Son moment de repos dans le grand arbre l'avait aidé à remettre ses pensées en ordre, et il s'était réveillé avec une nouvelle volonté. Celle de survivre, coûte que coûte. Celle de se défendre. Sur la pointe des pieds, et alors que le ciel commençait à s’assombrir, il se dirigeait vers là où tout avait commencé. Où les premiers morts étaient tombés. La corne d’abondance. C’était risqué il le savait. Mais c’était essentiel. Il devait passer là-bas, dans l’espoir de trouver de quoi se nourrir correctement, de quoi se défendre. Et mieux repartir à la recherche d’Ellyn. Pour ne plus avoir la crainte qu’un coup de canon retentissant dans l’arène soit le sien. Il s’appuya contre sa canne, faisant le moins de bruit possible. Il s’approchait de son but, il le savait. Il resserra sa veste sale contre lui, prenant une profonde inspiration. Dieu savait ce qui pouvait se trouver à la corne. Il n’y était pas retourné depuis le premier jour. Depuis le bain de sang. Des carrières pouvaient très bien s’être installés là-bas. Un long frisson le parcourut, quand le visage du tribut du Un lui revint à l’esprit. Ce type qui avait voulu, et faillit le tuer dès les premières minutes de jeux. Ce genre de personnes que Levi ne comprenait pas, et ne voulait jamais comprendre. Ceux qui tuaient… Sans ressentir la culpabilité. Lui, il ne faisait que ce ressasser encore et encore la scène qu’il avait vécu la veille. C’était en partie de sa faute. S’il n’avait pas entraîné la mutation avec lui, Isaac ne serait peut-être pas mort. Il avait l’impression de porter sur son dos la mort de cet inconnu, bien qu’il ne lui est en aucun cas porté le coup fatal. Il trembla légèrement, s’arrêtant à la lisière de la forêt. Il secoua doucement la tête, se chassant toutes ses pensées de son esprit.


Puis il releva le regard pour observer en face. Personne. Il n’y avait personne. Même si la nuit tombante lui rendait la tâche difficile, il était certain de ne voir aucune silhouette humaine à l’horizon. Il s’autorisa un discret soupir de soulagement, avant d’abandonner au sol son arme de fortune. Avec un peu de chance, il n’en aurait plus besoin, et trouverait un meilleur moyen de défense là-bas. Il se pencha, doucement, se préparant. Il fallait qu’il fasse vite. Si un tribut se cachait et lui tombait dessus dès qu’il mettrait un pas dehors, il serait fichu. Après une longue minute d’hésitation, il s’élança finalement.

Sentir l’air frais du soir s’écraser contre son visage était presque réconfortant. Il s’autorisa un bref sourire, martelant le sol le plus discrètement et rapidement que possible. Même s’il avait perdu de son énergie ces derniers jours, il fut rassurer de voir qu’il était toujours capable de courir. Personne ne vint l’interrompre. Il arriva à la corne au bout de quelques foulées, un brin essoufflé. De nuit, elle était encore plus menaçante que de jour. Une grosse masse sombre, terrifiante. Il retint un tremblement de peur, et se pencha pour ramasser ce qui était accessible. Il ne restait plus grand-chose, et la nuit ne l’aidait pas à repérer les objets les plus utiles… Et pourtant, son œil fut attiré par un éclat lumineux. Il se tourna et repéra l’objet. Une lame, qui luisait à la lumière de la lune. Il la prit entre ses doigts, curieux. Un poignard. Il frissonna, ne se sentant pas en confiance avec une arme qu’il ne savait pas magner... Mais il le garda quand même en main. ‘Pour se défendre en cas d’attaque… Pas pour tuer.’, songea-t-il pour se rassurer, déglutissant douloureusement. De son autre main, il attrapa une gourde qui se trouvait à quelques centimètres de là. Vide. Forcément. Il soupira, serrant ses deux gains contre lui. Un bruit le fit sursauter. Il ne savait pas s’il s’agissait d’un animal ou d’un tribut. Il ne voulait pas savoir. Alors il accrocha sa gourde à sa veste et s’enfuit à toute hâte, pour s’enfoncer dans la forêt et y disparaître.