oron silveroak

❝ WHO AM I LIVING FOR? ❞

about games and relative.

➺ COMMENT VOIS-TU TA MORT ?

Qui vous dit que je ne l'ai pas vue ?
Un soulèvement à l'usine. On y faisait régulièrement la grève, de toute manière. Ce n'était pas la pire du district, mais c'est uniquement ainsi qu'on pouvait avoir quelques privilèges, ou des conditions de vie moins douloureuses. Remy désormais avec ses jambes bioniques, elle ne pouvait plus assurer autant de travail, alors je devais travailler pour deux - les indemnités de l'usine ne couvraient qu'un strict minimum aucunement suffisant pour une adulte de presque trente ans, alors imaginez deux. Je ne me rappelle plus de la raison de la grève (sûrement une énième baisse de salaire, ce même commentaire qui a coûté ses jambes à ma soeur - et je sais que j'ai raison), mais ça a dégénéré, cette journée-là. Nous avons hurlé - tellement crié. Tous ceux qui n'étaient pas d'accord. Nous avons pris des armes, tout ce que nous pouvions trouver qui ressembler de près ou de loin à une arme, et nous avons essayé d'aller contre les Pacificateurs.
Trop. Trop forts. Trop nombreux. Trop armés. Notre rage mal organisée ne nous a rien donné, sauf la mort. Pour les autres - moi j'ai survécu. Je ne sais même pas comment. Il y avait les coups de matraque, les balles, le sang - je suis mort. Et j'ai ressuscité. J'ai rouvert les yeux j'étais déjà dans le D13. J'avais mal, j'en hurlais alors qu'on tentait de me retirer les éclats de balle et de métal fichés profondément dans ma chair, qu'on tentait de me replacer nez et mâchoire (le premier n'est pas tout à fait droit), mais j'étais vivant.
Et rebelle.

➺ POUR QUI/QUOI POURRAIS-TU MOURIR ?

Pour Remy. Panem pourrait brûler de toute sa force que je sauverais uniquement ma sœur. Elle est mon complément, l'autre partie de mon âme, et être si loin d'elle depuis si longtemps me ronge à chaque jour. Je ne suis pas habitué au mensonge, je suis quelqu'un d'honnête je crois bien, et devoir cacher que je suis vivant à la personne qui m'est la plus chère... c'est une torture. Cela dit, c'est pour la protéger que je fais cela. Si on me savait vivant, c'est elle qu'on irait torturer pour tenter de lui soutirer des informations qu'elle n'a pas. Évidemment, on me dirait que je ne suis pas révolté uniquement pour elle, mais pour l'avenir de tout un peuple. Je l'admets sans problèmes : je suis rebelle pour sauver Panem, pour détruire cette tyrannie qui est installée depuis bien trop longtemps. Malgré tout, je sauverais Remy avant n'importe qui dans ce monde pourri.

➺ COMMENT TE SENS-TU DANS LES SOUS-TERRAINS DU TREIZE ?

Mal. J'en ai l'habitude, cela dit. Les premiers mois, je ne les ai pas vus passer. Les années, par contre... Il y a toujours certaines périodes de l'année où on sent qu'on étouffe à l'intérieur - pour certains, ce sont des dates marquantes, pour d'autres, certaines saisons qu'ils aimeraient voir et vivre. Pour moi, c'est l'hiver. J'ai toujours envie de sortir, d'oublier les règles, je veux seulement respirer l'air froid et me sentir vivant alors que mes poumons brûlent. Le D13 n'est pas spécialement accueillant, de toute façon, et en sortir est d'autant plus dangereux. Les sous-terrains sont sombres, humides, mais ils sont... presque sécuritaires. La majorité du temps.

➺ AS-TU PRIS PART AUX DERNIERS EVENEMENTS, QUE CE SOIT POUR OU CONTRE LE CAPITOLE ?

Évidemment. Notre but est de gagner Panem district par district et pour ça, il faut que tout le monde mette la main à la pâte - et puis, avec mon « rang », ce serait idiot que je reste dans le 13 à me tourner les pouces. Et ça a été un tel... échec. Le Trois est retourné entre les mains du Capitole, alors qu'on le croyait gagné. On s'est assis sur nos lauriers comme une bande d'idiots et là... il faut qu'on recommence tout. Les gens ont peur. Des rebelles sont morts, encore plus, toujours plus. Il faut qu'on se reprenne et qu'on revienne encore plus fort, c'est la seule solution. Il n'y en a jamais eu d'autre, de toute manière.

➺ QUEL EST TON OPINION SUR LES PACIFICATEURS, LEUR ROLE, LEUR COMPORTEMENT ?

Connards décérébrés. Le cerveau lavé par le Capitole, enchaînés alors que certains croient certainement pouvoir tout changer ainsi, de l'intérieur. Connerie que tout ça, leur complicité les rend aussi, sinon plus, coupables que les autres. Toujours une oreille qui traînait, jadis, pour écouter les conversations et vous punir si un mot de travers était prononcé, toujours les yeux qui fouillaient, fouinaient, cherchaient la petite bête. Je suis presque content d'être mort, pour eux, qu'ils m'aient tué sans remords, qu'ils m'aient abattu sous leurs armes. Pour eux, je ne suis plus un problème, alors que j'en suis bel et bien un. Et eux sont des problèmes, tout autant qu'ils sont. Remy était plus indulgente que moi, à leur sujet, mais elle ne voyait pas non plus tout ce qui nous entoure. Ma sœur a toujours été plus douce que moi sur certaines choses.

➺ CROIS-TU AU BONHEUR ?

Je ne sais plus. Sans doute. Je crois aux flocons de neige qui tombent chaque hiver et me rappellent Remy, sa force tranquille malgré son terrible accident. Je crois à la survie d'un tribut chaque année, bien que celui-ci revienne chaque fois changé, transformé, fou probablement. Je crois au silence. Je crois à la connaissance, à l'intelligence humaine qui est si terrible et bénéfique, je crois aux avancées technologiques. Je crois à toutes ces choses tangibles, vraies, prouvées. Mais le bonheur ? Peut-être. Il ne s'est pas présenté à ma porte depuis longtemps. J'ai choisi de vivre comme je le fais, et peu importe la dureté de mes conditions de vie, je préfère cela que l'asservissement. J'ai choisi, en quelque sorte. Ça devrait me rendre heureux. Je vis. Remy vit. J'ai choisi ma voie. Je veux changer le monde.
Je préfère la neige au bonheur. Au moins, elle revient chaque année.

➺ COMMENT TE SENS-TU QUAND LE TEMPS DE LA MOISSON ARRIVE ?

Nerveux. Deux fois j'ai senti mon cœur s'arrêter lors de la Moisson. La fois d'Andreah et celle de Rhea, celle qui est allée dans l'arène avec Richard. Deux fois j'ai cru que c'était ma sœur qui avait été pigée. Oui, à chaque fois, j'étais soulagé, et tellement dégoûté de ce soulagement. Ça avait beau ne pas être Remy qui foulait l'arène, qui mourrait, mais ça n'en restait pas moins une enfant. Une personne qui serait aussi pleurée, qui avait été aimée. Soulagé qu'une autre meure, ha ! Je faisais bien pitié. Mon nom n'a jamais été tiré. Je n'ai jamais eu d'enfant à envoyer non plus. Je ne vis pas dans des conditions idéales pour me permettre d'avoir des enfants, de toute manière. Cette année, c'est une gamine du 6 qui a survécu. Je n'en suis pas plus content que si ça avait été quelqu'un d'un autre district, j'ai quitté le mien il y a longtemps, donc ce n'est pas très important. Un jour, on arrêtera ça. C'est ce qui compte.

JE VIENS D'UN MILIEU défavorisé,même si avant, j'étais pas trop mal loti, AINSI, POUR MOI, LA NOURRITURE est restreinte en quantité et en qualité selon les jours. DU COUP, MON NOM N'A aucune CHANCE D'ÊTRE TIRE AU SORT. J'EXERCE LE MÉTIER DE sergent et homme à tout faire ET POUR TOUT VOUS DIRE, J'aime, c'est quelque chose que j'ai choisi. JE SUIS DANS LE 13ÈME DISTRICT. AYANT trente-neuf ans JE ne peux plus PARTICIPER AUX HUNGER GAMES ET j'espère bien que cette dernière Moisson sera la dernière de toutes. ENFIN, J'ATTESTE QU'EN CRÉANT CE PERSONNAGE, J'ACCEPTE DE LE LIVRER À LA BARBARIE DES JEUX S'IL EST TIRÉ AU SORT.

tell us your story.

Musique

Ploc. Ploc. Ploc.

Quelque chose coulait dans cette salle. Un conduit, sûrement - qui était le dernier qui avait vérifié la tuyauterie ? Pas lui, c'était sûr, sinon, rien du tout ne coulerait. Le bruit des gouttes qui tombaient sur le béton, dans une flaque, depuis combien de temps ce tuyau coulait-il ?, l'agressait. Ça l'empêchait de terminer de nettoyer et de vérifier les armes, de les démonter les yeux fermés, les mains dans le dos, à une seule main, en cas de problèmes. Pour vérifier si tout allait bien avec elles. Pour s'entraîner. Pour se trouver quelque chose à faire. Parce qu'il n'y avait rien. Ils ne pouvaient pas sortir, alors que la garde des Pacificateurs passait au-dessus de leurs têtes, tentant d'apercevoir un signe de vie. Enfermés comme des rats, pas mieux que ces animaux, à vivre sous la terre et à se nourrir de ce qu'ils pouvaient trouver.
Il avait faim, en plus.

« Cadeau ! » La voix chaude de Morea l'interrompit dans son ouvrage, ça ainsi que le son d'un sac qui s'écrasait sur la table devant lui, dans le tas d'armes à feu. Oron leva les yeux et tendit la main pour ouvrir le sac, tandis que sa collègue rebelle traficotait quelque chose dans le coin de la salle. Du pain. Et des fruits. Bon sang. «Des fruits ? Où t'as trouvé ça ? Ne crois pas que je vais te dévoiler tous mes petits secrets. » Il en salivait déjà. Mais il ne pouvait pas manger ça. Comme si elle lisait dans son esprit, la dame tourna la tête pour le regarder par-dessus son épaule. « Vas-y. J'ai chipé ça pour toi. Personne le saura. Une rebelle chez les rebelles ? C'est que vous êtes bien impertinente, mademoiselle. Sa voix s'était faite malicieuse. Julian n'a pas des yeux partout, je fais ce que je veux, quand il est parti. Et puis, tu vas faire quoi ? Me dénoncer ? » Non. Non, évidemment. Oron sourit, n'ajouta rien et laissa simplement retomber le pistolet pour attraper une pomme et croquer dedans à pleines dents. Une pomme fraîche, pas trop abîmée, goûteuse, juteuse - où avait-elle été pêcher ça ? Il avait peur, en fait, de le savoir, mais il n'osait pas demander.

Pendant quelques minutes, il ne porta pas attention à ce que la blonde faisait. Il y avait cette pomme, et ce pain, et ces raisins, et cette flasque emplie d'un alcool dont une seule gorgée lui fit tourner la tête. Il n'avait jamais bien mangé. Enfants, Remy et lui étaient très minces, voire maigres. Adolescents, ils avaient refuser de laisser leurs parents se priver de nourriture et avaient donc conservé leur stature filiforme. Jeunes adultes... sa soeur avait eu son « accident », lui redonnant quelques plumes, et lui avait continué de travailler pour toujours trop peu d'argent. Et ce n'était certainement pas en vivant en reclus qu'il avait connu le plaisir de la bonne chère, ha ! Ça non. Donc, comme nous disions, il mangeait en silence quand il remarqua que Morea était encore dans son coin en train de faire il ne savait quoi. « Tu fais quoi ? » Pas de réponse. Oron fit mine de se lever, mais elle se retourna vivement en cachant quelque chose derrière son dos. « Bouge pas, j'ai presque fini. »
À tous les coups, elle planifiait un mauvais coup.
Il resta donc immobile et termina son repas, et à peine le dernier raisin croqué, la blonde se retourna avec une moue victorieuse sur son visage. « Alors ? » Quelques secondes. Et il sut. Un grésillement venait d'emplir l'air, suivit d'une musique. De la musique.

Au D13, la radio ne servait que pour entendre les discours de Capitole. Que pour les nouvelles. Jamais pour la musique.
Il savait en jouer, jadis. Sans doute que s'il réessayait...

« Lève-toi » Et marche. La phrase, il l'avait complété dans sa tête par automatisme. Les derniers mots qu'il avait dit à Remy. Oron se leva tout de même et alla rejoindre sa compagne, lui tendant son bras, qu'elle prit avec un rire.

Et ils dansèrent.

La vague blonde des cheveux de Morea sentait les fleurs. Les fleurs dans cette humidité. Les fleurs et les fruits. Son corps était chaud. Leurs mouvements s'accordaient bien, si bien, dans l'espace libre entre la table et la table où reposait la radio, entre les armes à feu défaites et la porte fermée de la pièce. Il n'y avait que la musique grésillante et Morea, que les souvenirs qui remontaient. Il aimait danser avec Remy, quand ils étaient plus jeunes - quand elle pouvait encore danser. Quand il était là, qu'il n'avait pas lâchement préféré être mort que vivant et à ses côtés. Pas mieux que ce fieffé idiot de Joas - pire que lui, même. Il l'avait laissée seule, seule au monde, alors qu'il aurait été si simple de lui passer un message par Morea, quelque chose de codé qu'elle pourrait décrypter... mais ce serait tellement risqué.
Il ne voulait pas que sa sœur souffre. Pas encore plus.
Tourne. Pointe. Glisse. Serre. Pique. Respire. Regarde. Les yeux de Morea qui cherchent les siens pour s'y ancrer, pour laisser un sourire doux étirer ses lèvres qui n'en faisaient jamais assez, pour qu'une main se glisse sur sa joue râpeuse de barbe. Il savait que ce qu'elle voulait. Ce qu'il ne ferait pas. Ce qu'ils ne feraient pas. Il ne résista pourtant pas quand elle l'embrassa. Presque pas. « Rea... »

J'ai pas la tête à ça.
Je ne veux pas.
C'est pas le temps.
Je ne veux pas ça.
J'en ai marre.
Je suis seul.
Ne me laisse pas.
J'ai besoin d'une autre que toi.
Je ne sais pas quoi faire.

« ... s'il te plaît. »

Elle s'éloigna. La musique jouait encore. Et sur ses traits, cette fureur qui semblait constante, vive, bouillante dans son corps, son coeur, sa tête. Elle ne dit rien, pourtant, il la voyait se mordre la lèvre pour ne pas hurler. Elle reprit seulement son sac sur la table et le laissa seul dans la pièce.

Seul avec la musique.