zoe aerith bendingstone

❝ WHO AM I LIVING FOR? ❞

about games and relative.

➺ TA MORT TU LA VOIS COMMENT ?

Comme la fin de ma vie. Comment voulez-vous que je la voie ? Mourir n'est qu'une conclusion, ce n'est pas non plus exceptionnel. En fait, c'est même la chose la plus banale du monde. Alors quoi ? Je ne pense pas que ma mort sera incroyable. Au contraire je pense que ma mort sera discrète, de la discrétion offerte aux pauvres et aux orphelins. Je partirai dans un souffle calme, sans que personne n'y prête vraiment attention. Comme l'immense majorité d'entre nous – vous croyez quoi ?

➺ POUR QUOI POURRAIS-TU MOURIR ?

Je pourrais mourir pour le bonheur. Juste le bonheur ; c'est un concept, une idée, c'est plus que quelqu'un. En un sens c'est la seule chose qui me reste, ou du moins ça les résume toutes : mon troupeau, mes quelques amis, l'amour, si je le rencontre un jour... tout ça, c'est pour le bonheur. Et des fois, je suis tellement heureuse que je pourrais en mourir. Des fois je me dis « ce serait une belle fin ». Je crois que c'est un peu rare les gens comme moi, alors j'évite d'en parler. Les autres ont tendance à croire que je mourrais pour rien...

➺ QUEL PETIT PLUS T'AIDE DANS LA VIE (OU JEUX) ?

Être bergère. Ça apporte des tas de choses, ce job, cet héritage, cette vocation. S'occuper d'un troupeau, déjà, nécessite un important sens des responsabilités. Une excellente capacité d'observation, aussi, pour surveiller les bêtes, remarquer dès que l'une d'elle est malade, les compter automatiquement, d'un seul coup d’œil. Il m'a fallu apprendre à les soigner, aussi, prendre soin d'elles... quelques rudiments de médecine, donc : comment compresser une plaie, penser, faire une attelle... Les protéger aussi, des autres bêtes, des sauvages, de ceux qui rodent. Autour des pâturages, en pleine nature, j'ai dû apprendre à poser des pièges. C'est probablement ce que je fais de mieux. C'est très inventif les pièges, très drôles même. Je dois avouer que ça expie une certaine partie de moi, une qui aime le pouvoir d'ôter la vie. Autre chose essentielle qu'apprend l'élevage : l'endurance. Passer des jours, des nuits, sans vraiment dormir, sans vraiment manger, sans vraiment vivre. L'épuisement, je connais mieux que ma poche. Alors je finis par le traverser comme une seconde peau, sans m'y attarder.

➺ AS-TU DES PROCHES QUI ONT PARTICIPÉ AUX JEUX ?

Quelqu'un de ma classe, quand j'avais douze ans. Ce n'était pas vraiment un proche, plutôt une connaissance, mais c'est la seule personne qui me vient à l'esprit. Une chic fille, qui voulait bien me parler quand j'étais toute seule. Elle a été moissonnée, puis est partie, puis est morte. Je ne me rappelle même plus comment. Je me rappelle juste de l'ambiance, sur les bancs de la classe, le lendemain. Ce froid entre nous, à cause de cette place vide, qui l'était dès lors définitivement. Je n'ai pas fini l'année : deux mois plus tard, j'abandonnais l'école pour prêter main forte à mes parents. Je crois que cette mort leur avait fait réalisé que je pouvais subir le même sort, qu'il fallait donc m'utiliser au plus tôt.

➺ COIN A ANNONCÉ LORS DES DERNIERS JEUX PAR MESSAGE PIRATE QUE LE TREIZE EXISTAIT TOUJOURS. TU ESSAIES DE TE JOINDRE À EUX OU AU CONTRAIRE, TU FAIS TOUT POUR STOPPER CETTE RÉVOLTE ?

Très honnêtement, je m'en contre-fous. Du moment qu'on me laisse tranquille avec mes moutons, tout me convient. Au fond, leur rébellion est légitime, mais je n'ai pas l'impression qu'elle me concerne vraiment... Moi je suis heureuse comme ça. Ça me révolte pas d'avoir faim. Je suis pas résignée non, je prends ce qui vient, c'est tout. Je pense que secouer les bras comme peuvent le faire les habitants du treize, c'est pas pour moi.

JE VIENS D'UN MILIEU défavorisé mais dans la moyenne du district, AINSI, POUR MOI, LA NOURRITURE est rare. DU COUP, MON NOM A neuf chances d'être tiré aux prochains jeux . J'EXERCE LE MÉTIER DE bergère ET POUR TOUT VOUS DIRE, J'adore. JE SUIS DANS LE 10ÈME DISTRICT. AYANT seize ans JE peux PARTICIPER AUX HUNGER GAMES MAIS je ne me soucie pas vraiment de la prochaine moisson. ENFIN, J'ATTESTE QU'EN CRÉANT CE PERSONNAGE, J'ACCEPTE DE LE LIVRER À LA BARBARIE DES JEUX S'IL EST TIRÉ AU SORT.

tell us your story.

Elle compte les moutons mais ne s'endort pas. C'est sa vie maintenant. Papa et maman sont morts hier. Avant-hier peut-être. Ou plus tôt. Elle ne compte pas les jours – elle compte les moutons. Ils sont morts. En même temps, c'est curieux. Une lame leur est tombée sur la tête à l'abattoir. Elle, elle était sur la colline – elle comptait les moutons, seule, pour la première fois. Ils sont morts. Elle est seule. Mais elle ne pleure pas. Elle ne se rappelle même pas avoir pleuré. Elle a seize ans, elle ne pleure pas, elle est grande. Elle est grande. Et elle est heureuse. C'est pour ça qu'elle ne pleure pas : elle est heureuse. Ses pensées tournent en boucle. Comme ça elles ne s'égarent pas, elles ne vont pas dans des recoins sombres et lugubres, elles ne flirtent avec des souvenirs ni brûlants ni glacials. La température mémorielle doit rester ambiante, tiède, pas chaude, pas froide. En fait, l'idéal serait que ses souvenirs n'aient plus de température, qu'elle ne les sente plus. Qu'elle oublie. Elle se sent oublier, bribe par bribe. Papa et maman. Elle les aime mais leurs visages s'effacent. Elle pourrait avoir de la peine. Mais la peine s'oublie comme tout le reste.
Elle arrache les pétales un par un. C'est une marguerite. C'est blanc et doux. Sasha est couché dans la yourte. Sasha est son apprenti maintenant, sa seule compagnie humaine. Zoe se lève, lance les bras en l'air, ouvre son visage au ciel crépusculaire comme si elle voulait baigner sa peau dans la lueur des astres. Un sourire profond s'ancre sur ses lèvres. Elle est tellement heureuse, il faut tellement peu de choses au final ; papa et maman sont morts elle est seule elle a faim – la faim grouille dans son ventre – demain elle emmène trois moutons à l'abattoir trois moutons qu'elle aime papa et maman sont morts maintenant tout est fini elle est seule. Elle est heureuse. Tout le reste, c'est des fourmis pour son bonheur, elle n'a qu'à les laisser ramper et regarder le ciel. Le ciel.
« Tu fais quoi ? » C'est Sasha, sorti de la yourte, qui est venu la tirer de sa contemplation aveugle et sourde. Elle baisse les bras, se retourne vivement vers l'intrus. Deux semaines qu'ils sont ensemble. On est quoi, en août ? Les jeux commencent dans deux jours. « Tu vas regarder les jeux, toi ? » Une question pour une question. Elle s'assied sur une pierre, Sasha s'assied sur l'herbe. « On est bien obligés de toute manière. Mais tu sais que j'aime pas trop ça... » Zoe hausse les épaules. Elle croit bien qu'elle s'en fout. Elle sait que Sasha a perdu sa sœur jumelle, quatre ans auparavant. Cela doit être dur, mais Zoe, elle, elle peut pas imaginer. Elle veut pas. La douleur c'est pire que mourir de faim, bien pire. Sasha ne dit plus rien. Les larmes commencent à remplir ses yeux sombres dans la nuit, tombée maintenant. Zoe, elle sait pas quoi répondre à tout ça ; elle est pas très douée contre la peine des autres. Les secondes se succèdent. Elle se penche, enfin, vers son apprenti, et presse contre elle ce pauvre être dont la tristesse l'effraie. Peut-être qu'elle est triste, elle aussi. Peut-être que les souvenirs ne peuvent pas être tièdes. Peut-être qu'elle se ment. « Je t'aime bien, Sasha. » Peut-être que c'est vrai. Papa et maman sont morts, et depuis Sasha est là. Papa et maman sont morts – il y a deux ans déjà.