Je pouvais accepter de nombreuses choses, j’avais une capacité d’adaptation exemplaire mais ça, ça c’était bien trop de demander. J’avais déjà tant changé pour le capitole, pour mes parents, mes parents biologiques qui m’avaient permis de survivre aux jeux et de devenir adulte. C’était grâce à eux que j’avais pu gouter à toutes ces joies, ces peines aussi certes mais ils m’avaient sauvés… Et sans eux je n’aurais jamais retrouvé mon frère… Jérémy, mon cher Jérémy… Devais-je plutôt pas l’appeler Phoenix désormais? Sa volonté était telle que je ne pouvais faire autrement… Il avait tellement changé depuis que je l’avais quitté dans l’arène… Depuis qu’il pensait m’avoir tué, je n’aurais jamais pensé le voir en uniforme du capitole sauf en cas de mission secrète au service des rebelles… Je pensais qu’il serait le même, que mon meurtre dans l’arène ne ferrait que renforcer son opinion concernant le capitole. Il aurait du le détester… Au lieu de ça il s’est mis à son service… Mais c’était le seul moyen pour que je le retrouve désormais… Alors il n’avait, en réalité, pas fait le mauvais choix… J’étais plus qu’heureuse de l’avoir retrouvé, il avait trouvé l’amour, il était… Heureux, du moins c’est ce que je pensais. Nous ne parlions que très peu souvent, il avait beaucoup à faire, entre son métier de pacificateur et la préparation de son mariage. Oh son mariage quelle joie! Il allait faire sa vie avec une femme qu’il aimait, Aileen, une jeune femme, qui malgré le fait qu’elle soit tout sauf innocente comme la neige de sa peau d’ivoire, était une femme qui l’aimait et elle était gentille dans son style… Je ne voulais qu’une chose, qu’il soit heureux, et si se marier avec cette fille était un chemin qui l’y mènerait, alors j’en serais toute aussi heureuse!

J’avais donc changé pour le capitole, pour tout cela, pour le bonheur. Mais que mes parents me demandent d’épouser ce garçon? C’était une chose que je refusais totalement… Il était tout ce qui me répugnait… Nous n’avions aucun point commun si ce n’est le fait que nous avions tous deux participé et survécus aux jeux. Lui avec les honneurs, moi dans l’ombre mais l’effet était le même. Nous ne pouvions pas nous entendre. Nous étions bien trop différents et rien ni personne ne pourrait arriver à nous rapprocher… Sauf peut être le fait d’empêcher ce mariage. Mais c’était surement impossible… Nos parents sont bien trop têtus pour que nous puissions espérer nous échapper de ce destin funèbre… Hulk… Il était bien trop arrogant pour que je puisse l’apprécier… Mais au moins le fait de le connaitre m’avait permis de faire une rencontre beaucoup plus agréable… Hadès… Oui ce prénom au lourd passé qui pourtant lui allait si bien. Il ressemblait beaucoup à Hulk en réalité mais je le supportais plus facilement… Même si au début ce n’était pas la joie nous avons appris à nous connaitre… Je l’appréciais vraiment ce jeune… Ses divagations au sujet des frasques sans intérêt du capitole me permettaient d’oublier ce pourquoi je n’avais pas le moral… Il était gentil… Aussi arrogant que son meilleur ami, mais gentil…

Assise à la terrasse de la demeure que je partageais avec mes parents je sirotai un verre de cocktail, profitant du chauffage installé non loin. Car le temps n’était pas au beau fixe, l’hiver s’était installé et je regrettai déjà les après midi passées à me balader dans les montagnes sans penser à la nuit qui tomberai bien vite en cette saison… Désormais cela me serait impossible, la nuit tombait bien trop vite et il faisait bien trop froid en dehors de la ville… Cette saison allait décidemment passer bien trop doucement pour moi… J’allais avoir besoin de tout mon moral pour pouvoir être de retour tout feu tout flammes au printemps. Heureusement que la tournée du vainqueur, allait mettre un peu de soleil dans tout ce petit monde. Alexiane avait gagné les jeux, j’étais tellement heureuse… Elle le méritait… Tout ce que je voulais c’était pouvoir la féliciter mais mes parents ne me le permettraient surement pas. Ils n’étaient certes pas au courant du lien que je partageais avec la jeune femme mais elle était de mon district d’origine et tout ce qui touchait de près ou de loin au district onze m’était interdit et ce depuis mon retour des jeux… Je l’avais très mal vécu pour tout avouer et ce n’était que depuis mes retrouvailles avec Phoenix que j’avais recommencé à vivre à peu près normalement. J’avais été tellement détruite par les jeux que le temps de me reconstruire j’avais laissé passé de nombreuses années de mon adolescence. J’étais devenue adulte sans vivre réellement ma vie de pré adulte… J’avais sauté une étape et pourtant je n’étais pas si désespérée que ça! J’étais assez forte mentalement désormais pour pouvoir vivre ma vie! Il faudrait que je me réveille un peu et que je vive comme une personne normale. Connaitre l’amour et tout le reste…

Je soupirai, il fallait vraiment que j’arrête de plonger dans mes pensées ainsi, cela ne m’avait jamais apporté quelque chose de bon de toute façon… Me levant prestement j’entrai dans la maison pour me préparer à quitter cet endroit. Il fallait que je prenne l’air, pas forcement dehors mais quelque part où je ne connaitrai pas chaque coin et recoin par cœur. Prenant un manteau de fourrure qui se trouvait dans l’entrée je sortis rapidement. Il devait être à peu près treize heures et j’avais tellement tout sauf faim que je me dirigeais en sens inverse de tous les restaurants qui se trouvaient en ville. Je ne savais vraiment pas où j’allais, je m’en foutais un peu. J’espérais juste pouvoir profiter quelques heures d’une ballade réconfortante. J’avais parfois besoin de quitter mon quotidien et instinctivement mes pas me portèrent vers la salle de réception du président Snow. Il ne devait pas y avoir beaucoup de monde à cette heure çi… Surtout s’il n’y avait pas de réception prévue dans la soirée… Entrant tranquillement, je passai une main dans mes cheveux et tournai sur moi-même pour observer la salle. Elle était magnifique, pour changer, même sans toutes les décorations extravagantes des soirées. Je me demandais où allait se passer le mariage de mon frère, cette salle serait toute indiquée mais il serait compliqué de faire venir des habitants de district ici… M’asseyant sur un fauteuil non loin de l’entrée je fermai doucement les yeux pour pouvoir m’imaginer la scène… Je ne faisais même pas attention au faire que quelqu’un était entré dans la salle…

C'était une journée comme les autres. Ni vraiment passionnante, ni réellement ennuyante. Un rayon matinal était venu m’extirper des bras de Morphée. Nous avions beau être en Décembre, le soleil qui se faufilait à travers les persiennes de ma chambre était doux et chaud. J’ouvris une fenêtre, par laquelle une brise glaciale se répandit dans la pièce. Je frissonnai « Mon gars, si tu sors aujourd’hui tu devras bien te couvrir. ». Du bruit parvînt de la cuisine. Hulk s’attelait en la réalisation du petit déjeuner. Cela ne faisait pas longtemps que nous étions colocataires, mais tout se passait à merveille. Nous nous étions rencontrés sur son lieu de travail. Mannequin, et ancien gagnant des Hunger Games, son arrogance et sa suffisance n’avaient d’égal que la mienne. Nous ne pouvions que nous rapprocher l’un de l’autre, et nous fîmes très vite inséparables. Il n’était pas comme les autres que je considérais comme des amis. Il était plus que ça, il était le seul en qui j’avais réellement confiance. Nous nous échangeâmes quelques vannes puis il me proposa de l’accompagner jusqu’à son lieu de tournage. Aujourd’hui il devait tourner une pub retransmise pendant une coupure pub d’une apparition de la nouvelle gagnante des jeux. Cette saison des Hunger Games fut tout aussi agréable à suivre que les précédentes. C’était toujours un réel divertissement et je me languissais déjà des prochains à venir !

Une fois prêt nous partîmes en direction du studio. L’air était frais, malgré les rayons de chaleurs qui venaient nous étreindre. Je ne savais pas vraiment ce que j’allais faire de ma journée, mais l’accompagner, et de ce fait prendre l’air, ne pouvait que me faire du bien. Sur la route nous croisâmes quelques connaissances avec qui nous échangèrent des courtoisies. Hulk était connue de tous, on n’oubliait pas le visage d’un gagnant, et encore moins un gagnant comme lui. De plus, devenue l’un des mannequins les plus prisés du Capitole, tout le monde connaissait le jeune homme. Bien que je ne fusse pas moi-même célèbre, je connaissais également tout un tas de beaux gens au Capitole. Il était important pour moi d’avoir dans ma poche beaucoup de relations. Pour la plupart j’usais de mes charmes et de manipulations afin de les ranger de mon côté. Si certains auraient des remords à agir ainsi, en ce qui me concerne, j’étais plutôt fier de mon talent de persuasion et de manipulation. N’allez pas croire que j’agissais de la sorte avec toutes les personnes que je rencontrais dans ma vie. Non, il y avait de ces rares individus qui méritaient de l’estime et avec qui je me trouvais moi-même. Hulk faisait partie de ces gens-là. Nous arrivâmes devant son lieu de travail, et le laissât là. Je n’avais toujours pas décidait de comment j’occuperais mon temps de l’après-midi. Peut-être allais-je me promener le long des allées marchandes, perdus dans mes pensées et mes divagations. Ou bien irais-je retrouver des fréquentations en bavardant autour d’un ou deux verres. Je n’étais pas fervent d’alcool, mais il était de bon ton dans la grande société de boire du champagne, ou encore du vin. Parfois même du whisky plus vieux que moi. Parler en tenant un verre d’hydromel digne de ceux des dieux, donnait une prestance supplémentaire. Une bouteille de certains grands vins valait la plupart du temps plus que le salaire annuel d’une famille dans certain district.

Je levai les yeux. Mes pensées m’avaient conduit sans que je m’en rende compte aux portes de la salle de réception du président Snow. Je m’y rendais parfois lorsque j’avais besoin de réfléchir. En journée elle était bien souvent déserte et permettait de se retrouver au calme dans un endroit apaisant. Apaisant oui, mais surtout magnifique. La beauté et la richesse qui se dégageait de ce lieux n’avait pas d’égal. Si la salle de réception du président offrait un tel spectacle de luxe, je n’osais imaginer ce que devait être son bureau ou ses appartements personnels.

Je regardai l’heure à ma montre : treize heure passée. N’ayant pas faim du au petit déjeuner copieux préparé par hulk, je décidais d’y entrer. Y passer un peu de temps me permettrai de me ressourcer un peu et de me concentrer sur mes projets. Comme prévu, la salle était quasiment vide. Un homme, au fond de la salle, semblait admirer les fresques d’or au plafond, et sur une chaise une jeune fille semblait assoupie. Elle se trouvait non loin de l’entrée ce qui me permis de l’identifier immédiatement. Domino ! Je l’avais rencontré par l’intermédiaire de Hulk et, si nos débuts furent plus que tendu, j’appris très vite à l’apprécier. Il y avait chez elle un petit quelque chose, un je-ne-sais-quoi qui me faisait apprécier le temps passé avec elle, et me faisait en redemander. Elle avait été fiancée d’office à Hulk, sans son consentement. Sans le consentement d’aucun des deux pour tout avouer. S’ils s’étaient détestés au début, ils avaient très vite trouvé un terrain d’entente : tout faire pour amener à néant ce mariage. Il arrivait à Domino de se confier à moi, et je devais reconnaitre que cela ne me déplaisait pas. J’avais eu du mal à m’en rendre compte, mais elle faisait partie des quelques rares personnes dont je me souciais réellement. La voir sur cette chaise les yeux fermés m’extirpa un sourire. C’était du Domino tout craché. Elle semblait dans son univers, perdue dans ses pensées. Ou bien tout simplement assoupie, ce qui ne m’aurait pas étonné plus que ça venant d’elle. Je m’approchai doucement d’elle, d’un pas léger, me pencha à son oreille et lui murmura :

« Ne vous a-t’on jamais apprit qu’il ne faut pas s’assoupir dans un lieu public jolie demoiselle ? »

A peine avais-je finis de parler qu’elle se retourna vers moi et ouvris ses grands yeux bleus. L’espace de quelques instants je fus désarçonné. Je me sentais toujours pris au dépourvue lorsqu’elle plongeait son regard dans le mien, comme mis à nu. Elle passa une main dans ses cheveux, faisant voler quelques fines mèches d’or, remis délicatement sa robe en place et vint déposer deux petits baisers sur chacune de mes joues.

« Oh, s’il n’y avait que ça que l’on m’avait appris et que je ne faisais pas très cher! »

Je souri affectueusement. J’aimai la répartie de Domino. Elle avait toujours réponse à tout, elle ne se laissait jamais prendre par les mots. Ni trop cinglante, ni pas assez, toujours dans le juste milieu. Elle parcouru la salle des yeux. L’homme au fond n’avait pas bougé depuis mon arrivée, le calme régnait plus que d’ordinaire. La probabilité que je la rencontre dans ce lieu était tellement infime que j’en étais légèrement presque incrédule. Mais je n’aurais su expliquer l’immense plaisir que je ressentis lorsque, assise dans ce fauteuil, j’avais reconnu Domino. Le temps passé en sa compagnie ne me paraissait jamais trop, plus encore, j’en redemandais. Ce qui était très rare dans la mesure où la plupart des gens m’ennuyait rapidement. Sa contemplation de la salle fini, elle revint plonger son regard océan dans le miens. Elle était très belle en cet instant, la luminosité de la salle faisait briller sa chevelure blonde, lisser sa peau de pêche, et renforçait la profondeur de ses yeux. Elle me sourit, et me demanda ce qui lui valait ce plaisir. Je mis quelques secondes à rassembler mes esprits, esquissa un sourire pour garder de la prestance. J’espérai qu’elle n’avait pas perçu le trouble qu’elle avait créé en moi. Quoi qu’il en soit je le dissipai très vite et lui répondit d’un ton charmeur accompagnée d’un clin d’oeil :

« Plaisir partagé ma chère ! » je lui fis bénéficier de mon plus beau sourire, puis continua « J’errai sans but précis dans les rues de Panem, et comme par magie je me suis retrouvé ici, à croire que le destin voulait que nous nous rencontrions en cette belle journée.»

Nous commençâmes à marcher le long de la salle, je passai mon bras autour de ses épaules. C’était une de ses habitudes que j’avais prise avec elle qui me plaisait, et qui parfois faisait naître un soupçon d’ambiguïté dans notre relation. Je la questionnai sur sa matinée et sur sa présence ici. Je l’écoutai me narrer son besoin de se changer les idées dans un endroit encore mystérieux pour elle, suite aux divagations de ses pensées. Cela ne devait pas être évident pour elle… Devoir épouser un homme sans l’avoir choisi, sans le vouloir, sans amour ni même désir. C’était toute sa vie qui allait changer, mais surtout c’était la priver de cette liberté, la priver de la liberté d’aimer. J’essayais de me mettre à sa place, imaginer ma réaction si mes parents avaient décidé de me désigner une fiancée sans mon consentement. Peut-être n’aurais-je émis aucune opposition si cela m’avait apporté quelque chose. C’était là la différence entre Domino et moi : elle était entière dans tout ce qu’elle faisait, alors que pour ma part nombreux de mes agissements étaient dictés par la poursuite d’un but ou d’un intérêt personnel. Sauf avec elle… Avec elle j’étais moi-même. C’était là le pouvoir qu’elle avait sur moi, elle me mettait à nue. Avec elle, pas d’artifice, pas de faux semblant, pas de manœuvres détournées. Parfois je me disais que cette relation devrait cesser, s’attacher aux gens ne ramenait jamais rien de bon, mais chaque fois que je me montrais un peu dur ou froid avec elle, la peine que je lisais dans ses yeux me transperçait l’âme et me rendait plus coupable que jamais. Je mettais résolue à abaisser ma carapace en sa présence et avais fini par apprécier cette légèreté en sa présence.

Une fois le tour de la salle fait, l’envie de prolonger ce moment avec elle, je lui demanda :
« Que penserais tu de passer l’après-midi ensemble ? Des heures à parler, à nous plaindre, à rire. D’ailleurs, tu ne m’as pas encore parler de où en est de la situation avec Hulk. Tu sais ce… mariage.»