♨ Before switching off the house of your neighbor, switched off the flames of your own house ◐ Gemma K. Mubstin ◑

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❉ Tall oaks from little acorns grow ❉

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Les évènements de la veille avaient hanté la nuit de Lucas sans répits. La première rencontre avec les autres tributs lui avait laissé l'occasion de mettre un visage sur sa mort prochaine, et il avait passé la nuit à imaginer la façon dont chaque tribut lui ôterai la vie. Il avait donc eu le temps de mourir 23 fois en se réveillant entre chaque avant que l'hôtesse du district 8 vienne lui annoncer l'heure du petit déjeuner. N'ayant pas eu un sommeil particulièrement réparateur, Lucas s'attarda sous sa couette, n'ayant pas la moindre envie de rejoindre à nouveaux les autres tributs pour leur premier entraînement à tuer. Néanmoins, Poppy le tira du lit un peu plus violemment une seconde fois, et le jeune garçon n'eut pas d'autre choix que de rejoindre sa co-tribut Lily pour le petit-déjeuner en traînant toutefois le plus lentement possible. A la vue de la table, le moral de Lucas remonta tout de même quelque peu. Finalement, le moment tant appréhendé arriva, et une fois que les deux jeunes gens eurent revêtu leur tenue officielle de tribut, ils quittèrent leurs appartements en direction du redoutable centre d'entraînement.

Une fois sur place, il reconnut quelques têtes qui avaient fait impression la veille au défilé, et les regards échangés furent plus curieux qu'hostiles - bien qu'il prit soin d'éviter ceux des carrières. - Un minimum soulagé, il décida d'ignorer ses rêves sinistres et de se concentrer sur l'instant présent. Une fois qu'ils furent tous réunis, un responsable leur fit un rapide discours pour leur présenter le programme de ces trois prochains jours, ainsi que le descriptif du règlement : aucune violence tolérée. L'annonce sonna comme un soulagement pour Lucas, bien qu'il continua de garder les carrières à distance raisonnable, histoire d'éviter toute possibilité de conflits. Lorsque chacun fut libre de vaquer aux occupations qu'il voulait, Lucas quitta Lily pour se diriger naturellement vers l'atelier de survie.

Bien qu'il ai déjà quelques compétences en ce domaine, s'il voulait avoir une chance de survivre dans l'arène, ne serait-ce que quelques temps, il aurait besoin de bien plus que quelques notions. De plus, il préférait repousser le moment de l'apprentissage à tuer le plus longtemps possible, bien que ce soit un passage obligé s'il voulait au moins avoir une chance de protéger Lily. Lorsqu'il s'installa à l'atelier, il remarqua par un bref regard qu'il n'était pas seul. Néanmoins, Lucas n'eut pas le temps d'y prêter une grande attention, car dès leur arrivée, le professeur commença immédiatement à donner des conseils. En effet, ils n'avaient pas de temps à perdre. Aussi, le jeune garçon lui prêta toute l'attention dont il était capable.

Ainsi, dès qu'ils furent livrés à eux-même, Lucas s'attela à l'allumage d'un feu, comme suggéré plus tôt par leur professeur. Par chance, son père avait eu l'occasion de lui apprendre quelques tours pour se débrouiller seul dans les plaines du district 8 avant d'être trop occupé par le travail en usine. De ce fait, Lucas réalisa plutôt rapidement la tâche, sélectionnant de l'herbe sèche et deux branches solides qu'il frotta rapidement jusqu'à obtenir de petites braises sur lesquelles il souffla doucement pour faire partir les flammes qui prirent rapidement sur l'herbe séchée. Une fois que le petit feu fut allumé, Lucas se redressa en l'observant d'un air satisfait, puis il laissa son esprit s'abandonner un instant aux souvenirs de son père, le regard fixé sur les flammes dansantes.

Cependant, noyé dans ses pensées, il ne prit pas gare au petit tas de plantes qu'on avait déposé à côté de lui, et lorsque les petites flammes de son feu s'approchèrent d'un peu trop près, les plantes prirent feu en un instant, comme recouvertes d'essence. Surpris, Lucas fit un bond en arrière avant que les flammes subites ne lui lèchent le bras d'un peu trop près. Puis s'emparant d'un seau d'eau à sa portée, il éteignit aussitôt le foyer. Le jeune garçon grimaça en jetant quelques regards discrets autour de lui. S'il avait voulu rester discret, en une fraction de seconde, il avait complètement fait tout rater. Néanmoins, quand il croisa des regards, ce ne fut que des airs moqueurs ou exaspérés qui s'offrirent à lui. Et c'était tant mieux. Il préférait passer pour un boulet que pour un dangereux pyromane. Finalement, alors qu'il reporta à nouveau son attention à l'atelier, il remarqua que l'évènement avait également alerté une jeune fille qui s'attelait aussi à l'obtention du feu à seulement quelques mètres de lui. C'est à ce moment là qu'il comprit avec horreur qu'il venait de brûler la réserve de plante de la jeune fille.

Aussitôt, il se releva pour aller en chercher à nouveau, et se dirigea vers elle en l'abordant dans le but de s'excuser.

- "Euh.. Salut. Désolé pour le brasier. Ça n'était pas volontaire." Déclara t-il d'abord d'un air maladroit. En cet instant précis, il se serait bien assommé trois fois au minimum pour arrêter de se ridiculiser au moins. Finalement, il déposa les nouveaux branchages à côté d'elle en poursuivant : "C'est une bonne idée d'utiliser ces plantes comme combustible. La vitesse d'embrasement est vraiment impressionnante." Avoua t-il alors d'un air presque admiratif, sa curiosité à nouveau titillée. Ainsi, en portant un peu plus attention à la jeune fille qu'auparavant, il remarqua de nombreuses brindilles cassées et quelques cailloux abandonnés autour d'elle. Ces indices laissèrent penser à Lucas que la jeune tribut essayait probablement d'obtenir une étincelle, sans grand succès.

Finalement, dans le but de se racheter, il lui conseilla alors : "Tu devrais utiliser des branches plus solides pour ton feu." Et à peine eut-il prononcé ces mots qu'il se retourna pour attraper deux branches qu'il jugea convenable. "Tiens, essaye avec ça. Si tu fais des gestes assez rapide, le bois chauffera rapidement." Expliqua t-il en souriant. Certes, la jeune fille lui serait probablement hostile une fois dans l'arène, mais peu importe, l'aider à faire du feu ne le tuerai pas non plus. Il servait à réchauffer, faire cuire, mais difficilement à tuer. Quoiqu'il en soit, Lucas était loin d'avoir envie de se prendre la tête à bouder tous les jeunes ici présents sous prétexte qu'ils s'entre-tueraient par la suite. Certains étaient même plus effrayés que lui à cette idée, alors quel intérêt à les considérer d'office comme des tueurs sanguinaires ?

Suite à ces réflexions, Lucas plongea son regard dans celui de son interlocutrice en y prêtant une réelle attention pour la première fois. Il reconnut alors la jeune tribut du district 6, se rappelant sa robe magnifique au mécanisme incroyable qui avait fait pétiller ses yeux lorsqu'un train miniature avait parcouru la tenue. Aussi se rendit-il confusément compte qu'il n'avait pas prit le temps de se présenter. Aussitôt, il y remédia : "Je m'appelle Lucas Mandrake. Du district 8". Dévoila t-il dans un sourire qui n'avait plus rien d'hostile, se présentant aussi naturellement que s'il parlait avec n'importe quelle personne de son propre district, oubliant leur condition de tribut pour un instant.

En ouvrant les yeux ce matin-là, Gemma était déjà pleinement réveillée. Elle tourna la tête vers la gauche pour s'assurer de l'heure qu'il était et resta un moment figée devant l'appareil posé sur sa table de nuit. Alors qu'elle s'attendait à trouver son petit réveil à aiguilles, il y avait face à elle comme une feuille translucide sur laquelle était inscrite en chiffres rouge 6:37. Elle eut besoin de quelques secondes supplémentaires pour que la mémoire lui revienne. Moisson. Train. Capitole. Défilé. Tous ses souvenirs réintégrèrent d'un coup son esprit dans un chaos improbable. Sa tête pivota de nouveau tandis que son regard se fixait sur le plafond immaculé de la chambre. Pour la première fois depuis son tirage au sort, elle se sentait sereine. La peur reviendrait bientôt, mais les restes de son sommeil réparateur et sa félicité de la vieille occupaient toujours son cœur, tenant toute angoisse à distance.

Elle resta longtemps dans cette position, allongée sur le dos, les bras tendus sur le côté. Cela lui rappelait les longues matinées qu'elle passait dans son lit à ne rien faire, au district six. Seulement, là-bas il n'y avait ni mentor irrévérencieux, ni co-tribut abruti. Ce fut cette pensée qui la poussa à quitter le confort de son lit pour prendre son petit déjeuner. Elle n'avait envie de croiser personne qui puisse la rabaisser à son statut précaire. La soirée de la veille l'avait tout bonnement transportée. Elle était une tribut. Elle était la reine des événements actuels. Une reine qui mourrait dans quelques jours, mais qui préférait entretenir l'illusion de son importance.

Gemma se rendit dans son dressing pour enfiler l'une des robes qu'elle avait retenues comme ses préférées. Peu importait son choix au final, elle n'était pas autorisée à se rendre à l'Entrainement ainsi vêtue.
Elle prit son petit déjeuner seule puis revint dans sa chambre. Changer le paysage derrière la vitre devint son jeu préféré une fois qu'elle se fut préparée. Le temps s'écoula lentement jusqu'à ce que Rhea vienne toquer à sa porte. En examinant son visage, Gemma comprit qu'elle avait une nouvelle fois subit les plaisanteries de Richard et... Piper, mais aussi qu'elle ne s'attendait pas à la trouver prête d'aussi bon matin. L'hôtesse l'autorisa à rester encore dans sa chambre pendant quelques temps, puis revint quand il fut l'heure de partir pour le centre d'Entrainement situé au sous-sol du bâtiment.

Elle n'accorda pas un regard à Fenugreek de tout le trajet, et l'oublia même pendant le discours du responsable. Bien qu'elle y accordât une certaine importance, elle ne put empêcher son attention de s'en détacher pour se concentrer sur les personnes présentes. Parmi l'assistance, certains visages lui étaient familiers pour l'avoir marquée durant le Défilé ou la Moisson. La volontaire du quatre, les pauvres mineurs du douze, ainsi que les tributs du cinq dont le char se trouvait juste avant le sien...
Finalement, quand tous se dispersèrent à la fin du speech, elle se trouva bien embêtée. Aucun atelier ne la tentait véritablement. On lui avait conseillée de garder ses atouts pour plus tard, le coin des plantes était donc à éviter. Mais pour le reste... Tout ce qui demandait des capacités physiques comme les ateliers d'agilité, de force, de corps-à-corps, ne lui disait absolument rien. Elle aurait pu dire la même chose du maniement des armes si une curiosité morbide ne s'était pas frayée un chemin jusqu'à son esprit. Jamais elle n'avait eu à se battre pour survivre, et chaque fois qu'elle s'était trouvée dans une situation potentiellement dangereuse, son premier réflexe avait été la fuite. Pourtant... Elle ne pouvait s'empêche de se questionner sur les impressions qu'on ressentait en tenant une arme entre ses doigts, tout en sachant s'en servir. Néanmoins, la peur de ce même sentiment chez d'autres qu'elle la poussa à se diriger vers un atelier inoffensif. Au hasard, elle se décida pour la survie. Ce savoir s'avèrerait nécessaire, car d'après Richard, elle ne pouvait apprendre à se servir correctement d'une arme en deux jours, s'isoler en priant était sa seule chance de salut. Cela ne correspondait pas vraiment à ses plans de mort héroïque mais bon, il avait raison au fond.

En s'installant à l'atelier, elle jeta un simple regard inquisiteur aux autres tributs présents avant de se lancer dans la confection de son feu. Ce qui ne s'avéra pas aussi simple qu'elle l'aurait cru. Divers combustibles s'étalaient devant elle, et parmi eux, elle reconnut une plante qu'elle connaissait bien. C'était celle que sa mère utilisait quand ils s'enfonçaient en famille dans les plaines et qu'ils restaient diner à la belle étoile. Dans ses souvenirs, il lui suffisait de frotter un peu de bois à proximité pour obtenir un joli feu. Dans ses souvenirs. Car la réalité était tout autre.
Gemma tentait tant bien que mal de suivre les instructions de leur instructeur mais rien n'y faisait, aucune étincelle ne venait chatouiller les feuillages au centre de son foyer. Plus les minutes passaient, moins elle se sentait en confiance. Si elle n'arrivait même pas à lancer un feu, comment ferait-elle pour survivre dans l'arène ? Et les autres autour d'elle ne pouvaient qu'avoir remarqué ses difficultés, elle apparaissait comme une cible facile, à éliminer dès le départ.
Ses mains se mirent à trembler, et plusieurs larmes roulèrent sur ses joues. Mourir. Mourir. Mourir. Elle allait mourir.

Comme pour confirmer ses craintes, brusquement, un feu se déclara. Gemma n'eut pas le temps de se réjouir de ce miracle tant la situation semblait anormale. Le feu tenait davantage du brasier et alors que les flammes se rapprochaient dangereusement d'elle, le foyer que la jeune tribut avait construit restait intact. C'était sa réserve qui brûlait. Mais comment...
Elle comprit lorsqu'on lança un seau d'eau sur le feu. La personne répéta son geste, et une fois la fumée dissipée, Gemma reconnut le garçon qui s'attelait précédemment devant elle. "Euh.. Salut. Désolé pour le brasier. Ça n'était pas volontaire." C'était lui, lui qui venait de manquer réduire en cendre tout l'atelier. Gemma était trop sonnée pour se positionner par rapport à ça. « Ce... ce n'est pas grave. » répondit-elle d'une petite voix en clignant des paupières. Son premier réflexe était la politesse, peu importait qu'il ait failli la tuer. Il disait que c'était involontaire, mais rien ne prouvait son innocence.
Elle en avait marre, la fumée lui piquait les yeux, ses pleurs continuaient. Pourquoi était-elle aussi bonne-à-rien ? "C'est une bonne idée d'utiliser ces plantes comme combustible. La vitesse d'embrasement est vraiment impressionnante." Elle releva les yeux vers le garçon. Il ne semblait pas avoir remarqué son état et s'intéressait davantage au feu qu'à son visage. Finalement, en y repensant, pour avoir déclenché une telle catastrophe, il ne devait pas s'y connaître tant que ça en feu. Peut-être avait-elle toujours sa chance.

Elle passa une main sur ses joues pour effacer les traces de larmes tandis qu'un petit sourire se formait sur son visage. « Oui, c'est une variété qu'on trouve beaucoup par chez moi, elle a des propriétés intéressantes. » Elle aurait voulu en dire plus mais le doute l'empêchait d'aller plus loin. Qui sait si les informations qu'elle donnait aujourd'hui ne lui seraient pas fatales dans l'arène ? Même si ce garçon semblait gentil, c'était peut-être une façade. De plus, il restait un adversaire. Et moins il en savait, plus les chances de Gemma augmentaient. Ce constat était cruel. Mais les Jeux fonctionnaient ainsi. "Tu devrais utiliser des branches plus solides pour ton feu." Ah. Lui ne semblait pas être arrivé aux mêmes conclusions. Il lui tendit deux branches, Gemma les saisit par réflexe. En les observant, elle ne vit pas de nettes différences entre elles et celles qu'elle avait utilisées précédemment, mais les posa malgré tout avec les restes de son foyer. Il n'avait aucune raison de l'embobiner, pas maintenant en tout cas. "Tiens, essaye avec ça. Si tu fais des gestes assez rapide, le bois chauffera rapidement." S'il le disait.
Elle se pencha et essaya de faire comme il lui conseillait. Après quelques secondes à frotter ces bouts de bois l'un contre l'autre – elle se sentait particulièrement stupide – elle les sentit se réchauffer entre ses doigts. C'était peut-être son esprit qui lui jouait des tours, mais sa motivation s'en retrouva décuplée. Bientôt, une étincelle apparut et le tas de feuilles prit feu. Gemma sourit largement. Elle l'avait fait. Elle avait allumé un feu. Ce n'est qu'à cet instant qu'elle remarqua le regard que lui adressait le tribut. Depuis combien de temps la fixait-il ? Elle n'aimait absolument pas se sentir observée. Cependant, le soulagement gomma rapidement son inquiétude tandis qu'elle observait les flammes en train de dévorer les branchages. "Je m'appelle Lucas Mandrake. Du district 8" Ah oui, tiens, se présenter, ce n'était pas stupide. Le garçon s'appelait donc Lucas. Une information toujours bonne à prendre. « Gemma, Gemma Mubstin. Je viens du six. » Le sourire de Lucas la perturbait. Elle n'était pas habituée à ce genre d'attention. Dans son district, beaucoup la connaissaient, que ce soit par ses parents, ou par l'école. Elle ne sortait pas beaucoup, mais sa réputation avait tendance à la précéder. Elle avait oublié ce que ça faisait de rencontrer des gens qui la prenaient pas pour une folle. C'était comme si on lui offrait un nouveau départ. La possibilité de devenir quelqu'un d'autre. « Tu ne trouves pas que le Capitole est... » Elle laissa sa phrase en suspend quelques secondes, le temps de trouver un adjectif approprié. « ...extraordinaire ? » Oui, ces Jeux offraient la possibilité de devenir quelqu'un d'autre. Mais seuls les faibles en profiteraient. Ceux qui regrettaient leurs actions passées et désiraient tout effacer. Gemma n'en faisait pas partie. Elle n'avait pas honte de ce qu'elle était.

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Gemma. Elle venait donc du six, le district des transports. Lucas avait toujours été impressionné par les énormes trains ou les célèbres hovercrafts qu'ils construisaient là bas. S'il n'y avaient pas eu ces maudites barrières tout autour des frontières du district, Lucas y aurait certainement fait un tour. Aussi lui accorda t-il un sourire amical après qu'elle lui eu dévoilé son nom. De plus près, il remarqua les yeux rougis et les traces de larmes qu'elle avait tenté d'essuyer à la hâte sur les joues de la jeune fille. Face à ces marques de panique et de désespoir, Lucas ne pouvait pas s'empêcher de prendre un air qui se voulait rassurant. Après tout, ils étaient tous dans le même panier.

Mais alors qu'il était presque sur le point de lui accorder quelques paroles rassurantes en prenant une attitude protectrice, Gemma le stoppa net dans son élan, l'interrogeant sur son opinion du Capitole. Seulement, en le qualifiant d'extraordinaire, les mots raisonnèrent plusieurs fois dans la tête de Lucas avant qu'il ne les accepte. Extraordinairement cruel, barbare, intolérable, persécuteur, sadique, sanguinaire, atroce, sauvage, débile, demeuré, idiot, imbécile, sot et pour finir, complètement taré. Ça oui. Cependant, alors qu'il dressait une liste sans fin de tous les adjectifs négatifs possibles et imaginables pour qualifier correctement le Capitole, Gemma attendait une réponse. Et après avoir activement fait travailler ses neurones pour comprendre comment un tribut qui n'était pas un carrière privilégié pouvait avoir de tels dires, il ne trouvait que deux solutions : Elle était complètement folle et aveugle cette pauvre fille, ou bien c'était une ruse.

Lucas préféra garder sa seconde hypothèse, certainement plus rassurante et plus cohérente. Aussi, après un petit instant de réflexion, il lui sourit à nouveau d'un air confiant en répondant : "Oh si ! C'est une vraie chance de pouvoir y être en personne !" Après tout, elle a raison, ce n'est pas un endroit pour insulter le Capitole à tout va. La salle était remplie d'oreilles, et peut-être même truffée de micros... Qui sait. "Je suis quand même un peu déçu que cela doive se terminer par l'arène. J'y serai bien allé en tant que styliste et non que tribut." Il prit une mine triste et un peu déçue. C'était parfait, utiliser la spécialité de son district pour faire penser à une quelconque admiration de la mode - alors qu'il n'y connaissait rien, et qu'il n'avait aucune envie d'y consacrer la moindre seconde. -

Et sans se douter qu'il s'engageait dans un quiproquo terrible, il continua : "Ma co-tribut est une vraie connaisseuse ! Je ne pouvais pas rêver meilleure partenaire de voyage jusqu'au Capitole. Nous étions vraiment excités de rencontrer nos stylistes et de découvrir les tenues du défilé. D'ailleurs, la tienne était vraiment impressionnante !" Ajouta t-il en prenant un air ravi et admiratif - enfin une chose qu'il pensait vraiment. Enfin, il porta alors toute son attention sur son interlocutrice dans le but de sympathiser un peu, tout en s'activant désormais pour construire un abri alors que l'entraîneur passait près d'eux : "Et toi, ton voyage s'est bien passé ?" Demanda t-il alors qu'il commençait à organiser la base du faux arbuste qui lui servirait d'abri/cachette.

D'abord sceptique devant l'enthousiasme de Lucas, Gemma décida qu'il n'était pas bon de se monter la tête pour si peu. Elle était trop paranoïaque. Mais il fallait la comprendre, les gens sensés étaient rares, alors tomber sur l'une de ces personnes dignes d'intérêt durant la préparation pour les Hunger Games était assez étonnant. Aussi son sourire se fit-il de plus en plus sincère et rayonnant au fil des paroles du dénommé Lucas. "Oh si ! C'est une vraie chance de pouvoir y être en personne !" N'est-ce pas ? C'était tellement inattendu, Gemma en oublia où elle se trouvait et ce qu'elle était censée y apprendre pour se concentrer sur ses paroles. "Je suis quand même un peu déçu que cela doive se terminer par l'arène. J'y serai bien allé en tant que styliste et non que tribut." Elle ne put retenir un petit rire. Elle le comprenait très bien. L'évènement pour lequel ils se trouvaient tous réunis au Capitole avait beau être une atrocité, elle ne pouvait s'empêcher d'être heureuse de se trouver là. « Comme je te comprends... Je me répète la même chose depuis notre arrivée ici... » Néanmoins, un petit détail clochait dans ce qu'il venait de dire. Enfin, clocher était un bien grand mot. Pour se rendre au Capitole, Gemma avait seulement d'autres ambitions que celles qu'il venait de citer. « Mais... Si j'avais pu venir ici dans d'autres, hum... circonstances, ça n'aurait pas été en tant que styliste. » Elle fit exprès de se taire à ce moment précis pour laisser monter le suspense, puis compléta. « C'aurait été en tant que Juge. Enfin, peut-être pas un grade aussi important directement, mais au district six on possède encore quelques centres de recherche où sont confectionnés certains pièges ou accessoires des Hunger Games. C'est... c'était mon rêve d'y entrer et d'y travailler. Et peut-être qu'avec le temps j'aurais réussi à faire mes preuves et que... » Elle laissa vagabonder son esprit quelques instants, le temps de replonger dans ses vieux rêves. Oui, ses vieux rêves, la réalité d'avant-Moisson lui semblait si lointaine que tous les espoirs qu'elle avait nourris jusque là ne pouvaient être qualifiés autrement. Au bout d'une dizaine de seconde elle revint à elle, et termina sa phrase avec un sourire d'excuse. « ...Enfin voilà. Mais maintenant nous sommes ici, donc bon, ce n'est plus d'actualité. » Un soupir s'échappa de sa bouche tandis qu'elle se dirigeait auprès d'un autre instructeur, spécialisé dans la construction d'un abri. Lucas la suivit en continuant de parler. "Ma co-tribut est une vraie connaisseuse ! Je ne pouvais pas rêver meilleure partenaire de voyage jusqu'au Capitole. Nous étions vraiment excités de rencontrer nos stylistes et de découvrir les tenues du défilé. D'ailleurs, la tienne était vraiment impressionnante !" Elle rougit sous le compliment, bien qu'il ne la concerne pas directement. « Tu en as de la chance... » murmura-t-elle, en songeant à sa co-tribut si douée. Dire qu'elle avait écopé du pire abruti que Panem ait jamais porté. Le sort était parfois injuste. Lucas dut sentir son malaise puisqu'il enchaina : "Et toi, ton voyage s'est bien passé ?" Le temps de réfléchir à une réponse convenable, Gemma se concentra sur sa cachette. L'exercice ne paraissait pas bien difficile, et pourtant, parvenir à arranger ces branches garnies de manière à obtenir un feuillage épais tout en s'assurant une bonne protection se révélait quelque peu ardu. « Euh... Il y a pire. » Il y a mieux surtout. L'épisode de la vodka resterait à jamais gravé dans sa mémoire comme la pire humiliation de sa vie. Mais le raconter risquait de mettre en relief la relation légèrement bancale qu'elle entretenait avec son mentor, bien qu'au final les choses se soient arrangées. Il lui fallait dévier la conversation vers autre chose, un sujet qui ne risquait pas de faire ressortir ses faiblesses. Oui, Lucas avait beau être quelqu'un de sympathique, il n'en restait pas moins un adversaire. « J'ai pu faire la connaissance de mon mentor... Un homme unique en son genre. » Elle ne précisa pas dans quel sens, mais elle accompagna sa phrase d'un petit sourire qui pouvait être pris pour un sourire d'admiration. Le mensonge n'était pas vraiment sa tasse de thé, ce genre de demi-vérité s'avérait parfaite pour des situations comme celle-là. « Je n'ai pas tellement vu mon co-tribut par contre... Ce n'est pas la grande entente entre nous. » Cette fois, elle grimaça. En écoutant les directives de l'instructeur, elle faisaient quelques progrès et sa cachette devenait de plus en plus crédible. Elle ouvrit la bouche pour continuer sur sa lancée, mais se stoppa au dernier moment, hésitante. Pouvait-elle critiquer Fenugreek ? Il avait beau être un abruti, les remarques qu'elle ferait pourrait peut-être lui porter préjudice à elle, après tout ils étaient du même district... Enfin, puisqu'ils s'entrainaient séparément et ne s'affichaient jamais ensemble, elle devait pouvoir se le permettre. « Si tu savais comme j'aimerais avoir un co-tribut intéressant. Fenugreek est un crétin fini. Il a beau apprécier le Capitole, j'ai l'impression que sa coupe de cheveux occupe une place plus importance dans son cœur... » Puis elle ajouta d'une voix naturelle : « Au moins, il ne posera pas trop de problème dans l'arène. Je lui souhaite une mort rapide. »

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Après avoir échangés leur pseudo-rêves de carrière au Capitole, Gemma mit fin à leurs fabulations en rappelant de la façon la plus accablante qui soit que plus aucun rêve d'avenir ne leur était permis de toute façon. C'était terriblement vrai, et outre les mensonges qu'ils venaient d'échanger pour lisser le poil du Capitole, une fois encore Lucas se rendit compte qu'il vivait certainement les derniers instants de sa vie. D'un air mélancolique, ils se dirigèrent tout deux vers l'étape suivante de leur atelier : construire un abri.

Ainsi, tout en continuant leur discussion, Lucas aborda un autre sujet : le voyage. Gemma lui avoua qu'elle avait pu faire connaissance avec son mentor, visiblement surprenant. Elle eu un petit sourire en le mentionnant, et le jeune tribut se demanda un instant ce qu'il pouvait bien signifier exactement. Cependant, il abandonna bien vite sa déduction, après tout, chacun était libre d'agir comme il le voulait. De toute évidence, Gemma n'en dirait pas plus puisqu'elle changea de sujet pour se plaindre de son co-tribut qui n'était apparemment pas un cadeau. Il eut une moue désolé pour elle lorsqu'elle lui expliqua qu'il était visiblement obnubilé par ses cheveux et eut un petit sourire en coin lorsqu'elle souhaita une mort rapide à cet imbécile d'une voix neutre. D'après ses dires, cela faisait un tribut de moins à craindre, c'était toujours ça de pris, même s'il n'était pas sûr de pouvoir se fier à Gemma dès leur premier contact.

« Je vois.. » Répondit-il seulement d'un air désolé. Il ne savait vraiment pas quoi ajouter pour réconforter la pauvre jeune fille. Il avait beau regretter amèrement d'être accompagné par Lily, il se rendit compte qu'il avait tout de même de la chance de bien s'entendre avec elle. « Au moins tu n'as pas à te soucier des autres. » Il avait fait la remarque d'une voix neutre, et pourtant, il aurait voulu hurler son désespoir. Dans un sens, Gemma était largement avantagée par sa solitude, car pour Lucas, protéger Lily c'était se conduire droit dans le mur. Il soupira, et pourtant, rien ne pourrait le faire changer d'avis, pas même la certitude de gagner les jeux. Il était certain de ne pas pouvoir vivre avec la mort de son amie sur la conscience. En songeant rapidement à ce qu'il laissait derrière lui, il ne prit pas gare à la lame du couteau qu'il manipulait pour tailler une branche et se blessa légèrement un doigt qu'il porta à sa bouche par réflexe. L'instructeur pesta contre sa maladresse et lui apporta de quoi se soigner en lui intimant l'ordre de faire plus attention, ce à quoi Lucas hocha par un vague hochement de tête. Il en avait vu d'autre et il n'y avait franchement pas de quoi faire un drame pour une petite coupure. L'instructeur devait certainement avoir mal dormi pour être d'aussi mauvais poil.. Mais une fois ce bref épisode clos, Lucas décida de poursuivre sa conversation avec Gemma. Après tout, elle semblait tout à fait intelligente - pas comme ces brutus de carrière qui n'acceptaient que les "forts" - et était visiblement ouverte à la conversation, ce qui n'était pas de refus pour Lucas, ravi de pouvoir discuter avec quelqu'un d'autre que Lily, bien que sa compagnie soit loin d'être désagréable. Seulement, ce premier contact avec un autre tribut que son district apaisait Lucas en lui rappelant que non, ils n'étaient pas tous des tueurs mais plutôt des jeunes perdus comme lui, arrachés à leur petite vie plus ou moins tranquille dans leur district et plongés dans le même enfer que lui.

Ainsi, c'est avec cette dernière pensée que Lucas se rendit compte dans un sourire qu'en quelques mots, il avait déjà quasiment adopté Gemma. En cas de problème, il lui porterait certainement secours sans grande hésitation. Après tout, elle n'avait pas grand chose de différant avec Lily, et elle était seule. Lucas ne pouvait décemment pas laisser une jeune fille sympathique seule dans la détresse. Cependant, il ne savait pas vraiment comment lui proposer son aide sans être trop direct pour éviter de paraître embobineur, la dernière chose qu'il était au monde. « De toute façon, je ne suis pas sûr que la stratégie des alliés soit la meilleure. » Qu'est ce qu'il était en train de raconter ? Il se discréditait complètement lui-même.. ! « Mais je suppose qu'être au moins en duo est bien plus réconfortant dans l'ambiance de l'arène... » Il avait prononcé ces paroles d'une voix neutre, presque indécise, en haussant les épaules. De toute façon, il n'était pas confronté à ce genre de problème, il avait toute confiance en Lily, rien ne l'obligeait à chercher d'avantages d'alliés qui pourraient tenter de les égorger l'un après l'autre dans la nuit. « Mais bon, comment faire confiance à quelqu'un qu'on ne connaît que depuis quelques jours en sachant qu'à la fin, il faudra s'entre-tuer de toute façon ? » Bien évidemment, à cette question, il n'y avait qu'une réponse : La prise de risque, et la vigilance. On ne pouvait simplement pas se faire confiance, c'était décemment trop dangereux. Finalement, Lucas avait de la chance d'être avec Lily, il se serait certainement fait avoir par un autre tribut dans le cas contraire. Mais cette pensée l'attristait quand au sort de Gemma. Bien qu'ils n'avaient échangés que quelques mots, il aurait été triste de la voir mourir, tuée par trahison d'un tribut lemda alors qu'il aurait pu rester avec elle. Mais était-elle digne de sa confiance ? Ne cachait-elle pas son jeu en semblant seule et abandonnée de tous ? Lucas trancha finalement, prêt à prendre le risque. « Si tu as besoin d'aide, n'hésite pas à me demander. » Lui proposa t-il alors dans un sourire réconfortant. Certes, il n'avait pas été explicite, mais il espérait avoir été assez clair pour lui faire comprendre qu'elle n'avait rien à craindre de lui.

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