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| IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne | |
| Auteur | Message |
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| Sujet: IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne Dim 1 Juin - 13:29 | |
| Voyage en train du D5 en direction du Capitole, peu de temps après le départ. La rapidité des évènements prenaient Levi totalement au dépourvu. On lui donnait des ordres, des indications. Presque mécaniquement. Sans aucune compassion. On se fichait bien du fait qu’on venait de gâcher sa vie et celle de sa pauvre famille. On s’en foutait, parce que c’étaient les règles égoïstes du Capitole, de tous les êtres vicieux qui étaient emplis d’excitation à l’idée de préparer de nouveaux jeux. Les vies qui en étaient altérés, cela ne comptait pas. Le divertissement, si. C’était peut-être un brin hypocrite de la part de Levi, qui pendant tout ce temps c’était bien moqué du sort des autres tributs. Sauf une seule année, mais c’était encore une autre histoire. Celle d’un autre jour, d’une autre année, bien loin. Celle où l’un des pions de ce jeu qui le dépassait avait été un visage connu.
Maintenant qu’il était à cette place, celle d’un tribut fonçant tout droit vers la mort, il voyait les choses autrement. Son regard c'était comme ouvert, tout comme son esprit et sa conscience. Il était un tribut, un sacrifié, de la chaire à patté offerte en victuailles aux gens du Capitole et de tout Panem. Mais Levi n’avait plus son mot à dire. Il était déjà entré dans la machine. La machine du jeu, mais aussi la machine qu’était le train. Il n’y avait pas de retour en arrière possible. La colère qui s’était immiscée en lui lors de son tirage avait disparu, se muant en un profond désespoir. Il ne pleurait pas, ou plutôt, il ne pleurait plus.
Mais il était encore fébrile depuis ses adieux avec sa mère, et son père. Son corps était parcouru de légers tremblements. Il ne se sentait pas prêt à quitter son foyer, sa maison. Il était comme un gamin qui partait pour la première fois sans ses parents. Sauf qu’il n’avait pas de date retour de programmée. Alors il abandonna, se laissa tomber sur l’un des sièges, dans un coin assez isolé, faisant face à la vitre. Les paysages qu’il connaissait s’éloignaient à une allure affolante. Il le savait, c’était la dernière fois qu’il les voyait. Il profita de chaque secondes où il percevait encore son District, là où il avait toujours vécu, il s’imprégna de ces image, car ce serait cela, dont il aurait besoin pour avancer. Pour supporter les préparatifs des jeux.
Il n’y avait pas que ça. Non. Levi ne partait pas seul. S’il avait évité Ellyn pour le moment, n’étant pas prêt à lui faire face, il y avait d’autres personnes qui partaient avec lui, qui l’accompagnaient. Ses mentors. Jaime. Sage… Sage. Il se releva, quittant son coin tranquille du train, pour partir à sa recherche. Il avait besoin de la voir, d’être rassuré. Elle était la seule qu’il avait envie de voir à cet instant. Il courrait presque à travers la machine en mouvement. Levi était ce genre de personnes qui savent à peine marcher. Il allait toujours vite, toujours trop vite. Maintenant que ses jours étaient compté, cela ne faisait qu’intensifier la situation. Le train avait beau être assez grand, il n’eut pas à le parcourir bien longtemps avant de finalement percevoir la silhouette singulière de Sage. Il s’arrêta, à peine essoufflé, et tapota du bout des phalanges la porte du petit salon dans lequel se trouvait sa mentor, son modèle.
« Sage… », Souffla-t-il en s’approchant. Sa voix était presque un murmure, à peine audible. Il se détestait pour cela. Montrer ses faiblesses. Il aurait aimé être ce genre de type capable de parler d’une manière ferme. Il l’était, quand il se perdait dans ses mensonges et prenaient trop confiance. Mais là il n’y avait pas de mensonge possible. Il n’arrivait même plus à se mentir à lui-même. Il prit une profonde inspiration, cherchant à puiser dans ses réserves de courages qui étaient déjà bien épuisées, depuis longtemps.
« On dirait bien que maintenant, tu es finalement mon mentor… de manière officielle, du moins ! », Lança-t-il avec un rire franchement nerveux, ne sachant pas comment réagir, ni par quoi commencer. Il avait peut-être juste besoin de la voir. Ce visage qu’il connaissait, qu’il n’aurait pas à affronter dans l’arène. Elle était passée par là, elle aussi. Elle s’était retrouvé dans ce train, elle avait connu cette peur de la mort qui se glisse dans le creux du ventre, et qui semble dévorer tout de nous, lentement mais douloureusement.
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| Sujet: Re: IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne Dim 1 Juin - 16:37 | |
| We get older by the hour. Levi & Sage Sage n'avait jamais été un modèle pour personne; elle était évité de ses pairs et faisait, en définitive, un mentor plutôt bancal. Autant capable du meilleur que du pire. Depuis sa maison dans le village de Vainqueur, elle ne recevait jamais personne si bien qu'on se demandait pourquoi cette femme, ressemblant à une perruche de salon Capitolien, n'était pas tout simplement restée parmi les exubérants et cruels pinsons du Capitole. Personne n'avait jamais eu de réponse à cette question, même pas elle. Peut-être la blonde aimait-elle son District, envers et contre tout. Peut-être aimait-elle cet endroit chargé des derniers souvenirs des gens qu'elle avait aimé: son père, Thybalt, Swain. Et à présent Levi. Elle s'était anormalement attaché à cet adolescent roux toujours indécis, toujours mal assuré car il avait été le seul à oser entrer chez elle et lui poser des questions. Il lui avait offert de l'admiration, de la reconnaissance -deux choses dont Sage avait besoin comme de manger et de boire. Et elle avait, fantasme morbide et cruel, qu'il soit choisi durant la Moisson pour se donner des électrochocs et essayer de se faire comprendre qu'elle était encore sensible, au fond d'elle. Une rêverie destructrice qu'on fantasme comme pour se faire un peu peur, se rappeler qu'on peut s'attacher et qu'on peut souffrir; souffrir pour continuer à se sentir vivant. Mais maintenant que la réalité avait supplanté la divagation, la chimère se transformait en hantise. Levi avait une chance sur vingt-deux de mourir.
Assise dans une banquette sous le soleil que filtrait la vitre du train, la jeune femme avait préféré se trouver seule. Son lévrier dormait paisiblement à ses pieds, roulé sur lui-même tandis que sa maitresse s'était laissé aller à deux bonnes heures de solitude, sans dire le moindre mot. Les Moissons étaient aussi effrayantes qu'excitante. Finalement, toute peur est un désir; elle s'en rendait compte. Et la mort promise aux Tributs leur parlait aussi de leur vie. Quand vit-on le plus? Quand on se retrouve face à la mort. Elle n'avait jamais regretté d'avoir été choisie, il y a vingt ans. Peut-être tait-elle la seule, hormis les Carrières, à avoir vu au delà de la machine infernale broyeuse de vie. Car elle était toujours là, avec une vie loin de l'apathie du travail quotidien dans un District. Des considérations bien vaines pourtant, qui seraient éternellement stériles. Elle avait choisi de se mettre un peu à part pour diviser le reste du temps entre ses deux Tributs, quand elle aurait les idées plus au clair; c'est à dire surement jamais. Pourtant, elle avait une responsabilité dans l'histoire: celle des derniers instants d'Ellyn et Levi et cette année, au contraire des dernières, elle avait envie de tout leur offrir.
Une belle vie, dans ses derniers instants, une belle mort. Une belle mémoire, dans son cœur. Une place à jamais gravée en elle, qu'ils gagnent ou qu'ils meurent; et Levi... elle ne voulait pas oublier Levi. Mort, elle ne l'oublierait jamais. Vivant, ils s'éloigneraient surement; peut-être la mort était-elle plus porteuse que la vie, somme toute. Une autre part d'elle-même refusait de voir ce petit mourir sans avoir essayé. L'espoir contre la peur, l'envie de vivre contre la mort. Il avait été le seul à venir vers elle; il l'admirait, elle, cette pauvre sotte qui se donnait au Capitole. Il l'admirait, mais s'il savait la vérité sur elle... Sage n'était qu'une petite bête qui amusait la galerie, comme tout les autres vainqueurs. Mais pour Levi, elle était différente. C'était pour ça qu'il s'était creusé une place dans son cœur avec autant de facilité: tout ceux qui aiment Sage découvre une femme désespérément à la recherche d'attention. Et quand il avait été tiré au sort, elle l'avait pris dans ses bras. Parce qu'il y avait les caméra, les yeux du Capitole rivé sur eux; pour la stratégie. Elle avait un plan; mais aussi et surtout parce qu'elle n'avait pas tant réfléchi que ça.
Un son vint interrompre ses réflexions interminables, et Helyos leva brusquement la truffe, sortant de sa somnolence. Sage tourna la tête sur le côté pour voir Levi dans l'encadrure de la porte, comme essoufflé. Les yeux toujours un peu trop maquillés de la blonde n'exprimait rien de spécial, et son sourire se marqua un peu plus; c'était un sourire chaleureux et amical, mais de ce genre de sourire qu'elle offrait à tout le monde. Pourtant Levi n'était pas n'importe qui: il était un Tribut, mais aussi un proche, à présent. Et pourtant Sage s'obstinait à jouer la comédie, parce qu'elle était devenue son mentor et qu'elle devrait lui montrer un personnage plutôt que la personne veule et indécise qu'elle était par nature. Parce qu'il aurait besoin d'elle.
"Tu as couru?", lui demanda-t-elle, amusée, "pourtant je n'allais pas sauter du train, tu sais!"
Elle riait fort, Sage; comme toujours. Un être dans la démesure. Et même si elle sentait la tension du jeune homme, elle rit avec lui quand il lui dit qu'elle était sa mentor, enfin officiellement. Son mentor, elle l'avait toujours été. Certaines choses ne changeaient pas. Se levant lentement en s'aidant de sa béquille -il était toujours un peu nébuleux de savoir si elle en avait réellement besoin ou pas- Sage enjamba précautionneusement son lévrier pour rejoindre Levi en quelques pas, le fixant sans rien lui dire, sans perdre son sourire. Elle chercha ses yeux de manière insistante et y planta son regard sans lui laisser l'opportunité d'esquiver la manœuvre. Puis, toujours silencieuse, Sage passa une main dans les cheveux de Levi, comme pour le rassurer. Elle ne trouva rien d'intelligent à dire alors pour une fois, elle ne dit rien; il était assez rare qu'elle ne dise rien.
"Nous allons faire un drôle de voyage", elle demeura un instant silencieuse avant de reprendre, "n'ai pas de regrets, tu es encore en vie. Alors vis pleinement."
C'était, quand elle avait douze ans et qu'elle était terrifiée par le silence de Jaime, son propre mentor, ce qu'elle s'était dit: "vis". Vivre, peu importe le temps que ça durera. Elle n'avait pas de bons conseils à donner, Sage; elle ne réfléchissait pas toujours au plus juste, au plus droit. Mais Levi lui rappelait en écho la peur qu'elle avait ressentit quand elle avait été choisie par la Moisson. Cette peur qu'elle n'oublierait jamais. Les cahots du train faisait tanguer sa longue silhouette, femme aussi grande qu'un homme, aux jambes comme interminables. Mais elle continuait de regarder Levi avec ce sourire comme invincible, dont l'insouciance semblait capable de venir à bout de tout. Et tant pis si ce n'était qu'un masque. Elle préférait celui-ci à un masque de pleurs.
Le chien de la blonde jappa un moment, sans raison aucune et la jeune femme se tourna vers lui avant de faire à nouveau volte-face vers Levi.
"Tu veux manger quelque chose? J'allais manger. Enfin quelque chose dans le genre. On parlera mieux le ventre plein, tu ne penses pas? On a plein de choses à se dire! Je suis là pour tes questions... et...", elle sembla réfléchir, "... tout ce que tu voudras."
Elle glissa vers la banquette pour s'y poser lentement, comme si elle était fatiguée; ses yeux trop maquillés cachaient facilement ses cernes si bien qu'il était comme toujours difficile d'estimer son état émotif; ce dernier changeant tout le temps, c'était une tâche encore plus ardu qu'on ne pourrait le penser. Mais elle invita Levi à la rejoindre de bon cœur: elle l'aimait parce qu'il était gentil avec elle; elle voulait tout lui donner parce qu'il l'admirait. Elle voulait le porter jusqu'à l'arène comme jamais elle n'avait accompagné un Tribut. Mais tout ça, Sage ne le dirait jamais à Levi.
Elle avait depuis bien longtemps, depuis qu'elle avait triomphé par hasard de la peur et de la mort dans l'arène, fait la promesse des yeux secs. Dean, Swain, Thybalt... papa. Trop d'hommes étaient morts dans sa vie et elle ne voulait plus souffrir. Pourtant souffrir montre qu'on est en vie. Elle voulait souffrir sans avoir mal; elle voulait tout et rien à la fois. Être loin, très loin de ce monde. Étrangler Levi à mort pour lui épargner la souffrance de l'arène et jeter son corps hors du train; l'inciter à continuer et à gagner les Jeux. Le sauver, le tuer, l'épargner. Tout, rien. Tout à la fois.
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| Sujet: Re: IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne Dim 1 Juin - 22:50 | |
| Sage avait toujours été une personnalité singulière et intéressante aux yeux de Levi. Personne ne comprenait son intérêt pour la vainqueur. Il n’était même pas certain de savoir lui-même ce qui causait son admiration pour la femme. Sa victoire aux jeux ? Oui. Même s’il n’était même pas née quand elle était sortie de l’arène vivante, il en avait vu des rediffusions, que le Capitole s’autorisait à sortir de temps en temps. Mais il n’y avait pas que ça. Dans le District, elle brillait. Le Cinq était loin d’être le meilleur district de Panem. A mi-chemin entre la richesse des uns et la pauvreté des autres, il était presque quelconque. Il se perdait dans la multitude d’autres districts, n’ayant rien de particulier. Il n’était certes pas à plaindre, mais aux yeux de Levi, il était profondément ennuyeux. Et dans toute cette grisaille, Sage s’était affirmée, et ce, peu importait le regard pleins de jugement que lui adressait la populace. Et c’était peut-être ça qui avait attiré l’attention de Levi. Elle semblait ne pas avoir peur d’eux, de leurs avis. Il n’avait jamais été sûr que cela fût la vérité, mais c’était l’impression qu’il avait toujours eu et c’était ça, l’essentiel. L’allure Capitolienne et fière. Tant que choses qui étaient impossible pour Levi, qui ne pouvait que les observer avec un regard pétillant et rêveur.
Alors maintenant qu’il se trouvait face à elle, il sentait le poids de son cœur s’alléger un peu. Dans tout le chamboulement de son existence, elle ne changeait pas, au moins. Il s’autorisa un sourire en réponse à sa question et sa remarque. Il avait couru, en effet. Il avait couru parce qu’il ne savait plus marcher, parce qu’il avait peur que s’il était trop lent, les choses lui filerait sous le nez, glissant entre ses doigts.
« J’aime courir. », Se contenta-t-il de répondre avec un haussement d’épaule, tentant d’imiter le ton léger de sa mentor. La tension qui le trahissait dans sa voix ne s’était pas tout à fait envolée, faisant vibrer légèrement ses propos, comme s’il devait les tirer du fin fond de sa gorge. Ce qui était presque le cas, au final. Pourtant, il n’avait jamais eu de mal à s’adresser à Sage auparavant. Parmi toutes les craintes qui le rongeaient, celle-là n’en faisait pas partie : communiquer. Mais là, il était dans un état second, malgré l’apaisement que la présence de la jeune femme effectuait sur lui, ses gestes affectueux. Elle était un peu comme une grande sœur de cœur, à défaut d’en avoir une par les liens du sang. Elle était cette personne qui lui donnait l’exemple et des conseils.
« J’ai toujours eu envie de me rendre au Capitole, un jour. Le visiter. C’est vrai que c’est un drôle de voyage, même s’il me fait un peu peur. Tu as raison… Je devrais en profiter, vivre pleinement… Mais c’est difficile. », Souffla-t-il en s’avançant dans le petit salon, s’efforçant de garder la tête haute. Il savait qu’il n’avait pas à jouer un jeu ici, dans l’intimité de cette pièce. Mais c’était plus fort que lui, il estimait qu’il devait faire un effort. Pour faire honneur à sa mentor en tant que tribut des 78èmes éditions des jeux. Parce s’il y avait quelqu’un dont il cherchait l’approbation ici, c’était bien elle. Il n’avait plus sa mère pour chercher la reconnaissance dans son regard.
Il la suivit, s’installa à ses côtés, ne répondant pas tout de suite à sa question. Il n’était pas tout à fait sûr d’être capable d’avaler quoi que ce soit, son ventre étant tellement serré par les évènements. Mais il hocha docilement la tête, n’ayant pas l’envie de refuser cette offre malgré tout. Il finirait bien par devoir manger, un moment où un autre. S’il devait vivre dans un certain luxe jusqu’à l’arène, autant en profiter. Se jeter sur les victuailles que le Capitole lui tendait, comme un gamin affamé du Douze. Il savait qu’il valait mieux que cela. Mais voilà. Il fallait savourer. ‘Vivre pleinement’, pour reprendre les propos de la jeune femme. Tirer son avantage de ce jeu sordide. Il avait vu à quoi ressemblaient les tributs lors de leurs interviews télévisés. On faisait d'eux des rois, l'espace de quelques jours, semaines. On faisait d'eux des rois, avant de leur arracher leur couronne sans ménagement.
« J’ai des questions. Peut-être trop, même. », Lâcha-t-il soudainement, se surprenant lui-même. Les mots s’étaient échappé d’entre ses lèvres avant même qu’il n’ait le temps d’y penser. Mais il n’eut pas le temps de regretter, car les questions se chamboulaient dans son esprit, se battant presque avec autant d’ardeur que des tributs dans une arène. Comment cela faisait, de se retrouver là-dedans ? Les préparatifs étaient si éprouvants que ça ? Allait-il devoir mentir lors de son interview ? Qui devrait-il craindre en premier ? Des plus futiles au plus intenses, toutes passaient dans sa tête, défilaient et dansaient, lui brûlant les lèvres. Il porta son regard sur le chien de Sage qui repose à ses pieds, cherchant à calmer le brouhaha de son esprit. Puis elle sortit. Sa première question s’échappa, s’envola dans la pièce, presque brutalement.
« Est-ce que la peur de mourir nous suit jusqu'au bout ? »
Il porta sa main à sa bouche, regrettant déjà ses mots. Parce que cette question, il le sait, elle est stupide. Qui serait capable de se débarrasser de sa peur de mourir, quand fonce droit sur cette fin ? Il aurait envie de retirer chacun de ses mots, les effacer. Il ne savait même pas pourquoi il en faisait autant, mais il s’en moquait. Il était à fleur de peau, et le mot était faible. Il se maudissait, de ne pas être capable de rendre ses immenses sourires à Sage. Il se sentait coupable, même. Coupable de sa propre tension, qui allait et venait, jouant avec ses nerfs. Il avait l'impression de devenir fou, à changer d'humeur en l'espace de quelques secondes.
Dernière édition par Levi Caulfield le Dim 8 Juin - 9:09, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne Mar 3 Juin - 21:15 | |
| We get older by the hour. Levi & Sage Depuis sa place, Sage avait un regard bienveillant sur son Tribut. Elle qui trouvait la vie vulgaire et sans scrupules n'était pas le meilleur mentor ni le meilleur être humain de Panem mais elle avait pour Levi cet attachement authentique qui faisait d'elle quelqu'un de sincère: elle avait certes des sautes d'humeurs, des phases de rejet du jeune homme mais dans l'ensemble, elle l'aimait. Il était une personne spéciale pour elle comme un petit frère qu'elle n'avait jamais eu, comme son seul admirateur; comme quelqu'un d'unique en son genre. Et elle voulait le préserver, même si elle savait que la cruauté de l'arène -ou plutôt celle des participants des Jeux et ceux qui soutiennent ce système- le tuerait peut-être; peut-être pas; pas besoin de pessimisme. Sage n'avait besoin ni d'espoir ni de drame. Elle pensait qu'il y avait une chance sur une vingtaine: cette chance, ce fut la sienne il y a plus de vingt ans. Alors l'homme n'est pas juste une statistique.
"C'est bien. Ça te servira surement dans l'arène", dit-elle en un constat neutre, sans plaisanterie.
Car chacun avait ses forces et ses faiblesses et le sourire policé de Sage parlait un langage plus vrai qu'elle ne voulait bien le faire croire. Si Levi aimait courir, ce pourrait être un plus; il n'y avait aucun humour noir sous-adjacent sous sa réflexion. Le jeune homme était tendu et même quelqu'un manquant cruellement de compassion comme la blonde pouvait le constater; pourtant elle ne souligna pas sa tension, ne dit rien et se contenta de l'inviter à sa table pour entamer la conversation qu'il était semble-t-il venu chercher chez elle. Un monde s'ouvrait à lui, bien plus cruel que celui qu'il avait toujours connu. Le monde où on fait de vous des dieux qu'on va déchoir, un monde qui repart continuellement à zéro en guillotinant ses idoles. Il apprendrait vite, elle n'en doutait pas une seule seconde. Elle ne s'inquiétait pas non plus pour sa survie: il adviendrait ce qu'il adviendrait, et chacun en apprendrait; la jeune femme avait déjà fait son choix du moment: elle ne survivrait probablement pas à la mort de Levi mais cela, elle ne lui dirait jamais.
A la place, Sage ne jouait aucun jeu; elle ne devenait pas un mentor, ne changeait pas. Elle parlait toujours avec ce ton détaché et léger, qui ne se souciait pas vraiment de faire plaisir ou de blesser son tribut. Un ton franc, congruent, un ton ami sans relation de pouvoir. Peut-être savait-il qu'au fond, elle n'avait rien à lui apprendre, car on n'apprend ni à vivre, ni à mourir ou à triompher. Le plus simple geste est de rassurer et d'accompagner; c'était ce qu'elle ferait. Personne ne rentrerait dans l'histoire, personne ne chercherait à rien réaliser. Sage ne transposait rien sur Levi, elle ne partageait jamais sa souffrance avec lui. Car de ses douleurs, personne n'en savait rien: Sage ne parlait jamais de ça, et encore moins maintenant que Levi avait le poids de sa propre destinée sur le dos.
"Moi aussi, il me fait peur", elle lui sourit avant de reprendre, "mais ce qui fait peur est toujours excitant."
Elle haussa vaguement des épaules quand il lui avoua que c'était difficile d'accepter de profiter du temps alloué, comme si elle était d'accord sans vraiment l'être; elle distillait un peu tout et son contraire.
"On a plus de temps que tu ne le penses."
C'était une question de point de vue uniquement, de verre à moitié vide, à moitié plein. Le temps qu'il lui restait avec ce garçon, Sage ne le voyait ni court ni long, mais intense; elle serait toujours avec lui et si d’aventure elle parvenait à être un mentor efficace, elle serait encore avec lui dans l'arène, et au delà. Et lui resterait gravé dans sa mémoire, mort ou vivant. Elle ne pensait ni à la mort, ni à la vie quand elle le convia à la table. Et lorsque le jeune homme s'avança avec une tête lourde qu'il espérait haute, elle ne dit rien. Mort, il peuplerait sa vie à l'infini, jusqu'à ce qu'elle-même meurt; ce qui pouvait arriver rapidement. Vivant, il serait encore là sur Terre pour venir la voir dans sa grande maison vide. Les deux se valaient et dans ce jeu sanglant, elle n'avait aucune des réponses aux questions qu'il se posait. Mais elle pouvait accompagner ses réflexions, l'accompagner tout court. Juste être là.
Ils s'installèrent côte à côte, un peu penauds. Héritière de jours maudits, Sage ne communiquait pourtant jamais ses angoisses passées à Levi; elle ne lui avait jamais parlé de ses Jeux, de ce qu'elle avait ressenti, comme si elle l'avait préparé un jour à devenir son Tribut. Et la blonde ne le força pas à manger, ni à quoi que ce soit d'autre d'ailleurs. Elle se retira un peu en arrière sur la banquette, glissant ses pieds sur le bord de la table avec un air désinvolte en se saisissant d'une pomme qu'elle mordit à belles dents.
"Là, c'est moi qui ai plus de temps que tu ne le penses", dit-elle en un fin sourire à la réflexion de Levi sur la multiplicité de ses questions.
Ils avaient bien le temps; ils avaient tout le temps pour ces questionnements vitaux, et moins vitaux. Pour toutes les questions qu'il aurait à lui poser. Sage écouta un instant le bruit du vent qui combattait la vitesse du train tandis que le roux posa son regard sur le lévrier paresseux qui veillait à leurs pieds, la truffe soupirante. La blonde regarda finalement l'adolescent à la dérobée, en un sourire. Il était trop jeune pour mourir, mais il n'y avait pas d'âge pour retourner à la terre, en fait. Il lui parla de peur, de mort, de permanence et son contraire, dans l'espoir d'une réponse réconfortante; la réponse était qu'elle n'en avait pas, mais essayerait de trouver quelque chose.
Alors Sage se contenta de sourire, dépliant sa longue silhouette souffreteuse avec langueur, tâtonnant à ses côté pour chercher sa béquille; elle se releva finalement, tirant sur sa veste pailleté de la brillance criarde du Capitole pour l'ôter, ne laissant d'elle qu'une femme-enfant grandi trop vite; trop grande, trop large, trop souriante, trop... trop. Trop elle, avec ses pantalons de cuir, ses chemises immaculées, son maquillage outrancier et ses bretelles ridicules. Elle rit de bon cœur quand il sembla interdit de sa question amusée pour une raison insaisissable, avant de faire quelques pas pour rejoindre le milieu du wagon.
"Je ne sais pas."
Ce fut tout ce qu'elle pouvait lui dire; l'homme est trop différent de l'autre homme pour qu'elle ait la réponse parfaite à ce genre de question. Certains étaient si désespérés qu'ils abandonnaient la peur et la souffrance, d'autres pédalaient dans le délire tandis que d'autres encore trouvait dans la peur l'énergie nécessaire pour survivre.
"Mais c'est une bonne question."
Alors non, elle n'avait pas de réponse toute faite; elle n'avait pas de réponse tout court. Mais elle avait sa propre peur, celle d'avant et celle de maintenant. La peur de plus tard, un demain sans Levi, un après demain sans Swain, un surlendemain sans Thybalt. La peur de vivre quand les autres sont morts, la peur de mourir, aussi. La peur de tout, de rien. La peur des Pacificateurs, des Jeux, des gens, tout simplement. La peur de voir sur l'écran la vie de Levi arriver au bout du chemin. Et cette peur était la vie. Et elle aimait la vie à en crever.
"J'avais peur. Tout le temps. J'avais peur de mourir, surtout à l’époque. Maintenant j'ai peur de vivre", elle le fixa dans les yeux, "la peur est toujours utile, si tu sais la reconnaitre sans te laisser déborder par elle. J'ai toujours peur, aujourd'hui. Peur pour toi, pour moi. N'y vois pas de faiblesse et si toi aussi tu as peur, dis-toi que celui qui n'a peur de rien crève souvent en premier. C'est la seule chose dont je me souviens dans l'arène."
Elle avait fait parti de ces enfants gladiateurs, martyrs d'un gouvernement carnivore. Elle avait subi ce que subissait Levi mais refusait de lui donner des leçons. Mais Sage avouait qu'elle avait eut peur comme elle avouait qu'elle tenait au jeune homme, finalement. Parce qu'on ne peut pas accompagner si l'on est pas vrai. Et se tournant pour regarder le paysage défiler à toute allure, le mentor essaya de chercher dans sa mémoire capricieuse quelque chose qui pourrait servir d'exemple pour son Tribut.
"Ça ressemblait... je ne sais pas. J'avais douze ans quand je suis entrée dans l'arène, et je n'avais jamais pensé à la mort avant. Ni la mienne, ni celle des autres. J'avais peur d'avoir mal et de faire mal. Le reste... j'étais perdue, j'ai agi, je n'ai pas réfléchi. J'avais tout le temps l'impression d'être ivre et mes sentiments...", elle se retourna vers lui, "... j'ne suis pas sûre d'en avoir vraiment eu. J'me souviens plus bien. Si tu as vu, tu sais que c'est un garçon du District Onze qui est mort pour me sauver. Ce n'était pas de la chance, c'était grâce à un sacrifice que je suis ici aujourd'hui."
Sage était calme et posée, ce qui était relativement rare. Elle semblait lucide, faisant la part des choses et sachant mettre des mots sur certaines choses, mais pas sur d'autres. Elle avait constamment peur, qu'elle disait, et pourtant il ne se voyait sur son visage jamais qu'un insolent sourire qui semblait généreusement violer la vie.
"Je ne sais pas... ça fait toujours peur, la première fois qu'on meurt", plaisanta la grande blonde, "mon vieux, il m'a dit un jour que le courage croît en osant et la peur en hésitant. Mais je pense pas qu'on puisse être courageux sans avoir peur et hésiter. J'ai pas de réponse à te donner à part de penser à comment tu peux utiliser ta peur. Je n'ai jamais utilisé la mienne, et je regrette. Ne fais pas la même erreur que moi."
Elle se tut finalement, jugeant qu'elle en avait assez dit sans chercher à partir sur ses sentiments à elle, sujet qui ne servirait à rien dans leur galère. La jeune femme se contenta de fixer Levi sans rien ajouter; surement n'y avait-il réellement plus rien à dire et elle était là pour écouter son Tribut autant que pour lui parler. Elle savait bien qu'elle ne supporterait pas sa mort, même si parfois elle l'espérait. Et si Levi mourrait, elle se tuerait. Elle le rejoindrait dans un endroit où dorment ceux qui je souffrent plus, où elle croiserait peut-être tout ceux qu'elle a aimé et qui lui manquait plus que l'absence même. Se donner la mort était à la fois très lâche et très courageux; elle le ferait pour lui, s'il ne reviendrait pas.
"Je peux te promettre une chose, même si je n'ai rien à t'apprendre. Je serai là pour t'accompagner Levi, où que tu ailles", elle marqua une pause puis reprit, le couvant gentiment du regard, "et si tu ne reviens pas, je ferai mon possible pour qu'on ne t'oublie pas. On se retrouvera, je te le promet."
Ça, elle le savait: morts ou vivants, ils se retrouveraient. Levi peuplerait sa vie à l'infini car il avait posé une main sur cet endroit sensible de Sage qui s’appelait le cœur; il s'y était brodé mieux que quiconque, comme Swain à l'époque de leur enfance. Pourtant, s'étant trouvé trop bavarde l'exubérante amoureuse du Capitole se tut; elle avait l'impression de s'être embrouillée dans ses sentiments, même si ce n'était pas le cas. Son discours restait le même: la vie est un combat, la mort une aventure et il n'y a pas de fin qui vaut mieux que l'autre. la vie et la mort se valaient dans son esprit un peu spécial. Mais elle ne pouvait survivre une seconde fois à la mort. On ne triche pas une seconde fois avec elle.
C'était dur d'accompagner quelqu'un au bout d'une histoire pareille, sans exercer de pouvoir, sans souffrir dans la compassion mais comprendre avec empathie. Être mentor était surement plus difficile que d'être prostituée; mais pour Levi, cela valait le coup car il peuplait sa vie à l'infini.
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| Sujet: Re: IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne Lun 9 Juin - 18:46 | |
| Certains n’auraient même pas pris la peine de lui répondre. D’autres se seraient moqués ouvertement de sa question. Certains auraient peut-être sorti des phrases toutes faites, sans y croire réellement. Pourtant, Sage ne fit rien de ces trois propositions qui aurait, soyons honnête, profondément agacé le jeune garçon, qui était déjà trop à fleur de peau pour son propre bien. Elle rigola quand même un peu, mais pour toute réponse il esquissa un sourire gêné.
Il écoutait sa réponse avec une attention toute particulière. Parce qu’il avait besoin de chacun de ces mots, pour avancer, pour lever un peu plus la tête dans ces instants fatidiques qui l’attendaient de pied ferme. Il en avait besoin, s’il voulait avoir un millième d’espoir de suivre la route de son mentor et sortir vivant de ces jeux. Il n’y croyait pourtant pas. Il n’y avait jamais cru. Mais dans le fond, c’était parce qu’il ne savait pas comment s’y prendre. Parce qu’il croyait que sa peur permanente ne pouvait être qu’un frein dans son chemin vers la survie. Mais là, elle lui disait d’utiliser sa peur. Et quiconque connaissait Levi, savait que de la peur, il en avait à revendre. Peur de tout, peur d’un rien.
Il hocha la tête lentement, comme un enfant qui approuverait les propos de son ainé. C’était un peu le cas, en fait. A seize ans, on était encore un gamin. Un gamin qui devait faire face à la vie, à la mort, à la cruauté de ces adultes qui voyaient en ces âmes innocentes un moyen de s’amuser, de jouer avec le peuple. Un jeu profitable en tous points. Sauf pour les victimes. Mais de toutes manières, c’était trop tard pour Levi d’y penser. Beaucoup trop tard. Il ravala ces pensées sombres et reporta son regard perçant sur la mentor. Celle qui lui promettait de l’accompagner où qu’il aille. D’honorer sa mémoire. De le retrouver. Une boule au fond de sa gorge venait naître doucement alors qu’il entendait ces quelques paroles. Il se mordilla la lèvre inférieure, ne sachant même plus quoi penser, ni quoi dire.
« Merci. », souffla-t-il finalement. Un remerciement qui voulait dire beaucoup. Merci pour la réponse. Merci pour ces promesses qu’il ne ferait probablement jamais s’exécuter, puisqu’il serait déjà six pieds sous terre.
« Je n’ai pas envie de n’être qu’un cadavre de plus dans l’arène, qu’on oubliera en une semaine à peine, quand le vainqueur écrasera tout le monde. », Avoua-t-il, en écho aux propos de la jeune femme. Ses paroles étaient ambiguës. Qu’est-ce qui lui posait le plus problème ? Le fait de mourir et de ne pas sortir vainqueur, ou le simple fait de mourir indignement aux yeux de tous, comme un animal qu’on pleure un instant, en attendant le prochain qui passera par-là ? Lui-même n’était pas certain de la réponse à ces questions.
« Apprend-moi à maîtriser ma peur, alors. S’il-te-plaît. A ne pas la montrer. J’ai peur. Tout le temps. Même en dehors de l’arène, j’ai toujours eu peur, même si je n’avais rien à craindre. Avant, on se moquait seulement de moi. Mais là, ce ne sont pas quelques moqueries qui m’attendent au tournant. C’est pire. Bien pire. Alors là, quand le danger me poursuit vraiment, j’ai peur - tu vois… - de perdre la tête, pour de bon. Je crois que ça a déjà commencé, parce que depuis que mon nom a été appelé, mon esprit fonctionne à l’envers, et je ne sais plus ce que je veux. »
Il respira profondément après sa petite tirade, qui avait besoin de sortir. La confusion qui émanait de ces propos était la même qui se déroulait dans sa petite tête blonde. Ou plutôt rousse. Là n’était pas la question, d’ailleurs.
« J’ai l’impression d’être déjà aussi fou que certains vainqueurs, comme Jai… », Il ferma la bouche, se retenant de citer son autre mentor. « Enfin, tu vois. », Se rattrapa-t-il maladroitement, se frottant la nuque. Qu’est-ce que cela allait donner, s’il sortait vivant de l’arène ? Comment est-ce que certains parvenaient à garder un esprit plus ou moins sain, après tout ça ?
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| Sujet: Re: IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne Lun 9 Juin - 23:20 | |
| We get older by the hour. Levi & Sage Il la remercia et elle ne lui offrit qu'un étrange sourire sur lequel la peur et la douleur ne semblait n'avoir aucune prise; mais Levi fréquentait Sage depuis bien assez longtemps pour connaitre ce masque qu'elle posait sur son visage pour se prémunir contre le monde extérieur; elle souriait, tout le temps. Elle souriait parfois même quand elle pleurait. Alors devant lui, la jeune femme semblait avoir une confiance et un aplomb extraordinaires tout en lui disant qu'elle avait peur de tout et qu'elle ne se sentait jamais en sécurité; c'était la plus stricte vérité. Le remerciement du jeune homme sembla révélé beaucoup en un seul mot et ne trouvant rien à dire, Sage évita de le prouver par des paroles. Elle hocha simplement de la tête, conciliante, chaleureuse. C'était un accord tacite entre eux; pour le reste, le silence suffirait. Pourtant lorsque Levi lui clarifia sa pensée, Sage se redressa vivement sur son siège, les yeux grands ouverts et les pupilles si étrécies qu'elles en ressemblaient à des têtes d'épingles. Des paroles qui faisaient écho à des pensées qu'elle avait, intimes. Ne pas mourir en anonyme.
"Je comprend", fit Sage avec un air étrangement fasciné, comme rendu extatique par les paroles du jeune homme.
C'était comme donner du sang à boire à un chien, ce genre de choses, dans l'esprit de la blonde. Elle l'écouta finalement lui demander d'apprendre la peur. La contrôler, ne pas la montrer. La peur était importante car elle était le moteur de survie de tous les animaux; tous les êtres ont peur et c'est ainsi qu'ils survivent, ligotés à leurs instincts. Elle appréciait la finesse de ce jeune homme pas comme les autres qu'elle devait conduire à l'abattoir. La blonde l'écouta sans l'interrompre, sans le bousculer. Elle comprenait une partie de sa souffrance, mais ne semblait pas y compatir du tout: Sage n'était pas un monstre, mais elle avait cette étrange distance qui lui permettait de ne pas sombrer avec les autres. De tenir le coup; car sombrer dans la peur avec Levi aurait précipité l'adolescent dans la dinguerie. Elle le savait bien.
Le laissant reprendre son souffle, Sage sentait bien que Levi était en pleine confusion. Elle n'était pas la meilleure au jeu de la stabilité émotionnelle mais elle connaissait sa place, son rôle. Elle devait garder un œil sur lui et passer son temps à lui dire qu'elle ne savait pas -qu'elle ne savait rien- deviendrait difficile à vivre pour lui, à la longue. Pourtant, elle sourit plus largement quand Levi s'empêcha de citer Jaime, l'ancien mentor de Sage et le sien, à présent.
"Jaime est dingue, c'est un psychopathe et il a plusieurs personnalités", dit Sage en haussant les épaules comme si elle disait qu'il avait un rhume ou un bouton, "c'est un bon mentor quand on le satisfait."
Elle savait de quoi elle parlait, elle qui l'avait déçu sur toute la ligne, jusqu'au fait de survivre sans tuer personne, par un coup de chance. mais elle était également la preuve vivante que ce genre de chose pouvait arriver; tout pouvait arriver. Elle en était la preuve. La jeune femme sourit plus largement et sr touchant le crâne de l'index, elle interpela son tribut:
"J'ai passé trois mois en psychiatrie au Capitole. J'ai des névroses avancées. Si tu survis, tu seras comme nous, ou tu seras parfaitement sain. Tu ne peux pas savoir à l’avance."
Son ton semblait encore un peu plus énigmatique que précédemment et l'attirant vers elle en lui offrant l'accolade, un bras passé en travers des épaules du jeune homme, la mentor reprit sur un ton plus doux, après un soupir:
"Parmi les fous, tu crains d'être fou", elle avait parfois avec Levi cette promiscuité étrange et un peu équivoque qu'elle offrait aux Tributs les plus âgés qui passaient entre ses mains; ce n'était pas volontaire. Levi était un garçon qu'elle appréciait car il l'admirait. Elle ne se rendait pas compte de toutes ses attitudes, "quand tu as peur, ris. Ou demande toi de quoi tu as peur."
C'était la seule chose dont elle était sûre: elle-même se montrait insolente et bravache pour oublier qu'elle avait peur, pour cacher l'odeur de la frayeur qui planait autour d'elle. Rire et être fou à en mourir de rire; elle n'avait aucune solution en réalité, mais faisait de son mieux. La jeune femme marqua une longue pause, réfléchissant bien à quoi répondre à la demande du roux.
"Peut-être faut-il penser... je veux dire, savoir ce qui te fais peur. La peur de l'échec nous conduit à ne surtout pas prendre de risque. La peur primale nous pousse à agir pour nous oublier. Si tu veux maitriser la peur, tu dois accepter qu'il existe LES peurs. Développer le courage commence par la connaissances des peurs."
Elle, elle avait peur de tant de choses; peur d'avoir mal, peur d'être seule. Peur d'être rejetée comme d'être aimée. Et peur de voir ses proches disparaitre. Pourtant, elle n'avait plus peur de la mort, mais devait aiguiller Levi sur le chemin glissant des effrois. Il lui demandait et elle réfléchissait pour donner des réponses constructives, elle la pauvre bipolaires triturées par ses névroses.
"Quand j'ai peur, tu vois...", elle poussa un soupir et ferma les yeux pour se concentrer, "soit je souris, soit je me dis que tout ça n'est qu'une illusion. Ou alors je rentre dans le lard à ce qui me fait peur pour en finir tout de suite. Parfois, quand je ne sais pas de quoi j'ai peur, je cherche quelqu'un contre qui le blottir ou avec qui faire l’amour -je sais c'est con, mais après je suis tellement abrutie par la fatigue que je n'ai plus d'angoisse. Sinon, je me dis que ça n'a plus d'importance. Ou alors que.. oui j'ai peur, mais que c'est juste une émotion, un signal d'alarme. Les peurs, c'est très personnel et j'aurai du mal à vraiment te donner une technique infaillible, Levi."
Elle prononça son prénom avec une certaine tendresse, tout en le relâchant de son étreinte étrange. Sage se considérait un peu comme une grande sœur pour le roux, mais ses gestes étaient parfois trop tendres; pourtant rien dans son comportement ne signifiait qu'elle cherchait à lui plaire outre mesure: c'était juste l'attitude générale de Sage avec ceux qu’elle aimait. Et elle sourit à nouveau, cette fois pour chasser la peur soudaine qu'elle ressentit de perdre Levi dans quelques temps. La peur jugulée par un rire tonitruant, soudain; elle se moquait de sa peur à s'en faire pleurer, les yeux un peu humides et pourtant pleins de morgue. Rire à s'en faire mal à la gorge, à s'en faire mal au cœur.
Qu'elle était bizarre, Sage. Mais elle ne savait être que ça.
Code by Silver Lungs |
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| Sujet: Re: IV,1. We get older by the hour. ft. S.O. Payne Mar 17 Juin - 2:07 | |
| Bien qu’il ne lui avouerait jamais, du moins pas à voix haute, Levi trouvait que Sage était un peu à l’image des jeux. Elle était un tourbillon de peur, qui passait du rire au sérieux, qui évoquait la mort avec un rapport tantôt si proche que distant. Elle était un peu comme un ouragan social, accentuant par ses rires aussi soudain que fort la folie de la situation. Elle lui offrait ses sourires et sa folie avec une sincérité déconcertante. Ce n’était pas le genre de conseils auxquels il s’attendait. Venant de ses mentors, il s’attendait à des conseils tous faits, dignes des entraîneurs expérimenté qu’ils devaient être. Des ‘fais-ci, fais-ça.’, des techniques de survie. Les mêmes discours que les autres mentors devaient ressortir d’une voix mornes à leurs pouliches de l’année. Mais là, c’était bien différent. Parce que c’était les conseils de Sage, et elle ne faisait rien comme les autres. Pour être honnête, Levi préférait cela. Il préférait quelqu’un qui ne prétendait pas être plus fort qu’il ne l’était vraiment. Il préférait quelqu’un qu’il ne comprenait pas toujours, plutôt que quelqu’un de placide qui ne demandait pas une immense réflexion – tant sur la personne en face que sur soi-même. Levi avait rarement rencontré des gens tels que Sage. Et les rares autres personnes qui semblaient se rapprocher de son comportement singulier ne lui arrivait très certainement pas à la cheville.
Levi se retrouvait d’ailleurs parfois en Sage. Le fait qu’elle aussi, ait peur. Cela le rassurait. Sa peur était différente de la sienne, et sa façon de la gérer aussi. Il écouta chacun de ses mots. Elle admettait sa propre folie. Mieux : elle l’acceptait. Il se mordilla la lèvre inférieure. Il ne serait jamais capable d’accepter sa propre folie. Celle qui le rongeait depuis quelques heures devait être bien légère face à celle qui se déroulait depuis des années dans l’esprit de la jeune femme. Elle était passé par bien plus de choses, avait plus d’expérience que lui, et pourtant, c’était lui qui se plaignait. C’était lui qui cherchait le réconfort, qu’elle lui offrait par son geste affectueux. Un geste qui lui rappelait les étreintes de sa mère. Il était peut-être un peu trop tôt pour être nostalgique…
« J’ai l’impression d’avoir peur de tout. C’est dur, de déterminer ce qui me fait réellement peur. Je sais de quoi j’ai peur, en général… : J’ai peur de mourir, j’ai peur de revenir, j’ai peur de changer, de perdre la tête… j’ai peur des autres… Même si j’essaye de penser à autre chose, ça ne marche pas. C’est comme le refrain d’une chanson agaçante, c’est toujours là, à se répéter dans un coin de ma tête… », Souffla-t-il en relevant son regard vers Sage. Il avait conscience qu’il devait avoir l’air d’un gamin perdu, à l’heure actuelle. Un gamin sans repère. Qui cherchait dans les mots de son mentor quelque chose à quoi s’accrocher. Cela marchait, en partie. Il avait l’impression de s’accrocher, mais aussi de se prendre de nouvelles bourrasques en pleine figure. Ou plutôt, des bourrasques qui venaient de partie de lui qu’il n’avait jamais cherché à explorer auparavant. Il s’était juste dit que la peur était la peur, rien de plus. Qu’il ne pouvait rien n’y faire, si ce n’était fuir le danger à grandes enjambées. Mais là, le danger n’était plus à fuir, et c’était bien tout le point de cette conversation des plus singulières. Il savait que cette conversation était essentielle pour la suite des évènements. Essentielle pour sa santé mentale mise à rude épreuve, pour la première fois de sa pauvre existence, ou presque.
« Je dois me trouver ma propre technique, alors ? Pour l'arène... Et le reste...? Je ne sais pas si je serais capable de rire, pas avec autant de… naturel. Ni trouver le courage nécessaire pour vaincre mes craintes. Mais je peux essayer de… prétendre ? », Murmura-t-il, incertain de ses propres paroles. Prétendre. C'était tout ce qu'il savait faire. Prétendre et fuir. Cela faisait rarement bon ménage, et c'était tout le paradoxe de l'existence de Levi. Il baissa le regard, le portant un instant sur le chien de la femme, pensif. Il passa sa main dans ses cheveux, glissant ses doigts dans ses boucles cuivrées, d’un geste distrait. « Je ne pourrais pas chercher le réconfort chez les autres, une fois dans l’arène… même en dehors. », Reprit-il finalement, après son court silence. Il choisissait ses mots avec soin, bien plus prude que la jeune femme. Faire l’amour, se blottir dans les bras de quelqu’un… Ce n’était pas quelque chose auquel le garçon était familier. Il était peut-être en retard par rapport aux autres adolescents de son âge, mais il ne pensait jamais à cela. Il pensait trop à lui-même pour s’offrir à un autre être humain de la sorte, quelque en soit la manière. Il se surprit même à rougir, légèrement. Se balançant d’un pied sur l’autre, mal à l’aise. Il était trop innocent pour le Capitole qui s’apprêtait à l’accueillir.
« Merci, en tout cas. Merci de me répondre comme cela. Tout est encore confus, il me faudra sûrement de longues heures de réflexions pour pouvoir comprendre tout cela, mais ça aide. Beaucoup. », Annonça-t-il avec une profonde sincérité. Au moins, dans cette épreuve, il avait la présence excentrique et un peu folle de sa mentor. L’entourage de Levi n’avait jamais compris l’attachement et l’admiration que portait l’adolescent à la vainqueur, mais il s’en était toujours moqué. Aujourd’hui plus que toutes les autres fois, parce que c’était peut-être le seul moyen pour lui de s’en sortir au moins jusqu’à l’arène.
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