tell us your story.

Tu t’allonges dans ton lit recouvert d’une couverture de soie. Du bout des doigts, tu caresses l’étoffe précieuse distraitement. Encore une journée finie pour toi, encore un nouveau lendemain qui t’attend, encore le même train-train quotidien fait de sortie entre ‘amis/ennemis’, de potins racontés par des filles/femmes peinturlurées que c’en est grotesque, encore un lendemain dont tu pourrais citer dans les moindres détails son exacte composition. Tu soupires et fermes les yeux avant de te recouvrir d’un nuage de soie.

Tu te réveilles après un cauchemar. Toujours le même: celui où, dans l’arène, des tributs morts te torturent lentement sous les acclamations de la foule composée de toutes tes connaissances, amicales ou non. En sueur, tu te précipites sous la douche pour te débarrasser d’un sang imaginaire. Te frottant jusqu’au sang, tu en sors apaisé et changes de vêtements, enfilant une tenue de sport.

La maison de tes parents est vide, calme, trop silencieuse. Comme d’habitude, ils sont absents. Tous les deux mènent une vie séparée, ton père découchant souvent et passant ses soirées Dieu seul sait où, et ta mère se consolant sans doute au Casino ou chez ta tante. Tu ne sais même plus quand tu les as vu pour la dernière fois. Etait-ce un an ou un mois? En tout cas, longtemps. Tu la traverses tel un fantôme, récupérant ton casque traînant dans le salon et le branchant à ton smartphone. La musique de jazz en sortant te vide la tête et tu te diriges d’un pas sûr vers le parc bordant la demeure.

Dans les bois, tu cours. Tu cours pour quoi au juste? Pour échapper à ce cauchemar? Pour ne plus penser à cette situation familiale si banale parmi les tiens? Ou tout simplement pour avoir la sensation d’être vivant lorsque, vidé de toute ton énergie, tu t’affales à même le sol, te maculant de terre et d’herbe mouillée? A ce moment là, tu as la merveilleuse sensation de ne faire plus qu’un avec la Nature. Les oiseaux chantant au dessus de ta tête brune te semblent comme les carillons du Paradis. Tu souris, dans ces moments là, d’un vrai sourire et non pas de ce sourire de pub que tu adresses à tout les autres.

Allongé une fois de plus dans les bois, ton dos au contact de la terre, tu regardes le ciel. Cette immense étendue bleue de la même couleur que tes yeux te fait prendre conscience de ce qu’est la vraie liberté. Celle que jamais tu n’auras, toujours contrôlé par le Capitol. Des larmes perlent à tes yeux mais tu ne les essuies pas. Le sol les absorbe. C’est bien, penses-tu, ce qui est à la Nature retourne à la Nature.

Un nuage passe, puis un autre. Au fond de toi, le temps n’a plus d’emprise. Tu sais que tu as mille et un rendez-vous plus ou moins importants. Mais tu restes là. Et tu penses. A quoi? A un moyen de retrouver cette liberté perdue. Devenir rebelle? Tu ne sais que trop bien que jamais on ne t’acceptera, habitant du Capitol que tu es. Et puis tu connais la redoutable efficacité des Pacificateurs. Non, ce n’est pas pour toi. Tu cherches un moyen de pouvoir t’exprimer, de te sentir vivant tout en n’enfreignant pas les lois. De rester ici, au Capitol, ville que tu adores et que tu sais ne pas pouvoir t’en passer.

Un nuage passe. La forme te rappelles une robe. Puis une silhouette de femme. Tu plisses les yeux et ton imaginations dote ce mannequin de chaussures, d’un sac, d’une paire de lunettes de soleil aux grands verres…Et puis, l’Illumination.

Tu seras styliste.