Capitole - Mars 2311.

Il était encore tôt lorsque les mouvements esquissés par mon mari me tirèrent du sommeil. Je jetai machinalement un oeil sur le réveil pour voir qu'il était sept heures du matin. Bon sang, ça n'était pas humain de se faire tirer des bras de Morphée à cette heure ci lorsqu'on ne travaillait pas. Du moins, lorsque je ne travaillais pas. Parce que bien évidement ce n'était pas le cas de Lucius qui avait qui plus est une importante réunion qui lui prendrait une bonne partie de la journée. Alors qu'il commençait à peine à se lever, je me surpris à l'observer, un fin sourire aux lèvres. Il n'y avait jamais eu d'amour entre mon époux et moi. Une attirance, purement physique, une certaine affection qui avait finit de naître mais rien à voir avec la passion dévorante. Nous nous étions mariés parce que nous étions conscient que cela servirait nos interêt à tous les deux. Et nous étions bien heureux comme ça... La fougue, la passion et l'exaltation nous allions la chercher ailleurs et voilà bien la première fois depuis longtemps que nous avions passé la totalité de la nuit ensemble. Mais je dois admettre que de temps en temps cela faisait un bien fou. C'était agréable aussi d'avoir parfois l'air d'un couple normal.

Lorsqu'il quitta la chambre, je tachai de m'endormir, en vain. Tout se bousculait dans ma tête et surtout les Jeux. La Moisson n'allait pas tarder et j'avais hâte de voir qui serait les Tributs de cette année. J'espèrai que certains soient prometteurs, qu'ils nous offrent un spectacle grandiose à la hauteur du Capitole. Après tout les Hunger Games étaient l'évènement le plus attendus dans tout Panem et le président Snow attendait chaque personne y prenant part au tournant. Autant dire qu'un Juge pouvait bien perdre la vie dans des conditions mystérieuses si il ne remplissait pas sa part de travail. J'en avais conscience et nous en avions tous conscience bien que cela ne se dise jamais. Pourtant cela ne me révoltait pas. Rien ne me révoltait concernant les agissements du Capitole. J'y avais toujours adhéré et y participait autant que je le pouvais. Mais se serait mentir que de dire que je n'appréhendais pas ces Jeux. Sans doute parce qu'il s'agissait des deuxièmes pour moi en tant que Juge. Et oui j'étais encore toute jeune dans le métier et je manquais peut être encore un peu d'expérience même si mon arrogance naturelle me permettait de masquer tout ces doutes derrière un masque d'apparente froideur.

J'étais restée près d'une heure ainsi, allongée dans mon grand lit à tourner et retourner cette 76th édition à venir. Ce n'est que lorsque j'entendis du mouvement venant de la chambre d'à côté que je daignais me lever. Il était l'heure pour ma fille Luxuria d'aller à l'école et comme toujours depuis des années elle se levait toute seule. Le temps de me lever pour la rejoindre qu'elle était déjà en train de prendre son petit déjeuner, préparé par le muet à notre service.

" Bonjour ma chérie, bien dormi?" Je déposai un doux baiser contre ce front avant d'aller m'asseoir à mon tour. Le matin je n'avais jamais très faim et me contentait de manger quelques fruits, un vrai pêché mignon pour moi, pendant que ma fille engloutissait des denrées en tout genre. Nous discutions de choses et d'autres durant tout le temps du déjeuner alors que je surveillais régulièrement l'heure pour que Luxuria ne soit pas en retard. Si il y avait bien une chose que je détestais c'était cela. Le début de matinée passa donc rapidement et après avoir embrassé ma fille qui partait accompagné de notre muet, je me suis donc dirigée vers la salle de bain pour y prendre une douche brûlante. Je la prenais toujours comme ça. Les jets d'eau laissait des traces rouges sur ma peau tant ils étaient chaud et la buée envahit très vite toute la pièce. Pourtant c'est fou ce que cela pouvait me détendre. Si je m'écoutais je passerai des heures ainsi.

Malheureusement cela n'était guère possible. Même quand je ne travaillais pas j'avais des choses à faire et même lorsque je n'étais pas sur mon lieu de travail je trouvais le moyen d'y penser et de m'avancer. Ainsi je m'installais donc derrièrz la grande table du salon, une multitude de papiers devant moi. Le choix de l'arène pour la prochaine édition avait enfin été arrêté hier lors d'une réunion, néanmoins il nous restait encore beaucoup de travail. Ainsi je me mis à griffonner quelques idées de créatures génétiquement modifiés, d'obstacles à mettre en place. Je réfléchissais aux détails de cette arène en esquissant même quelques croquis... Jusqu'à ce que la sonnerie retentit. Sans attendre je rangeais aussitôt tous mes papiers et les enfermais dans la petite commande se trouvant dans la pièce la plus au fond de la bâtisse. Si quelqu'un venait à tomber sur ce genre de papiers je ne donnais pas cher de ma peau...

" Gladys! Pile à l'heure, c'est parfait." En effet, cette professeur du district un avait toujours été ponctuelle avec moi ce que j'appréciais grandement. Il faut dire que nous ne rations jamais nos petits rendez vous, plus encore lorsque l'heure de la Moisson approchait. Je n'étais pas du genre à être proche des habitants du district, mais avec elle c'était différent. Déjà elle venait du un, le district qu iavait le plus de valeur à mes yeux. Ensuite elle enseignait aux Carrières, ce qui constituait un sérieux avantage pour moi. Et enfin elle était une pro capitolienne, le genre d'habitant qu'il nous falait absolument. Voilà pourquoi je m'étais liée à elle et m'autorisais même à l'inviter chez moi de manière occasionnelle.

"Désire tu quelque chose?" Questionnai je alors que je venais de la faire entrer et de l'inviter à prendre place dans le grand salon. Je n'étais peut être pas un modèle de chaleur et certainement pas la femme la plus accueillante du Capitole néanmoins je connaissais les bonnes manières et savais les mettre à profit lorsqu'il le fallait.

Gladys s'était levée tôt ce matin-là, malgré un coucher tardif la veille : le train depuis le district un ne l'avait déposée au Capitole qu'à dix heures du soir. Mais elle avait l'habitude de se rendre ainsi à la capitale pour le weekend de temps à autre, profitant des arrangements de son emploi du temps qui répartissaient ses heures de cours du mardi au jeudi. Elle partait aussitôt sa dernière leçon terminée et ses obligations administratives réglées, et n'attendait pas, le lendemain, pour vaquer à ses occupations mondaines. Une fois les pieds au Capitole, elle ne s'accordait aucune grasse matinée.

Cette fois en particulier son enthousiasme avait eu le temps de grandir sous la frustration : cela faisait plus d'un mois qu'elle n'était pas venue, trop prise qu'elle avait été par l'organisation des examens et la correction des copies. À présent qu'elle respirait enfin, il lui fallait oublier toutes ses tensions, ou du moins les remplacer par de plus agréables au sein de la population la plus haute de Panem. Les troubles scolaires étaient oubliés pour un temps en cette période d'approche de la Moisson, et cette dernière cachait les prochains, à l'horizon. Bientôt, bientôt l'instant béni où elle verrait le ravissement sur le visage des tributs de son district, où son cœur s'emplirait de fierté à voir les beaux jeunes gens du Un le représenter dignement.

Le premier rendez-vous qu'elle avait pris, en lien direct avec cette Moisson tant attendue, avait bien évidemment été avec Astoria Wrickers. Elle ne pouvait attendre sans trépigner intérieurement de lui décrire avec tous les détails les plus flatteurs ses meilleurs éléments de cette année – et une en particulier, qui ferait à n'en pas douter son ravissement, comme elle faisait le sien depuis qu'elle l'avait découverte dans sa classe. Dans le train qui la rapprochait de cet instant, la veille au soir, elle s'était laissée aller à imaginer la discussion, avait prévu à l'avance ce qu'elle pourrait dire, et comment. Elle en avait oublié les détails ce matin, car il s'était moins agi d'une réelle prévision que d'un fantasme en attendant sa réalisation concrète, mais flottait toujours en elle la sensation de bonheur diffus que cette rêverie lui avait laissé. Elle trouverait bien les mots sur le moment, pour cela elle ne se faisait pas de soucis ; les seuls discours qu'elle préparait à l'avance demeureraient toujours ses leçons.

Dès qu'elle avait ouvert les yeux, dans la chambre luxueuse de l'hôtel qu'elle avait choisi pour ce séjour-ci, elle s'était sentie chez elle. Fait absurde, quand elle ne savait que trop bien qu'elle ne tolérerait pas de vivre au Capitole à plein temps... La possibilité lui en avait été offerte, après tout, et elle l'avait refusée : elle aimait trop son district pour s'en séparer si radicalement, et surtout ne supportait que modérément la compagnie prolongée des Capitoliens. De la plupart d'entre eux, du moins. Astoria était de ces exceptions. D'abord parce que Gladys ne pouvait que lui vouer une admiration sans limite au vu de son parcours : si liée aux Jeux, et en particulier responsable de la représentation nationale de son cher district, elle avait dès le départ conquis la professeur. Ensuite parce qu'elle avait trouvé en elle, ou prétendu trouver, une semblable, au caractère proche du sien, et avec qui elle partageait plus que les apparences n'auraient pu le prévoir. Sa nomination en tant que Juge n'avait fait que renforcer cette admiration, ainsi que laissé fleurir la courtoise amitié qui les liait, et que Gladys avait soin d'entretenir dès que l'occasion s'en présentait. Comme aujourd'hui, justement.

En choisissant sa tenue de la matinée – elle ne se changeait jamais autant qu'au Capitole – Gladys avait pris soin de se parer avec richesse mais sans trop se charger. Elle aimait l'élégance et la simplicité où tant de Capitoliens s'embarrassaient d'attributs grotesques ; sachant qu'Astoria partageait ces goûts, elle surveillait d'autant plus sa mise en sa compagnie. Elle avait donc opté pour une longue robe blanche, serrée jusqu'aux genoux puis évasée sur les mollets, qui ondulait au-dessus d'une paire d'escarpins transparents, ornés sur le contour d'une rangée de perles. De légers points de couleurs s'accrochaient périodiquement : un trait de bleu pâle à son poignet et à son cou, en accord avec les reflets du bas de son jupon, et un rose opalin sur les lèvres.

Elle se présenta ainsi rayonnante chez Astoria, et fraîche d'un plaisir sincère de retrouver la jeune Juge.

— Gladys ! Pile à l'heure, c'est parfait.

— Toujours, répondit-elle avec un sourire, en pénétrant dans la somptueuse demeure, aussi séduite que la première fois qu'elle y avait mis les pieds.

— Désires-tu quelque chose ?

— Juste du thé, je te remercie.

Elle contempla paisiblement le salon, quoiqu'elle ait déjà eu l'occasion de le détailler, et s'assit où on l'y invitait. Les maisons du Capitole avaient beau avoir toutes un luxe certain, toutes n'avaient pas la prestance de celle des Wrickers. Si elle avait pu s'en faire bâtir une, Gladys l'aurait sans le moindre doute arrangée de manière semblable. Mais c'était là un fou désir qui ne pourrait se réaliser, et auquel elle tâchait de ne pas trop songer, cherchant plutôt à se satisfaire des divers hôtels où elle pouvait se permettre de loger. Il y avait hélas des limites à ce que sa fortune pouvait lui accorder. Elle remercia quand on lui servit le thé, mais attendit avant de le porter à ses lèvres.

— Alors, que deviens-tu ? La préparation des prochains Jeux te passionne, j'imagine... fit-elle avec un petit sourire complice. Elle ne tarda cependant pas à ajouter : Je sais bien que tu ne peux rien me dire. Malheureusement ! Je devrai attendre quelques mois encore. Dis-moi seulement : l'arène à venir va-t-elle bien passionner tout Panem ? Assez pour lui faire oublier l'édition précédente ?

Je ne me voilais pas la face. Je savais pertinament que dans d'autres circonstances, Galdys et moi aurions pu être de proches amies. Mais je me plaçais moi même certaines barrières et par conséquent m'interdisais de lier des liens sincères avec des gens des districts. Certes Gladys aurait parfaitement eut sa palce parmis nous mais le simple fait d'avoir choisi de rester là ou elle était prouvait bien qu'elle était différente des Capitoliens. Pourtant elle était une des rares qui ne m'ennuyait pas. Certainement grâce à nos similitudes, mais aussi à sa politesse et so nrespect que j'appréciais grandement. Et puis elle savait toujours lorsque le moment était venu de s'éclipser ce qui était rarement le cas des habitants du Capitole. La plupart avait le plus grand mal avec la subtilité et n'était guère perspicace à mon plus grand désarroi.

"Ce muet, jamais là lorsque j'en ai besoin." Certes je faisais preuve de mauvaise foi. Si i létait absent c'est bien parce que je lui avais déjà donné quelque chose à faire. Je n'était pourtant pas feignante. Au contraire j'avais le gout du travail et ne comptais pas les heures. Mais les taches ménagères et toutes les choses de ce genre là n'étaient pas du tout ma tasse de thé. Cela me prendrai un temps considérable et je trouvais cela plutôt dégradant pour quelqu'un comme moi, voilà pourquoi j'avais décidé d'embaucher un muet. Il fallait bien que ces gens servent à quelque chose après tout... Mais tant pis, je me débrouillerai toute seule pour apporter son thé à mon invité. Après tout c'était encore dans mes cordes.

Alors que je me dirigeais vers la cuisine, je pus apercevoir au passage le regard que portait Gladys sur ma demeure et j'en esquissais un fin sourire satisfait. Je savais ma maison fabuleuse, après tout elle avait été travaillé pour ça. Mais j'appréciais toujours de voir cette lueur admirative dans le regard de mes invités. Bien sur je n'étais pas la seule à avoir une maison aussi luxueuse et elle n'était peut être pas la plus belle du Capitole mais j'en étais assez fière d'autant plus que je la trouvais aménager avec gout. Bien décidée à ne pas faire trop attendre mon invitée, plus par politesse que par réelle attention, je me hâtais de faire chauffer l'eau alors que je préparais un plateau sur lequel se trouvait le sucre, les petites cuillères et surtout une bonne vingtaine de thé différent, préférant la laisser choisir. Le tout étant prêt en quelques minutes, je revins donc assez rapidement auprès de Gladys, la laissant décider du thé qu'elle préferait.

" Certainement autant que l'entrainement de tes Carrières." Je lui adressai un sourire entendu. Effectivement cette période était importante pour moi puisque nous approchions des derniers préparatifs... mais elle l'était certainement autant pour Gladys. Après tout il lui fallait bien préparer de bons Carrières. Rare était les fois ou aucun tributs ne c'était porté volontaire au district un et croyez moi je suis bien placée pour le savoir. Et mon invité serait toujours très bien vu si le vainqueur de cette édition était un de ces élèves.

" Effectivement, savoir tenir notre langue est bien une des premières qualités requises dans notre métier." Tout en lui répondant je me servais un thé à la menthe. La saveur n'était peut être pas originale mais je l'avais toujours trouvé exquise. D'ailleurs c'était bien le seul thé que je buvais. Tous les autres étaient uniquement là pour faire bonne figure, pour montrer l'abondance dont je disposais lorsque les invités me demandait un thé, rien de plus.

"Je pense qu'elle plaira à beaucoup des habitants de Panem... elle est vraiment surprenante." En effet, voilà bien longtemps que l'arène n'avait pas été dans un climat bâtie avec un climat aussi froid. La survie des tributs allaient être mise à rude épreuve et je me doute bien que l'arène allait plaire. Bien sur je craignais de voir les tributs mourir de froid trop rapidement et j'espérais que nous avions fait le nécessaire pour cela. Après tout le but était de donner un vrai spectacle. D'autant plus qu'il fallait toujours encore rettraper l'édition précédente, nous n'avions donc pas le droit à l'erreur. Certes cela me causait quelques tracas mais j'étais plutôt confiante de l'ensemble. " J'ai hâte que vous puissiez tous en découvrir tous les secrets." C'est qu'il était parfois difficile de garder le secret. Je mourai d'envie de tout raconter, de vanter mon travail et celu ide mes collègues dans une moindre mesure. J'adorais recevoir lesfélicitations des habitants après le premier jour dans l'arène, lorsqu'ils avaient déjà découvert certaines choses. Et ne pas pouvoir entendre des félicitations maintenant me frustrait un peu. Mais je savais que je paierai cher la monidre fuite. Voilà qui incitait assez facilement à se taire.

" Malheureusement l'arène ne peut guère faire de miracles si les tributs sélectionnés manque de charisme et de motivation." Je buvais une longue gorgée de mon thé brûlant, appréciant la sensation de chaleur s'insinuant dans ma gorge alors que je posais ma tasse doucement. Je savais que Gladys comprenait parfaitement ce que je voulais dire. Il était toujours important d'avoir des tributs interessants. La plupart étant choisi par pur hasard je misais souvent sur la chance mais aussi sur ceux qui se montraient volontaires. Une façon de mener la conversation sur les Carrières de mon invitée en somme.

Gladys avait eu un hochement de tête compréhensif lorsqu'Astoria s'était plaint de son muet. Elle-même n'en avait pas ; mais non parce qu'elle ne pouvait se le permettre, ni parce que, comme la plupart de ceux des districts, elle réprouvait cette pratique comme une preuve de barbarie du Capitole. Au contraire, elle trouvait cela remarquable, et même très humain : au lieu de condamner les criminels et dissidents à un emprisonnement perpétuel, on leur offrait une nouvelle vie, une chance de se rendre utile dans la société, de servir les plus grands de ce monde. Une rédemption que ceux des districts devaient envier de tout leur cœur. Si elle-même avait choisi de ne pas en réclamer les services – hors bien entendu de ceux compris dans les hôtels où elle logeait – c'était tout bonnement par manque de confiance envers eux. Cela dit, elle appréciait toujours lorsqu'elle pouvait profiter de leur aide discrète et efficace chez ses relations. C'est donc sans se choquer qu'elle accueillait, avec même un certain amusement, le perpétuel agacement condescendant des Capitoliens à leur égard.

Elle n'y pensait cependant déjà plus alors qu'elle commençait à goûter son thé en écoutant Astoria lui parler de son travail. La référence à ses Carrières la fit sourire en toute sincérité, tant elle comprenait ce que la Juge voulait dire. En ce qui concernait les Jeux, tout travail y ayant lien excitait, et même enfiévrait en cette période de préparation. Toute la population, après tout, n'attendait que ça – et donnerait cher, à n'en pas douter, pour pouvoir avoir ce privilège de discuter avec l'un des Juges. Gladys s'en gonflait d'orgueil autant que de joie simple, quoique sans le montrer derrière son air toujours tranquille à siroter son thé. Astoria cependant demeurait mystérieuse, toujours à respecter le secret, comme il se devait : preuve de sa force de caractère, qu'admirait la professeur. On sentait pourtant toute la passion contenue, l'envie de déjà faire connaître au monde le génie des créateurs des Jeux. Rien qu'à entendre cet écho, elle s'en sentait toute émoustillée.

— Malheureusement l'arène ne peut guère faire de miracles si les tributs sélectionnés manquent de charisme et de motivation.

Gladys prit son temps pour finir sa gorgée, poser sa tasse et esquisser un sourire ravi ; un exploit, tant elle se sentait intérieurement excitée à l'idée de parler de ses, ou plutôt de sa merveille de cette année. Elle avait tant à dire sur Glamoria qu'elle aurait pu se lancer tout de suite, et parler sans s'arrêter pendant des heures. Mais, par soucis d'étiquette, par respect pour son hôte et parce qu'elle ne voulait pas gâcher le plaisir en tout dévoilant trop vite, elle se contenta de garder le ton serein de la conversation.

— Tout à fait, il en faut qui sachent profiter de ce qui les entoure et mettre les Jeux en valeur autant qu'eux-mêmes.

Quant à ceux qui ne le savent pas, ils périssent toujours rapidement, de toutes façons, songea-t-elle en outre, mais sans le rajouter. Ce n'était pas un secret que les tributs les moins intéressants et les moins aimés du public tendaient à mourir quand l'action faiblissait : pour laisser aux favoris le temps de se préparer à se battre entre eux, on éliminait le menu fretin pour tout de même continuer à divertir les spectateurs. Personne n'en doutait, et cependant c'était quelque chose qu'on ne formulait pas. Non que ça soit en soi tellement tabou, mais Gladys avait la sensation que ç'aurait été déplacé d'en parler, un peu comme mentionner à un couturier ses techniques de points. Elle saisit donc la perche que lui tendait si courtoisement Astoria, et en vint au sujet de ses Carrières.

— J'ai d'ailleurs cette année une jeune fille qui promet de briller... quel que soit le terrain où elle évoluera, au Capitole autant que dans l'arène.

Elle marqua une légère pause, toujours afin d'éviter de se précipiter, pour laisser monter le suspens, aussi – mais avec subtilité.

— Elle s'appelle Glamoria Sparkles. Peut-être la connais-tu ? Elle est également mannequin...

J'ai toujours assumé le fait d'avoir des préjugés et des idées bien arrêtées sur les habitants des Districts. Ceux venant des districts les plus pauvres sont souvent qualifiés de misérables de ma part et je ne leur accorde que très peu d'interêt. Ceux qui viennent de districts plus appréciés du Capitole ont le droit à plus d'égard de ma part et en particulier ceux habitant au 1. Il est sans nul doute mon district préféré, ce n'est pas pour rien que j'y ai passé plusieurs mois dans ma jeunesse et que je me suis retrouvée dans l'équipe de préparation de ces tributs là durant onze éditions des Hunger Games.

Déjà parce que j'aime beaucoup leur spécialité; les produits de luxe. C'est que j'aime le confort et le luxe, donc forcément... Mais en plus de ça, ils sont proches de nous. C'est là bas que l'on compte le plus de pro capitole et le moins de miséreux. Les personnalités les plus interessantes des districts font partis de ce dernier et Gladys en est un bel exemple. Certes je n'ai jamais oublié que nous ne venions pas du même monde. Mais j'admets apprécier sa compagnie et sa façon d'être souvent proche de la mienne. Sans compter que l'avoir parmis mes relations positives est toujours très utile à l'approche des Hunger Games... Voilà pourquo que je lui donne le maximum de sympathie que je peux lui donner sans oublier bien évidemment nos différences.

"Tout à fait, il en faut qui sachent profiter de ce qui les entoure et mettre les Jeux en valeur autant qu'eux-mêmes." Je hochai légèrement la tête en guise d'approbation. Voilà bien quelqu'un qui avait tout compris. " Les Jeux sont avant tout un spectacle et le public n'aime pas suivre sur écran des gens transparents et faibles. Jamais ces personnes ne sortent vainqueur puisqu'elles ne parviennent pas à s'en donner les moyens et se font avoir par les plus fortes personnalités. C'est un fait." Ou du moins c'était la version officielle. Qui n'était pas loin de la vérité non plus. Il est vrai que les personnes les plus faibles trouvaient la mort rapidement. Néanmoins si les plus discrets mouraient parfois ce n'était pas toujours à cause de leur vulnérabilité. Au contraire, certains étaient très rusés mais sans aucun charisme. Et hors de question de faire gagner ce genre de personnes, non appréciés du Capitole. Alors, nous nous arrangerions pour leur monter bons nombres de difficultés. Idem pour u ntribut qui faisait office d'un esprit rebelle trop poussé.

"J'ai d'ailleurs cette année une jeune fille qui promet de briller... quel que soit le terrain où elle évoluera, au Capitole autant que dans l'arène." Cette fois si je levai légèrement les sourcils, un regard interrogateur fixé sur Gladys. C'est que cela m'interessai. A vrai dire j'espérais même l'entendre dire cela. Je misais toujours beaucoup sur le district un et je le dis, cela me plairais de le voir gagner cette édition. Et je savais très bien que bon nombres de Capitoliens attendaient également avec impatience les prouesses de ce district, surtout si il s'agissait de Carrières. Nos habitants aimaient ce genre de tributs et ça, je ne l'oubliais pas... Néanmoins je ne pippais mots, préférant attendre que mon interlocutrice me donnent d'avantages de précisions d'elle même. Ce qui ne tarda pas à arriver.

"Elle s'appelle Glamoria Sparkles. Peut-être la connais-tu ? Elle est également mannequin..." Et voilà, comme d'habitude mon soucis principal... Mon incapacité à retenir les noms des gens. Je n'y pouvais rien, il fallait vraiment qu'ils me marquent ou que je les connaissent bien pour mémoriser cela. Sinon je les trouvais si peu digne d'interêt que je ne prenais pas cette peine. Mais si cette Sparkles était si talenteuse, mieux valait pour moi de retenir son identité. " Glamoria dis tu?" Simple question réthorique de ma part posée plus dans le but de me laisser le temps de visualiser la personne qu'autre chose. Néanmoins après quelques secondes je n'arrivais toujours pas à mettre un visage sur ce prénom. " Peut être l'ais je aperçu à quelques reprises mais j'avoue qu'à chaud son nom ne me dis rien..."

Il faut dire que ce n'était pas les mannequins qui manquaient ici. Nous étions tous tellement obsédés par l'apparence et la mdoe qu'il nous fallait bien quelques emblèmes. Nus avions aussi bien nos top model du Capitole, que des mannequins des districts. Des personnes dont la beauté n'avaient pas pu nous laisser indifférents malgré leurs origines... " Sais tu si elle compte se montrer volontaire le jour de la Moisson? " Demandai je d'u nton neutre pour masquer le grand interêt que j'avais vis à vis de la réponse qu'elle m'apporterai. " Mais dis moi, qu'est ce qui la rend si talentueuse à tes yeux?"

Gladys ignorait si le nom de Glamoria était connu ailleurs que dans son district. Elle ne s'attendait en tous cas pas spécialement à ce qu'Astoria bondisse à son évocation, ne sachant que trop bien le nombre astronomique de mannequins que les habitants du Capitole avaient l'occasion de voir chaque jour. Si elle n'y avait guère prêté attention, elle se rappelait qu'en venant ce matin elle avait croisé de nombreuses affiches, de nombreux corps mis en valeur, avec animations, reliefs et sons pour rendre la publicité plus saisissante encore. Sa chère élève, si peu de monde au district un ignorait son visage, n'était ici qu'une jolie image parmi d'autres, là pour briller le temps d'un trajet, avant d'être remplacée par la suivante. Mais elle savait qu'à présent son nom ne serait plus oublié par la Juge, et que celle-ci, si l'envie lui en prenait, pourrait faire quelques recherches de son côté pour ressortir les diverses photographies de Glamoria qui devaient bien être stockées quelque part. Photographies qui, d'ailleurs, ressortiraient fort probablement une fois la jeune fille connue de Panem en tant que tribut... Il n'était pas de meilleur publicité qu'une héroïne des Jeux posant pour votre marque !

Au final, qu'Astoria voie pour l'instant de qui il s'agissait ou non importait peu ; ce qui comptait, c'était de lui avoir appris l'air de rien la profession de Glamoria. Quelle meilleure preuve de la beauté et du charisme d'une jeune fille des districts que de se voir choisie comme mannequin par le Capitole ? Déjà une partie de ce qu'on demande à un tribut était ainsi garantie : elle savait séduire les foules. Étant en outre Carrière du Un, il était déjà évident que les spectateurs l'adoreraient.

— Sais-tu si elle compte se montrer volontaire le jour de la Moisson ?

Gladys prit un air amusé à cette question. C'est que c'était là l'autre point positif de la jeune fille : elle était déterminée, et son volontariat n'était déjà plus une option. Encore une raison pour attiser l'amour du Capitole à son égard.

— Il faudrait la ligoter et la bâillonner pour l'en empêcher, cette année !

Elle continua de boire son thé en souriant tranquillement, afin de prouver qu'elle n'avait pas le moindre doute à ce sujet. Certes Glamoria avait encore un an devant elle avant de ne plus être éligible à la Moisson, mais elle s'était tant préparée cette année en vue de la 76ème édition qu'il faudrait un véritable cataclysme pour l'empêcher de se porter volontaire. Ces Jeux seraient les siens, personne au district n'en doutait.

— Mais dis-moi, qu'est-ce qui la rend si talentueuse à tes yeux ?

Elle n'eut aucune hésitation avant de répondre, mais prit seulement le temps de poser sa tasse sur la table et de s'appuyer au fond du siège afin de se mettre plus à l'aise. Cet instant était important pour de nombreuses raisons : si elle voyait Astoria dans un contexte purement amical, elle n'oubliait jamais que cette dernière était Juge, et que tout le bien qu'elle pourrait dire de Glamoria maintenant la servirait plus tard – et ce que la Juge y pense consciemment ou non. Il ne s'agissait pas d'une interview, d'un interrogatoire ou d'une réunion professionnelle, mais Gladys y accordait autant d'importance, avec seulement le stress en moins. Elle n'avait pas besoin de repenser à tout ce qu'elle avait sottement prévu de dire : tout lui venait naturellement.

— De nombreuses choses, à vrai dire : elle est très polyvalente, ce qui est la base de sa force. Elle a beaucoup de charisme et manie très bien les mots – c'est une de mes élèves les plus douées, vraiment. Le tout va lui servir autant pour plaire au Capitole que pour manipuler les autres tributs, je n'en doute pas, ajouta-t-elle avec un air entendu. Dans l'arène, une bonne partie du spectacle reposait sur les jeux d'alliance et de trahison ; les charismatiques et les manipulateurs donnaient en général de quoi passionner l'audience. Mais je dirais que son plus grand atout est sa volonté et sa force de caractère, termina Gladys plus sérieusement.

Après tout, toutes les qualités du monde ne servaient à rien si elles appartenaient à un tribut trop faible pour en profiter.