You know her since she was a girl. Now watch her become a woman.
T'es venue au Capitole flamboyant robuste comme un chêne, c'est abusée, usée, que tu parviens à t'installer sur le fauteuil, devant l'écran de la mort qui annoncera la couleur de la note, tantôt douce sinon salée. T'es lovée là dans des bras invisibles qui éternels te maintiennent en vie. T'es comme une poupée dégarnie de sa toison d'or, comme un angelot asphyxié en phase terminale. Tu sangloterais presque dans ton monde à toi, ton monde cloisonné de parois de cendres et de portes infranchissables, où les serrures n'existent pas.
Ton pays des merveilles à toi.
Un pays de cauchemars.
T'y as pensé jour et nuit, à t'en arracher ton esprit d'enfant disloqué depuis des siècles par une haine trop abrupte.
À côté de toi, deux autres âmes se meuvent, égarées peut-être, abusées à s'en jeter par les fenêtres, sinon amusées par ton pitoyable paraître. Tu sais que tu payes pas de mine sur le coup. T'as les bras ballants, parce que tu t'interdis de te recroqueviller sur toi comme un môme chétif, tu refuses de rendre ce moment meurtrier maladif.
Egidius et Dahlia te tiennent compagnie, sitôt qu'on puisse réellement le dire. Tu les jauges en dédain, dans un mutisme de prière. Et ouais tu te demandes à quoi ils pensent. Tu te demandes s'ils te voient déjà la mâchoire déboîtée par un Carrière animal. Tu te demandes s'ils pensent que c'est Quinn qui t'achèvera dans l'arène, si c'est ton essence anathématisée qui aura raison de toi, de ta peau, de ta chair, si ta haine enjôlée, enjolivée provoquera ta perdition sans la moindre pitié ; terrassée par le chaos qui te convoites depuis toujours, érodée par le vice qui s'imprègne du sang qui coule dans tes veines.
Alors. Après ? C'est donc ça le fin mot de l'histoire. Une mort sans écho, une mort sans bravades ? Une mort que tu mérites ?
Une coquette barbie juvénile crevée, son ombre fantomatique balancée au bord d'un précipice, histoire de bien l'achever.
Ouais, bordel, tu te doutes bien que les deux vainqueurs du Quatre se gaussent allègres de ton menton relevé, de tes fautes inavouées. Tu te confesseras jamais. Tu les emporteras avec toi dans ta chute impardonnable.
Quand t'entends Quinn qui débarque, tu relâches ton corps, l'abandonnes à cette lourde épreuve, esseulé. Tu le regardes même pas, sinon pour quoi faire ? Ta tête viens plonger dans les douillets coussins et tu croises tes jambes sur la table basse du salon. Là. Devant l'écran.
Caesar Flickerman apparaît enfin.
Tu te balances des autres tributs, sinon ceux auxquels t'as déjà goûté. Ceux qui t'embaument de la brûlure de leurs gestes, de leurs mots, de leurs maux.
Ivory d'abord. Huit.
Quinn. Neuf.
Laona. Cinq.
Daisy. Six.
Evjkaä. Sept.
Et puis, tu ne fais plus qu'un avec ton propre toi. Tout autour l'immense pièce s'efface, engloutie par un mal étranger, allochtone, avalant sur son passage urticant les autres humains du lieu. T'es seule. T'es perdue. T'as même pas entendue ta propre note. T'as même remarqué aucune réaction. Parce qu'ils ne sont plus là. Disparus. Évaporés comme la fine buée qui s'accroche toujours vainement et péniblement sur les parois de la douche.
T'attends le récapitulatif et t'émerges enfin.
Siwan. Six.
Tu ricanes. T'es hautaine. Tu fais des grands gestes indécents. Mais tu fais tout ça plus de peur que de perversion enfantine.
Tu vas crever.
HRP.