Brave bête, il baisse la tête, mordille sa lippe et louche sur ses chaussures abimées. Obéissance. Pourquoi ? Il ne sait pas très bien. Surement le malaise qui l'étreint, chaque fois que la situation ne tourne pas à son avantage. Centre de toutes les attentions, il vacillerait presque, l'affreux. Ses guibolles aux muscles noueux le portent. Les cuisses se durcissent et les biceps suivent. L‘envie de frapper et de mordre. Avant, arrière. Avant, arrière. Il se balance, veut gommer les sordides idées, qu'elles glissent hors de son affriolante cervelle. Une moue boudeuse ou songeuse investit ses traits. Ce qu'il est vraiment ? Beaucoup l'ignorent. Spécimen intéressant, dit-t-on. Mais on doute encore de ses capacités intellectuelles. C'est que l'homme au sourire rêveur, est une sacrée saloperie, un bel enfoiré. Dégénéré en puissance, l’esprit est complètement disloqué, démantibulé, arraché. Il sort les crocs si vite qu'on peine à esquiver la morsure. Il éclate de rire, et grogne aussitôt.
Les discussions, globalement, l'ennuient. Et sa capacité de communication, semble côtoyer de près l'inexistence la plus totale. Silencieux et sauvage. Rien n'apparaît véritablement sur son minois, ses intentions sont farouchement maquillées. Et ses soupirs témoignent de son arrogance frôlant la témérité. Le pantin glacé répond, simplement. Sven Elijah Mogg, Monsieur. Trente quatre ans. Pacificateur. Je viens du district huit. L’énergumène pourrait ajouter un " et je t'emmerde." ou "va crever. ou bien encore "ta tête serait jolie accrochée au dessus d'une cheminée." à la fin de son court monologue, l’effet serait exactement le même. Un haussement d’épaules, gracieux, félin, inhumain. Démoli, Sven a une vision erronée de la réalité qui l’entoure. En proie à des crises d’angoisses ; dès qu’il a la sensation de perdre le contrôle d'une situation. Être mis à nu, le terrifie. Colère, est sa muse.
C’est un tueur redoutable. Un homme et un enfant. Recruté à l'âge de dix-huit ans, afin d’intégrer les troupes des pacificateurs. Il s'est rapidement fait repérer pour son manque de compassion et de pitié. Elément perturbateur dès son plus jeune âge, les troubles se sont manifestés lorsque son frère cadet a été tiré au sort lors de la moisson et qu'il était déjà trop vieux pour prendre sa place. La cinquante sixième édition des hunger games lui a volé Neen. Le gosse est mort égorgé, et lui, n'a pas que regarder. Il ne restait plus que trois concurrents et il a fallu qu'il échoue, et qu'il l'abandonne... Rancoeur et peine. Les troubles n’ont fait que s’accroître admirablement ensuite. Bombe à retardement. Plusieurs rixes et à de multiples reprises des actes violents ; durant ses heures de travail à l'usine. Clébart enragé, grondant dans les venelles à l‘odeur nauséabonde. Sven a fini par disparaître de la circulation. Sans laisser de traces. Le monstre enfermé dans ce corps hurle et crache sa souffrance, mais personne ne comprend, ni ne veut entendre. C'est un pacificateur du nom de Julian Spencer, - devenu plus tard son mentor - qui l'a trouvé deux semaines plus tard suivant sa disparition. Dans un district tel que celui ci, tout le monde s'en fout des ceux qui disparaissent. Pourtant, l'homme pris en charge l'adolescent, durant l'une de ses missions. A moitié conscient, Sven s'est débattu, a frappé, et a cédé. Commotion cérébrale. L'homme a été séduit par la brutalité et la fougue de cet animal blessé. Il a exposé les faits, et on a tranché. La décision fut prise rapidement, sur un commun accord. Incapable d'exister en société, Sven fera cependant un excellent petit pion. C'est là le meilleur avenir qu'on puisse lui réserver, aux vues de ses antécédents. Lui procurant une stabilité, il va servir les intérêts du capitole.
Dévoré par la douleur et le remord de ne pas s’être laissé mourir. Cinglé. Cœur souillé par le sang de ses victimes passées. L’homme est sur le fil, en équilibre au dessus d'une vierge aliénation, et d'une démence crasse. Suffisamment malin pour contourner les règles et la bienséance. Il feint la crétinerie ou s'habille de naïveté, en scrutant de ses deux immenses prunelles azurées le vis-à-vis soit amusé ou outré. C’est de rage que la bête se nourrit. Les murmures dans son crâne, le faisant régulièrement dérailler. Brouhaha invraisemblable, il en braillerait. Psychoses et flash-backs, la mémoire ne s‘efface pas. Elle le hante au plus il tente de s‘en détacher.
Observant d’un œil brillant la prestigieuse autorité des grands de ce monde, seuls ayant acquis son fragile respect. Faux, il les hait et souhaite voir leur univers brûler. Sven attend sagement l’heure où les choses pourront enfin changer. L’admiration à ses limites que le chien d’attaque est prêt à transcender. Car un sbire au cœur noir n’est capable que d’infidélité. Cabot sans maître. Faiblarde conscience, morale désagrégée. Sven est obsessionnel, et fatalement déséquilibré. Perdu au milieu de ses pulsions de mort et de destruction. Inabordable créature. Trop absorbée par elle et ses passes temps difficiles.
Une claque. Un retour. Non, non. L'envie démange, mais ce serait là simple démence. Car le petit taré vous choppera un doigt et le recrachera dans son verre d'alcool. Un sourire aux lèvres et seulement de la haine au fond de ses pupilles dilatées.