« Non, il ne s’inquiète pas pour ça. Il sait que je suis prudente. » Etre prudent était une chose nécessaire pour la pérennité de nos vies, mais être prudent n’était pas suffisant. Il fallait être prudent, mais surtout être chanceux. Ne pas tomber sur les mauvaises personnes au mauvais endroit, ne pas trop se faire remarquer, se fondre dans l’ombre et espérer ainsi pouvoir exister. « Moi ça ne m’empêche pas de… » Tournant mon visage vers un point invisible, mes mots moururent dans ma gorge. Non, ça ne m’empêchait pas de m’inquiéter pour elle, encore plus depuis que je l’avais vu entrer dans une rage sourde chez les Pacificateurs. La prudence n’avait rien avoir avec tout ça, alors j’avais bien le droit de m’inquiéter, bien que ce droit me semblait terriblement peu légitime vu que je n’étais certainement rien pour la jeune femme. Ou alors, juste pas grand-chose. Velvet s’approcha de moi, son visage penché vers le haut, alors que le mien était penché vers le bas. Mes yeux se perdant dans les siens, je restais tranquillement silencieux, en quelque sorte apaisé. « Tu veux rentrer ? » Passant une main sur mon visage, je sentais les cernes qui s’étaient formées sous mes yeux à cause de mes dernières nuits troubles. Je n’avais pas envie de rentrer et la laisser, mais mon corps me rappelait malheureusement à l’ordre. « Je pense qu’il est vraiment tard et que c’est mieux de rentrer avant de se faire pincer, toi comme moi. » Lui offrant un léger sourire, je me reculais pour ramasser mon sac et le poser sur mon épaule. Il fallait dire que je pouvais encore trouver une excuse, mais me faire attraper par les Pacificateurs ne me donnait nullement envie. Je rajoutais alors : « Je te ramènes chez toi. » Et je n’allais pas la laisser refuser, même si ça me faisait faire un léger détour. Je préférais rentrer un peu plus tard quitte à même me faire pincer par mes parents, plutôt que de me demander si elle est bien sagement chez elle à dormir.

« Moi ça ne m’empêche pas de… » commence-t-il, mais il ne termina pas sa phrase pourtant, au vu du contexte de la conversation, je pouvais aisément deviner ce qu'il voulait me dire. Je ne dis pourtant rien, alors que je mourrais d'envie de lui dire que moi aussi je m’inquiétais souvent pour lui. Surtout quand il devait aller soigner des gens malades et surtout, contagieux. J'avais toujours peur qu'il finisse par attraper une maladie mais je crois qu'il prend des précautions, je suppose qu'il prend des herbes ou qu'il porte un masque devant la bouche et le nez lorsque la maladie est trop importante et risque de le contaminer. Je ne sais pas, j'espère juste que jamais ça n'arrivera, qu'il ne tombera pas aussi malade que les pauvre gens qu'il tente de sauver. Finalement je lui avais demandé si il voulait partir et le jeune homme passa une homme sur son visage, il semblait fort fatigué, comme moi mais je me demandais si il ne l'étais pas plus a utiliser toute cette énergie pour sauver les gens du district. « Je pense qu’il est vraiment tard et que c’est mieux de rentrer avant de se faire pincer, toi comme moi. » je hochai la tête silencieusement alors qu'il attrapa son sac pour le remettre sur son épaule et je m'approchai a nouveau de lui mais plus aussi près qu'auparavant. « Je te ramènes chez toi. » encore une fois je hochai la tête et ouvrit même la bouche pour répondre. « Tu es sur ? Tu as l'air fatigué... » Ceci dit je mourrais d'envie qu'il me ramène chez moi et c'est pourquoi je n'insistais pas trop, l'avoir encore un peu plus en ma compagnie me faisait du bien.

J’aurais aimé rester plus longuement avec Velvet, mais je n’étais clairement pas en état. J’avais besoin de sommeil, de me reposer et de cesser de m’agiter comme un forcené à gauche et à droite sur des cas que je ne pourrais certainement pas sauver. Néanmoins, c’était plus fort que moi, je ne cessais jamais de m’esquinter. A défaut de pouvoir sauver tout le monde, j’essayais de rendre les fins plus belles, moins douloureuses, même si au final ça faisait toujours aussi mal. Après avoir récupéré mon sac, je lui annonçais que je la raccompagnais. Je ne lui posais pas de question, c’était une affirmation et je n’allais pas la laisser refuser, surtout en pensant à l’heure qu’il était. « Tu es sur ? Tu as l'air fatigué... » Un sourire sincère étira mes lèvres alors qu’à sa réponse, absolument pas contraire, je savais que j’avais gagné. Elle n’avait pas refusée que je la raccompagne, elle l’acceptait même d’une certaine façon en répondant ainsi. Je posais alors, simplement, un bras sur son épaule avant de faire un pas pour qu’on se mette en marche. Laissant ma main retomber le long de mon flanc, je la regardais du coin de l’œil alors que je répliquais : « Je ne vais pas être épuisé après t’avoir ramenée chez toi. » L’obscurité environnante était oppressante. Pourtant, le district à la pale clarté du jour n’était pas vraiment plus beau que plongé dans cette obscurité. Avançant, je sentais les ustensiles et les précieuses boites contenant divers herbes médicinales ou baumes s’agiter dans mon sac sans pour autant faire de bruit. L’endroit était silencieux, même peut-être trop. « Puis, je n’aurais certainement pas su fermer un œil de la nuit si je n’étais pas certain que tu étais bien arrivée chez toi. » La belle, sans le vouloir, m’arrachait souvent aux bras de Morphée, tant je m’inquiétais pour elle. Mais ça, je ne pouvais pas lui avouer.