiers que je devais signer – parmi lesquels certificats médicaux, autorisation de sortie ou certificats d'aptitude pour rejoindre les soldats du Treize –. Plongée dans ma paperasse, je ne me rends même pas compte du temps qui s'écoule lentement mais surement. Je me lève, sur le point d'aller chercher un énième papier dans l'armoire qui est à ma droite quand on cogne doucement à la porte que j'avais laissé entrouverte avant de m'atteler à ma tâche. « Excusez-moi... » Penchée au-dessus de la table, je m'apprête à répondre – poliment, bien évidemment –, que la salle de garde n'est pas ouvert au public mais uniquement au personnel hospitalier sauf que la phrase de mon interlocutrice finit de me clouer sur place. « Je m'appelle Avalon Sweenage, je fais partie des personnes du Neuf qui viennent d'arriver ici... » Mon cœur rate un battement. Puis deux. Peut-être même trois. Avalon ? Mais... Avalon est... est au Neuf, non ? Mes poings se resserrent dans le vide alors que je sens mes doigts trembler et, imperceptiblement, mes genoux en font de même. Ma petite sœur est là, juste derrière moi, et je suis tout bonnement incapable de lui faire face.

J'ai pourtant tellement rêvé de ce moment. De la prendre dans mes bras, de constater combien elle a pu grandir, de lui promettre de toujours être là pour elle, désormais. De recommencer à vivre, avec elle, pour elle. Comme avec Aiden ou Kathleen, en somme. Les plaisanteries et les sourires me sont venus si naturellement avec eux. Mais, Avalon, c'est différent. Fondamentalement et foncièrement différent. Parce que c'est ma petite sœur. Et que, contrairement à mes deux amis que j'ai toujours perçu comme des personnes fortes et indépendantes ; je ne peux pas voir Avalon autrement qu'en tant que la gamine de douze ans qui pleurait dans mon cou avant mon départ pour les Hunger Games. Autrement que la petite fille que je mettais un point d'honneur à protéger. Je ne l'ai jamais considérée comme faible, juste fragile. Certainement parce que je ressentais le besoin d'être là pour elle, de me montrer utile, même si elle n'avait pas besoin de moi. Car, même si je taisais ce sentiment d'infériorité, j'ai toujours eu l'impression de ne pas lui avoir été d'un aussi grand recours que Rumer. J'étais celle sur qui elle pouvait toujours compter, certes, toujours prête à endosser les responsabilités de nos bêtises communes, celle qui fonçait toujours dans le tas pour massacrer Loa-Skann ou un autre idiot qui aurait eu la folle idée de l'embêter. Mais, à mes yeux, ça n'avait pas été suffisant. Ça ne serait jamais suffisant. Et là, alors que je pensais systématiquement à la joie de la retrouver, au bonheur intense de pouvoir la serrer de nouveau dans mes bras ; là, toute ma culpabilité me revient en pleine figure. Toutes les responsabilités que j'ai fui, même à mes dépens. Mon absence, surtout. De ne pas avoir été là pour elle pendant ces six dernières années. Dans les bons, comme dans les mauvais moments. Et pourtant, combien j'aurai voulu être présente pour elle. Pour la soutenir. Pour la faire rire, encore et encore. Elle a un si joli rire, Avalon. Du moins, dans mes souvenirs, aussi précis et flous peuvent-ils l'être, paradoxalement.

« On m'a dit que je devais venir ici pour... pour vérifier que tout aille bien chez moi... » Comme si quelque chose pouvait clocher chez elle. Et puis, si tel est le cas, je serai incapable de l'admettre ; pour moi, Avalon reste Avalon. Aussi saine d'esprit qu'on puisse l'être dans ce monde de fous. Mes lèvres tremblent, ma vue se brouille mais je retiens mes larmes. Je ne veux pas pleurer. Plus jamais. Plus depuis que j'ai appris pour la mort de papa et que Kathleen a du me serrer dans ses bras pendant un moment indéfiniment long. Mon regard s'accroche à l'armoire, entrouverte, et je me précipite, penchant mon corps de sorte que mon visage soit caché par les portes poussées vers l'extérieur. Je m'abrite de son regard, d'enfant ou d'adulte, je n'en sais rien. Je ne sais plus. Qui est-elle aujourd'hui ? Proche de la gamine que j'ai connu et profondément aimé ? Et à l'antithèse même des souvenirs de la petite Avalon que j'ai emporté avec moi, aux Jeux, puis au Treize. Je fais mine de chercher un dossier, alors qu'il n'en est rien. Alors que je cherche juste à la fuir. À fuir mon cœur qui tambourine dans ma poitrine. À enfin contrôler les tremblements dans mes doigts, et les trémolos dans ma voix lorsque je lui demande : « Où sont tes amis, Avalon ? » Son prénom se forme délicieusement sur ma langue ; et je n'arrive pas à croire qu'elle est là. Bel et bien là. En face de moi. À quelques centimètres alors que des kilomètres et des kilomètres nous ont séparées pendant six longues années. Ça, et le fait qu'elle me pensait morte. Qu'elle me pense morte. Aura-t-elle supposer que je faisais partie des tributs ramenés à la vie dont Coin a parlé dans son message pirate aux précédents Hunger Games ? Aura-t-elle espéré que je sois revenue à la vie, ou aurait-elle préféré ne même pas y songer, parce que son deuil était fait et qu'elle ne voulait pas sortir les squelettes de son placard. Je suis un squelette. Pensée morbide qui m'arrache un sourire amer. Aussi amer que la mort peut l'être. La mort. Ma mère est morte. Rien à voir, mais c'est pourtant ce qui me fait baisser les yeux vers le pendentif qui se balance autour de mon cou, à la manière d'un pendule. Collier si reconnaissable pour moi. Pour Rumer. Pour Avalon. Pour avoir longtemps été une relique que l'on regardait d'un œil à la fois crédule et respectueux ; que notre ainée gardait précieusement dans un petit coffret en bois. Qu'elle m'a offert alors que je courais droit vers ma porte. Droit vers ma mort. Brusquement et dans un geste dénué de toute délicatesse, je m'empoigne du pendentif et le serre entre ses doigts. Le serre si fort que je le sens écorcher la paume de ma main. Je ferme brièvement les yeux, me tâtant pour savoir ce que je dois faire. Pourtant, je le sais déjà. Je ne peux qu'affronter. Affronter Avalon et son regard accusateur si elle doit m'en tenir rigueur.

« Avalon... » Ma voix se brise. Que dire, que faire ? Avoir rêvé de ce moment un bon millier de fois ne m'aura pas aidé, visiblement. Car tous ces beaux discours que je m'étais préparée à déblatérer une fois mes sœurs retrouvées ; toutes ces belles paroles me restent coincées en travers de la gorge. Alors, mon corps semble prendre l'initiative de lui-même, avant que je n'en formule la pensée, je me redresse lentement, le plus lentement possible, de toute ma hauteur. Mes doigts, encore crispés autour de mon collier, se détendent doucement, jusqu'à relâcher le pendentif qui repart s'échouer entre mes deux seins. J'ouvre alors lentement les yeux que je n'ai même pas pris conscience de fermer et croise son regard, teinté de surprise à mon avis. « Pardonne-moi... », chuchoté-je d'un air pitoyable, voire larmoyant. Pardonne-moi d'être partie trop tôt. De ne pas avoir été à la hauteur. De ne pas être revenue. Pardonne-moi d'avoir tenté de te fuir. Mais, surtout, pardonne-moi de ne pas être encore capable de te prendre dans mes bras. Et pourtant, comme l'envie est forte. Comme j'aimerais le faire. Mais, la culpabilité liée à l'émotion me clouent sur place. M'empêchent de songer correctement. Et, la seule pensée qui parvient à heurter mon esprit est de constater comme elle a grandi. « Comme tu es belle... », je tente, dans un sourire, pourtant tremblant et un tantinet. J'en avais tellement rêvé. J'avais si ardemment désiré la retrouver. Et pourtant... Pourtant, quelque chose cloche. Quelque chose qui ne m'a jamais effleuré l'esprit avec Aiden ou Kathleen. L'absence a été si longue. Si longue que j'ai peur de l'avoir perdue et, je crois, que si tel est le cas, je ne m'en remettrai jamais. Parce que je l'aime tellement ma petite sœur. Au moins aussi fort – si ce n'est plus – que quand nous étions enfants.


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Avalon R. Sweenage
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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeDim 7 Oct - 20:30


La seule chose à laquelle j'avais pensé en entrant dans l’hôpital du Treize était qu'il ne fallait absolument pas que je croise Rumer et Julian qui ne perdraient pas une seconde pour me sermonner et me harceler de questions intrusives. J'avais donc pris le chemin opposé lorsque j'entendis la voix de Julian qui se trouvait certainement au chevet de son frère mal en point. Il ne m'était pas venu une seule seconde à l'esprit que j'aurais dû me présenter à l'entrée de l’hôpital, ou bien trouver un soldat à l'extérieur qui en savait certainement plus que moi sur le fonctionnement de ce district. C'était pourquoi j'avais erré quelques minutes dans les couloirs à la recherche d'une personne qui pourrait m'aider, de préférence une jeune femme qui me comprendrait au cas où les questions deviennent trop personnelles. Je m'arrêtai dans une salle qui semblait servir pour les consultations des médecins, à moins que ce n'était qu'un bureau et il ne me resterait plus qu'à m'excuser pour mon erreur, puis y entrai bien timidement. La jeune femme semblait bien occupée, mais je me permis de la déranger en me présentant maladroitement. Après tout, il fallait bien que je me débarrasse de cette visite médicale au plus tôt pour ne pas avoir d'ennuis tout d'abord, mais aussi parce que je tenais à sortir d'ici bien vite pour retrouver Aiden dès qu'il aurait terminé sa journée.

J'avais presque l'impression que ma présence n'importait guère à la jeune médecin qui était devant moi. Elle ne prêtait nullement attention à mes paroles, ne m'avait même pas saluée – et je me rendis compte que moi-même je ne l'avais pas fait – et ne semblait pas s'intéresser beaucoup à ma demande qui n'était pas si compliquée. Si elle ne tenait pas à s'occuper de moi elle-même, elle pouvait au moins m'envoyer vers l'une de ses connaissances pour que je sorte de ce lieu morne le plus vite possible. Pourtant, elle paraissait totalement dans son monde, imperturbable. « Où sont tes amis, Avalon ? » Voilà que j'avais enfin un peu d'attention, et même si je ne voyais pas l'intérêt de sa question, je ne pouvais qu'être polie. J'avais la chance d'avoir un nouveau départ dans ce district, et personne n'avait à savoir ma mauvaise habitude d'envoyer tout le monde sur les roses dès que quelque chose me déplaisait. Alors, pourquoi ne pas en profiter pour devenir plus agréable ? « Je ne sais pas, ils sont arrivés avant moi à l’hôpital je crois. Ma sœur ne doit pas être loin, j'ai entendu la voix du jeune homme qui est arrivé avec nous vers l'entrée. » J'étais bien vague sur la raison de mon retard à venir ici, personne n'avait besoin de savoir avec qui j'étais, certainement pas une femme qui ne me connaissait pas.

Après quelques instants d'hésitation, ou peut-être seulement de concentration sur ce qu'elle faisait, la jeune femme se décida à m'accorder plus qu'une infime partie de son temps et m'interpella, de façon très inattendue. « Avalon... » Étonnamment, j'avais l'impression de connaître cette voix. Je ne pouvais pas la replacer, et puis j'étais bien persuadée que ce n'était pas possible que je connaisse une jeune femme du district treize. Puis, je me rappelai de la jeune fille que nous avions croisé, Aiden et moi, lorsqu'il était blessé et que nous rentrions chez nous. Cependant, j'effaçai cette idée bien rapidement en me souvenant que la rebelle en question était brune. Ce n'était donc pas elle. Je laissai cette envie de savoir d'où me venait ce souvenir, comprenant que je ne serais pas capable de mettre un nom dessus, alors que ce n'était peut-être qu'une seule intonation qui me rappelait quelqu'un d'autre du Neuf. La jeune femme se redressa, et m'adressa un regard si étrange, je ne comprenais pas pourquoi elle semblait si bouleversée... Il était possible qu'elle ait appris une mauvaise nouvelle juste auparavant, et que ma présence la dérange. Je ne savais pas quoi en penser. Et pourtant, j'aurais juré que ce regard m'était familier. Il me rappelait presque ma sœur qui était partie il y avait déjà quelques années. Cette jeune femme avait le même regard, les mêmes yeux, mais son comportement était si différent. Billie avait toujours été pleine d'entrain, le plus souvent souriante, alors que cette jeune femme semblait affligée par un lourd passé. Il suffisait de voir sa façon de serrer un collier dans sa main pour se rendre compte que ses anciens souvenirs n'étaient pas faciles à supporter.

« Pardonne-moi... » Il ne m'en fallait pas plus pour me perdre totalement. Pourquoi s'excusait-elle ? Elle n'avait rien fait qui pouvait me déplaire, il n'y avait que son comportement étrange qui pouvait me mettre mal à l'aise, ce devait sûrement être de cela qu'elle s'excusait d'ailleurs. J'étais sur le point de dire que ce n'était pas grave, que je pouvais repasser plus tard ou même m'adresser à quelqu'un d'autre si elle le souhaitait, mais les mots ne me virent pas et elle me doubla dans des mots encore plus surprenants que les premiers. « Comme tu es belle... » Je finis par me dire que j'étais tombée sur la folle du district. Ce devait être une patiente, je m'étais trompée en la prenant pour une infirmière ou médecin. Je m'apprêtais à reculer en m'excusant du dérangement lorsque je remarquai ce sourire. Il était timide, incontrôlé, mais je ne pouvais que le remarquer. Je l'avais tellement vu ce sourire, et j'avais même envié longuement la seule personne que je connaissais qui était capable de sourire de cette façon alors que j'en étais incapable. Mais ce n'était pas possible. Elle était morte. Je l'avais vu mourir, tout le monde l'avait vu. Je devenais folle, c'était certain. Après Aiden, voilà que je revoyais ma sœur en hallucination. Tout cela n'avait été que dans ma tête depuis le début.

Mon esprit se mit à réfléchir à très grande vitesse, et de nombreux souvenirs firent leur apparition pour tenter de m'expliquer toute cette situation grotesque. Je revoyais la diffusion des jeux, je ne l'avais jamais oublié. Elle était morte, c'était sûr. Et pourtant, je repensai à ce district, le Treize. Je me souvenais d'une sorte d'annonce pirate de l'année dernière, ils avaient dit que des tributs avaient survécu. Mais comment ? Nous les avions tous vu mourir dans l'arène ! Impossible. Puis, ce fut le visage d'Aiden que je revis quand il avait évoqué ma sœur morte pendant ces jeux. Il avait eu une réaction là aussi étrange. J'avais tout d'abord cru qu'il était perdu dans ses pensées, mais cela voulait-il dire que je n'hallucinais pas et que je ne me trompais pas ? Pendant ce temps où les souvenirs et les idées les plus absurdes fusaient dans mon esprit, je restais plantée devant la jeune femme, totalement décomposée ne sachant si je devais croire ce que je voyais, ou si je devais restée logique et censée. « Billie ? » Mon esprit me joua un bien mauvais tour en laissant partir des paroles insensées avant que je ne les retienne pour ne pas passer pour une folle. Ils allaient tous penser que j'avais des hallucinations, ou que mon cerveau avait perdu la capacité de reconnaître correctement les personnes qui me faisaient face. Avant même que la jeune femme me demande pourquoi je l'appelais de cette façon, je me rattrapai. « non excusez-moi... je... je suis fatiguée je dois me tromper... je suis désolée... » Je n'avais plus qu'à sortir rapidement d'ici avant que l'on ne me colle la même étiquette qu'Aiden et que je ne puisse pas sortir de l’hôpital avant des jours. Toute chamboulée, je m'apprêtais donc à sortir de cette salle, et à me résigner à rejoindre Julian et Rumer en me gardant bien de leur dire que je devenais complètement déséquilibrée.
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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeMar 30 Oct - 18:09


La journée s'annonçait pourtant terriblement banale. Lever à six heures tapantes, petit-déjeuner en vingt minutes top chrono, quelques consultations éparpillées dans mon emploi du temps et une quantité impressionnante – et déprimante – de paperasse à remplir dés le repas de midi terminé avant de m'atteler à administrer quelques soins aux patients du centre de soins. Une journée en tout point semblable aux précédentes, somme toute. Du moins, j'en étais persuadée avant qu'on ne vienne toquer à la porte de la salle de garde et qu'on ne se présente comme étant Avalon Sweenage – ma petite sœur que je n'ai pas revu depuis près de six ans – ; par conséquent, aujourd'hui s'annonce tout sauf une journée ordinaire, désormais. J'ai du mal à aligner deux pensées cohérentes, une seule trotte dans mon esprit, inlassablement : Avalon est ici. Avalon est ici. Avalon est ici. Outre de me rendre proie à une émotion intense, cette idée me paralyse presque d'appréhension. À l'idée de ne pas être à la hauteur. D'avoir lamentablement échoué dans mon rôle de grande sœur – dans lequel, d'après moi, je n'ai jamais vraiment excellé –, d'être rejetée, aussi. On m'a arrachée aux miens, après tout ; qui me dit qu'ils ne m'ont pas définitivement rayée de leur vie ? Que je n'ai pas été reléguée au rang de sœur disparue mais à celui de fantôme ? Pour la première fois depuis mon arrivée ici, les retrouvailles qui s'immiscent dans mon esprit sont loin d'être aussi idylliques que ceux que j'espérais. Plutôt catastrophiques. « Je ne sais pas, ils sont arrivés avant moi à l'hôpital je crois. Ma sœur ne doit pas être loin, j'ai entendu la voix du jeune homme qui est arrivé avec nous vers l'entrée. » Bien malgré moi, je pousse un bref soupir de soulagement : Rumer est en vie. Depuis que j'ai appris pour mon père, le doute s'immisce constamment, me pousse jusqu'au vice de me demander si mes sœurs n'ont pas suivi la même route. Paradoxalement, si je suis rassurée d'apprendre qu'elles vont bien toutes les deux – enfin, aussi bien que peuvent l'être deux personnes qui débarquent au centre de soins du Treize –, mon cœur se serre d'autant plus à l'idée d'affronter les deux autres membres de la sororité Sweenage. D'autant plus que mon ainée a toujours eu le don de me mettre mal à l'aise d'un simple regard quand je venais de commettre une bêtise ; Rumer avait cette autorité propre aux parents, et bien qu'elle ne me punissait presque jamais, je la respectais plus que si elle avait fait preuve d'une poigne de fer à mon égard.

Retournée face à elle, je me retiens de m'effondrer sur place. Sur son visage, je vois les vestiges de notre enfance. Ensembles. , un terme qui m'est désormais presque étranger lorsque je dois l'assimiler aux membres de ma famille. Depuis plusieurs années, je vis dans la séparation. L'exclusion. Exclue d'une famille que j'ai toujours regretté. Exclue d'un groupe d'amis que je rêvais de retrouver. Exclue, enfin, d'un District dans lequel je suis née. Mon regard doit trahir une certaine affliction, poussée par la culpabilité qui me ronge soudainement. Je lui prie de me pardonner et, dans ses yeux se lie de l'incompréhension, pure et dure. Moi, de mon côté, je me sens perdue aussi, du coup. L'impression tenace qu'elle ne me reconnaît pas me fait mal. Je sais que j'ai changé, mais pas au point d'être méconnaissable. La preuve en est que Kathleen et Aiden n'ont pas hésité une seconde avant d'assimiler ce visage d'une jeune femme de dix-neuf ans à la gamine qui partageait autrefois leurs jeux d'enfants. Alors, pourquoi Avalon se terre dans son ignorance ? S'obstine-t-elle à me considérer comme morte et enterrée ? Elle reste plantée là, en face de moi, je lâche un compliment teinté de mélancolie et, toujours, entaché de culpabilité. Ses yeux rivés sur moi, j'ai l'impression d'y lire une étincelle nouvelle lorsqu'elle s'étonne : « Billie ? » Je n'ai pas le temps d’acquiescer que ladite étincelle s'est éteinte et qu'elle se dérobe aussi promptement : « non excusez-moi... je... je suis fatiguée je dois me tromper... je suis désolée... » Je la vois me tourner le dos, prête à prendre la porte. Avalon t'échappe, me souffle mon subconscient.

Et moi, je n'ai conscience de rien lorsque je m'élance à sa suite et dépose ma main au creux de son bras, dans le but de la retenir. Je ne peux pas la laisser partir. Pas maintenant que je l'ai enfin retrouvée. Des larmes embuent mon champ de vision. Douleur sourde qu'elle refuse de me reconnaître, moi, sa grande sœur. Sang de son sang. Chair de sa chair. Mais, plutôt que d'afficher le mal qui me ronge, j'esquisse un sourire, déjà plus proche de ceux que je lançais à tout va du temps où je vivais au Neuf, toute innocente et fringante que j'étais. Petite fille inconsciente. « Tu te fous de moi, Ava ? » Le ton n'est ni agressif, ni affligé, juste profondément joyeux – en apparence – quoique teinté de curiosité. « En fait, tu veux te venger des histoires que je te racontais quand on était petites ? » Je fronce légèrement les sourcils, pas le moins sévère du monde. Je me rappelle de ces nuits où, alors que ni l'une ni l'autre n'arrivait à trouver le sommeil, parfois, je m'amusais à lui conter ces mythes que Kathleen ou Aiden m'avait narrée plus tôt dans la soirée. Drapée dans la fierté propre à une enfant qui refuse d'avouer être effrayée mais, amusée, je la surprenais parfois en train de vérifier sous son lit si une quelconque créature n'y était pas cachée avant de finalement sombré dans les bras de Morphée. Souvenir d'enfance. Songe empli d'innocence. Je ne me laisse pas gagner par la nostalgie, et continue, faussement stricte, imitant le ton de papa lorsqu'il nous posait un ultimatum pour nous dissuader de faire une bêtise – ou au contraire, pour nous obliger à avouer ladite bêtise – : « Avoue ton crime tout de suite et je serai clémente à ton égard. » Mon grand sourire de trente-deux dents tremble légèrement, la commissure de mes lèvres se détend légèrement, jusqu'à lui offrir une risette un peu plus contenue, un brin plus tendre, un tantinet plus fraternelle. J'ai l'impression qu'il s'agit d'une piètre imitation de l'attitude que j'avais autrefois à son égard. Car, si avec mes amis, tout était venu naturellement, j'ai presque du mal à me remémorer de notre relation exacte, à Avalon et moi. « Il n'y a pas d'erreur. C'est bien moi. » D'un geste instinctif, je lâche enfin son bras, persuadée qu'elle ne partira plus, et porte mes doigts gourds et tremblants jusqu'au pendentif de maman. Petite manie que j'ai depuis que le bijou est en ma possession : besoin viscéral de le toucher pour me rasséréner. Et jamais je n'en ai eu autant besoin qu'en cet instant.

Plus que son regard, c'est à présent sa réaction que je crains. D'autant plus que j'ai le sentiment que la petite sœur que j'ai connu a bien changé. Peut-être pas fondamentalement. Au fond, elle reste certainement la même ; mais quelque chose diffère. Dans ses yeux, ou sur son visage ; je n'en sais trop rien. Juste qu'elle est plus proche de l'adulte qui m'est étrangère que de la gamine que je protégeais du mieux que je pouvais du monde entier. Elle a la tête de papa lorsqu'il refusait de croire à nos récits rocambolesques pour lui expliquer la raison de notre retard, lorsqu'on arrivait quelques dizaines de minutes après le couvre-feu qu'il imposait. Mauvais tour de mon esprit tourmenté, mais le visage de mon géniteur se forme derrière celui de ma cadette, m'observe de son regard accusateur qu'il ne m'accordait qu'à de très rares occasions. Ma culpabilité n'en devient que plus intense. Je n'étais pas là. Pour chaque difficulté que Rumer ou Avalon ont rencontré. Pour la mort de papa. Les soirs où elles ne trouvaient pas le sommeil. Les journées où le silence étaient trop lourd pendant les repas – elles ont toujours été moins expansives que moi, plus posées, moins bavardes –. Je n'étais pas là. Et, parfois, j'ai le sentiment que je ne suis pas ici non plus. Du moins, que Billie n'est plus. Et ça me tue.


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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeSam 3 Nov - 1:05


Je commençais déjà à être fatiguée de cette journée. Après m'être coltinée Rumer et Julian pendant des heures, j'avais été épuisée par la découverte d'Aiden toujours en vie dans ce district souterrain, puis j'avais dû accepter de le laisser partir à ses obligations pour retourner à l’hôpital où j'allais me faire disputer par les deux rebelles qui ne manqueraient pas de me harceler pour savoir les raisons de mon absence. Je voulais juste que tout cela se termine, ne plus avoir à supporter la pression, devenir indépendant dans ce district qui semblait donner sa chance à chacun, du moins c'était ce qu'Aiden avait sous-entendu, je crois. J'entrai donc dans l'hôpital sans me douter une seule seconde de ce qui m'y attendait. Je redoutais Rumer et Julian, mais je n'avais pas pensé à l'autre alternative. Mais comment aurais-je pu y penser ? Comment aurais-je pu imaginer que je me retrouverais face à une jeune fille médecin ou infirmière qui semblait me connaître depuis toujours. Mon cerveau refusa l'information. C'en était trop. Il y avait tout d'abord eu Aiden. Et maintenant elle ? Ma sœur morte il y a combien... ? Six ans ? Non. Ce n'était pas elle. Mon esprit me jouait des tours. Ma fatigue me faisait imaginer tout et n'importe quoi. Il se pouvait même que toute cette conversation n'ait été qu'invention de ma part. La situation était étrange, bizarre et me mettait terriblement mal à l'aise. Je ne savais que dire ou que faire. Je pouvais me tromper, dans les deux sens, mais il valait mieux pour moi refuser toute possibilité que ma sœur soit toujours en vie pour éviter la même étiquette qu'Aiden. Mon intégration n'allait pas être simple si l'on me prenait pour une folle, et je n'aurais plus qu'à dire adieu aux chances de retrouver le jeune homme dès la soirée. Je me retournais alors pour éviter cette situation bien trop gênante, espérant ainsi échapper à l'internement dans la seconde suivante.

La jeune femme s'élança pour me rattraper. Elle attrapa mon bras pour arrêter ma fuite, et je vis ses yeux se perdre dans des larmes. Étrangement, elle me sourit pour se transformer en celle dont je pouvais difficilement me souvenir, à mon grand désarroi. J'avais fait une sélection dans mes souvenirs, et ceux avec la jeune Billie s'étaient estompés avec les temps, ne voulant pas trouver d'autres raisons de haïr n'importe qui dans le district Neuf. « Tu te fous de moi, Ava ? » Elle avait ce ton tellement étonnant, inapproprié à la situation qui pourtant ne me gênait aucunement. Je sentais bien qu'il y avait quelque chose, que je ne me trompais pas mais ce n'était pas possible. Elle était morte. « En fait, tu veux te venger des histoires que je te racontais quand on était petites ? » J'étais toujours aussi étonnée de ses paroles, et par son comportement retenu. A chaque fois que je la pensais à la limite de fondre en larmes, elle devenait drôle. Elle me perdait tellement. J'en avais déjà eu assez avec Aiden, mais voilà que tout semblait recommencer. « Avoue ton crime tout de suite et je serai clémente à ton égard. » Elle avait pris un ton et une attitude que je ne pouvais pas avoir oublié, ce qui ne me laissait pas d'autre choix que d'être sûr de la personne qui se trouvait en face de moi. Et lorsqu'elle me sourit, il n'y avait plus aucun doute. Je la reconnaissais maintenant. Je pouvais revoir un visage plus jeune et enfantin à la place de la jeune femme qui était en face de moi.

« Il n'y a pas d'erreur. C'est bien moi. » Billie était devant moi. Elle était morte, comme Aiden, et elle était dans la même pièce que moi. Et là, je me mis à fondre en larmes. Je venais de quitter le jeune homme, que je croyais pourtant mort, alors pourquoi pas quelqu'un d'autre. Nous avions entendu cette annonce du Treize, disant qu'ils avaient réussi à sauver des tributs. Je n'y avais pas cru, c'était tellement absurde, mais surtout je n'avais jamais pensé que des anciens tributs comme Billie ait été cobaye de leurs expériences. Je développai alors soudainement un sentiment de haine envers ce district qui usait de la vie de tributs sans aucun scrupule. Billie et d'autres avaient-ils demandé à revivre une vie déjà nulle, qui se transformait en cauchemar dans ces souterrains ? Avaient-ils le droit de choisir pour des enfants ce qui était bon pour eux, et s'il valait la peine de les faire revenir pour supporter des souvenirs affreux de l'arène. Ma sœur retrouvée lâcha mon bras, persuadée que je n'allais pas fuir devant ce nouveau choc. Je ne savais ce qui me retint de partir en courant en cet instant, peut-être n'avais-je plus la force pour ce genre de choses. Il était pourtant certain que je n'allais pas pouvoir supporter ces deux retrouvailles de suite sans réagir vivement.

« C'est pas possible... » Je commençais à m'énerver sous la pression de la nouvelle, mais aussi à cause de la fatigue. J'avais l'impression d'être entre cauchemar et réalité, dans un flou total avec une migraine pesante, sans savoir distinguer le vrai du faux. « Tu es morte il y a six ans ! je l'ai vu... ! » Je ne réalisais même pas à quel point mes paroles pouvaient être blessantes en lui rappelant des choses atroces lorsqu'elle était encore dans l'arène. J'essayais de me rattraper, toujours maladroitement. « Je suis désolée Billie ! Si seulement j'avais su je serai venue bien plus tôt ! Je m'en veux tellement de ne pas avoir écouté Aiden... » Voilà un sujet que Billie ne manquerait pas de remettre sur le tapis, même si j'espérais qu'elle allait m'en préserver pour les quelques minutes qui allaient suivre. Je venais tout juste de digérer le retour à la vie d'Aiden – enfin je pouvais dire que je m'en étais totalement remise, mais ce n'était certainement pas l'impression que je voulais laisser à ma sœur – alors ce n'était pas pour me retrouver harceler par un mort-vivant sur une relation qu'elle ne comprendrait pas. Puis je me dis que j'avais sûrement tort de penser cela. Après tout, Aiden avait bien dû croiser Billie ces dernières semaines, et notre début de relation avait dû être évoquée au moins une fois. Quel cauchemar ! J'imaginais déjà les questions de la jeune fille qui avait été digne de celle que j'avais connu ces premières minutes. J'espérais au moins qu'elle ne comprendrait pas que j'étais avec lui et que c'était la raison de mon retard dans cet hôpital.
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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeJeu 22 Nov - 22:59


Depuis mes cinq ans, lorsque j'avais vu Avalon rentrer à la maison en pleurs, blessée au genou suite à une mauvaise chute, tenant fermement la main de Rumer dans la sienne, je m'étais jurée de toujours la protéger. De tous les maux que nous pourrions rencontrer dans ce monde de misère et de calvaires. Et, les années ont beau passé, ce besoin exacerbé de la protéger est toujours là, s'agitant en mon sein, me hurlant de la rassurer, de la prendre dans mes bras. Mais ses yeux – ses si jolies yeux – éberlués qui me fixent me clouent littéralement sur place. L'espace d'une seconde, je ne sais plus comment m'y prendre avec elle ; que dire ; que faire. Elle me déstabilise, mais je ne laisse rien paraître dans ma voix que je veux confiante. Autre besoin de me montrer forte devant elle, de ne pas lui laisser entrevoir mes blessures les plus profondes. J'avais toujours éviter de pleurer devant elle, ou même de montrer qu'on m'avait blessée, métaphoriquement parlant ; je voulais simplement qu'elle ait la sensation de pouvoir s'accrocher à moi sans la moindre crainte. Je voulais être son roc. Son bouclier contre tous les malheurs qui pourraient lui arriver. Mais, jamais l'idée que je puisse être à l'origine même du moindre malheur – aussi minime aurait-il été – ne m'avait traversée l'esprit. Enfant, je m'étais toujours pensée invincible, à l'abri des Jeux, simplement parce que j'avais des rêves pleins la tête et toute la vie devant moi, que je ne pouvais tout bonnement pas mourir si jeune. Je n'avais jamais supposé que je puisse disparaître, du jour au lendemain, pouf, et la laisser là, toute seule, sans roc auquel s'accrocher en période de tempête. Je n'y avais pas plus songé alors que je me battais dans l'arène, pour un jour supplémentaire, une heure de plus, quelques instants volés ; trop occupée que j'étais à survivre pour penser à ma petite sœur qui me regardait peut-être, me battre en désespoir de cause. Sachant pertinemment que je ne faisais que retarder l'échéance, sans jamais pouvoir réellement m'échapper de cette étreinte funeste, de ces bras décharnés qui venaient m'envelopper chaque nuit où le sommeil me gagnait lentement. Et puis, les premiers mois de mon intégration au sein du Treize, j'avais l'esprit trop tourmenté par ces souvenirs, terribles et morbides, de ces quelques jours de peur, d'un trop plein d'adrénaline pour moi, de désespoir, de mort. La mienne, surtout. Ce ne fut alors que bien plus tard que je commençais enfin à penser à ma famille à laquelle j'avais été arrachée, par le Capitole, dont on me tenait éloignée, par le Treize. Les années qui ont suivi, je me suis surtout consacrée aux élucubrations de nos retrouvailles ; mais aujourd'hui, alors qu'elle fond en larmes devant moi, il n'y a que le poids de la culpabilité qui affaisse un peu plus mes épaules, me fait même courber l'échine sous le poids si lourd de cette absence prolongée.

Elle ne s'est pas enfuie, c'est la seule pensée un brin positive qui parvient à se former dans mon esprit tourmenté d'être la cause des pleurs de ma cadette. Non seulement j'avais échoué dans ce rôle de protectrice que je m'étais moi-même incomber, mais aujourd'hui, je me rapprochais plus de l'épée qui portait les coups que du bouclier qui l'en protégeait. « C'est pas possible. » Mes lèvres se ramènent l'une contre l'autre, dans une moue à la fois un tantinet contrariée mais aussi assez confuse tandis que je vois les joues d'Avalon prendre une délicate teinte rosée, propre à l'énervement dont elle est la victime en cet instant même. À cause de moi. « Tu es morte il y a six ans ! je l'ai vu... ! » Je crois que je demeure impassible mais, au plus profond de mon être, c'est une tornade d'incompréhension, une bourrasque d'amertume, une tempête de colère. Parce qu'on m'a arrachée ma vie, mais non content de m'avoir détraqué l'esprit, on faisait souffrir ma sœur inutilement. Je ne suis pas de ces individus qui se plaignent sans arrêt, mais je pense légitime de juger que nous avions eu notre lot de malheurs pour une vie entière – et une mort, me concernant –. J'espère simplement qu'elle ne se mettra pas à penser comme moi ; comme ces hypothèses qui me tourmentent depuis six longues années ; suis-je vraiment Billie, morte puis revenue à la vie ? Suis-je une autre, si semblable en apparence, mais différente de celle que j'étais ? Nous, tributs vaincus puis ramenés au Treize, sommes allés à l'encontre du cycle de la vie ; la mort est définitive, c'est d'ailleurs ce qui fait la mort. Un état aussi irréversible que permanent. Sauf pour nous, pauvres victimes du destin, qu'on avait pioché au hasard au milieu d'une vingtaine de gamins qui s'étaient lancés dans un contre-la-montre, contre la mort, pour vivre. Et, alors qu'on sombrait lentement dans cette lumière que ceux qui sont passés de près de la mort ont eu le loisir d'apercevoir, on se sentait brutalement tirés en arrière. Renvoyés, interdits du repos éternel promis auquel, parfois, on se surprenait à aspirer, simplement parce qu'on était épuisés de vivre. Vivre après la mort. Vivre, mais plus vraiment.

Je me saisis silencieusement d'une des mains de ma sœur et la dirige jusqu'en dessous de ma poitrine, là où trône ma cicatrice, dernier vestige de ma vie d'avant – le collier de ma mère mis à part – ; ultime et unique preuve du fait que je ne peux être que Billie même si c'est tout, sauf raisonnable et dans la mesure du possible. Lentement, je remonte la main d'Avalon jusqu'à la déposer au niveau de mon cœur ; moi-même, ça m'étonne encore, parfois, de savoir que mon palpitant bat encore, comme auparavant. Peut-être la seule partie de moi qui ne porte aucune séquelle de mon séjour dans l'arène. Mon regard – plus proche du gris anthracite que du vert émeraude habituel – croise celui de ma cadette et, la voix un peu rauque, je tente d'esquisser un sourire en lui demandant : « J'ai toujours l'air morte ? » Son regard reste ancré dans le mien, je n'ai plus aucune notion du temps ; je me rends simplement compte que j'ai finalement relâché la main d'Avalon qui est retombée le long de son corps. « Je suis désolée Billie ! » Et je ne saurais dire combien ça peut m'être agréable de l'entendre prononcer mon nom, avec ce timbre qui, s'il est hésitant l'est simplement par la sincérité de ses mots plutôt que sur de quelconques doutes quant à ma réelle identité. Je crois qu'elle a fini par accepter l'idée saugrenue que sa sœur morte à la télévision est bel et bien en face d'elle. Même moi, qui pourtant ne fais pas face à un choc tel que le sien, j'ai du mal à m'en rendre compte. « Si seulement j'avais su je serais venue bien plus tôt ! » Je m'apprêtais à l'interrompre, lui dire qu'il était inutile de culpabiliser, qu'il valait mieux penser à aujourd'hui, alors que nous étions enfin réunies alors que, pendant ces dernières années, plus grande encore que la distance d'un point de vue géographique, celle que nous nous imposions – moi parce que penser au Neuf me faisait inutilement souffrir ; elle car elle me pensait morte – dans nos esprits, pour éviter de rouvrir des plaies que nous n'avons jamais pu panser. J'aurai voulu aussi ajouter que je n'aurai pas permis qu'elle tombe ici, dans les sous-terrains, perdue entre les limbes du Treize, sans pouvoir espérer de sentir de nouveau le soleil caresser sa peau. Mais, toutes ces paroles restent bloquées, devancées par celles d'Avalon : « Je m'en veux tellement de ne pas avoir écouté Aiden... » Un sourire vient se dessiner sur mes lèvres, bien malgré moi. Au vu du regard de ma sœur – plutôt courroucé, si expressifs que je peux lire dans leur azur que je n'ai pas intérêt à trop m'attarder sur le sujet – ; néanmoins, la réaction est plus forte que moi : « Aiden, hein ? », je demande avec un sourire entendu, tentant de lui faire comprendre qu'après s'être remis de ses émotions – lui aussi ayant connu le même choc quant à ma « résurrection » –, mon ami d'enfance avait bien fini par m'avouer le plus gros de l'histoire, du moins, ce qui s'était passé depuis mon départ pour les Hunger Games. « C'est lui qui t'as envoyée ici ? » Mais, ne lui laissant pas continuer, j'ajoute aussitôt, faussement sévère, à la manière d'une mère qui réprimande ses enfants : « J'espère bien, ou je devrai me charger de son cas, personnellement. » Ce n'est pas comme si je terrorisais Aiden ; nous nous étions toujours considérés d'égal à égal, et ces scènes de pauvre garçon martyrisé par les deux tyrans que nous étions, Kath et moi, n'étaient qu'un vaste jeu. Pourtant, comme dans le doute que ma sœur ne comprenne pas tous ces sous-entendus qui, pour nous trois, hurlaient notre complicité qui n'avait jamais pâti de notre longue séparation, j'offre à Avalon mon plus grand sourire avant de faire un pas vers elle. Un brin hésitante, j'en amorce un second et, dans son regard, j'attends comme une permission – idiote que je suis – pour enfin la serrer dans mes bras.


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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeMar 4 Déc - 18:46


J'avais toujours considéré ma relation avec Billie étrange, pour une raison qui m'était en fait inconnue. Je pensais qu'elle n'était une sœur pas comme les autres, présente et attentive sans pour autant être comme Rumer en me disputant pour tout et rien à la fois. Cependant, je n'avais pas compris à l'époque que leurs intentions, bien que semblables en apparence, n'étaient pas totalement les mêmes. Rumer s'était mis en tête de me materner, et je ne pouvais que la remercier pour ce sacrifice qui devait lui coûter beaucoup, alors que Billie était la sœur complice, parfois envahissante par ses questions intempestives mais jamais méchante. C'était bien la même personne que je retrouvais aujourd'hui, même s'il était toujours très difficile de croire en la vérité de la situation qui était déraisonnable. Ma première surprise fut violente, très violente si bien que je dus blesser la jeune femme en laissant croire que je pensais qu'elle n'était qu'une menteuse dérangée ayant pour but de me rendre encore plus folle que je ne l'étais déjà. Sa présence finit presque par me convaincre que je ne faisais qu'halluciner depuis quelques heures et que, soit nous n'étions pas encore arrivés au Treize, soit j'avais pris un sérieux coup sur la tête et qu'on m'avait transporté d'urgence à l'hôpital. Dans tous les cas, j'avais terriblement de mal à me faire à l'idée que cette situation était réelle, que la jeune blonde qui se tenait devant moi était bien la sœur que j'avais perdu des années auparavant.

Malgré mon premier refus de croire en sa sincérité, la jeune fille ne cessait pas de sourire et d'essayer de me convaincre que j'étais bien face à une réalité certes inconcevable, mais pourtant présente. Sans que je ne m'y attende, elle attrapa délicatement ma main afin de l'approcher d'elle pour je ne savais quel dessein qui avait sûrement pour but de me faire oublier les images de sa mort qui n'avaient pas été si vraies qu'il n'y paraissait à l'époque. Ma main se retrouva rapidement à l'emplacement de son cœur qui battait tout autant que le mien, vivant et non enterré quelque part comme nous l'avions tous cru. « J'ai toujours l'air morte ? » Non, c'était sûr qu'elle n'avait pas l'air d'un mort-vivant revenu uniquement dans mes hallucinations. Toujours en larmes, je ne pus m'empêcher de m'excuser. Pour les jeux, pour notre absence, notre ignorance et pour sa vie détruite. J'accumulai les mots de regrets et remords, sans laisser l'occasion à Billie de me reprendre, de me contredire ou tout autre chose. J'avais le sentiment de l'avoir laissé tomber, abandonnée à son triste sort toutes ces années dans un lieu aussi froid et invivable que l'avait été son passage dans l'arène. Pendant des années j'avais cru être dans une des pires situations du district avec tous les proches que j'avais perdu, mais elle avait vécu bien pire sans que nous ne sachions rien. J'aurais tant voulu qu'on me dise la vérité, que j'avais une sœur perdue dans ce district digne d'une prison. Prise dans mon élan d'excuses dispersées, j'évoquai le nom d'Aiden, chose que je regrettai aussi vite que je le dis. « Aiden, hein ? » Son regard s'était rapidement transformé pour me laisser croire qu'elle en savait bien plus que je ne l'aurais souhaité. Mais comment en vouloir au jeune homme d'avoir évoquer notre relation alors qu'il avait lui aussi été enfermé dans le Treize ?

Je savais que les questions allaient se suivre bien trop vite pour satisfaire la curiosité de la jeune femme, mais j’espérais qu'elle allait attendre au moins quelques minutes avant de me harceler pour savoir au final que peu de choses puisque nous n'avions partagé véritablement que deux journées avec Aiden. « C'est lui qui t'as envoyée ici ? » Je voulus lui répondre qu'elle avait effectivement raison et que je n'avais pas eu trop le choix face à l'insistance du jeune homme mais aussi par respect des règles. Cependant, elle fut plus rapide que moi en redevenant la personne que je connaissais qui passait son temps à blaguer en prenant une autre voix pour appuyer ses propos d'un ton comique. « J'espère bien, ou je devrai me charger de son cas, personnellement. » Elle réussit à me faire sourire quelque peu alors que je réalisais qu'elle avait dû lui faire la misère pendant les mois où il avait été seul dans le district. Mais je ne doutais pas que cette présence lui avait été d'une grande aide pour ne pas devenir encore plus fou que ce que disait le bracelet en plastique qu'on l'obligeait à porter. J'acquiesçai de la tête pour lui donner raison mais ne sus trop quoi lui répondre tellement la situation était étrange. Même si nous avions toujours été proche, je me demandais comment m'y prendre avec elle alors que le choc de la nouvelle était encore présent. Je remarquai que Billie tentait de s'approcher de moi avec retenue, sans doute pour les mêmes raisons que moi, pourtant je ne trouvai pas la force m'élancer dans ses bras tellement le geste m'aurait paru déplacé alors qu'il ne l'était pas. Je savais que cette jeune fille était ma sœur maintenant, mais j'avais aussi un petit bout de moi qui me disait que ce n'était qu'une inconnue, depuis toutes ces années sans aucun mot ni aucun regard. Je me dis qu'apprendre à connaître la personne qu'elle était devenue effacerait peut-être ce blocage qui m'empêchait toute sincère preuve d'affection profonde. « Comme ça tu deviens médecin ? » Je me promis d'éviter toute conversation se rapportant de près ou de loin aux jeux, ne voulant pas me lancer dans un sujet sûrement trop sensible. Et puis, j'aurais bien l'occasion de découvrir la vérité sur les survivants des jeux. Pour l'instant, une tout autre idée me vint en tête, non pas que je voulais me débarrasser de Billie au plus vite, mais je compris soudain pourquoi Aiden évitait cet endroit le plus possible. L'ambiance était glauque ici, on ne savait pas qui l'on allait croiser, ni dans quel état, et le lieu était tellement désert, sans vie, encore plus que les rares autres salles que j'avais pu voir jusque là. « Je crois que tu vas devoir t'occuper de moi si je veux avoir une chance de sortir d'ici rapidement. » Je lui adressai un sourire timide, soucieuse de vouloir donner un nouvel élan à une relation perdue depuis trop longtemps. Je ne comprenais pas ma réaction subitement calme, j'aurais dû continuer à me perdre dans mes doutes, à pleurer, ou même à être sur les nerfs. Au lieu de cela, un autre sentiment me gagna, sûrement la fatigue qui me faisait perdre le fil des événements de la journée. Je fermai les yeux l'espace d'une seconde, et je sentis un petit vertige d'épuisement qui ne dura que très peu de temps, pourtant je ne montrai rien à la jeune blonde qui s'empresserait de s'inquiéter pour ma santé et m'obligerait à rester dans cet hôpital encore plus morose que le district Treize entier.

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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeJeu 6 Déc - 17:37


Il y a de ces absences qu'on ne peut pas combler, même avec la meilleure volonté du monde. Des fossés qui se creusent inexplicablement entre deux cœurs pourtant étroitement liés, et qu'on n'arrive pas à combler. Cette absence, que je ressentais à peine en présence de Kathleen ou Aiden – et pour cause : nous nous comportions constamment tels les gamins de dix petites années que nous avions été –, m'était renvoyée en pleine figure en face d'Avalon. Ses yeux, même s'ils n'ont rien d'hostiles, transmettent un message à mon esprit tourmenté. Tu n'étais pas là. Semble-t-elle me dire alors qu'elle me rappelle, avec vigueur, que je suis morte. Tuée, à tout juste treize ans. Morte, un peu injustement. J'ai d'ailleurs eu tout le loisir de m'en souvenir lorsque j'étais enfermée dans le centre de soins, quelques semaines après mon arrivée au Treize, parce qu'on ne me jugeait pas encore assez stable, psychologiquement parlant, pour prendre le risque de me laisser vadrouiller comme bon me semble dans le District. Pendant des jours et des jours, ces mêmes mots avaient heurté, violents et vifs, mon crâne migraineux. Tu es morte. Morte, morte, morte. J'en étais même venue à me demander si cette Billie et moi formions réellement une seule et même personne. Interrogation existentielle que je taisais depuis toujours, sous peine de me voir affublée de ces horribles bracelets auxquels mes deux meilleurs amis avaient eu droit. Mentalement instable. Je leur en foutrais, des mentalement instable. Qu'on les envoie dans l'arène, la mort à la clef, le désespoir comme seul compagnon ; et on verra s'il ressorte aussi sains d'esprits qu'à leur arrivée. Qu'on leur fasse subir les mêmes tortures qu'on avait infligé à Aiden ; et après, on en reparlera autour d'une tasse à café, le bracelet au poignet. Longtemps, j'avais préféré garder tout cela pour moi. Taire mes insomnies, comme mes crises d'hystérie que je cachais aux yeux des autres lorsque personne n'était là pour y assister. Aujourd'hui encore, j'ai souvent du mal à dormir. Et si je n'ai pas de séquelles aussi importantes que l'autre qui parasite l'esprit de Kathleen, eh bien, je suis toujours sujette à replonger, un jour ou l'autre. Je suis une bombe à retardement, prête à exploser à tout moment, si silencieuse qu'elle en paraît pourtant inoffensive avant le gros boum final. Moi aussi, j'aurai pu – aurai du – porter ce maudit bracelet, pour toutes ces pensées tordues qui pullulaient dans ma tête, parfois, lorsque je me sentais plus morte que vivante. Morte. Nouveau déclic ; je me souviens alors qu'aux yeux de mes sœurs, je suis morte – ou je l'étais encore il y a une dizaine de minutes –.

Le contact de la main d'Avalon entre mes doigts eut presque l'effet d'un électrochoc. Après plus de six ans à me demander si j'aurai un jour l'occasion de ne serait-ce que croiser leurs regards, je pouvais toucher au moins une de mes sœurs. La toucher. Et la pensée me percute, sans équivoque. Ce n'est pas un rêve, une quelconque élucubration de mon esprit. Je suis bel et bien en face de ma petite soeur, perdue de vue depuis bien trop longtemps pour que les échos de nos éclats de rire communs me parviennent, trop lointains à présent. Et puis, dans ses yeux, je comprends qu'elle réalise enfin. Elle se confond en excuses qu'elle ne me doit aucunement. Tentant alors de lui remonter le moral, en évoquant le nom d'Aiden, je me félicite en la voyant esquisser un léger sourire. Le visage de ma sœur de quelque dizaine d'années se superpose avec celui de la jeune femme que j'ai en face de moi. L'espace d'une seconde, je suis décontenancée. Cela, plus l'hésitation quant à enfin la prendre dans ses bras ne font que me souffler de nouveau les mêmes mots accusateurs, encore et toujours. Tu n'étais pas là. Et au fond, qu'importe que je ne sois pas l'investigatrice de cette absence, j'en demeure la principale fautive et je sais pertinemment que je vais en payer les pots cassés dés à présent. À voir dans les yeux de ma cadette la même lueur que celle qui brille dans mes yeux. À ne pas savoir si celle en face de moi est la sœur dont je chéris le souvenir depuis des années ou si elle n'est que l'inconnue que je rencontre aujourd'hui. Nous avons toutes les deux changées, en six longues années. Bien trop pour que notre relation n'en pâtisse pas. « Comme ça tu deviens médecin ? » Je souris, bien malgré moi. « Je crois que tu vas devoir t'occuper de moi si je veux avoir une chance de sortir d'ici rapidement. », dit-elle en esquissant un sourire plus timide que le mien, teinté de cette ignorance quant à notre lien fraternel malmené par le temps. Je jure la voir fermer brièvement les yeux, comme victime d'un malaise mais, lorsqu'elle se reprend, j'intercepte dans son regard l'espoir que je n'ai pas surpris cette seconde d'inattention. Je fais comme si, jouant à l'ignorante, feignant de laisser passer cet instant de faiblesse. Je souris de nouveau. Je m'incline, courbette stupide et gamine. « Si tu veux bien prendre place. » et je l'invite à s'installer sur l'une des trois chaises qui encerclent la table de la salle de garde. Elle s'exécute rapidement et, me saisissant de l'élastique autour de mon poignet, je m'attache rapidement les cheveux en un chignon négligé, laissant quelques mèches blondes s'en échapper et encadrer mon visage tandis que le collier de maman – que je n'ai jamais quitté depuis mon départ du Neuf – quitte l'échancrure de mon haut pour venir se balancer entre Avalon et moi lorsque je me penche doucement, pour l'ausculter.

D'abord postée en face d'elle, je fais lentement bouger mon index de gauche à droite, dans son champ de vision, attendant qu'elle suive mon doigt des yeux. Je ne dis rien, place le stéthoscope autour de mon cou dans mes oreilles, me place derrière elle, lui relève légèrement son tee-shirt et lui intime de souffler longuement dés que je pose mon instrument sur son dos ; elle obtempère. Tout semble aller et, l'air de rien, je jette un regard à la dérobée sur son dos, comme pour m'assurer qu'il n'y a pas de cicatrice, aucune séquelle physique, pas la moindre preuve d'une quelconque torture comme Aiden en a été victime. Je vérifie ensuite brièvement ses réflexes puis, l'air de rien, je tire la chaise à côté de la sienne. « On ne dirait pas, comme ça, mais c'est pas aussi cauchemardesque que tu ne le penses. » J'esquisse un sourire rassurant, tentant d'occulter toutes les pensées négatives que j'ai un jour pu avoir à l'encontre du Treize. Le tri de mes pensées rapidement fait, je suis d'ores et déjà bien plus convaincue de mes dires. Je dois tout au District – mon District – : ma vie, ou tout du moins, la seconde chance qu'ils m'avaient offerte. « C'est une question d'habitude. », je souffle. Il suffit de se plier au mode de vie imposé, ai-je envie de dire. Mais, moi-même, je n'ai jamais été du genre à me taire et écouter ; à obéir sagement. Trop insolente, trop virulente, disait-on parfois, au Neuf. « Un des soigneur m'a prise sous son aile dés que j'ai pu quitter le centre de soins, un mois après mon arrivée. J'ai immédiatement commencé une formation pour devenir guérisseuse. » J'espère qu'elle entendra l'enthousiasme dans ma voix. Ce métier, c'est ma vocation. C'est tout ce que je voulais devenir, faire dans l'avenir. Petite déjà, j'avais longuement supplié le guérisseur de mon District pour qu'il m'enseigne quelques rudiments sur la médecine. J'avais, à force de détermination, réussi à lui arracher quelques livres et, au fil des années, il s'était suffisamment fié à moi pour me permettre d'assister à des opérations, à l'aider lorsque celles-ci étaient complètement minimes. Il m'avait initiée et le Treize avait repris le flambeau, m'offrant une vraie formation, avec de vrais patients, dans de vraies conditions. « Le processus a d'ailleurs été accéléré, depuis l'attaque chimique. À priori, je devrais devenir officiellement guérisseuse d'ici un mois, deux tout au plus. C'est vraiment génial. » Je m'extasie tranquillement sous le regard de ma sœur. Alors, je me redresse légèrement et plonge mon regard dans le sien. « Et toi, alors ? » Je devais apprendre à la connaître. Si je connaissais par cœur la gamine de douze ans, la jeune femme de dix-huit années était remplie de secrets à mes yeux. Tant de choses que j'ignore. Tant de choses à rattraper. Et je suis prête à tout, pour rattraper le temps perdu, pour les retrouver, elle et notre complicité.




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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeDim 9 Déc - 22:47


Il m'était impossible de croire que nous avions perdu tout ce qu'il restait de notre relation. J'avais pourtant ce sentiment amer de ne plus être la petite sœur de la jeune femme qui se tenait devant moi, de ne plus savoir comment lui parler, comment fixer mes yeux dans les siens sans avoir un regard perdu qui trahissait mon incompréhension face à cette situation étrange. Il fallait pourtant que je me reprenne pour que la toute nouvelle Billie que je découvrais ne pense pas que j'avais oublié qui elle était pour moi, qui elle avait toujours été même si nous avions cru l'avoir perdu dans les jeux atroces du Capitole. Nous avions une chance inespérée, que beaucoup de personnes auraient enviée, et je n'étais pas prête de la gâcher même si les instants d'adaptation allaient être compliqués. Ne sachant trop comment me comporter avec la jeune femme, j'essayais de changer de sujet pour tenter de débloquer notre conversation qui ne menait à pas grand chose. Par la même occasion, cela me permettait de me donner une chance de sortir au plus vite de ce lieu, non pas que je n'étais pas heureuse de retrouver ma sœur perdue, mais parce que l'ambiance y était encore plus froide et étrange qu'ailleurs. Je voulais aussi éviter toutes ses questions pour ne pas me sentir obligée de lui répondre des choses qui ne la regardaient pas, ou encore des choses qui ne lui seraient pas agréables à entendre, comme la relation compliquée qui avait pris le dessus entre Rumer et moi après de nombreux désaccords. Billie n'eut pas l'air de vouloir me contredire, et je lui en fus très reconnaissante. Elle sourit de nouveau avant de prendre son rôle de médecin au sérieux pour s'occuper de moi comme je l'avais suggéré quelques secondes à peine auparavant. « Si tu veux bien prendre place. » Je m’exécutai sans attendre à son ordre, et ne pus rater le collier qui se balança à son cou, juste devant mes yeux. Cependant, je ne fis aucune remarque à son sujet, même si mon regard trahit ma brève stupeur, me donnant ainsi une preuve irréfutable que la jeune fille était bel et bien la petite Billie devenue adulte.

Après ces mots m'invitant à m'asseoir, la jeune femme entreprit de m'examiner comme il semblait être coutume de faire pour tous les nouveaux arrivants dans ce district. Elle testa ma vue, où je ne sais quelle chose qui devait être en rapport avec mes yeux en passant son index juste devant mon visage. J'acceptai ensuite sans me plaindre à ce qu'elle inspecte mon dos, ma respiration ainsi que la santé de mon cœur. Un nouveau test qui ne prit que quelques secondes et je fus délivrer quelques temps des examens pas forcément très agréables.  « On ne dirait pas, comme ça, mais c'est pas aussi cauchemardesque que tu ne le penses. » Je fus tout d'abord confuse, ne sachant de quoi voulait parler la jeune femme. Parlait-elle de son temps dans l'arène ? C'était peu crédible. Elle n'en aurait pas parlé de cette façon. Ce devait donc être de ce district, le Treize. J'avais beau essayé de la croire, je ne pouvais pas imaginer me sentir bien, heureuse, un jour, dans ce lieu impersonnel et froid. « C'est une question d'habitude. » Pourtant, je lui laissais le bénéfice du doute. Après tout, je n'étais arrivée que peu de temps avant, alors comment pouvais-je juger de la valeur de ce district ? « Ça paraît dur à croire, c'est tellement... froid ici. » J'essayais de participer à une conversation, mais j'avais l'impression de me forcer à dire ces mots. Enfin, ce n'était pas qu'une impression. « Mais je vais faire un effort, je leur dois bien ça. » De qui parlais-je vraiment ? Je n'en avais aucune idée. J'aurais voulu dire « je lui dois bien cela », en parlant d'Aiden bien entendu, mais il était hors de question de donner une nouvelle raison à Billie de me questionner sur le jeune homme. Ainsi, il m'avait paru judicieux de laisser croire que j'étais reconnaissante envers le Treize de m'avoir accueilli alors que nous fuyions le Neuf.

« Un des soigneur m'a prise sous son aile dés que j'ai pu quitter le centre de soins, un mois après mon arrivée. J'ai immédiatement commencé une formation pour devenir guérisseuse. » Je ne sus trop quoi lui répondre, alors je lui souris pour lui montrer que j'étais contente qu'elle ait trouvé une occupation. Je ne pouvais imaginer la situation dans laquelle elle avait été en arrivant dans ce district, totalement perdue, ne connaissant personne alors qu'elle était encore jeune. « Le processus a d'ailleurs été accéléré, depuis l'attaque chimique. À priori, je devrais devenir officiellement guérisseuse d'ici un mois, deux tout au plus. C'est vraiment génial. » Une attaque chimique ? Au district Treize ? Jamais nous n'avions été mis au courant. Mais en même temps, jamais je n'avais cru à l'existence de ce lieu, et encore moins au fait qu'il pouvait rivaliser avec le Capitole, alors pourquoi aurais-je su ce genre de chose. Tout le monde me gardait loin des informations importantes. « Je suis contente pour toi. » Je lui adressai un sourire tout aussi timide que les autres, auquel elle répondit avec sincérité avant de commencer la série de questions tout doucement. « Et toi, alors ? » Je n'avais aucune idée de ce que j'allais bien pouvoir lui répondre. Qu'allais-je dire ? Que j'avais gâché la vie de Rumer toutes ces années ? Que notre père était mort à peine un an après sa disparition ? Que son amie Kathleen avait péri dans les derniers jeux ? Elle s'attendait sûrement que je lui raconte ma vie, mon occupation dans le district, ma passion si j'en avais une. Sauf que les dernières années avaient été vides. « Moi ? Je... » Mes paroles étaient hésitantes. Je ne savais par quoi commencer, alors que je n'avais rien à lui dire. Pourtant, il fallait que je prenne les devants, sinon je sentais que certaines questions bien particulières viendraient pour m'aider. « Rien de spécial, tu sais, au Neuf, il y a pas grand chose. » Je cherchais tant bien que mal une chose à lui dire, je voulais vraiment lui parler de moi, si seulement j'avais fait quelque chose de ma vie à part me plaindre. Je la regardais, assez coupable de n'avoir rien à lui offrir alors qu'elle m'avait raconté une partie de sa vie dans ce nouveau district. « J'aimerais pouvoir t'en dire plus, sincèrement, enfin te dire quelque chose, mais tu dois déjà te douter de ce qu'est une vie normale dans le Neuf. » Ma réponse était bien trop médiocre, j'en avais conscience. Billie allait croire que je ne la considérais pas assez pour lui parler de moi et de tout ce qui s'était passé dans la famille, mais c'était justement l'inverse. Je la considérais trop pour lui avouer à quel point la vie avait été difficile depuis qu'elle était partie pour les jeux.
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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeLun 10 Déc - 15:59


Deux idées se combattaient en mon sein. Celle de tout lui dire ; lui avouer tout ce que je savais, que j'étais au courant de ces choses qu'elle tentait vainement de me cacher. Ou bien, celle de me taire, de jouer à l'ignorante, à ne pas chercher à combler cet horrible fossé entre nous. Et, le pire, c'est que je sais que de ces deux envies qui tentent de prendre le pas sur l'autre, la deuxième demeure la plus forte. Car il demeure l'absence, devenue mur d'incompréhension. Nous n'étions plus aussi proches qu'avant. Nous avions bien trop grandi, trop rapidement sans doute, loin l'une de l'autre. Il y a cette idée que je n'étais qu'une étrangère, à ses yeux. Que je ne la connais guère plus, à présent. Qu'à part le sang, rien ne nous liait réellement. La pensée, horrible, heurta mon esprit avec bien trop de violence : Tu l'as perdue, ta petite sœur. Il n'y a plus d'Ava, petite fille aux yeux bleus tantôt rêveurs, tantôt inquisiteurs ; celle que je prenais dans mes bras quand ça n'allait pas ; celle que je faisais parfois tourner en bourrique avec mes questions indiscrètes et mon humour souvent vaseux. Non, Ava s'était envolée, ne restait qu'Avalon, une jeune femme dont j'ignorais tout, en somme. Je ne connais d'elle que ce que Kathleen ou Aiden ont bien voulu me dire, depuis leurs arrivées respectives au Treize. Et c'est horrible, la simple idée qu'ils connaissent ma propre sœur mieux que moi. Qu'ils savent plus de chose que moi-même de la chair de ma chair, sang de mon sang. Alors, doucement, je me terre sous cette image factice de sœur qui en voit autant qu'elle en sait : rien. Je fais semblant de ne pas déceler les marques de fatigue sur son visage, je fais semblant de ne pas remarquer ses yeux curieux qui se posent sur moi, visage étranger. Je fais semblant et ça me tue, de ne pas pouvoir être réellement moi, à ses côtés. Et c'est comme si l'idée de lui parler de ces choses, un peu taboues, que l'on garde au fond de nous, comme si cette idée s'est subitement volatilisée. Je ressens presque le besoin de m'excuser auprès d'elle, prétexter qu'un patient requiert de mon aide, que je suis trop débordée ; mais le centre de soins est vide. Vide, comme notre relation. Vide, comme le néant qui réside entre nous. Et ça me tue, de l'avoir un peu perdue.

J'essaie d'engager la conversation. Sujet anodin car je suis tout bonnement incapable d'embrayer sur quoique ce soit de réellement sérieux sans sentir que c'est inapproprié. Mais rien ne devrait l'être, surtout pas avec Avalon. J'essaie de lui communiquer cette reconnaissance exacerbée, qui s'est rapidement muée en loyauté indéfectible, que je voue au Treize. Elle me semble sceptique et ça n'a que le don de me rappeler que l'époque où, d'un simple sourire entendu, je parvenais à lui faire avaler n'importe quoi est tellement loin. « Ça paraît dur à croire, c'est tellement... froid ici. » Sa voix est faible, proche d'un murmure, comme si parler relevait du calvaire. Comme si me parler était un calvaire. En est-ce un ? Je n'en sais rien. Mais je n'en fais rien. J'esquisse un bref sourire, pas vraiment enjoué, plutôt blasé, presque attristé. Je connais, cette rengaine incessante que tous psalmodient à leur arrivée dans le District : tout est de glace, on a froid la nuit et les gens sont froids avec nous ; tout est de glace, même toi. « Mais je vais faire un effort, je leur dois bien ça. » J'arque un sourcil, ne comprenant pas réellement de qui elle parle en cet instant. À qui doit-elle le moindre effort ? Rumer, Aiden ? Les rebelles, le Treize ? Et, dans mon crâne, voix cruelle, me rappelle que je ne suis pas incluse. Que je ne le serai peut-être plus jamais. Qu'à moi, elle ne me doit rien. Strictement rien, hormis l'absence. Les rires qui ont cédé la place au silence. Peut-être en vient-elle jusqu'à me considérer comme responsable de la mort de papa ? Je n'en sais rien. Et ça me fait mal, mal, quand je dis : « C'est bien. » car, non, ce n'est pas bien. Non, cette incompréhension n'est pas bien. Au contraire, elle me fait plus de mal que de bien. Et Avalon, avec ses yeux trop bleus, finit de me clouer de douleur. Mais je me rappelle que je dois porter mon masque ; jeune femme intouchable quant à cette souffrance qui me lancine la poitrine. Je change brutalement de sujet, lui parle un peu de mon passé, de ces dernières années, du moins, de cette formation que je suis depuis mon arrivée.

« Je suis contente pour toi. », dit-elle dans un léger sourire. Je lui en offre un autre en retour, si rapidement que ça en paraîtrait naturel. Mais Avalon suscite en moi une certaine gêne que je ne me connais pas. Une seconde, le silence, pesant, s'installe entre nous. Je ne peux le supporter. Pas même le tolérer. Je lui demande ce qu'il en est de son côté et je crois l'avoir un peu prise au dépourvu. « Moi ? Je... » Elle est trop hésitante pour me paraître sincère ; si hésitante qu'elle semble dans un dilemme intérieur. Dans mes yeux brillent sans doute la lueur d'espoir qu'elle se jette à l'eau. Qu'elle m'avoue tout, enfin. Maintenant. Et nous libère d'un poids trop lourd pour nos frêles épaules. Avalon, parle, parle, je t'en prie. « Rien de spécial, tu sais, au Neuf, il y a pas grand chose. », assène-t-elle et, de cette simple phrase, elle détruit tous mes espoirs. L'idée même qu'elle me considère comme une étrange m'est intolérable. Et pourtant, comment expliquer qu'elle demeure si secrète, à propos d'elle et de sa vie – de laquelle j'ai été bien trop absente, je me répète, encore – alors que je ne cherche qu'à l'inciter à se confier ? Pour la comprendre. Réapprendre à la connaître, aussi. Et retisser nos liens autrefois si étroitement complices. Mais, devant ce désir de retrouver notre fraternité si soudée, je suis confrontée à un mur de non-dits et de gêne. J'ai l'horrible impression – sans doute fausse – qu'elle ne me fait pas confiance et se refuse à me confier quoique ce soit. Bien malgré moi, je porte ma main au collier de maman, et le serre étroitement entre mes doigts. Geste qui passe souvent inaperçu aux yeux d'autrui, sauf auprès de mes proches qui savent lire ce torrent d'appréhension qui me submerge lorsque j'agis ainsi. Elle ouvre la bouche, je suis pendue à ses lèvres, et tous mes espoirs s'accrochent à sa langue qui se délie lentement. « J'aimerais pouvoir t'en dire plus, sincèrement, enfin te dire quelque chose, mais tu dois déjà te douter de ce qu'est une vie normale dans le Neuf. » Si le moindre doute persistait, le voilà à présent éradiqué. Elle ne me fait pas confiance. Je me répète silencieusement : Tu l'as perdue, ta petite sœur. Et jamais cette phrase n'a sonné aussi douloureusement juste à mes oreilles. Une vie normale ? Perdre papa, devoir subvenir elle-même à ses besoins, n'avoir que l'épaule de Rumer sur laquelle se reposer, vivre dans la misère de Panem ; tout ça, c'était une vie normale pour elle ? Non, irrévocablement non, juste qu'elle ne se fiait pas assez à moi pour s'ouvrir et enfin me parler. Je suis sur le point de simplement hocher la tête, continuer cette mauvaise comédie mais, au même instant, j'entrouvre les lèvres, hésite, me ravise mais dit finalement : « Je sais, pour papa. »


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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeDim 16 Déc - 19:34


La conversation était de plus en plus froide, et je savais bien que j'étais la seule coupable. Billie m'en voulait, de ne pas être capable de lui montrer une seule preuve d'amour, ni même de lui parler sans réserve, c'était clair. Comment lui en vouloir ? La jeune femme devait attendre ce moment depuis tellement longtemps, peut-être même n'avait-elle jamais osé l'espérer ? Et moi, je gâchais tout par ma sorte de timidité qui avait toujours été un problème dans mes relations. J'aurais tellement aimé être différente à ce moment-là, avoir changé comme elle l'avait espéré pour lui avouer tout ce qui avait changé au district Neuf. Si seulement cela avait été le cas. Tout aurait été plus aisé, et beaucoup moins froid. Mais rien n'était facile dans le famille Sweenage.

Je la voyais se questionner sur l'identité du « leur » que j'avais mentionné. Cependant, je ne savais même pas qui j'incluais là-dedans. C'était sans doute un moyen de remercier le Treize d'avoir sauvé ma sœur et Aiden, sans l'avouer clairement. Ou bien de la remercier pour ce qu'elle était en train de faire, pour tout ce qu'elle avait fait. Je ne savais pas vraiment où était le vrai. Je la laissais alors croire ce qu'elle voulait, en espérant qu'elle choisisse la meilleure option. « C'est bien. » Je sentais pourtant une pointe de tristesse dans ces paroles. Elle n'était pas convaincue de mes paroles, ni du bonheur que je ressentais à la revoir. Elle savait ma façon d'être, même si j'avais pris quelques années, j'avais toujours retenu mes émotions. Je n'étais pas comme ces personnes qui se jettent dans les bras les uns des autres, ou qui ont toujours des petits mots d'amour comme s'ils avaient à prouver quelque chose chaque seconde. Seulement, il était clair qu'en ce moment j'avais quelque chose à lui prouver, quelque chose que je ne savais exprimer, je n'avais jamais su.

Je lui donnais raison malgré moi en ne répondant pas à sa question. Enfin si, je répondis. Mais pas de la façon dont elle souhaitait. Je restais vague sur ce qui s'était passé ces dernières années, lui mentant sans le vouloir en évitent d'aborder les sujets qui rendraient la conversation encore plus pesante qu'elle ne l'était déjà. Elle ne réagit pas à mes mots, sûrement par une forte déception. A quoi s'attendait-elle ? Nous venions à peine de nous retrouver. J'avais passé des jours éprouvants dernièrement. J'étais fatiguée, et perdue. Et pour rien au monde je n'avais envie de replonger dans d'horribles souvenirs. Nous aurions bien le temps de résumer nos misérables vies dans les jours qui suivaient. Mais apparemment, elle ne voulait pas attendre encore une seconde. Je ne pouvais que la comprendre, après toutes ces années, séparées, nous n'avions pas une minute à perdre, nous en avions perdu déjà trop. « Je sais, pour papa. » Sa phrase me tomba tout de même dessus sans que je ne m'y attende. Que pouvais-je dire ? Comment devais-je réagir ? Je n'en avais aucune idée. Mais pourtant, il fallait que je trouve. Il fallait que je sache quoi dire, quoi faire, sous peine qu'elle m'en veuille pour très longtemps. « Je... » Je restais décontenancée devant elle, les yeux perdus dans les larmes qui montaient petit à petit. Comment savait-elle déjà cela ? C'était sûrement Aiden qui lui avait dit. Il avait même d'ailleurs dû tout lui raconter, tant mieux. Je ne savais si j'aurais eu la force de tout lui apprendre moi-même. « Je suis désolée Billie... » Désolée de ne pas être la sœur dont elle avait rêvé, désolée de ne pas savoir lui dire ce qu'elle savait déjà, désolée que nous ayons perdu notre père.

La vie au district Neuf avait vraiment été minable. Je devais donc lui dire cela ? Soit. Par où donc allais-je commencer ? J'avais déjà ma petite idée, mais je ne pensais pas qu'il soit bon d'en venir à une triste vérité qu'elle supporterait aussi mal. Mais, après tout, elle m'avait bien dévoilé qu'elle connaissait une partie de l'histoire assez brutalement, alors pourquoi n'aurais-je pas le droit de faire de même ? Je lui tendis ma main blessée, puisqu'apparemment elle n'y avait pas fait attention. Les ongles que le pacificateur m'avait arrachés durant sa petite séance de questions n'avaient toujours pas repoussés totalement. On pouvait encore voir la moitié de la chair sur le bout de mes doigts, c'était assez répugnant d'ailleurs. « J'étais avec Aiden quand il s'est fait arrêter. » Deux informations en une, c'était pas génial ça ? Oui, j'étais finalement avec Aiden. Oui, j'ai subi les 'questions' d'un pacificateur. Je me ravisais, de peur de devenir méprisable à cause de mon comportement puéril que je sentais mourir d'envie de se manifester. Après tout, elle avait bien le droit de savoir, je me devais même de lui dire. Elle était ma sœur. « C'est de ma faute si on en est arrivé là... » Si nos vies étaient bousillées, si nos maigres projets avaient été balayés d'un revers de main. J'étais pourtant heureuse, non pas de tous ces malheurs, mais parce qu'ils nous avaient réunis avec Billie. Ce n'était donc peut-être pas en vain que nous avions vécu tout cela ? La vie nous donnait-elle une nouvelle chance de croire au bonheur et à la liberté ? La situation était cependant assez délicate dans la famille Sweenage. Nous avions fini par pourrir nos liens, le temps les avait malmené, et les événements encore plus. Mais je ne doutais pas qu'ils soient irrécupérables, au contraire. « Ça va pas bien aussi entre Rumer et moi, depuis... papa, et... son engagement dans la révolte... » A m'entendre faire une liste superficielle des derniers temps, je me rendis compte que c'était vraiment pas top la vie au Neuf. Les éléments s'étaient accumulés, et encore je n'avais pas tout dit. Voilà. Elle avait finalement eu ce qu'elle voulait entendre. Nous avions eu une vie minable.
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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeSam 22 Déc - 15:02


Le problème, ce n'est pas qu'elle ait changé ou non. Mais que notre relation ait changé. J'ai osé espérer que, à l'instar de ma complicité avec Aiden ou Kathleen, celle que j'entretenais avec mes sœurs n'aurait pas à pâtir de mon absence. Et, si tout est différent avec Avalon, pourquoi ne serait-ce pas aussi le cas avec Rumer ? Dois-je m'attendre à être rejetée de cette fratrie si soudée autrefois ? Ma famille, c'est ce qui m'a fait tenir. Ce qui m'a poussée à avancer, me battre, survivre. Pour les retrouver un jour. Et les serrer de nouveau dans mes bras. Mon père n'est plus là, mort et enterré ; mais je ne saurai tolérer qu'il en soit de même avec mes sœurs. On n'a pas le droit de se comporter ainsi, telles des étrangères que nous ne sommes qu'en partie. Si je ne connais pas la jeune femme en face de moi, la gamine qu'elle a été autrefois, celle-là, je la connais par cœur. Je connaissais cette fillette un peu solitaire, posée qui gardait la plupart des choses pour elle. Mais, avec moi, elle avait toujours été différente : un peu plus souriante, un peu plus joueuse. Pendant nos années d'insouciance, Avalon était mon rayon de soleil, la prunelle de mes yeux. Ne la touchaient que ceux qui désiraient souffrir. On ne s'en prenait pas impunément à ma cadette ; on se retrouvait toujours face à une furie hystérique qui jurait de nous arracher les yeux – et qui l'aurait fait si Kathleen n'était pas constamment là pour me retenir – et, aujourd'hui encore, je sais que je ne répondrai de rien si quelqu'un venait à lui faire du mal. Et je crois bien que c'est la seule chose qui n'a pas changé entre nous : mon instinct protecteur, ma sale manie d'un peu trop la couver. C'est l'unique chose qui est restée intacte, malgré mes Jeux, mon absence, ma mort. Juste ça. Car, à part cette facette de notre relation, tout est différent désormais. Avalon et moi les premières. Du moins, c'est ce que je ressens à cet instant car je n'ai jamais vraiment eu l'impression d'avoir beaucoup changé depuis six ans. Six ans. C'est long, six ans. Deux mille cent quatre-vingt dix jours. Autant de jours où j'ai eu, bien souvent, une pensée pour elle, Rumer, mes amis, et le Neuf en général. Autant de jours où ces mêmes personnes m'enterraient un peu davantage. Et quoi, ai-je réellement espéré qu'elle me ressusciterai aussi vite ? Elle a besoin de temps. Du temps... C'est tout ce qu'on a. Et, après tout ce temps, je peux bien lui en donner un peu plus.

Mais ça, je ne l'ai compris que lorsque j'ai laissé échappé que je savais. Ces choses qu'elle me cachait, en désespoir de cause. Parce que j'ai attendu bien trop longtemps pour la voir, profiter de nos retrouvailles, de notre vie ensemble de nouveau. Enfin. Je me refusais de perdre une seule seconde supplémentaire. Égoïste, je ne pouvais me résoudre à lui laisser le temps de se terrer dans un mutisme qu'elle pensait peut-être protecteur, rassurant. Mais le silence m'étouffe, m'assaille, me transperce les tympans. Pire que les hurlements que je pousse dans la nuit en m'éveillant subitement, que mon nom scandé pour les Hunger Games, que les coups de canon annonçant la mort d'un autre enfant. Je constate que je l'ai prise au dépourvu. Elle amorce un début de phrase, s'arrête aussitôt. « Je suis désolée Billie... » Désolée de quoi ? De ne pas m'assaillir de mauvaises nouvelles sitôt retrouvées ? D'être suffisamment saine d'esprit pour se rappeler que ces six dernières années, j'étais morte ? Morte, bordel. Le Capitole m'avait vraiment tuée. Littéralement. Comme métaphoriquement, au fond. On m'avait arrachée tout ce que je possédais en un claquement de doigt, une seconde. Le destin m'avait pointée du doigt et destinée à une morte suite à de longues journées de peur et de désespoir. Un sacrifice qui n'apporterait ni prospérité ni sérénité sur le pays. Vain. Tout était vain, à Panem. Même nous, le Treize, notre espoir. On perd tout, un jour ou l'autre. C'est le risque à prendre pour vivre : on obtient des choses qu'on est menacés de perdre à chaque instant. Et j'ai tout perdu. Ma famille, mes amis, mon District, ma vie et mon identité. J'ai perdu ma sœur, au même titre qu'Avalon a perdu la sienne. Et rien, rien ne saurait résoudre ce problème. Ce qu'on perd, on ne le récupère jamais vraiment. On le cherche désespérément, on retrouve parfois quelque chose de semblable mais ce n'est jamais exactement la même chose. Billie a été enterrée. Moi, je suis là. Et malgré le temps, c'est toujours dur pour moi de le comprendre. Alors, quant à l'accepter... Je lève doucement ma main, prête à entrelacer mes doigts aux siens mais me ravise aussitôt. Je ne me reconnais pas ; cette hésitation, ces doutes, ce manque de simplicité et de naturel, ce n'est pas moi. Et je m'en veux, tellement, de ne pas être capable de la serrer tout contre moi comme j'en rêve depuis six ans.

Lorsqu'elle me tend sa main, la culpabilité se fait d'autant plus vive. Car, si je n'arrive plus à assurer dans mon rôle de sœur, j'osais espérer être encore douée en tant que guérisseuse aspirante. J'observe la blessure avec horreur. Ce n'est pas tant l'état de la main en lui-même – j'ai déjà vu bien pire – mais l'idée qu'on ait pu faire du mal à ma cadette et que je n'étais pas là pour la sauver. Cette simple pensée fait monter en moi une colère sans nom, exactement le même sentiment que lorsque je m'étais rendu compte ce qu'avait traversé Aiden avant de débarquer au Treize. On l'avait torturé. Et, si quelqu'un avait osé en faire de même avec ma sœur, je crois que la furie en moi risque de s'éveiller de nouveau. « J'étais avec Aiden quand il s'est fait arrêter. » Ses dires ne font que confirmer mes craintes. Je ferme les yeux une seconde, le temps de saisir l'information mais, surtout, de canaliser la colère – non, la rage – qui me consume en cet instant. Je suis affamée de justice, obsédée par une vengeance que je tourne contre un illustre inconnu, Aiden ne m'ayant jamais confié grand chose à propos de sa séance de torture. Je n'ai jamais pu le blâmer mais, aujourd'hui, ce manque d'informations se fait cruellement ressentir. Je me suis toujours jurée de quitter les sous-terrains du Treize, un jour. Et celui-ci risque d'arriver bien plus tôt que prévu à présent. Et quelques têtes pourraient tomber. Du moins, c'est ce que je pense à cet instant, ainsi gouvernée par mes sentiments destructeurs. Car je sais pertinemment que, aussi bien entrainée que je puisse l'être, je ne saurai faire le poids face à un Pacificateur expérimenté. Ou, tout du moins, pas dans un combat de force brute. Mais quoiqu'il advienne, celui qui lui a fait ça paiera. D'une manière ou d'une autre. Je tente désespérément de me concentrer sur les bandages que j'enroule autour de sa main ; je fixe toute mon attention là-dessus, prenant garde à ne pas lui faire mal ou d'arracher un de ses ongles qui commencent tout juste à repousser. C'est une pensée qui ne m'aurait jamais tourmentée avec n'importe quel patient ; mais là, c'est Avalon. Et rien que d'imaginer un Pacificateur lui infliger ce traitement me donne la nausée.

« C'est de ma faute si on en est arrivé là... » Instinctivement, je parviens enfin à porter ma main sur la sienne et la serre doucement. Comme pour la rassurer, à l'image de ce que je faisais lorsque nous étions enfants et qu'elle culpabilisait pour des bêtises – bien inoffensives – que nous avions pu faire ensemble mais où j'endossais l'unique responsabilité. Je trace quelques cercles imaginaires sur le dos de sa main avec mon pouce et souffle un simple : « Chut. » que je veux maternel et rassurant. Un simple chut qui signifie que non, ce n'est pas de sa faute. C'est la faute de Snow, du Capitole, de ces Pacificateurs qui se trainent à ses pieds tels des chiens affamés. C'est la faute de Panem et de la tyrannie dont nous sommes tous victimes. La faute d'un destin injuste qui prend plaisir à s'acharner sur la famille Sweenage. Mais, silencieusement, je jure que c'est la dernière fois qu'on lui fera du mal. « Ça va pas bien aussi entre Rumer et moi, depuis... papa, et... son engagement dans la révolte... » J'arque, bien malgré moi, un sourcil. J'ignorais que Rumer s'était autant investie dans la rébellion que le Treize menait contre le Capitole. Je me rends compte que j'ignore bien des choses. Si Kathleen m'a avouée pour mon père, elle a préféré taire combien la vie au sein de ma famille avait pu se dégrader. Un stupide nom pioché, un stupide accident de chasse ; et voilà qu'on réduisait les liens du sang à néant. Qu'on résumait notre fratrie à de simples noms mis côte à côte, trois têtes blondes qui se ressemblent, qui se sont connues enfants. J'ai envie de hurler. De m'enrôler dans l'armée, aussi. Peut-être. Avalon éveille en moi une colère sans nom. Parce que, en cet instant plus qu'à n'importe quel autre moment, j'ai envie que le Capitole tombe ; que Snow aille manger les pissenlits par la racine. Et tant pis si tous discutent des moyens employés par le Treize. Aujourd'hui, la fin justifie les moyens. Aujourd'hui, je suis égoïste, et je serai prête à mettre ce pays à feu et à sang pour qu'ils rendent au centuple le moindre mal qu'ils ont pu infliger à ma petite sœur. Une question me brûle les lèvres : qui est l'infâme Pacificateur qui l'a ainsi faite souffrir ? Mais, l'heure n'est pas à ressasser les mauvais souvenirs. Je serre un peu plus étroitement sa main dans la mienne – j'espère juste que je ne lui fait pas mal – et, accrochant finalement son regard, je souffle : « Tout est fini, Avalon. Et je te jure qu'il ne t'arrivera plus rien. Nous sommes en sécurité, ici. » Au-delà d'une promesse que je lui fais, c'est surtout à moi-même que je me jure de la tenir. Car, dés à présent, je suis de nouveau une sœur et je ferai tout mon possible pour qu'elle n'ait plus à souffrir de quoique ce soit.


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Avalon R. Sweenage
DISTRICT 9
Avalon R. Sweenage
△ correspondances : 13212
△ points : 2
△ multicomptes : dely, ridley, dahlia
△ à Panem depuis le : 23/04/2011
△ humeur : mélancolique
△ âge du personnage : vingt-deux ans
△ occupation : garde d'enfants


can you save me?
statut: célibataire
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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeJeu 3 Jan - 17:16


Je ne savais que dire, ni que faire, devant cette personne qui était tout pour moi, et qui pourtant m'avait semblé l'espace d'un instant être une pure inconnu. Comment devais-je me comporter avec la jeune femme ? Devais-je lui avouer tout ce qu'elle voulait que je dise, tous les malheurs que nous avions vécus ? Ou devais-je me taire pour nous éviter des retrouvailles encore plus tristes qu'elles ne l'étaient déjà ? Je n'avais pas les réponses à ses questions, du moins je n'avais pas celles qu'elle aurait aimé entendre. Nous n'avions pas eu une vie heureuse depuis son 'départ'. Papa était mort, Rumer était devenue rebelle, et je m'étais retrouvée seule avec mes tourments sans pouvoir m'en détacher. Cela s'était bien sûr accompagné par un manque cruel de moyen pour tenir la maison en bon état, ou même pour nous nourrir correctement chaque jour. J'aurais dû être reconnaissante envers Rumer pour tous les sacrifices qu'elle faisait pour moi, pour m'offrir un peu mieux que nos maigres ressources, mais je ne voyais que les mauvais côtés de ses actions, chose peu étonnante de ma part. Que ressentais-je à présent, après tous ses choix douloureux ? Je n'en avais pas la moindre idée. J'étais trop perdue entre le Neuf, et le Treize, qui, même si je n'y étais que depuis quelques heures, m'avait sûrement offert plus de choses que tous les autres districts auraient pu m'offrir.

Ne sachant quels mots adresser à Billie lorsqu'elle m'annonça tout savoir de sort de notre père, je m'excusai. C'était une habitude chez moi. A chaque fois que j'étais perturbée, embrouillée dans des idées trop importantes pour mon esprit las et fragile, je partais pour de longues minutes d'excuses qui n'étaient pourtant jamais trop présentes à mon goût. J'aurais voulu m'excuser de ne pas avoir su lui avouer ce qu'elle attendait de moi, de ne pas avoir pu lui adresser le moindre geste gentil, mais je sentais que ce n'était pas la meilleure chose à faire si je voulais garder un semblant de conversation avec ma sœur tout juste retrouvée. Je finis par lui apprendre tout ce qu'elle ne pouvait savoir, choses qu'elle ne souhaitait sûrement pas entendre vu l'expression qui s'afficha sur son visage lorsqu'elle découvrit mes doigts encore meurtris de la séance de torture d'Hunter Blackbird-Crowley. Billie avait toujours été protectrice envers moi quand nous étions petites, et je ne peux que comprendre sa rage alors qu'elle découvrait qu'elle a, en quelques sortes, échoué dans sa mission de grande sœur. Bien évidemment, j'aurais aimé la rassurer en lui disant que cela n'était pas de sa faute, mais comment le faire comprendre sans lui dire qu'elle avait été absente tout ce temps ? Je n'en avais aucune idée, ce fut pourquoi je la laissais passer un bandage sur ma main. Je ne voyais pas l'utilité du geste, mais après tout elle était mieux placée que moi pour savoir ce qui était bon ou non, et si cela permettait d'accélérer la repousse des ongles, ou simplement de les cacher aux yeux des autres, le bandage me convenait avec plaisir.

Après ces moments assez froids, je me laissais aller en m'apitoyant sur mon sort. Je prenais la responsabilité de toutes les erreurs qui nous avaient conduits à ces situations aussi graves que stupides. Si seulement je n'avais pas eu ce comportement égoïste la plupart du temps, nous n'en serions jamais arrivés là, avec la moitié des personnes blessées, dans le Treize, même si je regrettais de moins en moins notre venue dans ce district fantôme. A peine avais-je exprimé ce sentiment que Billie nous accorda l'un des premiers contacts tactiles en serrant délicatement ma main pour marquer sa présence à mes côtés. « Chut. » Je laissais couler quelques larmes. Elle avait tort de me dire de me taire, je savais tout ce que j'avais fait, ou ce que je n'avais pas fait, et voilà le résultat. Certes, je n'étais sûrement pas la seule coupable dans l'histoire, mais il fallait bien accepter que je puisse moi aussi faire des erreurs. Nous n'avions plus dix ans, de nos fautes ne résultait pas des petites disputes oubliées la minute suivante, loin de là, malheureusement. Je finis par lui avouer que la relation entre Rumer et moi avait, par la suite, pris une très mauvaise tournure. Nous ne nous comprenions plus, l'ambiance était pire que froide, et cela uniquement lorsque nous n'étions pas en train de nous disputer au sujet de tout et de rien. Alors que nous étions toutes les deux perdues dans nos pensées, entre celles de vengeance et de colère de ma jeune sœur, et les miennes qui n'étaient que culpabilité et regret, Billie serra un peu plus ma main pour me ramener à notre bien triste conversation. « Tout est fini, Avalon. Et je te jure qu'il ne t'arrivera plus rien. Nous sommes en sécurité, ici. » J'espérais bien qu'elle avait raison. Je ne savais pas si j'allais avoir la force de supporter de nouveaux événements de cette ampleur.

Je regardais ma sœur dans les yeux à travers les larmes qui continuaient de couler, et pour la première fois je ne fuis pas son regard. Je voyais en elle toute la sincérité de ses paroles, qu'elle serait à présent à mes côtés à chaque instant, que plus jamais nous n'allions nous quitter. Qu'allais-je donc lui répondre ? Je devais la remercier de tout ce qu'elle était prête à faire pour moi, et ce qu'elle faisait déjà ; j'avais tant de chose à lui dire, de sentiments à exprimer, et pourtant je ne me sentais pas capable de lui adresser le moindre signe de reconnaissance. Il était peut-être temps de redevenir la petite sœur qu'elle avait quittée quelques années auparavant, celle qui était toujours à côté d'elle parce que trop apeurée de ce que pouvaient lui dire ou lui faire les autres personnes. Dans un geste calme mais peu retenu, je me lançai dans ses bras comme la dernière fois que nous nous étions vu, dans l'hôtel de justice du district Neuf quelques minutes avant de la quitter pour plusieurs années. Je fis tout de même attention de ne pas mettre à mal le bandage que la jeune femme avait fait précédemment. « Je suis tellement heureuse de t'avoir retrouvée Billie ! On se quittera plus jamais maintenant. » Rien ne pouvait me rendre plus heureuse après avoir retrouvé Aiden. Billie était bien là, devant moi, et ses promesses ne me laissaient croire qu'à un avenir plus plaisant.


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MessageSujet: Re: we were just kids (billie&avalon)   we were just kids (billie&avalon) Icon_minitimeVen 25 Jan - 14:56


Était-ce réellement possible, qu'un simple bout de papier puisse faire basculer toute une vie ? Toute une famille ? Il avait suffi d'un simple Wilhelmina Sweenage scandé d'une voix aux horribles accents du Capitole pour me guider d'un pas presque jovial au devant de ma mort et faire plonger les miens dans des tourments dont j'ignorais presque tout. Si je n'en avais jamais réellement parlé, la culpabilité pesait toujours sur mes épaules, malgré les rires et les plaisanteries. L'idée que mon père, désespéré par une nouvelle perte, s'était montré trop inattentif pour éviter un stupide accident de chasse. C'était ma faute. C'était ma mort qui lui avait causé tant de peines. C'était ma mort qui était le prélude de tous les malheurs qui sont tombés sur mes sœurs depuis ces six dernières années. Si je regrettais souvent cette vie que j'avais mené, avec une innocence proche de l'insouciance, qu'en était-il de Rumer, ou d'Avalon ? Elles qui devaient continuer de dormir dans notre chambre, celles que nous partagions toutes les trois, faute de moyen pour posséder chacune la nôtre. Moi, je n'ose pas même imaginer si j'avais du m'endormir en face d'un lit vide. Si, partout où je me rendais, un horrible spectre me suivait tandis que l'absence, terrible, se faisait ressentir dans chacun des pores de ma peau. J'étais pleine de remords comme de culpabilité. Je m'en voulais aussi, au fond, d'avoir été si différente d'elles, de ne pas les avoir toujours comprises. Elles avaient toujours été plus calmes, réservées sur leurs sentiments, moins enclines à rire ou à aller à l'encontre des autres, enjoignant n'importe qui à venir plaisanter d'un simple sourire. Je n'avais jamais cherché à comprendre pourquoi elles et pas moi. Et ces différences, si minimes autrefois, me revenaient en pleine figure aujourd'hui. Elles avaient un tempérament qui était presque à l'opposé du mien, elles avaient supporté une absence dont j'étais l'investigatrice ; elles étaient vivantes, je ne l'étais qu'à moitié. Aujourd'hui, tous ces détails, autrefois si insipides, érigeaient des barrières si hautes entre Avalon et moi qu'elles en semblaient presque insurmontables. Je trouvais injuste d'avoir emporté de notre géniteur le souvenir d'un père aimant et infiniment protecteur lorsqu'elles se remémoraient parfois de la loque humaine qu'il avait été. Je m'en voulais d'avoir passé tant de temps avec Kathleen et si peu avec elles, d'en passer aujourd'hui encore davantage qu'avec celles qui partageaient le même sang que moi. Je regrettais, cette relation si fusionnelle avec ma meilleure amie, à un point que j'avais du mal à supporter la gêne qui subsistait entre ma sœur cadette et moi-même.

La vision des ongles arrachés d'Avalon me donne envie de vomir. L'idée même qu'on ait pu la faire souffrir me file la nausée. Pourquoi ? Pourquoi s'en prendre à une simple gamine de dix-huit ans qui n'a rien demandé ? Pourquoi s'attaquer à une jeune fille qui essaie juste de joindre les deux bouts sans n'avoir jamais tenté de porter atteinte au Capitole ? Je lui bande sa main, ses doigts. D'abord pour éviter que les repousses d'ongles ne soient arrachées dans un geste trop brusque mais, aussi, pour lui éviter de se remémorer cette séance de torture chaque fois qu'elle posera de nouveau les yeux sur sa main meurtrie. Pour faire cesser mes nausées aussi, pour alléger la culpabilité à l'idée que je n'étais pas là. Que même ma mort ne suffisait pas à justifier mon absence. Le pire, c'était de me dire que j'étais peut-être en train de rire à gorge déployée avec Kathleen, plaisanter ouvertement avec un collègue, tandis que ma sœur gémissait de douleur sous les assauts cruels d'un chien du Capitole. Je lève les yeux et croise ceux d'Avalon, brillant de cette même lueur coupable, déversant tout un flots d'excuses sur des choses dont elle n'est même pas responsable. Je reconnais là sa manie de toujours se désigner comme coupable de tous les maux du monde. Un instant, je retrouve la sœur que je connais, que j'aime de tout mon cœur et je suis ostensiblement rassurée. Alors, c'est sans doute ce sentiment qui se rapproche de la quiétude à l'idée de la connaître encore, malgré les années, qui me pousse à finalement franchir les derniers centimètres qui nous séparent. Je pose ma main sur la sienne, la serre doucement même si je voudrais y mettre toute la force de ce sentiment paradoxal mêlant le désespoir à l'idée saugrenue de l'avoir définitivement perdue et, au contraire, l'espoir de la retrouver par intermittence, dans ses réactions si proches de celles qu'elle avait lorsque nous étions enfants.

Finalement, ce fut sa relation avec Rumer qui fut mise sur le tapis. Des difficultés qu'elle rencontrait quant à s'entendre. À cause des évènements survenus dans le quotidien des Sweenage depuis ces dernières années. Les mots me brûlent la langue, mais je ne dis rien. Si sa complicité d'avec notre ainée a pâti du fait que Rumer a voulu se ranger auprès des rebelles pour participer activement à la libération de Panem, comment lui parler de mon désir grandissant de m'enrôler à mon tour dans la révolte ? Si je n'en étais pas un membre officiel, je demeurais néanmoins la plus active possible, répondant toujours présente pour soigner les soldats blessés, prête à de nombreuses conciliations pour arranger n'importe lequel d'entre eux, obéissant presque toujours aux directives de Coin. Je préfère taire ce détail pour l'instant. Amener le sujet plus doucement, avec délicatesse plutôt que de lui avouer, de but en blanc, que je comptais imiter notre ainée. Au lieu de quoi, je m'attèle à tenter d'essuyer sa culpabilité, l'aider à aller mieux, à comprendre qu'elle n'est que la victime et non la coupable, lui promettant une sécurité dont moi-même je n'ai jamais été garantie. Mais j'étais sa grande sœur et, en tant que tel, je me devais de me démener pour tenir cette promesse qui avait peut-être des airs solennels mais ô grand jamais de paroles en l'air. Finalement, elle ose ancrer son regard dans le mien ; ce que j'y lis me bouleverse tandis que j'intercepte quelques larmes commencer à briller dans ses prunelles. J'y vois la même envie que celle qui m'anime ; celle de nous retrouver. J'y vois aussi la même hésitation mal placée, le regret de ressentir pareil sentiment alors que je songe que nos retrouvailles auraient du être les plus naturelles du monde. J'esquisse un large sourire bienveillant à son intention quand, tout à coup, elle a un geste qui me prend au dépourvu. Elle s'élance dans mes bras. C'est idiot, mais je me suis toujours souvenue de ma sœur comme d'une gamine peu tactile, assez mal à l'aise lors d'étreintes un peu trop sentimentales tandis que je ne demandais qu'à la prendre dans mes bras lorsqu'une bonne nouvelle venait éclairer notre quotidien ou lorsqu'il s'agissait de surmonter une autre difficulté mise en travers de nos existences. C'est alors le plus naturellement du monde que mes bras viennent encercler sa taille, la serrant davantage contre moi, nichant mon nez dans sa crinière blonde et désordonnée, souriant béatement à l'idée que rien n'était perdu. Tout pouvait redevenir comme avant. Et, bien au-delà, notre relation pouvait encore se raffermir. Inévitablement, toute l'appréhension à l'idée de retrouver Rumer à son tour s'échappe de mon palpitant. Je me sens si légère à présent. « Je suis tellement heureuse de t'avoir retrouvée Billie ! On ne se quittera plus jamais maintenant. » Je me permets encore quelques secondes, pour savourer cette étreinte qui, je le devine, ne se réitèrera pas de sitôt. Mais c'est tellement plaisant. Je me recule doucement, lui souris avant de me ramener une de ses mèches de cheveux derrière son oreille. « Rien ne nous séparera plus jamais, je te le jure, Ava. » Et, comme lorsque nous étions enfants, je lui tends mon auriculaire, attendant qu'elle vienne y enlacer le sien, comme pour ponctuer ce pacte que nous nous apprêtons à faire. On dit souvent qu'on ne choisit pas sa famille. Eh bien, si j'avais eu le choix, je n'aurai rien changé.


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