La journée s'annonçait bien. Ma mère et ma famille ne connaissait toujours pas mon lourd secret et c'était tant mieux. Comment ma mère aurait-elle pu le supporter ? Et mon frère et ma sœur alors ? Il fallait donc que ça continue ainsi. Que rien ne se sache. Et pour cela il fallait que je l'écoute et lui obéisse. Mais depuis le lendemain de mes tortures, cette soirée que j'avais passé avec lui, enfin plutôt cette nuit, il avait changé à mon égard. Il ne me frappait plus, ne me parlait plus comme à son esclave que je devait être, mais bien comme à un égal.
Et moi je ressentais quelque chose pour lui. Quelque chose de fort. Quand je le croisait en ville bien sur nous faisions comme si j'étais le garçon discipliné qu'il voulait que je sois, mais le soir chez lui, il était différent. Et je pouvais le regarder dans les yeux. Me plonger dans cet ébène magnifique, brillant, parfait. Je le laissais alors profiter de moi tout autant qu'il me laissais profiter de lui. Et en général, il me laissais dormir contre lui ou lui contre moi. Allez savoir.
Mais je ne m'attendais pas à ce que ce soir là tout change. Alors que je faisais de nouveau le mur pour aller "m'entraîner" avec Adonis, je ne pensais absolument pas que quelque chose allait attirer mon attention au-delà des grillages et des limites de notre district. Je regardais, fendant la nuit de mon regard. Je ne me trompais pas. quelque chose avançait vers notre district. Je me cachais et laissait approcher la personne. Hors de question que je me fasse repérer. Et s'il s'agissait d'un collègue d'Adonis ? Comment lui expliquer ou je me rendais ? D'autant plus après le couvre feu ? Et je ne voulais surtout pas lui causer de torts.
Je restais caché jusqu'à ce que la personne passe le grillage. Je sortais la tête de ma cachette et remarquais alors la carrure de cette personne. Ce n'était pas un pacificateur. Et vu ses fringues, il ne pouvait venir que d'un district. Je sortais de ma cachette en silence et comme une ombre me faufilais derrière lui. Je plaçais une main sur sa bouche et parlais rapidement et silencieusement. Tel un murmure, mes mots filèrent comme le vent :
"T'es fou si tu te fait prendre c'est la torture assuré. Part de là. Y'a des rondes toutes les cinq minutes."
J'espérais qu'il comprendrait qu'il devait se faire petit. Je lui faisait signe pour lui montrer une cachette en espérant qu'il me suive.