| Sujet: Re: FREYA&GRAHAM → blood on her hands Mer 7 Déc - 14:42 | |
| Freya dit que ce n'est pas grave. Mais ça l'est. Je crachote un peu, épuisé, sale, les ongles rouges d'un sang qui n'est pas le mien. Je me mets lentement sur le côté, reprenant mes esprits. Qu'est-ce que j'ai fait ? Qu'est qui m'a pris ? Au moment où je me lève difficilement, encore chancelant, Freya tombe lourdement à terre, et il me faut un long temps pour enfin comprendre l'étendue des dégâts. Je reste interloqué une seconde ou deux, puis me rue, glissant presque sur le sol boueux, vers elle, tremblant. C'est moi qui ai fait ça. Moi qui était censée la protéger. Elle perd du sang abondamment, je crois que j'ai ouvert une grosse veine. Je suis paniqué. Alors, je fais la seule chose à laquelle je suis bon : faire de mon mieux pour stopper les dégâts. J'arrache un pan du t-shirt que je porte et le noue bien serré avant son avant-bras et ses poignets ensanglantés. Elle a dû s'évanouir. Elle a l'air si frêle, si fragile, qu'en la portant vers la rivière, quelques mètres à ma gauche, j'ai l'impression qu'elle va se briser comme du papier de verre. Elle est d'une pâleur cadavérique et j'en ai l'estomac retourné. Le monstre qui l'a rendu comme ça, ce n'est pas un Pacificateur. C'est juste moi. Je la pose sur le bord de la rivière et plonge ses bras dans l'eau, effaçant ses traces de sang sur ses bras pour y voir plus clair et pleurant comme un enfant. Je ne veux pas qu'elle parte, j'ai si peur qu'elle ne résiste pas... Je porte sur mon épaule et cherche aux alentours une plante, une pierre, n'importe quoi qui puisse la soulager et désinfecter ses plaies, mais rien. Je la fouille pour voir si il ne lui resterait pas de quoi la soigner, mais elle a les poches vides, et moi aussi. Qu'est ce que je vais faire ? Il faut que je retourne en arrière. Je serre Freya dans mes bras comme si j'avais peur qu'elle m'échappe. Pour l'instant, elle respire encore, mais ce n'est sûrement qu'une question de temps. Il faut que je la sauve. Et vite.
Alors, je me mets à courir du mieux que je peux, Freya toujours sur mes épaules, repartant en arrière. Je cours ainsi pendant près d'une heure, incapable de m'arrêter, ne ressentant même pas une seule douleur. Je ne me soucie pas de moi, pas de mes muscles endoloris, ni de ma blessure. Juste de Freya. Je ne m'arrête uniquement que lorsque je repère de quoi la désinfecter et fermer ses blessures. Je la pose et m'active, ruisselant de sueur. Je retire son garrot, partagé entre la peur de ne pas y arriver et la joie de voir encore sa poitrine se lever à un rythme régulier. Longuement, je panse ses plaies, et finis par attendre, roulé en boule. Il ne doit être que une ou deux heures de l'après-midi. J'ai l'espoir stupide qu'elle se réveille rapidement, mais je me résous à oublier cette possibilité et je reprends Freya sur mon épaule. Je marche rapidement. Il faut que je rattrape le retard que nous avons pris. Pendant une heure, puis, deux, puis trois, je poursuis mon avancée. Vers cinq heures, je prends enfin une pause. J'allonge Freya sur sol et la couvre de ma veste bien chaude. Je vérifie ses bras, caresse son visage. Je veux qu'elle se réveille et qu'elle me dise que ça va bien... Mais elle ne bouge pas et je prends mon fusil. Il faut que je chasse quelque chose. Un écureuil, un lapin... N'importe quoi qui puisse la nourrir. Je me retire dans la forêt et attends. J'ai l'impression que rien ne va arriver. Après tout, nous n'avons pas croisé d'animaux depuis le début de notre voyage, alors pourquoi j'en rencontrerais un maintenant? Je perds de plus en plus espoir. Je glisse contre le tronc d'un arbre, prostré, tenant mon fusil si fort que les jointures de mes mains deviennent blanches. Puis, j'entends un bruissement de feuilles pile devant moi. Et je tire dans le tas une demi-douzaine de balles. Le bruit a dû faire fuir ce que j'ai voulu tiré, mais je me lève tout de même et va voir. Je reste choqué une seconde. J'ai tué une espèce de chevreuil.
Trois de mes six balles ont fait mouche. Je tire le cadavre jusqu'à l'endroit où Freya repose. Je dégaine un couteau et découpe tant bien que mal la pauvre bête. Ca me dégoûte. Je suis sur le point de vomir, mais je m'applique quand même. Je coupe le goulot de ma gourde pour pouvoir conserver des morceaux, et je tire le reste du chevreuil loin de nous. Finalement, la nuit tombe et je m'assois sur une pierre en face de Freya. J'ai les genoux à la poitrine et le regard un peu vide. Ca doit bien faire six heures qu'elle s'est évanouie. Normalement, cela ne dure pas aussi longtemps... Je songe un instant à m'endormir, mais de toute façon, je n'y arriverais pas, et je reste donc éveillé. Finalement, j'entends la voix apeurée de Freya une fois, puis deux. « Je suis là. » je lance en la fixant. Mes yeux se sont habitués au noir et j'arrive à distinguer les contours de son corps. Je ne dis rien pendant un moment. « Tout va bien. » j'ajoute pour la réconforter. Je n'ose cependant pas m'approcher d'elle. Et si je me mettais à péter les plombs encore une fois ? Et si elle me repoussait ? « Je me suis occupé de tes bras. » je continue, la voix tremblotante. Je me dégoûte. Je suis une affreuse personne. Freya se serait bien mieux débrouillée sans moi. « Ce n'était pas moi qui t'ai fait ça. Enfin si mais... » Je soupire, le coeur lourd. « Je ne voulais pas. Mais j'ai pas réussi à me contrôler.. » J'ai l'impression d'être un vieil alcoolique qui tente d'expliquer son comportement. « Est-ce que je peux venir près de toi? » J'ai beau lui avoir poser cette question, je n'attends pas la réponse et m'assois près d'elle. La sentir près de moi me rend plus serein. Je prends sa main et je m'entends commencer à sangloter. J'ai peur, j'ai honte et je m'en veux terriblement. Entre deux pleurs, j'arrive à reprendre mon souffle. « Je suis tellement désolé, Freya.. Je n'ai jamais voulu te faire de mal. »
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