Nemesis & Logan

Une journée de plus, accumulée parmi tant d'autres. À l'exception que cette journée avait été beaucoup plus difficile pour moi, étant une très bonne pacificatrice je me devais de rester de marbre lorsqu'un autre pacificateur donne une leçon aux habitants d'un district. Même s'il m'arrivait de ne pas participer à ces carnages, feintant un air blasé, j'étais la pire de toute, car je n'agissais pas ou rarement, je laissais faire. Parfois le plus important n'est pas ce qu'on fait aux autres, mais ce qu'on ne fait pas. Aujourd'hui je n'avais rien fait, j'avais simplement regardée un pacificateur tuer un père de famille devant ses enfants en bas âge. Cruelle et pourtant cette violence me plaisait d'une certaine façon, haïr le monde entier c'était ce qui m'avait aidée à tenir le coup, pendant un instant j'avais même doutée de mes propres convictions, étais-je réellement honnête envers moi-même ou bien est-ce que je me voilais la face, trouvant l'excuse de protéger Lonan dans le simple but de survivre. Mon père me disait souvent : Les gros poissons mangent les petits. La loi de la jungle en somme, malheureusement il y avait un fond de vérité dans ce proverbe, car plus on avançait, plus la nature sauvage de l'être humain était exposé au grand jour. « -Encore perdue dans tes pensées ma jolie ? » Une voix sournoise, fourbe et cruelle m'interpella sentant la main de cet homme sur mon épaule, je le toisais du regard, froide et distante comme à mon habitude ? Une soudaine envie de l'ouvrir de haut en bas et d'accrocher ses organes sur les grillages pour imiter une œuvre d'art, me traversait l'esprit. Posant ma main sur la sienne avant de lui offrir un vague sourire et de tirer son majeur en arrière assez violemment pour voir pendant quelques secondes, son visage se tordre. « -J'ai horreur qu'on me touche sans prévenir, fait ton boulot tu veux. » Je passais ma main dans mes longs cheveux ébènes avant de lui offrir un sourire narquois, presque malsain, puis je lui faussais compagnie.

La présence des autres me donnaient la nausée, j'étais une asociale de base, moi la petite fille fragile et rêveuse, j'étais devenue une jeune femme prétentieuse et cruelle à souhait, il m'arrivait, de temps en temps, d'admirer mon ancienne maison qui était habitée par une famille d'étrangers. Je m'enfonçais de plus en plus dans la pénombre, seul le craquement des branches sous mes pieds venaient briser le silence morbide du district. Seule, je l'étais et ce n'était pas plus mal, j'avais hâte de finir cette ronde, pour enlever cet uniforme de pacificatrice et dormir un peu, si toutefois, l'image de ce père de famille et de ces enfants ne venaient pas me hanter. Je m'arrêtais devant la maison de Lonan, les lumières étaient allumées, je restais droite, mes mains le long de mon corps et cette mélancolie dans mon regard, ma faiblesse, l'amour. De temps en temps, je pouvais voir une ombre au loin, sa silhouette, distraite et perdue dans les souvenirs d'une enfance innocente, je ne portais pas attention à ce qui m'entourait. C'était comme cela, chaque fois que je m'approchais un peu trop près de Lonan. Je baissais légèrement le regard, me retrouvant face à un jeune homme, un habitant du district, plongeant mon regard dans le sien sans dire un seul mot. J'étais quelque peu surprise de voir un habitant venir à moi. « Pourquoi m'as tu sauvé la vie ? » J'arquais un sourcil, sans le quitter du regard, comment pouvais-je oublier ce regard, il y avait des gens qui me marquaient plus que d'autre, même si je montrais le contraire, lorsque j'avais vu ce garçon qui était sur le point de sortir de son district, la logique aurait voulue que je le punisse. Cependant, ce regard m'avait troublé, peut-être parce qu'il me rappelait Lonan, je n'en savais rien. J'avais donc aidée, indirectement ce garçon à ne pas se faire prendre, cependant j'avais espéré ne plus avoir à le revoir et au lieu de ça il venait me voir. Naïf petit garçon qu'il était. Le silence était lourd, presque étouffant. « -Dis-moi, es-tu suicidaire ? Parce qu'il faut l'être pour avoir le culot de venir voir un pacificateur pendant sa ronde et l'accuser de ne pas faire correctement son travail. » Glaciale, méfiante, froide, ma voix résonnait comme une mauvaise mélodie. Je soupirais légèrement avant de sentir une légère brise venir caresser mon visage, relevant ma crinière en arrière, je me reculais d'un pas en arrière. « -As-tu des preuves de ce que tu avances ? » Demandais-je le plus calmement possible avant de regarder autour de moi. Je me devais de rester prudente, car si un pacificateur passait par là et qu'il entendait notre conversation, je signais mon arrêt de mort et celui de ce jeune homme par la même occasion.