Skann était certainement le garçon le plus stupide que je connaissais. Même si le niveau d'intelligence d'autres n'étaient pas beaucoup plus haut à l'école, le jeune homme les surpassait tous. Il se faisait un plaisir d'embêter tous ceux qui ne faisaient pas partie de ses amis, avec des blagues vraiment débiles. Bien évidemment j'avais toujours été une cible facile, étant seule dans mon coin et de nature peu sympathique, chose que Skann et son amie Silka remarquèrent dès le début de notre scolarité. J'avais subi de nombreuses farces puériles et stupides, mais elles n'avaient jamais été humiliantes ou insultantes. C'est alors que je l'entendis salir la mémoire de Billie, me disant des choses qu'ils n'auraient jamais dû prononcer. Je l'avais dégagé de la maison, mais il était revenu à la charge, encore une fois, et ne comprit toujours pas que je ne voulais pas le voir chez moi. Je voulais qu'il dégage d'ici, et qu'il me laisse tranquille pour toutes les années que nous avions encore à vivre. Mais c'était sans compter sur sa débilité et son entêtement à vouloir se faire entendre. « mais, mais.. Avalon attend !» Lui faisant comprendre qu'il n'était pas le bienvenu, loin de là, je lui claquai la porte de ma chambre au nez en pensant m'être débarrassé de lui. Mais toujours pas.

Je m'étais allongée sur mon lit, faisant en sorte de ne pas déclencher de nouvelles douleurs à mon poignet encore blessé. J'espérais pouvoir me reposer, trouver un sommeil qui me manquait particulièrement depuis quelques jours, mais je fus couper de mon semblant de tranquillité par le jeune homme qui ouvrit rapidement la porte pour revenir me hanter encore une fois. « J’ai pas envie de partir. Je m’excuse et toi tu m’ignores ? C’est comme ça que ça marche chez toi ? Ouais, bhen, en tout cas, t’es pas sympa. Je fais des efforts et tout, et toi tu t’en fous. Si tu veux je peux continuer à te martyriser hein ! ça me gêne pas du tout ! » Toujours aussi débile, il ne comprenait vraiment pas que je ne voulais pas le voir, et encore moins l'excuser pour ce qu'il racontait. Et puis, j'étais pas sympa ? Oui j'étais bornée et insupportable la plupart du temps, il le savait très bien, alors pourquoi croire que je pourrais changer pour lui ? Il y avait bien d'autres personnes avant lui qui méritaient que je fasse des efforts. « Et pourquoi je ferai des efforts avec toi ? Tu te fous de moi à chaque fois qu'on est au même endroit, tu manques de respect à ... » Aiden ? Rumer ? Billie ? La liste était longue, et je ne savais pas vraiment à qui j'avais pensé en disant ma phrase. Heureusement que je l'avais pas dit des mots maladroits sur Aiden, il était clair que Skann aurait pris un malin plaisir de se moquer de moi parce que j'étais tombée amoureuse de lui. « Et surtout, fais-toi plaisir hein... Je voudrais pas te priver d'une victime de tes débilités. » Il pouvait bien continuer à m'embêter, je ne le croyais pas capable ne serait-ce qu'une seconde d'arrêter de me lancer des piques. Non c'était certainement pas possible. Skann passait son temps à cela, alors il ne pouvait pas changer d'occupation principal. « Et puis rend moi mes fraises, déjà. Si t’en veux pas, je vais pas les gaspiller quand même. » Je m'en fichais totalement des fraises qu'il avait apporté. Je me doutais bien que c'était une façon de m'amadouer ou je ne savais quoi avec un objectif en tête. Qu'est-ce qui lui était passé par l'esprit lorsqu'il avait décidé de passer à la maison, pour me raconter tout et n'importe quoi ? Certainement pas un élan de générosité. « Tu les as laissées dans la cuisine tes fraises, va les chercher si elles te manquent tant que ça. » A vrai dire, je n'avais aucune idée d'où se trouvaient les fraises, je savais seulement que je ne les avais pas. Par déduction, je me dis qu'elle devait être là-bas si Skann ne les avait plus. Mais j'en venais presque à douter de la véracité de ses paroles.

L'ambiance était froide et assez tendue. Aucun d'entre nous n'avait envie de lâcher, nous gardions nos mauvais caractères et tout allait pour le mieux. Par chance Skann avait en face de lui quelqu'un de doué pour embêter tout le monde, sauf qu'avec moi c'était peut-être plus mesquin, et sûrement moins sur le ton de la rigolade. Je me demandai alors quelle était la raison de sa présence. Skann faisait toujours les choses par intérêt, pour se moquer des autres ou pour ses paris débiles. Je n'eus alors aucun scrupule à lui poser la question directement. « Au fait, c'était quoi ton pari avec ta Silka cette fois ? M'emmerder toute une journée ? Venir m'énerver ? Me faire avouer des trucs débiles pour vous foutre encore plus de moi ? » En voyant qu'il n'était pas prêt de cesser ses provocations, je ne pensais pas me priver de lui dire clairement que je voyais clair en lui, même si je n'avais pas compris toute la complexité de sa personne. En effet, je ne comprenais toujours pas pourquoi il avait décidé de rejoindre les rebelles. Peut-être était-ce aussi l'un de ses paris avec l'autre rousse.

(désolée c'est pourri )

Pour changer des mes habitudes, j'avais fini par crier des insultes pour le faire partir de la maison. Je ne le supportais plus. Ses blagues, sa tête, sa voix... Lui tout entier me donnait presque envie de commettre un meurtre pour ne plus jamais le voir. A chaque fois que je lui disais de partir, il revenait sans cesse à l'attaque pour devenir de plus en plus lourd, sans que je puisse agir. J'aurais bien voulu le menacer en évoquant Rumer, ou même Aiden. Cependant, ma relation avec la première n'était pas au beau fixe, et pour ce dernier, il était hors de question que je donne une nouvelle raison à Skann pour m'embêter encore plus. « T’as raison Ava… » Une lueur d'espoir s'installa dans mon esprit l'instant d'une petite seconde, jusqu'à ce que le jeune homme s'assit sur le lit. S'il avait compris – chose qui était en fait impossible – il n'avait qu'à retourner voir Silka. Je lui lançai un regard noir, un peu plus qu'auparavant, et reprenai de plus belle dans mes critiques teintées d'énèrvement plus que voyant.

« Attention beauté, tu pourrais me vexer… » Quelle horreur de l'entendre me parler comme ça... J'avais toujours détesté sa façon de s'exprimer, sans cesse extraverti et amical avec les gens. Comment pouvait-on agir comme ça ? Certes, nous nous connaissions depuis des années, mais je n'avais jamais été gentille avec lui, loin de là. En voyant Skann sortir de la chambre, j'espérai vivement qu'il ne reviendrait pas même si ce n'étaient que de faux espoirs. En effet, il revint aussi rapidement qu'il était parti, ferma la porte et s'installa contre la porte. « T’as pas faim ? T’es sûre ? » Je n'aimais pas son regard, ni même son attitude. Mais ce n'était pas nouveau à vrai dire. « Non, je n'ai pas faim. Tu n'as peut-être pas compris tout à l'heure quand je te l'ai dit … ? » Il n'allait quand même pas me répéter trente-six fois la même question ?! A croire qu'il les avait empoisonnées ou quelque chose dans le genre pour vouloir absolument me les donner avec autant de gentillesse et d'insistance. Je ne comprenais pas son comportement, ormis le fait qu'il souhaitait m'embêter jusqu'à ce que je lui crie dessus. Mais cela je l'avais déjà fait, alors pourquoi rester ? J'espérais bien avoir ma réponse rapidement sinon j'allais vraiment devenir excécrable.

« Tu pourrais un peu montrer ton côté sympa pour une fois. C’est juste des fraises Avalon ! Peu importe ce qu’on fait Silka et moi, j’essaye d’être gentil là ! Sérieux c’est quand la dernière fois que t’en a mangé ? T’es … t’es trop rigide !! Mange ses fichus fraises, elles sont super bonnes ! » Il avait peut-être raison, sûrement même. Cependant, je le trouvais étrange. Pourquoi devenir sympa d'un coup avec moi ? C'était tellement... pas crédible. Et puis, je n'en avais rien à faire des fruits qu'il me présentait, je voulais juste qu'il s'en aille. Il n'avait toujours pas compris certainement. « Pourquoi je serais sympa ? J'en ai rien à faire des fraises, garde-les ! Il faut que je le répète combien de fois ? » Je n'avais pas un ton d'énèrvement ultime, mais plutôt d'exaspération. Skann s'entêtait, toujours et encore. Qu'il me laisse tranquille ! Sérieusement, c'était tellement agaçant de le voir rester là à me narguer avec ces fruits ! Oui je mourrais d'envie de les prendre et les garder pour moi, mais je n'allais certainement pas accepter ce présent venant de lui ! Plutôt mourir que de lui faire croire que j'accordais le moindre crédit à sa présence. « Tu sais bien que je suis 'frigide', depuis quand ça te dérange ? » J'avais un ton mesquin, mais si les cris et insultes ne lui suffisaient pas peut-être que le mépris me serait d'une grande aide. Je ramassai son paquet de fraises, le jetai par terre et écrasai le tout. « Hmmm, elles étaient délicieuses. Dommage que tu n'aies pas pu manger les dernières. » Je lui lançai un regard insolent et m'empressai de lui rendre le paquet taché de rouge. Il allait apprécier ce petit cadeau, c'était clair. Dommage que j'ai eu à gâcher d'aussi beaux fruits qui ne méritaient pas tant de haine de ma part. Malheureusement, je n'avais pas vu d'autres solutions. « Maintenant qu'il n'y a plus rien, c'est l'heure de partir je crois ? » Avec un peu de chance, j'allais me débarasser de lui définitivement. Sa venue semblait se baser sur ce petit sac, mais puisqu'il n'y en avait plus, ou du moins il n'y avait plus aucune raison de m'obliger à prendre son contenu. Je le voyais déjà prendre la porte pour me laisser dans un calme magnifique, sans sa présence insupportable. Il pouvait bien faire un effort non ?