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 if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN

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Kathleen S. Harper
DISTRICT 9
Kathleen S. Harper
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MessageSujet: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeDim 9 Déc - 23:06


flashback ♆ début juin 2311.
Inspirer, expirer. Inspirer, expirer. Tous les moyens étaient bons pour essayer de calmer les battements frénétiques de mon cœur. J’allais enfin partir en mission. Ma toute première. Enfin, la première officielle, tout du moins. Une équipe de cinq personnes, menée par le sergent Jenkins. Notre objectif était très simple. Nous rendre dans un entrepôt en bordure du district dix, y rencontrer notre contact, récupérer la cargaison, et repartir aussi sec. Rien de bien palpitant, et à priori rien de dangereux. Mais j’appréhendais énormément ce moment. J’allais enfin pouvoir montrer à tout le monde que j’étais capable d’aider le treize. C’était étrange à quel point j’étais à la fois excitée, et terrifiée à la fois. A peine une heure avant le départ en mission, j’étais déjà prête. Tenue de combat enfilée, matériel prêt à l’emploi, ordre de mission bien intégré. Je trépignais littéralement d’impatience. J’avais profité du répit accordé avant le départ, pour aller voir Billie, à l’infirmerie. Non pas que j’avais besoin de soins, mais je m'étais jurée de passer quand le moment serait venu. Et cette fois, j’y étais. Mon grand moment. Je ne lui en avais pas encore parlé, de cette mission. Bon, à côté de ça, cela ne faisait que deux jours que j'étais au courant. A vrai dire, je n'étais même pas certaine de sa réaction. D'un côté, je savais qu'elle serait heureuse pour moi. Après tout, ce n'était pas comme si je lui avais rabâché les oreilles sur ma folle envie de sortir des souterrains un coup de temps en temps. Mais de l'autre, je savais qu'elle aller se ronger les sangs jusqu'à ce que je revienne. Enfin, c'était tout à fait son genre. De plus, je savais qu'elle allait faire exprès de dramatiser la chose. Elle était vraiment douée pour ça. Quand, enfin, elle m'avait vue dans l'uniforme des soldats du treize, elle avait affiché sa moue boudeuse. « Oh allez. » lui avais-je dit sur un ton amusé. « Tu me remercieras quand t'auras autre chose que de la vieille purée en sachet pour manger. » après mon retour de la mission, elle aurait de la vieille purée en sachet ET de la viande fraîche en accompagnement. S'en était suivi une de nos 'disputes' qui sonnait tellement faux que c'en était comique. Malgré mon attitude désinvolte et bonne enfant, je n'osais pas lui confier mes craintes à propos de cette sortie. J'avais un espèce de mauvais pressentiment, mais je préférais le garder pour moi, histoire d'éviter de passer pour une grosse paranoïaque. C'est alors que mon oreillette grésilla. Il était l'heure. Je lui adressais un sourire en me levant, avant de lui ébouriffer les cheveux. « Sois sage surtout en attendant que je revienne ! » je lui avais lancé avant de sortir de l'infirmerie en lui tirant la langue. Il était à peine vingt-et-une heures. Si tout se passait bien, nous serions de retour aux alentours de cinq heures du matin. J'avais rapidement rejoint mon équipe dans les hangars, où notre hovercraft nous attendait. Si seulement j'avais su, j'aurai dit au revoir à Billie.


♆ mi-décembre 2311.

Elle semblait si lointaine cette époque. Celle où je pensais que j'allais mieux, que les choses allaient enfin s'arranger. Aujourd'hui, tout ce que je ressentais, c'était de la haine et de la colère. Envers le district treize, envers le Capitole, envers Miléna, envers... Absolument tout et tout le monde. J'étais de nouveau enfermée, et j'avais horreur de ça. J'étouffais tellement dans cette pièce, que j'aurai fait n'importe quoi pour sortir d'ici. Cela faisait à peine deux semaines que j'étais rentrée... Enfin, qu'on m'avait forcée à rentrer, plus exactement. Et je n'avais pas mis le nez hors de cette chambre d'hôpital pour le moment. Oh, je ne me leurrais pas. Je savais très bien que j'allais y rester jusqu'à la fin de mes jours. Le fait était que je menaçais chaque personne qui avait le malheur de passer par là, ou que j'essayais de les étrangler, ou dieu seul savait quoi encore. Je ne laissais personne m'approcher, même pour soigner mon bras cassé à cause de Miléna. Ils étaient obligés de me mettre sous sédatif pour enfin réussir à faire leur saloperie de chirurgie accélérée. Le problème majeur étant qu'ils devaient recommencer régulièrement. Certes, cette technique permettait aux os de se ressouder plus rapidement, mais il fallait accorder un minimum de repos au pauvre bras blessé. Chose que je ne faisais absolument pas. C'était de leur faute, aussi. Ils me mettaient cette putain de camisole pour que soit-disant, je ne me blesse pas. Mais la seule chose que je faisais, c'était de tirer sur les liens, d'essayer de me dégager de l'entrave de cette saloperie. Et me bousiller encore et toujours le bras par la même occasion. Enfin, heureusement pour moi, je n'étais pas non plus en permanence affligée de ce foutu vêtement. Non, c'était juste pour trente pour cent de mon temps. Les soixante-dix restants, j'étais bourrée de médicaments qui me faisaient comater. Ce qui au final, n'était pas forcément mieux. Voire même, pas mieux du tout. Depuis hier, j'étais étrangement calme. Et ils m'avaient pour une fois autorisée à me promener dans ma cellule -car ce n'était rien d'autre qu'une cellule, il ne fallait pas se voiler la face- sans être complètement amorphe, et sans avoir la camisole. Et dieu, que ça faisait du bien d'être libre de ses mouvements, et d'avoir l'esprit clair dans un même temps. Même si libre, était un bien grand mot. Après tout, j'étais toujours enfermée.

J'étais assise sur mon lit, adossée sur le mur auquel il était collé. Immobile, les yeux fixés sur le mur gris qui me faisait face, je pensais à tellement de choses à la fois que mes pensées étaient tout sauf claires. J'avais tellement de questions qui demeureraient sans réponse. Qu'est-ce que j'allais devenir ? Quand arrêterait-on de prendre des décisions pour moi ? Allais-je sortir d'ici un jour ? Si oui, quand ? Et dans quel état ? Le bruit de la clé dans la serrure me sorti de mes pensées. Je penchais la tête sur le côté, me demandant qui cela pouvait bien être. Ce n'était pourtant pas l'heure de manger, ou de prendre les médicaments prescrits pour mes troubles du sommeil. La porte s'ouvrit pour laisser apparaître Billie. Ma Billie. Elle semblait tendue, et avait l'air... Différente de la dernière fois. On aurait presque dit qu'elle était malade. J'arquais un sourcil en soupirant d'un air exaspéré, avant de reporter mon attention sur le mur face à moi. « Alors c'est comme ça que ça se passe... Ils t'envoient toi, pour essayer de m'amadouer ? » je demandais d'un air las, sans vraiment attendre de réponse. Inconsciemment, j'avais commencé à tripoter les cicatrices autour de mes poignets. La simple présence de Sweenage me mettais mal à l'aise. Je ne voulais pas avoir affaire à elle. C'était trop... Douloureux.

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MessageSujet: Re: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeLun 10 Déc - 18:57





my life ain't nothing but this carnival of rust



Elle était en vie. Elle était vivante, bordel, et personne n'avait voulu me le dire. On m'avait plongée dans l'ignorance, abandonnée dans cette abysse de douleur. On m'avait laissée croire que ma vie se résumerait désormais à ce néant qui enlaçait ma poitrine. À ce champ de bataille que l'annonce de la mort de Kathleen avait ravagé. Où les cadavres s'entassaient. Toujours le même, en million d'exemplaires. Toujours son visage d'opale, éternellement figé dans une de ces mimiques oscillant entre le sourire amical et la grimace moqueuse ; toujours ses yeux azurs, fixés sur un point invisible aux miens ; toujours son corps, immobile, désespérément immobile. Et la voix. Cette voix, horrible, qui me susurrait, cruelle, qu'elle était morte alors que l'odeur pestilentielle de la mort embrumait l'air, partout où j'allais. Où les bras fantomatiquement décharnés de la Mort m'encerclaient, dans une étreinte tendrement morbide, attendant sagement que je vienne l'enlacer à mon tour. Où l'espoir avait été éradiqué des sous-terrains du Treize, de la surface de la terre, comme ça, en un claquement de doigt. En trois mots. Trois terribles mots. Kathleen est morte. Elle est morte, qu'ils m'avaient dit. Ils avaient osé me faire croire pareille abomination, transformer ma vie, où les séances de bonheur étaient calquées sur mes entrevues avec ma meilleure amie, en véritable cauchemar. Car, partout où je me rendais, il n'y avait que son absence. Il y avait cette douleur qui lancinait ma poitrine, s'amusait à la déchirer, lentement. Ouvrir les plaies jusqu'à se saisir de mon cœur à pleines mains et en retirer tout semblant de vie. Je ne vivais plus ; me contentais d'exister. Partout, dans le centre de restauration, à l'hôpital, dans ma propre chambre ; partout, le fantôme de Kathleen me poursuivait. Quand je fermais les yeux, les siens s'incurvaient sous mes paupières ; dans le silence dans lequel je me plongeais sciemment, seul son rire parvenait encore à résonner à mes oreilles ; chaque bouffée d'air, à défaut d'être salvatrice, obstruait un peu plus mes poumons, parce que je me rappelais que ceux de ma meilleure amie étaient désespérément inerte, comme le reste de son corps. Et, j'apprenais par Miléna que ce fantôme qui me poursuivait sans cesse n'était que chimère ? Que, tous ces mois à avoir l'horrible sensation de ne plus être vivante, étaient fondés sur un mensonge ? Non. Non, le Treize n'avait pas pu me faire ça. Et pourtant... Pourtant, dans mon crâne résonne l'ultime phrase qu'elle m'a dite, sur un ton enjoué, comme toujours. Sois sage surtout en attendant que je revienne ! Et moi, je m'étais nourrie de cette phrase, comme une affamée à qui on sert des mets délicats, je m'en étais abreuvée, à la manière d'un vampire suceur de sang. Parce que cette phrase, c'était tout ce qui me restait. Mon espoir s'y résumait. Alors, silencieusement, j'attendais. Son retour, sa résurrection, que sais-je. J'attendais simplement, et c'était peut-être la seule raison pour laquelle je me tenais encore debout à cet instant. Parce que nous n'avions pas eu d'adieu, juste la promesse de retrouvailles prochaines. Et je m'y étais accrochée, avec la force qu'on n'attribuait qu'aux désespérés, rescapés d'un naufrage qui tenaient bon, accrochés à un rocher, attendant qu'on vienne les secourir. Et, plutôt que de me sauver, l'annonce que Kathleen n'était pas morte m'avait fait lâcher prise. Et, doucement, je perdais pied, peinais à remonter à la surface et me regardais, presque passivement, couler.

J'avais longuement fait des pieds et des mains, pour la voir. Juste croiser ses yeux bleus et me dire qu'elle était bel et bien réelle. Je n'en demandais pas plus. Je ne demandais pas que ce néant qui habitait ma poitrine disparaisse, qu'un sourire revienne ourler mes lèvres, que mes yeux reprennent leur habituelle couleur émeraude plutôt que l'abominable gris anthracite dont ils avaient arboré la teinte. Je n'étais plus que l'ombre de moi-même. Depuis plusieurs semaines, apercevoir mon simple reflet dans le miroir était une réelle torture. Si personne ne m'en avait fait la remarque, je savais pourtant qu'ils voyaient avec horreur la terrible décadence fulgurante dont j'étais victime. Je peinais à traîner ma carcasse, et si je me levais le matin, c'était essentiellement pour me rendre au centre de soins et faire ce pour quoi je m'étais battue : guérir. Guérir des blessures lorsque les miennes sont irréversibles. Soigner des plaies lorsque les miennes s'inscrivent en profondeur dans ma poitrine, s'y incurvent, encore plus fort que la cicatrice qui témoigne de ces horreurs que j'ai vécu dans l'arène. Depuis peu, j'ai souvent l'impression que le sort prend un malin plaisir à s'acharner sur moi : il m'avait arrachée bien trop de personnes pour que ce ne soit que pure coïncidence. Et, parfois, lorsqu'il se juge assez clément pour m'en rendre quelques unes, j'ai la terrible sensation que ça ne sera jamais plus comme avant, que nous avons quand même perdu quelque chose d'essentiel. Et cette impression tenace que j'avais éprouvé en retrouvant Avalon n'a de cesse de heurter ma poitrine avec force lorsque je songe que Kathleen ne se trouve qu'à quelques couloirs de moi. Ils l'ont enfermée, dans une chambre isolée du reste de l'hôpital, Miléna m'a dit qu'ils l'ont même mise dans une camisole. Et, une fois encore, ils nous traitent comme des fous. La mort de Kathleen aura au moins eu le mérite de me faire ouvrir les yeux et, lentement, sans même que je ne m'en rende compte, je voyais. Je voyais toutes ces failles dans la justice du Treize, toute la violence dont parfois ils peuvent faire preuve pour obtenir ce qu'ils désirent. Et, dans mon cœur avait point le terrible sentiment de rancœur celui que j'avais jamais tourné uniquement contre le Capitole. Et, à présent, j'en tenais même rigueur à ceux qui m'avaient offerte une seconde chance. Ma foi inébranlable vacille et j'ai envie de m'arracher les cheveux, de hurler pour que cette voix qui insinue le doute dans mon crâne cesse. J'ai besoin de croire en notre cause, de croire au Treize. Même s'ils m'ont mentie, m'ont cachée que Kathleen avait survécu, m'ont trop longtemps empêchée de la voir.

Ils considèrent que je suis prête, à présent. Si j'ai d'abord été victime de quelques nouvelles crises d'hystéries depuis que j'ai appris qu'elle était vivante, j'ai lentement commencé à me remettre, plus pour revoir Kathleen que pour autre chose, certes. Les autres guérisseurs assurent que ce sera bon, pour finalement m'en remettre totalement et ne pas me contenter d'une certaine convalescence. Ils ont finalement accepté et, à peine mon supérieur m'a-t-il communiquée l'information que je suis partie en courant. Dans mon crâne, languide litanie, son nom résonne. Kathleen, Kathleen, Kathleen. Je bifurque brusquement à gauche et je me rends seulement compte que je suis bien trop essoufflée, que j'ai mal aux côtes d'ainsi me démener. Voilà trop longtemps que je me suis contentée de me traîner en avant, loque humaine. Je ralentis donc peu à peu la cadence, jusqu'à littéralement m'arrêter devant la porte de sa chambre. Je reprends d'abord ma respiration, les yeux fixés sur cet unique obstacle entre ma meilleure amie et moi, qui se résume à une simple porte fermée à clef. Pourtant, la même clef demeure au fond de ma poche, semble peser une tonne. Car, soudainement, je me rends compte de tout ce qu'ouvrir cette foutue porte implique. La revoir. Enfin. Enfin... Les doigts tremblants, je me saisis de la clef et, fébrile, la tourne lentement dans la serrure. J'entre dans la chambre, elle est là, assise sur son lit, adossée au mur, les yeux un peu vagues, un peu trop calme pour me paraître normale. Le visage légèrement inclinée, elle posa ses pupilles trop bleues sur moi avant de pousser un soupir et de finalement me délaisser totalement pour se concentrer de nouveau sur le mur. Pourtant, je sais que l'image de son regard, intercepté seulement une seconde, sera désormais impérissable dans mon esprit.

Quelque chose a changé dans ton regard, tu sais ? Et ça me tue. De constater que j'ai sans doute réellement perdu ma meilleure amie, même si tu es encore en vie. Même si tu es juste en face de moi. « Alors c'est comme ça que ça se passe... Ils t'envoient toi, pour essayer de m'amadouer ? » Le timbre de ta voix parvient à mes oreilles et y bourdonne quelques instants. Tu sais, combien de temps j'ai attendu, avec l'espoir fou que j'entende de nouveau cette même voix ? Elle s'inscrit en moi, dans mon esprit et je me refuse d'en oublier la moindre intonation. Pas maintenant que je sais combien je peux te perdre rapidement. Imperceptiblement, je me balance nerveusement d'un pied sur l'autre, comme une enfant qui serait en train de se faire réprimander. Comme une gosse qui n'a plus aucune confiance en la vie et en elle-même. Tu as tout emporté avec toi, Kathleen. Tout, même moi. Et je crois que tu as oublié de ramener cette partie si essentielle de mon être avec toi. Même si je n'espérais pas que tout se volatilise comme ça, je constate durement, un peu fatalement, que le néant est toujours là. Je n'ai toujours pas la force de sourire. Te sourire. Rien, rien n'a pu y faire. Pas même le soutient inébranlable de mes sœurs, d'Aiden ou même de Galaad n'a pu m'aider à surmonter cette perte si terrible. J'ai pensé que tu aurais été la seule capable de me redonner le sourire, malgré l'état dans lequel j'étais. C'est ironique, hein ? Parce que c'est toi – involontairement et indirectement, certes – qui m'a plongée dans cette détresse. C'est ton absence qui m'a bouffée de l'intérieur. Tu n'étais pas là et rien que cette idée terrible avait fini de m'achever. Tu ne serais plus jamais là. J'avais fini par le comprendre. Pas par m'y faire. Je n'aurai jamais pu m'y faire, tu le sais. On a toujours été trop soudées, trop fusionnelles. Tu étais au-dessus de tout, au-dessus de tous. Ma moitié, mon alter ego. Mon âme sœur, en quelque sorte. Et ta disparition a tout détruit, tout arraché. Tout ne se résumait qu'à un horrible cataclysme, après que la tornade de ta mort soit passée. Tu me tues. À moins que tu m'aies déjà tuée. Je n'en sais rien. Je ne sais plus. Je n'y arrive plus. Rends-moi mon sourire, Kath. Rends-moi ma vie. « En réalité, personne n'était d'accord pour que je vienne. » Ma voix est un peu rauque. Si basse qu'elle ressemble à un murmure. Si basse que je ne sais même pas si tu l'as entendue. Pourquoi n'ont-ils pas voulu ? Parce qu'ils jugeaient que je n'étais pas prête à te faire face. Toi, que je n'avais pas su enterrer. Dont le deuil était impossible. Ils disaient que je n'étais pas prête à faire face à cette dure réalité où tu étais finalement en vie, où j'avais souffert pour rien. Où tu es juste en face de moi mais si différente que tu sembles être quelqu'un d'autre. Si différente que j'ai la sordide impression que c'est l'autre qui me fait face. Et, une fois encore, ça me tue un peu plus.



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MessageSujet: Re: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeJeu 13 Déc - 22:27

Malgré ce qu’ils m’avaient fait au Capitole, il y avait certaines personnes en qui j’avais toujours cru. Enfin, jusqu’à un certain point. Jusqu’à ce que, finalement, après le premier mois dans leurs geôles, j’avais tout simplement… Abandonné tout espoir d’être sauvée. Je savais que c’était tout simplement impossible, que plus rien, plus personne ne viendrait à ma rescousse. Ils m’avaient simplement abandonnée, comme on jette un objet usagé après qu’il ait fait son temps. Les mois qui avaient suivis, mes bourreaux ne cessaient de me répéter que le district que je servais m’avait simplement laissé rôtir ici, plutôt que d’essayer de lancer une mission de secours. C’était mon cruel destin, de mourir ici. Et je les avais crus. J’avais gobé absolument tout ce qu’ils me disaient. Aujourd’hui encore, je restais intimement persuadée que les gens d’ici – ou du moins les plus influents – étaient au courant de la survie des membres de l’équipe. Enfin, la survie post-mission, puisque cet état avait bien rapidement changé avec la mort consécutive de mes coéquipiers. Jusqu’à ce que je tue moi-même l’un d’entre eux pour me sauver. Et personne, non personne n’avait levé le petit doigt. Combien d’autres vies avaient-ils sacrifiés ainsi ? Combien d’autres personnes avaient été brisées dans la guerre du Capitole et des rebelles ? D’un côté comme de l’autre, aucun n’était digne de confiance, finalement. Ils ne valaient pas mieux les uns que les autres. Il était clair que je n’étais pas la première, et que j’étais loin d’être la dernière qui aurait à pâtir de la cruauté du genre humain. Tout ça pour un peu plus de pouvoir. Si le treize gagnait la bataille, Coin serait-elle vraiment une meilleure présidente que ne l’était Snow ? Il n’y avait rien de moins certain. Et ceux qui affirmaient que les choses allaient changer, étaient tout simplement des menteurs. Des menteurs et des tricheurs.

Et au milieu de tout ça, il y avait les victimes. Comme les habitants des districts. Comme Billie, comme sa famille, comme Aiden, comme les tributs chaque année. Ou encore moi. Et le seul droit que l’on avait, c’était de mourir pour une cause ou une autre. Dans les Jeux, à la vue de tous. Dans la guerre, définitivement seuls. Personne ne méritait ça. Pendant soixante-quinze ans, le Capitole avait eu le plein pouvoir. Il pensait s’être débarrassé du treize en rasant leur district, et avait assis son autorité en instaurant les Jeux de la Faim, histoire que jamais personne n’oublie. Ils avaient fait en sorte de nourrir cette crainte, et cette haine des habitants à leur égard. Certains les vénéraient, comme ces psychopathes des districts riches. Je les avais vus, ces gamins en train de s’entraîner à la vue de tous, sans que personne n’ait le droit de rien dire. Dans le district d’où je venais, un enfant surpris en plein entraînement était immédiatement traîné sur la place publique pour être fouetté au sang, et parfois à mort. C'était la dure réalité de ce qu'était notre vie à Panem. Et cette réalité, je peux la voir partout où mes yeux se posent. Notamment sur Billie. Elle se tient là, l'air mal à l'aise, n'osant pas même s'approcher de moi. Qu'est-ce qu'ils lui ont raconté ? Que j'étais pire que lors de mon arrivée ici ? Que je risquais de lui faire du mal encore ? Visiblement, je lui en ai déjà assez fait comme ça, je crois. Et le pire, c'est que je vais devoir la blesser encore une fois. Pas parce que je le veux. Mais parce qu'il le faut. C'est pour la protéger. La protéger de moi, et de cette aura mauvaise qui plane autour de moi. Elle aura mal, cela ne fait aucun doute. Depuis que nous sommes toutes petites, nous avons toujours tout fait ensemble. Nos moindres secrets étaient connus l'une de l'autre, on pouvait passer des journées entières à ne rien faire d'autre qu'apprécier la compagnie de chacune. On n'avait même pas besoin de parler pour être sur la même longueur d'onde. Les regards que nous nous lancions suffisaient amplement. Et nous avions retrouvé ça, il y a six mois. Nous avions repris notre relation là où elle s'était arrêtée. Bien sûr, nous n'avions pas oublié ce qui nous était arrivé, loin de là. Mais nous avions réussi à passer outre. Nous étions de nouveau une seule personne. Et il avait fallu que tout reparte de travers. Comme si la première fois n'avait pas suffit. Sauf qu'elle avait été celle qui devait vivre avec le souvenir de l'autre. Maintenant elle savait. Elle connaissait le calvaire que j'avais vécu pendant les cinq années après sa moisson. « En réalité, personne n'était d'accord pour que je vienne. » dit-elle à voix basse. C'est à peine si j'ai entendu ces quelques mots. De nouveau, je penche la tête sur le côté, histoire de la regarder. Je plisse légèrement les yeux, me rendant compte que quelque chose cloche. Forcément. Il y a toujours quelque chose qui cloche lorsque je suis dans les parages. Sans que je sache vraiment pourquoi, je m'extirpe du lit sur lequel j'étais assise depuis le début de la journée. Je fais quelques pas dans sa direction, avant de finalement me poster face à elle, les yeux plissés et la tête légèrement penchée sur le côté. Je ne comprenais pas ce qu'elle faisait ici. Enfin... Si, je comprenais, c'était Billie, et sans doute pensait-elle retrouver sa Kathleen. Personne ne l'avait donc prévenue ? Personne n'avait donc essayé de l'empêcher de venir ici, sachant que ce serait difficile pour elle ? Elle qui semblait avoir vécu l'enfer depuis que j'étais partie. Seulement... Pour commencer, elle n'aurait pas du être au courant de mon retour. Elle aurait du rester dans l'ignorance la plus totale. Je la connaissais par coeur, et le fait de savoir, mais de ne rien pouvoir faire... C'était sans doute la pire punition qu'ils pouvaient lui infliger. Encore une chose que je ne pardonnerai pas au district treize. Ils se croyaient tellement invulnérables, tellement intouchables. Au dessus de tout. Sans jamais quitter son regard, je lâche un nouveau soupir. « Pourquoi t'es venue dans ce cas ? » je lui demande doucement, sans prendre d'intonation particulière. Je prévois déjà d'avance sa réponse, ou le genre de chose qu'elle pourra me dire. Qu'elle est là pour m'aider, que je lui ai manqué... Qu'elle est là pour moi, comme elle l'a toujours fait. La vérité, c'est que je n'ai pas besoin d'elle. Ni de personne d'autre. Quitte à passer le restant de mes jours ici, je préfère que ça soit seule. Seule, et sans personne pour interférer avec ma petite tranquillité. J'ai déjà le coeur assez lourd à l'idée de devoir me plier à la volonté du treize, alors il est inutile d'en rajouter avec des personnes qui pourront éventuellement avoir raison de moi. Et de ma pseudo allégeance au Capitole. D'ailleurs, qu'ils aillent se faire foutre, eux aussi. Tout ce que je demande, c'est qu'on me foute la paix une bonne fois pour toute, c'est trop demander peut-être ?

Sans quitter ses yeux du regard, je lève ma main droite vers elle. Vers son visage, qui, je dois l'avouer, m'a énormément manqué. Mais je dois me répéter que je n'ai pas besoin d'elle. Et elle n'a pas besoin de moi. Personne n'a besoin de moi. Je fais glisser le dos de mes doigts gelés le long de sa joue, emportant une mèche de cheveux qui se trouvait là, pour aller la placer derrière son oreille. Je m'approche encore un peu, et me mets légèrement sur la pointe des pieds, rapprochant mon visage du sien. « Je sais pas exactement ce que tu comptes trouver en venant là, mais tu risques d'être déçue. Dans tous les cas, tu ne devrais pas te trouver ici. » je lui murmure au creux de l'oreille. Je laisse passer quelques secondes, le temps qu'elle assimile un peu, puis je m'écarte, cherchant de nouveau à croiser son regard. Je sais quelque part au fond de moi, que ce que je vais y lire va me faire mal. Mais c'est un mal nécessaire. Elle n'ira pas mieux si je suis toujours dans les parages. Ma prétendue mort avait été douloureuse pour elle. Je suis bien placée pour savoir ce que c'est. Ca aurait pris du temps pour qu'elle s'en remette. Je le sais. Oh, je ne dis pas qu'elle s'en serait remise complètement. Moi-même, je ne l'avais jamais fait. Mais elle est forte, elle aurait surmonté ça, et se serait servi de sa douleur pour aller de l'avant, comme une force pour arriver à ses fins. Je m'éloigne de quelques pas, avant de finalement me retourner, de sorte à ce qu'elle ne voit plus que mon dos. Ces six derniers mois, j'ai fais des choses horribles. Mais là, j'ai la vague impression que c'est la pire chose entre tout. « J'ai pas besoin de toi. » je murmure finalement, concentrant mon regard sur le mur en béton face à moi, auquel je trouve soudain un intérêt tout particulier. Crois moi Billie, ça vaut mieux comme ça. Sors. Sors d'ici et laisse moi. Et surtout, ne reviens plus. Ne demande plus de mes nouvelles. Juste... Oublie moi. Oublie moi comme je vais le faire. Parce que... Parce que ça vaut mieux, finalement. Ca vaut mieux pour nous deux. Ca vaut mieux pour toi. Tu n'as pas besoin de quelqu'un comme moi pour empoisonner ton espace.

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MessageSujet: Re: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeMer 19 Déc - 18:22


Ont-ils eu raison lorsqu'ils ont tenté de me persuader que c'était trop tôt pour moi, de te faire enfin face ? Je ne sais pas. Je ne sais rien, sauf que j'éprouvais le besoin viscéral de te voir. Enfin. Après des mois entiers à refuser de dormir, par peur d'accrocher ton regard dans mes songes, à croiser ton fantôme partout où j'allais ; j'avais besoin de te voir, en vie. Tu comprends sans doute, hein ? T'as du éprouver la même chose lorsqu'on m'a tuée, aux Jeux. C'est dans ces moments-là que je me rends compte que t'as toujours été la plus forte de nous deux. Toi, t'as vécu cinq ans en étant persuadée que je mangeais les pissenlits par la racine, à affronter ta propre mort peu de temps après. Moi, quelques malheureux mois ont suffi à transformer ma vie en véritable enfer. Subite décadence jusqu'à m'écraser au sol. Puis tomber, encore. Immanquablement. Parce que tu n'étais pas là pour me rattraper. Et le pire, c'est que je ne peux m'en prendre à personne, sauf au Treize. Ou encore, à moi-même. Je sais que si je te le disais, tu te mettrais à crier que je n'ai pas à culpabiliser. Du moins, c'est ce que la Kathleen que je connais me dirait. Mais, au fond de moi, je sais que je suis autant fautive que chaque soldat qui n'est pas venu à ta rescousse. J'ai tant espéré que tu sois en vie, tu sais ? Et cet espoir futile s'est rapidement mué en certitude inébranlable. Dans mon esprit, tu ne pouvais pas être morte ; tu étais trop forte, pour ça. Alors, si j'en avais été persuadée, refusant obstinément de regarder la dure réalité où tu n'étais définitivement plus en face, pourquoi ne suis-je pas partie ? J'aurai du. Peut-être que je ne le pouvais pas, faible comme j'étais – comme je suis – mais j'aurai du. Tu le méritais, Kathleen. Tu mérites qu'on se batte pour toi.

Je n'arrive même pas à te regarder en face lorsque je souffle qu'on ne voulait pas que je vienne. Comme si j'avais honte de cet aveu. De te confier que tout ce temps que j'ai mis à venir, c'était à cause d'eux et que j'avais simplement courbé l'échine. Je crois que je n'ai plus de tripes. Je ne suis plus rien. Juste un fantôme. Un horrible fantôme, le terrible souvenir de la personne que j'ai été, un jour. Lorsque, naïvement, je m'étais remise à penser que nous étions invincibles, que si nous ne l'avions pas été dans le passé, nous étions désormais plus fortes que tout. Mais t'as tout balayé, sur ton passage. Il ne reste que des ruines. Des ruines et le trou qui obstrue ma poitrine. Je ne lève les yeux que lorsque je t'entends te lever du lit ; je me retiens de t'intimer de rester couchée, te dire que tu dois te ménager. J'ai toujours été ainsi, à me soucier de ton bien être avant tout le reste. Je me souviens de ces fois où, enfants, tu râlais face à mon côté un peu trop maternel, ma manie de te couver comme je pouvais le faire avec Avalon. Cet élan protecteur revient au galop et mes poumons semblent inspirer une longue bouffée d'air salvatrice. Mais ma respiration s'arrête soudainement lorsque tu te retrouves juste en face de moi. Si proche que je n'aurai qu'à lever la main pour te toucher. Les yeux plissés, tu penches doucement la tête, comme si tu m'analysais. Le fais-tu ? Est-ce que tu me reconnais ? J'ai l'impression d'être sondée du regard, à la manière qu'on reluque un étranger avant de conclure qu'on ne peut pas se fier à lui. Tu peux me faire confiance, tu le sais, n'est-ce pas ? Je l'espère. Car on a toujours placé énormément de confiance en l'autre. Peut-être trop. C'est sans doute ça qui aura eu raison de moi. Il y avait trop de moi en toi. On a toujours fonctionné à deux tant et si bien que j'ai toujours eu l'impression qu'on n'était rien d'autre que les deux moitiés d'une seule et même entité. Alors, pitié, Kath. M'enlève pas ça. Je me sens tellement vide. Ne me rends pas... incomplète.

« Pourquoi t'es venue dans ce cas ? » Bien malgré moi, j'écarquille les yeux. Sérieusement, Kathleen ? Pourquoi je suis là ? La vraie question c'est pourquoi je suis pas venue avant ? Pourquoi je suis pas venue te chercher au lieu de me morfondre et de me laisser sombrer ? Bon dieu, si tu savais combien je me déteste en cet instant. Alors que je croise tes yeux bleus, exactement les mêmes que dans mon souvenir ; mais ton regard est si différent. Ta voix, basse et douce, me file des frissons. C'est loin de l'intonation que tu prends, habituellement, lorsque tu t'adresses à moi. J'arrive enfin à faire passer un peu de détermination dans mes yeux mais je me sens si perdue. Pourquoi je suis là ? J'aimerais te dire que c'est pour t'aider à t'en sortir. Mais je crains que la raison de ma venue ne soit que totalement égoïste. J'aimerai t'aider. Tellement. Le désir de te porter secours est si fort que c'en est douloureux. Mais, face à ça, aux abominations que le Capitole t'a fait subir, aux changements dont tu es sujette. Face à ça, je crois que je ne peux rien. J'ai jamais su faire face à l'autre, alors comment veux-tu que je sois capable d'affronter cette partie de toi que je suis censée connaître par cœur mais qui, immanquablement, m'échappe ? Ma voix tremble lorsque les mots tentent de se frayer un chemin entre mes dents étroitement serrées. « J'avais besoin de te voir. », je souffle. Et c'est vrai. Rien n'a jamais sonné aussi vrai entre nous. À toujours se charrier, faire comme si on passait notre temps à se chamailler. Mais ça a toujours été plus que ça, nous deux. Je ne t'ai jamais demandée rien d'autre que ça. Aussi simple que ça : ta présence. C'est tout ce que j'ai jamais voulu dans ma vie. L'unique chose dont je ne pourrai jamais me passer. Et ce destin cruel me l'arrache, une fois encore. Ce même destin qui s'acharne sur nous jusqu'à avoir raison de notre complicité. Mais je te le promets, Kath, je me battrai pour que ça n'arrive jamais. Soudain, tu lèves ta main jusqu'à effleurer mon visage de tes doigts. Un frisson court le long de mon échine mais ce n'est pas à cause de la fraicheur de ta peau. Un instant, je me surprends à fermer les yeux, juste pour savourer ton contact et que l'information percute mon esprit avec assez de conviction pour que plus aucun doute ne soit jamais permis : tu es bien là. Tu ramènes une mèche de cheveu derrière mon oreille et mon cœur se surprend à battre un peu plus vite pour une raison que j'ignore. Sans doute la joie incommensurable de savoir que tu es en vie.

J'entrouvre brutalement les yeux lorsque je t'entends chuchoter à mon oreille. « Je sais pas exactement ce que tu comptes trouver en venant là, mais tu risques d'être déçue. Dans tous les cas, tu ne devrais pas te trouver ici. » Puis tu t'éloignes et j'intercepte encore une fois ton regard tueur à mes yeux. J'ai envie de pleurer, sans doute que ça se voit, que tu le remarques. Pourquoi tu me fais ça, Kathleen ? Est-ce que tu m'en veux ? Tu ne devrais pas te trouver ici. Mais toi non plus, tu ne devrais pas être là. Tu devrais être paisiblement assise derrière une table au réfectoire où on serait en train de rire, comme à notre habitude. Aiden se serait invité à notre table, rapidement imité par Avalon et Rumer. Et tout aurait été parfait. Et on aurait ri, comme jamais. Ri, comme on le fait toujours. Tu sais que je n'ai plus ri, depuis que tu es partie ? T'as emporté mon rire avec toi ; mon sourire aussi. Rends-les moi, Kathleen. Rends-moi ma vie. Mets-toi dedans et rends-moi le tout. Toi comprise. Nous comprises. Tu ne devrais pas te trouver ici. La phrase tourne en boucle dans ma tête. Alors, lorsque tu te recules davantage, je réplique, un peu amère : « Je sais, on me l'a suffisamment répétée. » Ma voix s'adoucit un peu lorsque j'ancre mon regard dans le tien. « Mais tu le sais : je n'en fais qu'à ma tête. » Aucun sourire pour accompagner mes dires mais seulement songer à plaisanter est déjà un énorme pas en avant. Un exploit que je n'ai pas pu accomplir depuis des mois. Tu vois, comme tu m'es essentielle ? Il suffit que tu sois là pour je sois plus forte. Pour que je me surpasse et devienne meilleure. Alors, pourquoi tu me tournes le dos ? Tu ne comprends pas combien ça peut me faire mal ? S'il te plait, Kath, regarde-moi ; rends-moi plus forte. Au lieu de ça, ton murmure m'achève. Me tue. Me détruit aussi.

« J'ai pas besoin de toi. » La douleur est fulgurante et si vive que je ne peux m'empêcher de porter une main à ma poitrine. C'est insoutenable, tu sais ? Parce que le besoin d'être ensemble a toujours été oppressant en moi ; davantage encore depuis nos retrouvailles, depuis le fol espoir chimérique où nous aurions pu être ensemble, pour toujours. Tu me fais mal. Plus que de raison. Plus qu'une simple meilleure amie pourrait le faire. Plus que quiconque dans ce pays misérable ne saurait m'en faire. Tu auras ma peau, Kath. Et on le sait toutes les deux. J'ai envie de pleurer, pour la première fois depuis six mois. Ces foutues larmes qui n'ont pas voulu lorsque j'ai appris que t'étais morte. Juste morte. Tu me connais ; tu sais que je n'aime ni la grandiloquence ni les discours maniérés, même si on s'est toujours amusées à parodier ces gens qui vivent dans la théâtralité à chaque instant. J'aime pas tout ce qui est superficiel, alors j'ai pas pleuré. Parce que toutes les larmes du monde auraient été superflues ; aucune n'aurait su traduire combien ça m'a fait mal d'entendre que Bileen n'existerait plus jamais, sauf dans mes souvenirs. Tu ne me regardes plus, mais moi, je n'arrive pas à poser les yeux autre part que sur toi. Je sens encore tes doigts sur ma joue, ton souffle au creux de mon oreille ; t'es une part de moi, une part de moi, partie intégrante de mon être alors je grave dans ma mémoire le moindre souvenir de toi, à présent. J'ai les yeux rivés sur toi et je souffle, douloureusement : « Peut-être. Mais moi, j'ai besoin de toi. » Peut-être que je rêve, mais je jure te voir tressaillir. Et je me sens comme forcée d'ajouter : « Tu m'as demandée pourquoi je suis venue : je veux vivre. »



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Kathleen S. Harper
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MessageSujet: Re: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeDim 6 Jan - 23:55

Ca ne devrait pas se passer ainsi. Cette scène ne devrait même pas avoir lieu, de toute façon. Tout simplement parce que je n'étais pas censée me trouver ici. Il n'y avait qu'un seul endroit, où je devrai être à l'instant. Entre quatre planches en bois, au fond d'un trou, en train de bouffer du pissenlit par la racine. Pourquoi les choses n'étaient-elles jamais simples ? « J'avais besoin de te voir. » j'arquais un sourcil, et serrais la mâchoire un court instant. « Et tu as pensé à ce dont je pourrai avoir besoin ? » je lui demandais froidement. J’espérais bien que cette attitude inamicale et négative allait venir à bout du peu de volonté dont elle disposait. Ainsi elle partirait, pour ne plus revenir. Et je me retrouverai de nouveau seule, avec pour seuls compagnons mes regrets et mes remords. Rester ici, c'était mauvais pour elle. Et je m'en voudrai terriblement si je devais assister à sa décadence. Au moins, si elle était loin de moi, je pourrai me l'imaginer souriante, pleine de vie. Comme elle devrait l'être. Même si au fond, je savais que ça ne serait pas le cas. « Je sais, on me l'a suffisamment répétée. » et bornée en plus de ça. Billie, tu ne changeras donc jamais ? Notre petit monde a volé en éclat, il est temps d'arrêter de chasser des chimères, et de faire face à la réalité, aussi douloureuse soit-elle.

« Mais tu le sais : je n'en fais qu'à ma tête. » Je la dévisageais quelques instants, gardant le silence, et essayant de calquer du mieux que je pouvais une expression indéchiffrable sur mon visage. Elle ne devait pas voir à quel point sa manière d'agir ainsi m'affectait. S'il y avait bien une chose que je n'avais pas prévue en me... Laissant embarquer dans toute cette histoire sans fin, c'était de la revoir un jour. Dans ma cellule, j'avais eu le temps de faire le deuil de ma petite personne, d'accepter mon sort, et de prier pour qu'elle en fasse de même. Mais pouvais-je réellement escompter au fait qu'elle me laisse partir si facilement ? En revenant plusieurs années en arrière, quand elle avait été choisie pour les jeux, quand ma trop longue hésitation à prendre sa place m'avait fait perdre la personne que je chérissais le plus après ma famille, j'avais changé. Je m'étais fait peur moi-même. J'étais devenue froide, je n'hésitais pas à utiliser tous les moyens à ma dispositions pour arriver à mes fins, j'avais cessé d'être moi. Malgré le soutien de ma famille, d'Elyas, d'Aiden et de tous les autres, j'étais devenue une sorte de machine. Certains de mes agissements irréfléchis et dangereux, autant pour les autres que pour moi, m'avaient longtemps valus les refus de pouvoir participer à la rébellion activement.


J'ai pas besoin de toi. Les mots étaient tombés. Implacables, froids, blessants, étonnement simples à prononcer. Jamais, ô grand jamais je n'aurai pu imaginer avoir la force de dire une chose pareille à... A Billie. Pardonne moi, juste... Pardon. Mon cerveau me hurlait de m'excuser auprès d'elle. Mon corps tremblait à force de vouloir la serrer contre lui. Quel genre de monstre étais-je pour me comporter ainsi envers la seule personne qui comptait encore un tant soit peu pour moi ? « Peut-être. Mais moi, j'ai besoin de toi. » Bien malgré moi, je tressaillis, alors qu'un malaise diffus me saisissait, tandis que la réalité de la situation semblait doucement arriver à mon cerveau. En plus de six mois de temps, le Capitole m'avait appris plusieurs choses. Et ne plus rien ressentir, était l'une d'entre elle. J'avais également appris à apprécier cette sensation, à l'utiliser à mon avantage. Certes, ils m'avaient conditionnée pour faire de moi leur marionnette, j'en avais conscience. Depuis le début. Mais pour être tout à fait honnête, cette nouvelle condition qu'ils m'avaient offerte n'avait pas été pour me déplaire. Au contraire. Grâce à eux, je n'avais plus eu besoin de me soucier des autres. J'aurai même pu recommencer une nouvelle vie, si j'avais eu plus de temps. Tout reprendre à zéro. Ca paraissait tellement simple, dit de cette manière. Mais là... Cette douleur poignante que je ressentais dans la poitrine... Du chagrin, de la colère, des regrets. Les paroles et la simple présence de Billie avaient suffis à faire s'effriter le mur construit autour de mes sentiments. Et c'était assez pour ressentir de nouveau. Maintenant, je me souvenais pourquoi j'avais arrêté de lutter, là-bas. Ca faisait trop mal. Ca faisait souffrir, de ressentir. Je voulais juste qu'elle se taise. Qu'elle se taise et qu'elle sorte. De cette façon, je n'aurai plus besoin de subir tout ça. Si elle avait pu voir mon visage, à cet instant, elle aurait su à quel point je regrettais déjà mes paroles. Cependant, je me contentais de secouer négativement la tête en me mordillant la lèvre inférieure. Je n'étais pas supposée ressentir de nouveau. Pas après qu'ils m'aient conditionnée. Bien rapidement, j'adoptais de nouveau une stature et une expression neutre. « Tu m'as demandée pourquoi je suis venue : je veux vivre. » Je connaissais Billie. Je savais qu'elle était plus forte que l'image du fantôme d'elle que j'avais à l'instant même. Si elle était comme ça, c'était parce qu'ils lui avaient fait part de mon 'retour triomphal'. Mieux aurait-il valu que personne ne la mette au courant. Elle aurait pu gérer ma mort sans aucun faux espoir. Cela lui aurait pris du temps, mais elle en serait venu à bout. Alors que là, elle avait l'espoir futile de me revoir, de retrouver celle qui était partie six mois auparavant. Mais c'était justement là le piège. Elle était partie. Ils l'avaient tuée à petit feu, avaient fait en sorte qu'elle ne croit plus en rien. Et ils avaient gagnés. Sans jamais me retournait, je chassais toutes ces pensées, tous ces souvenirs de mon esprit. Mais ils étaient aussitôt remplacés par quelque chose d'autre. Par elle.

Pourtant, je me devais de rester sourde à cet appel à l'aide. A cette douleur qui résidait dans sa voix. Si elle savait à quel point je voulais juste la prendre dans mes bras, la serrer fort contre mon cœur meurtri, et lui dire que tout irait pour le mieux, que maintenant, tout cela était derrière nous. Mais je n'en avais pas le droit. Je ne m'en donnais pas le droit. Pas après tout ce que j'avais fait. Avait-elle seulement la moindre idée des abominations que j'avais pu faire, au nom du Capitole ? Non, elle n'avait définitivement pas besoin de quelqu'un comme moi. Je serrais les poings, les bras raides le long du corps, essayant de contenir le flot d'émotions qui me parcourait à l'instant même, alors qu'une lueur de colère sembla s'allumer dans mes yeux jusque là, éteints. J'explosais soudain, me retournant vivement, avant de m'approcher dangereusement. Dans ma rage de vouloir faire les choses comme elles devaient être, comme je voulais qu'elles soient, j'allais lui faire du mal, j'en avais conscience, mais elle ne me laissait pas le choix. J'agrippais ses bras avec force, serrant sans doute trop fort entre mes poings tremblants, tandis que je croisais son regard le temps d'un instant. « Tu veux vivre ? » demandais-je en la fixant de mes yeux durs et froids, la voix aussi glaciale que je pouvais. « Dans ce cas, sors d'ici. Sors, et ne reviens plus. » je sifflais d'un air mauvais au possible. Si ma voix et mes yeux ne montraient aucun signe de faiblesse, mon corps allait finir par me trahir. Mes gestes envers elle étaient incertains, hésitants. Dans ma peur de vraiment lui faire du mal, j'essayais de me contenir tant bien que mal. Nous savions toutes les deux que j'avais toujours été une mauvaise actrice, et pourtant, depuis que j'avais enfilé ce masque de... 'Méchante', personne n'avait su capter cette détresse réelle, cachée sous la carapace que j'avais du me forger. Elle devait comprendre qu'elle ne tirerait rien de bon, à venir ici. J'avais changé, en mal. Et je ne supporterai pas de l'entraîner avec moi dans ma déchéance. Avoir vu toutes ces émotions dans ses yeux à la fois terrifiés et blessés, m'avait fait l'effet d'une douche froide. Aussi, je la lâchais brusquement, la poussant un peu en arrière par la même occasion. « Si tu veux réellement vivre, tu n'as pas besoin de moi. Sors ce cette pièce et retourne aider ceux qui peuvent encore l'être ! Ceux qui ont besoin de toi. »
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MessageSujet: Re: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeVen 25 Jan - 19:05


Tu as changé. Constatation simple mais ô combien douloureuse. C'est comme si on plantait une lame si fine dans mon cœur qu'il est impossible d'y voir les dégâts alors que la souffrance est intolérable. Alors que je suffoque, j'agonise, à l'idée que tu ne sois plus la même, celle que j'ai connu et aimé, de toute mon âme, comme on aime sa moitié. J'avais besoin de te voir, ai-je dit. Et il n'y a rien de plus vrai, tu sais ? Tu dois comprendre ce sentiment, n'est-ce pas, Kath ? Ce besoin viscéral de s'assurer que l'autre n'est pas qu'un mirage crée par mon esprit détraqué. Que tu es bien réelle, en vie, juste en face de moi. Tu avais les mêmes doutes, les mêmes craintes, à l'époque, lorsque qu'on t'a jetée en pâture dans l'arène, puis balancé au Treize, lorsque je t'ai cherchée puis retrouvée. L'émotion – et la tentative d'étranglement – une fois passée, je me souviens que tu me touchais sans arrêt, comme si tu avais peur que tous ces rires, toutes ces chamailleries n'avaient été qu'un songe. J'ai l'impression que c'était il y a tellement longtemps. Dans une autre vie. Une vie où j'avais gardé encore un semblant d'espoir quant à l'avenir. Parce que tu étais là, à mes côtés, et que ça a toujours été plus simple d'avancer avec toi. Tu me rendais forte. Aujourd'hui, tu me rends faible. Si faible. C'est comme si tu aspirais toute parcelle de mon énergie, te repaissant de mon malheur alors que, doucement, la douleur insupportable que j'éprouve depuis l'annonce de ta mort s'évapore, ne laissant derrière elle qu'une coquille vide. C'est tout ce que je suis, sans toi. Rien. Un trou béant. Le néant. C'est toi qui mets de la couleur dans mon monde, de la joie dans mon cœur, des sourires sur mes lèvres, des rires au fond de ma gorge. Et maintenant, que dois-je faire ? Me contenter d'avancer, sans vivre ? Abandonner le semblant d'existence que j'ai pu mener dans cette chambre isolée du reste du monde, avec toi ?

« Et tu as pensé à ce dont je pourrai avoir besoin ? » Ta voix, froide, hostile, me file des frissons. Elle sonne comme un reproche. Qu'insinues-tu, que je suis égoïste, que je pense à moi avant de penser à toi ? Tu sais pourtant qu'il n'y a rien de plus faux, que tu es toujours passée en première, que j'ai toujours été prête à faire un millier de concessions simplement pour te faire sourire. Tu avais longtemps été la motivation à chacun de mes actes. Mais, à présent, que faire, que dire, pourquoi agir si ce n'est pas pour entendre ton rire ? Vraiment, Kathleen, ma vie est calquée sur un emploi du temps, tatoué sur mon avant-bras. Je suis passivement ces quelques mots tracés à l'encre et je n'essaie même plus de faire autre chose. Et être heureuse, être forte, n'a jamais figuré sur mon bras. Je ne suis plus rien. Qu'une vulgaire poupée de chiffon dont le Treize peut disposer à sa guise, suivant leurs directives, sans rien demander de plus, sans tenter de me révolter contre n'importe quelle forme d'autorité. Je m'écrase. Je suis en chute libre depuis qu'on est venu me dire que tu ne reviendrais plus jamais. Et te voir, là, maintenant, c'est un peu la chute brutale qui se termine dans un crac sinistre. Et je ne sais même pas si je pourrai me relever. Je n'ai pas besoin de toi. Cherches-tu à me faire plus de mal que de raison ? Car si tel est le cas, tu t'y prends à merveille. Tu n'as pas besoin de moi et je me sens cruellement inutile. Insipide. Et un peu plus vide. Je mets d'ailleurs quelques instants avant de comprendre que la voix rauque et faible qui s'élève, c'est la mienne. Moi, j'ai besoin de toi. J'ai toujours eu besoin de toi. Et je crois que c'est quelque chose qui ne changera pas. Jamais. Comment se passer d'une partie entière de son être ? Je constate d'ailleurs que ma réponse te désarçonne, tu tressaillis mais je n'arrive pas à discerner l'expression qu'arbore ton visage. Retourne-toi, dis-moi que tu es désolée. Pourtant, je te vois secouer la tête de gauche à droite avant de te redresser. Bordel, Kathleen, regarde-moi ! Arrête de me faire autant de mal.

Kathleen... Tu te tiens dos à moi, raide, tendue, crispée. Puis, brutalement, tu te retournes, je me fige devant l'expression de rage qu'affiche ton visage rude. Tu t'approches, je ne cille même pas, n'esquisse pas le moindre pas de recul. Certains verraient ça comme une marque de courage, d'autres comme de l'inconscience. Moi, je ne qualifierai ça que de confiance. Une confiance sans borne que je te voue, Kathleen, depuis toujours. Juste en face, tu agrippes férocement mes bras de tes poings crispés, quoiqu'un brin tremblants. « Tu veux vivre ? », tu me demandes, le regard dur, d'un bleu si différent de celui que je connais. Je suis habituée à ce ciel paisible d'été au-dessus de nos têtes, ces belles journées d'enfance passées au Neuf. Mais là, tes yeux ne sont que glace, qu'un acier bleuté, deux dagues qui viennent s'enfoncer dans mon palpitant jusqu'à me réduire au silence par la douleur. Ta question est un peu rude, mais purement rhétorique. Aussi, je ne réponds pas, même si je crains la suite. Je sais qu'elle ne me plaira pas. « Dans ce cas, sors d'ici. Sors, et ne reviens plus. » Et j'ai cruellement raison. Tu me fais mal, tu le sais, ça ? J'ai peur aussi. Pas de toi. Mais peur de moi sans toi, tu vois ? Peur de ne pas retrouver la moitié que j'ai laissé partir, il y a six mois. Six horribles mois. Tu me blesses, en me demandant de partir sans me retourner, avec un ton si rude, sans avoir même la décence de bégayer. Laisse-moi une chance, Kath. Laisse-moi t'aider. Sans doute la lueur dans mes yeux t'a fait réagir finalement, car tu te figes, une seconde, une seconde de trop, et je me surprends à penser que la Kathleen que j'ai connu n'est pas entièrement morte. Tu vois, combien tu m'es nécessaire ? Tu me donnes de l'espoir. Un espoir qui m'avait abandonnée depuis bien trop longtemps.

Soudain, tu me repousses, brutalement, relâchant l'emprise que tu avais sur moi. « Si tu veux réellement vivre, tu n'as pas besoin de moi. Sors ce cette pièce et retourne aider ceux qui peuvent encore l'être ! Ceux qui ont besoin de toi. » Et, brusquement, je te regarde, les yeux brûlants d'une détermination nouvelle ; te défiant d'aller plus loin que ce que tu viens déjà de faire. Les yeux illuminés d'une colère dévastatrice, tournée contre le Capitole, le Treize, contre tous ceux qui ont pu t'arracher à moi. Et alors, sans même m'en rendre compte, je me laisse glisser à terre, m'assois en tailleur, juste en face de toi, et lève la tête d'un air déterminé jusqu'à accrocher ton regard. « Si je dois partir d'ici, ce sera les pieds avant la tête. », je balance de but en blanc, finalement, sans la moindre once de détermination. Et tu me connais, tu sais que je tiendrai, que je ne lâcherai pas le morceau. Pas tant que tu ne seras redevenue toi-même. En attendant, arrête de me regarder comme ça. Arrête de me tuer, Kath. « Bordel, Kathleen, tu comprends pas que je vivrai toujours mieux avec toi qu'avec ton absence ? » Je m'énerve. Contre le Capitole, de t'avoir changée. Contre le Treize, de m'avoir cachée ta survie. Contre toi, un peu, de ne pas vouloir ouvrir les yeux. Contre moi, surtout, de ne pas pouvoir te ramener à la raison. D'être si faible. Ma voix se brise, plus rauque, presque larmoyante lorsque je t'intime : « Regarde-moi. » Mais tes yeux sont déjà rivés dans les miens. Mais je sais que tu comprendras : regarde-moi, vraiment. Je continue, la voix oscillant entre désespoir et hystérie : « Regarde-moi et ose me dire que je vis bien sans toi ! C'est le silence qui me fait mal. C'est ton absence qui me tue. » J'ai envie de pleurer, parce que c'est trop dur de te regarder et de voir quelqu'un d'autre. Mais je suis intimement persuadée que là, derrière ce regard hostile et étranger se cache ma meilleure amie. « J'en ai rien à foutre que t'aies changé. Tu resteras toujours Kathleen Sinéad Harper, la gamine de cinq ans que j'ai percuté un après-midi de printemps ensoleillé, parce qu'on courait trop vite toutes les deux. La gamine avec laquelle je rigolais si souvent que j'ai l'impression d'avoir passé mon enfance à rire, sans arrêt. L'un des visages que j'ai emporté avec moi, dans l'arène, ma dernière motivation pour survivre à ce cauchemar. La jeune femme que j'ai retrouvé dans les couloirs du Treize et avec qui j'ai repris le cours de ma vie, comme si on ne nous avait jamais volé cinq ans. » Je crois que je pleure. Ce sont toutes les larmes que je n'ai pas réussi à verser, depuis ces six derniers mois. « Tu resteras toujours ma meilleure amie. Ma moitié. Mon âme-sœur, comme on disait, lorsqu'on était gamines. » La voix tremblante d'émotion, je continue mon long monologue : « Et, bordel, Kath, tu me tues à me rejeter parce que je t'aime, moi. Que tu sois comme avant, ou non. Qu'importe ce que tu as fait, mes sentiments n'ont pas changé. »


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MessageSujet: Re: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeLun 4 Fév - 2:24

Mon accès de rage passgère commença à s'estomper alors que je m'éloignais de nouveau. Je la fixais alors qu'elle s'installa en tailleur sur le sol. A quoi jouait-elle ? Espérait-elle vraiment rester ici jusqu'à ce que nous nous mettions à bavarder comme au bon vieux temps ? Ce qu'elle pouvait être bornée parfois. Je me demandais bien comment j'avais pu seulement espérer qu'elle m'écoute sans broncher, et qu'elle sorte de cette chambre bien gentiment, sans même essayer de résister. « Si je dois partir d'ici, ce sera les pieds avant la tête. » son regard était résigné, et elle était fermement décidée à me tenir tête. Elle comme moi savions qu'elle obtiendrait ce qu'elle voulait. Elle finissait toujours par l'avoir. Alors pourquoi ? Pourquoi je m'obstinais ainsi à nier l'évidence du fait que j'avais besoin d'elle. « Tu fais une erreur. » je grognais en croisant les bras sur ma poitrine, cherchant à trouver une résolution nouvelle dans ma quête de solitude. Je fronçais les sourcils en me mordant l'intérieur de la joue. Sur mon visage, toujours rien d'autre que cette expression mauvaise, que j'arborais depuis maintenant six mois. A croire qu'elle était gravée sur mes traits. Mais en réalité, ce n'était qu'un masque. Un masque visant à me protéger du monde extérieur. Ce monde que je trouvais trop dur à affronter. Cette réalité trop dure à supporter. Alors je préférais mentir. Mentir à mes proches, et surtout à moi. A dire vrai, je m'étonnais moi-même. Avoir réussi à être aussi... Froide avec Billie pendant aussi longtemps, ça relevait de l'exploit. Tout mon être réclamait son contact, ce qui restait de mon âme saignait à la simple idée de lui faire encore plus de mal. « Bordel, Kathleen, tu comprends pas que je vivrai toujours mieux avec toi qu'avec ton absence ? » Bien sûr que si ! Ne suis-je pas la mieux placée pour le savoir ? A ton avis, qu'est-ce que j'ai ressenti lorsqu'ils t'ont emmenée loin de moi, il y a cinq ans ? Je n'étais plus rien, sans toi. Rien. Sais-tu combien de nuit j'ai passé à te pleurer en serrant ton bracelet contre mon coeur ? Tu sais, ces fameux bracelets de corde tressée que nous avions un jour acheté à la Centrale ? Chacune le notre. Oh, tu te souviens, Aiden avait dit être jaloux de ne pas en avoir. Un jour le tiens s'est cassé, et maman te l'avais réparé. Comme à chaque Moisson, on les échangeait, pour qu'ils nous portent chances, qu'on disait. Quelle naïveté. Je serrais les poings, essayant de chasser ces souvenirs d'un autre temps. Un temps révolu et à jamais perdu. Nos regards sont rivés l'un dans l'autre depuis quelques minutes, mais je garde le silence. « Regarde-moi. » mes yeux semblent se réveiller. Petit à petit, la réalité me rattrape. Nous rattrape. Ce corps amaigri dans lequel tu te trouves actuellement, c'est ma faute, n'est-ce pas ? Je me souviens des premiers temps sans toi. Je ne mangeais plus, je ne dormais plus. Je ne vivais plus. Je n'avais plus le goût à rien, et le monde avait désormais une fadeur incomparable. Aucune expérience ne valait la peine d'être vécue sans toi. J'avais presque abandonné le combat, tu sais. J'étais... Comme toi. « Regarde-moi et ose me dire que je vis bien sans toi ! C'est le silence qui me fait mal. C'est ton absence qui me tue. » j'entrouvris légèrement la bouche, prête à répondre quelque chose, mais finalement, seul le silence se montra. Toujours et encore ce silence mauvais, qui nous faisait du mal à toutes les deux.

Je t'écoutais parler. Elle semblait si lointaine, cette époque où nous étions âgées de cinq ans, et où nous courrions dans les champs du district. Cela nous amusait toujours de rentrer chez moi dans un état lamentable, et nous riions aux éclats tandis que ma mère nous lançait ses fausses réprimandes, avant de nous offrir son joli sourire amusé. Je crois que je sens une larme rouler le long de ma joue. « Et, bordel, Kath, tu me tues à me rejeter parce que je t'aime, moi. Que tu sois comme avant, ou non. Qu'importe ce que tu as fait, mes sentiments n'ont pas changé. » Je me mis à trembler de tout mon être, tandis que je me rendais peu à peu compte à quel point j'avais pu être égoïste. Egoïste et stupide. J'étais en train de rejeter la seule personne pour qui j'aurai fait n'importe quoi. J'étais en train de lui faire du mal, en voulant la protéger de mon influence malsaine. Je la regardais pleurer, du haut de mon mètre soixante-six, et j'avais l'impression de me liquéfier sur place. Sur mon visage auparavant glacial, tout n'était plus que confusion et douleur. Rien au monde, ne me faisait plus mal que la voir comme ça. Mon coeur semblait avoir cessé de battre, et me faisait terriblement mal. Ma gorge était nouée, et refusait d'émettre le moindre son. Une larme chargée de douleur s'écrasa en silence sur le sol de la pièce. Je pleurais. Putain. Elle avait réussi à briser le mur, à faire resurgir tous ces remords, toutes ces peines, ces craintes, tous ces sentiments que j'avais pris grand soin d'enfouir au plus profond de mon âme. Je les avais cru perdus. J'avais juré qu'ils avaient été détruits, broyés et piétinés par mes geôliers. Mais ils étaient toujours là. Toujours aussi virulents, et... Ca faisait toujours aussi mal d'y être confrontée. Mes jambes tremblantes refusaient de me soutenir plus longtemps encore. A peine avais-je fait quelques pas en sa direction, que je me retrouvais à genoux devant elle. Pardon Billie. Putain pardonne moi. J'ai été la pire des personnes ayant jamais foulé cette Terre. Regarde où on en est à cause de moi. Regarde nous. Sans réfléchir et sans me retenir d'avantage, je tendis mes mains vers son visage, hésitant légèrement dans un premier temps, et allait les poser sur ses joues humides. D'un revers de pouce, je tentais de chasser tendrement ses larmes, comme si ce simple geste avait le pouvoir d'effacer le mal que je lui avais déjà fait. Nos yeux se croisèrent un instant, mais je les fermais bien rapidement. J'avais peur. Peur de voir mon oeuvre dans ses iris. Retenant à peine le sanglot qui parcourut mon corps, je posais mon front contre le sien, et restais immobile un court instant, essayant d'oublier ce désastre qu'avait été notre vie depuis plusieurs années, essayant de n'en garder que les meilleures parties. Tous ces instants passés ensemble, et j'avais osé la rejeter alors que j'étais à peu près sûre que sa seule présence valait toutes les thérapies des psy réunies. Mais le fait était que je ne méritais pas de l'avoir, son amour. Nous n'avions toujours pas bougé, sans doute trop occupées à essayer d'être... D'être Billie et Kathleen, et non pas ces deux coquilles vides n'ayant aucune raison d'avancer. Parce que dans le fond, Billie n'était rien sans Kathleen, et Kathleen n'était rien sans Billie. Depuis toujours, cette vérité s'était affirmée d'elle même. Cette relation que nous avions construite depuis notre enfance, c'était quelque chose de tellement fort, de tellement rassurant, de tellement beau, que les mots venaient à manquer pour la décrire. Mes actions et mon égoïsme avaient bien faillis y mettre un terme. Et je crois que jamais je ne me serai pardonnée un tel geste. C'était sans doute la pire chose qu'il pourrait arriver, d'ailleurs. « Je suis tellement désolée. » je lâchais finalement de ma voix éraillée, ne tentant même plus de cacher mes émotions. A quoi bon ? Elle me connaissait par coeur. Et cette personne que je lui avait montrée quelques instants plus tôt, ça n'était pas moi. C'était celle qu'ils avaient créés au Capitole. Finalement, je passais mes bras derrière sa nuque, et allait enfouir mon visage dans son cou, m'accrochant à elle comme une enfant à sa mère. « Me laisse pas... Me laisse plus. » je murmurais entre deux crises de sanglots. Je voulais m'assurer que plus jamais, elle ne me laisserait porter l'uniforme du treize, que plus jamais, elle ne me laisserait partir. Si c'était pour ne plus revenir vers elle, je ne voulais même plus faire un simple pas en dehors de cette pièce. Cela impliquait également qu'ils ne la laissent pas s'embarquer dans des missions folles et dangereuses comme ils savaient si bien en faire. « Plus jamais. Plus jamais. » je continuais à parler. Plus pour moi que pour elle. Car je savais très bien que dans son cas, elle ne me laisserait jamais tomber. « Je suis désolée. » je répétais encore, en la serrant un peu plus fort contre moi. J'avais besoin de sa force, de sa présence. « J'ai besoin de toi à mes côtés. Maintenant et pour toujours. » je ne voulais plus la lâcher. Plus jamais. Peu importe ce que le treize ferait. Peu importe ce que le Capitole ferait. Ils ne me la prendraient pas. Aucun d'entre eux. Elle était la lumière qui venait éclairer mon chemin sombre et sinueux, la main tendue qui me rattraperait à chaque fois que je trébucherai. Oui c'était ça, ma moitié, mon âme soeur.

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MessageSujet: Re: if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN   if i died the world would continue to move along, as if nothing had happened ♆ BILEEN Icon_minitimeLun 8 Avr - 18:08


Ça ne devrait pas se passer comme ça. On ne devrait pas encore avoir à vivre ça. Je suis fatiguée, de te perdre, encore et toujours, d'être séparée de toi, inlassablement. C'était déjà assez dur, la première fois, dans l'arène, le débarquement au Treize, totalement perdue. Mais là, là... Te voir là, plus près que tu ne l'as jamais été en six mois et pourtant, paradoxalement, si loin. C'est pire que tout. C'est une douleur infâme que de ne plus savoir à qui je m'adresse, à toi, ou à cette autre qui m'effraie malgré ce que je veux bien en dire. « Tu fais une erreur. », tu grognes et je flanche une seconde avant de me ressaisir aussitôt, de hisser sur mon visage émacié un masque de détermination qui m'est devenu inconnu, désormais. « Non, l'erreur, je l'ai faite il y a six mois, en devenant comme ça. », je montre ce que je suis devenue d'un brusque geste de main dégoûté. J'en suis venue à haïr mon reflet dans le miroir, cette maudite psychée qui me renvoyait en pleine figure toute ma faiblesse. Et je m'en suis voulue. Ô tellement. De ne pas savoir me montrer forte, au moins pour les autres qui sont encore là, qui t'ont survécue et, d'une certaine manière, qui m'ont survécue aussi. J'aurai tellement voulu me montrer forte, pour Rumer, Aiden ou Avalon. J'ai eu honte, tellement, en détaillant cette paire d'yeux ternes, enluminés par d'horribles cernes, en remarquant avec horreur combien j'étais devenue maigre, en venant à me demander comment je faisais pour encore tenir debout. Je me déteste. Pour être faible, si faible sans toi. « J'aurai mieux fait de tous les envoyer chier, tout plaquer et venir te chercher. », je crache, amère. Amère contre le Capitole, le Treize, moi. Ouais, surtout moi. Pour avoir été assez crédule et avoir placé une confiance aveugle dans ce District qui n'a fait que t'envoyer au devant d'une mort certaine, une autre. Alors quoi, le Capitole se charge de gamins insouciants, le Treize prend les restes ? Non, il doit y avoir une autre alternative, quelque chose de meilleur. Cette révolte ne serait-elle qu'une quête du pouvoir, qu'un ignoble jeu de trônes ? Ne nous permettait-on que de choisir entre la peste et le choléra ? Moi, je veux autre chose.

Pitié, Kathleen, arrête de me regarder ainsi. Ses traits durs qui tailladent ton visage, cette lueur glaciale qui brille dans tes yeux ; je ne les supporte pas. Pas quand c'est moi que tu regardes ainsi. Arrête. Arrête. Un instant, je crois parvenir à te faire réagir, à faire surgir quelques vagues souvenirs dans ta mémoire détraquée. C'est la même douleur qui s'incurve dans ton regard, sur ton visage ; l'ignoble souffrance d'avoir perdu sa moitié. Alors, c'était ça, que tu éprouvais, pendant tout ce temps ? Ce néant qui prend place dans ta poitrine et dans lequel tout s'engouffre, les bonnes choses comme les mauvaises, jusqu'à te vider entièrement. Jusqu'à ce que tu ne ressembles qu'à une vulgaire coquille vide. Mon dieu, Kathleen, comment t'as pu faire pour vivre ainsi pendant cinq ans ? Six pauvres et vulgaires mois ont eu raison de moi, mon optimisme, mon utopisme. À défaut de ressortir grandie de cette épreuve, je me trouves vieillie : lassée de vivre, blasée, épuisée, fatiguée. J'ai juste envie de fermer un instant les yeux, de me reposer un peu. Au lieu de quoi, je t'intime de me regarder, la voix éraillée, et tu obtempères aussitôt. Tu sembles finalement comprendre toutes les horribles conséquences de ton absence, ta mort. Ta mort, bordel ! Combien de fois te tueront-ils ? Combien de fois t'arracheront-ils à moi ? Si rester ici, cloîtrée dans cette pièce, pouvait me donner la certitude qu'on ne serait plus jamais séparées, je resterai ici, sans une once d'hésitation. Dehors, ce n'est rien. La réalité est ici, avec toi, dans tes yeux, dans les échos de ton rire. C'est toi, ma réalité, Kathleen. T'as compris, hein ? Tu dois t'imaginer ces longues nuits à essayer vainement de pleurer, sans succès, à ne pas savoir retrouver le sommeil, à voir ma raison m'échapper lentement, sombrant de nouveau par moments dans quelques crises d'hystérie intempestives. Peut-être que tu superposes ton visage et ta propre expérience sur la mienne ; imaginant ce que j'ai pu vivre — survivre — à travers ce que tu as toi-même vécu — survécu —. Pourtant, tu ne dis rien. C'est encore le silence qui me répond. Ce même silence qui me blesse, me poignarde et me laisse agoniser sur le sol, en silence. Silence. S'il te plait, Kath. Fais quelque chose, parle, crie, hurle, qu'importe. Tout, tout sauf cet immonde silence qui a pris ta place pendant six mois.

J'enchaîne, encore. Encore et toujours. Prête à tout pour rompre ce silence impossible. J'intercepte une larme dévaler ta joue ; aussitôt, les miennes redoublent. Regarde dans quel état pitoyable je suis, Kathleen. Je pleure, comme une gamine désespérée et complètement perdue. Mais je suis perdue sans toi. T'es mes repères, mon monde entier. Reste là, avec moi. Vis avec moi. Pour moi. En moi. Tu trembles, tant et si bien que tu t'écroules. En face de moi. Toujours plus près. Je n'entends pas tes sanglots, il y a la larme qui a roulé sur ta joue et s'est écrasée sur le sol qui a explosé mes tympans. Une larme dans un océan de douleur, de malheur. Je n'arrive même plus à distinguer les battements de mon cœur ; il y a juste les échos de cette maudite larme, suicidée sur le sol. Plouf. Et plouf fait mon cœur quand je lève de nouveau les yeux sur ton visage larmoyant. J'aimerai t'attirer vers moi, te serrer dans mes bras à t'étouffer. Mais j'ai peur. Si peur. Combien de fois ton fantôme est-il venu me hanter, venant troubler les rares heures de sommeil que j'arrivais à gratter, malgré mes insomnies ? Alors, tes mains s'invitent sur mes joues, tes pouces chassent lentement, avec douceur, les larmes qui continuent de dévaler. J'ai un stock de larmes de six mois, Kathleen ; je crois que j'ai pas fini de pleurer, je sais même pas si j'arriverai à m'arrêter maintenant. Mais les larmes s'écrasent sur le sol, imprègnent tes doigts. Tu les balaies de mon visage et j'ai l'impression que tout s'en va avec elles. Tes mains enlèvent la douleur infâme, le trou béant, le dégoût de moi-même, le désespoir. Tout, tout tombe à mes pieds, s'écrase sur le sol, disparaît lentement. Je me sens si vide. Vide de tout. Vide de sens. Parce que vide de toi.

Tu fermes les yeux ; moi, je n'arrive pas à détacher les miens de ton visage, comme figé dans un sommeil agité. J'ai comme la sordide impression d'être un vampire, de devoir me repaître sans cesse de toi, de ton être, pour me sentir à nouveau vivante. Tes traits s'incurvent sous mes paupières tant et si bien que lorsque je ferme les yeux, je te vois encore, éternellement, irrévocablement. Je sens un mouvement de ta part, puis ton front contre le mien. À travers les larmes, je parviens à esquisser un maigre sourire, tremblotant, un peu hésitant aussi. Ce contact, ta peau contre la mienne, ton cœur près du mien, c'est tout ce que je voulais. C'est tout ce qui m'a manquée. Tu me reviens. Enfin. Et moi, je reviens à la vie. Instinctivement, mes bras encerclent ta taille et je ne me formalise pas de ton corps tremblant contre le mien ou des quelques larmes qui, parfois, s'écrasent sur mes cuisses. Je suis en vie. Bileen aussi. « Je suis tellement désolée. » Je ferme les yeux un peu plus fort, sentant un sanglot remonter et hoche fébrilement la tête de haut en bas, me mordant la lèvre pour ne pas redoubler aussitôt mes pleurs. Je sens tes bras s'accrocher autour de ma nuque, puis ton visage qui vient se nicher dans mon cou. Je frisonne en sentant ton souffle sur ma peau. J'entrouvre un instant les yeux, les lève vers le ciel — ou plutôt : cet immonde plafond gris — et je souris vaguement. Enfin rassénérée. Enfin complétée à nouveau. « Me laisse pas... Me laisse plus. » J'acquièsce à nouveau de la tête, doucement, tremblante. « Plus jamais. Plus jamais. » Je répète, dans un écho presque solennel : « Jamais. » Comment le pourrai-je alors que je viens d'entrevoir l'Enfer qui m'a ouvert ses portes, dans lequel je me suis engouffrée ? Je ne veux plus jamais avoir à vivre ça, Kathleen. Jamais.

« Je suis désolée. », dis-tu, en resserrant un peu plus ta prise autour de ma nuque. Ma main s'aggrippe avec la force du désespoir à ton tee-shirt, j'ai l'impression d'être une fille en proie à la noyade et toi, Kath, toi, t'es ma bouée de sauvetage. « Je sais. », j'essaie de souffler calmement, mais c'est dur, si dur, de ne pas laisser transparaître mes émotions alors qu'elles reviennent toutes ensembles à la charge après six mois à s'être tues, me laissant dans un état second. « J'ai besoin de toi à mes côtés. Maintenant et pour toujours. » Je souris et, pour la première fois depuis six mois, ça ne ressemble ni à un simple étirement des lèvres totalement désuet ni à un rictus douloureux. Je m'essaie jusqu'à rire ; mais cela ressemble plus à un sanglot éraillée qu'à autre chose. « C'est plutôt à moi de dire quelque chose comme ça. » Mais ça me parait si évident. Il suffit de poser les yeux sur moi, mon corps décharné, mes yeux fatigués pour comprendre. Comprendre que, chez nous, deux moins un, ça fait zéro. Foutue équation impossible, terrible problème mathématique. En fait, non, on n'a jamais été deux. On est que les moitiés d'une seule et même entité. On porte en nous la moitié de Bileen. Et on est plus fortes que tout, hein, Kathleen ? Plus fortes que cette salope de Mort qui s'est trop amusée avec nous, mais qui n'a jamais su nous garder, parce que l'autre est de l'autre côté et qu'on se refuse de l'abandonner. Plus fortes que le Capitole qui croyait avoir raison de nous en nous jetant dans la fosse aux lions. Plus fortes que le Treize qui nous ment et joue de nous, malgré ce qu'il veut bien en dire. Et forte de cette constation, certitude inébranlable, foi inébranlable en nous, je souffle avec la volonté de détendre l'atmosphère : « Décidément, on saura jamais se retrouver sans verser notre petite larme. » Mais aussitôt, le rire sombre dans une nouvelle vague de larmes. Je ne sais plus si je ris, ou si je pleure. Sans doute les deux. Deux choses dont j'avais été incapable jusqu'à te revoir. Lentement, mes doigts desserrent leur emprise sur ton tee-shirt et d'un geste presque maternel, je caresse lentement ton dos, savourant ta proximité à laquelle l'horrible absence a cédé sa place. Bordel, comme je me sens vivante, à présent.

J'ai envie de courir partout, de hurler ma joie, de crier à Avalon, Rumer, Aiden et tous les autres combien je suis heureuse, que l'espoir est de nouveau de mise, que je peux redevenir comme avant. Mais je relègue cette pensée pour plus tard ; car cette porte qu'il faut traverser, c'est celle qui nous sépare de l'extérieur mais me séparera aussi de toi lorsqu'il faudra que je la passe. Et je ne veux pas. Jamais. Je ne veux pas sortir sans toi. Pourquoi le Treize s'obstine-t-il à vouloir te garder en quarantaine, t'éloigner du reste du District, t'éloigner de ceux qui comptent alors qu'ils sauraient peut-être t'aider à aller mieux ? Mais, pire que tout, t'éloigner de moi. Je me rends compte, finalement, que ce monde hostile ne cherchera qu'à nous séparer, malgré ce que nous voulons bien en dire, malgré nous. Et c'est exactement ce que j'appréhende, ce qui m'effraie. Te perdre, encore. Être séparée de toi, à jamais. « Et si on s'enfuyait ? » Une seconde, je me demande qui vient de formuler à voix haute ce à quoi je pense ; jusqu'à me rendre compte que c'est de ma bouche que ces mots sont sortis. Mes doigts glissent jusque dans ta crinière tandis que je me recule doucement, de manière à pouvoir intercepter ton regard azur, je laisse mes doigts jouer avec une mèche de cheveux, la glisser derrière ton oreille en te souriant doucement. « C'est vrai. On pourrait juste... partir. Vivre dans un District au loin, au soleil, sans armée ; on ferait notre révolte à notre manière. On serait libres. » Je souris, dans le vague, dans mes pensées. Oui, pourquoi ne pas tout plaquer ici ? Partir pour le Quatre, avec la mer, l'air frais. Loin du Treize. On aurait qu'à rejoindre les rebelles, plus libres, moins austères. On pourrait vivre heureuses, Kath. Certes, il nous faudrait convaincre Aiden, Avalon et Rumer — je ne me vois pas partir sans l'un d'entre eux après les avoir enfin retrouvés — mais on pourrait se bâtir une vie, là-bas, loin des autres, de ces sous-terrains qui me rappellent combien j'étouffe, combien je souffre. Allez, Kath, dis oui, fuyons. Vivons heureuses.

Pourtant, il y a une pensée parasite dans mon esprit, quelque chose que je ne te dis pas, que je te cache pour la première fois. Comment t'avouer, sinon, que cet uniforme que tu portes et qui me soulève le cœur lorsque je le vois sur toi, comment te dire que je commence penser à l'enfiler à mon tour ? Je suis en train de devenir folle. Littéralement folle. Je rêve de revoir enfin la lumière du jour, la vraie lumière du soleil dont j'ai été privée pendant près de sept longues et douloureuses années. J'ai envie de courir, de me battre, de réapprendre à vivre. D'aider les autres, ceux sur qui la tyrannie de Panem sévit encore plus que sur nous. « Je me sens si inutile ici, Kath. » Combien de gens arrivent au Treize, en une journée ? Tellement. Et parmi eux, immanquablement, des guérisseurs, des gens qui pourraient sauver des vies, là-haut, avec la révolte qui éclate. Et eux ici, ces gens, dans les Districts, sont livrés à eux-même, doivent soigner eux-même leurs blessures. Je veux monter là-haut, aider à mon échelle, me sentir utile, enfin, et sentir le soleil sur ma peau, de nouveau. Mais je sais que sans toi, je ne m'en irai pas. Kathleen, dis oui, je t'en prie.


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