La journée commençait très bien. Ma mère n'étant pas débordée, j'avais tout le temps que je voulais pour moi. Donc je sortais de mon lit très tôt comme à mon habitude mais ce coup-ci pas pour bosser. Je prenais mes couteaux et sortais dehors. Je passais alors devant sa maison à elle.

Un jour, elle m'avait sortie d'un mauvais pas. Mais depuis ce n'était pas le grand amour entre nous deux. Pourtant je pensais qu'elle ne pouvais que comprendre ce que je voulais et ce que je ressentais. Après tout elle vivait cette tyrannie tous les jours. Là d'ailleurs elle s'entraînait. Enfin disons plutôt qu'elle se faisait torturer par son blaireau de père. Celui là je ne le connaissais que trop bien. Je ne calcul même plus le nombres de fois où je suis rentrée chez moi avec quelques ecchymoses. Certaines justifiées, d'autres par pur sadisme.

Enfin bref autant dire que ce mec reflétait totalement le régime qu'il servait. Un homme rigide, sadique, violent. Même envers sa propre fille. Je ne comprenais pas ce genre de personne. Pourtant sa fille n'y échapperait pas. Lui aussi devrait l'offrir en tribut. Alors pourquoi ne se révoltait-il pas ? Pourquoi était-il prêt à sacrifier sa chair et son sang au nom d'un régime illégal ?

Décidément tout allait à wallou ces temps-ci. Enfin bref ce n'était pas mon affaire. Elle ne m'aimait pas et moi je n'allais pas encore risquer d'en prendre plein la gueule pour une nana qui n'avait rien à foutre de moi. Pourtant quelque chose me poussait à l'aider. Sans doute l'envie de ne jamais rien devoir à quiconque. Mais au moment où j'allais intervenir, son père lui jeta son mégot sur le dos puis parti. Néanmoins j'avais entendu où il allait. Et moi comme à mon habitude je voulais tester mes capacités.

Je me dirigeais donc aussi vers les marchés noirs. Je cachais en route mes couteaux dans mon dos. Puis je rentrais sans me faire repérer. Je tournais et virais de ci de là afin de tester ma capacité à me cacher dans cet environnement. Et je fus heureux de remarquer qu'aucun des pacificateurs ne me repérais. De toute façon cette fois hors de question de me laisser battre. Les couteaux étaient là pour ça.

Mais soudain, je sentis que l'ont me prenais par la main. Une main forte. Je glissais ma main libre dans mon dos et au moment où je sortais le couteau, je voyais Enora me tirer dehors et m'amener à côté du ruisseau. Elle se coucha en toussant. Elle semblait ne pas arriver à respirer correctement. Je m'approchais d'elle et la regardais un peu inquiet :

"Ça va ?"

Mais j'étais aussi pas très content. Elle venais de faire capoter mon entraînement. Quoi que j'avais bien vu que je pouvais bien me fondre parmi les autres et un lieu presque inconnu.

"Tu sais je t'ai rien demandé alors pourquoi tu m'as amené ici ? Si j'étais là bas ce n'est pas pour rien tu sais."

Non mais je rêve ou bien elle m'engueulait ? Pour qui elle se prend celle-là ? Ça lui vient pas à l'esprit que si effectivement je bravais les Pacificateurs ce n'était pas pour rien ? Non pas une seconde tu parle. Non mais j'hallucine quoi. Vraiment n'importe quoi. Je ne trouve même pas quoi lui répondre. Enfin si mais je veux pas. Je sais bien que sinon ça va dégénérer. Cette fille je l'observe depuis un moment. Son père c'est un taré. Et elle et bien elle est folle. Se laisser traiter comme ça c'est vraiment n'importe quoi.

Je gardais mes yeux dans les siens. Je ne comptais pas ciller. Si quelqu'un devait baisser le regard c'était bien elle. Pas moi. Moi je n'avais rien fait de mal. Par contre elle venait d'interrompre mon entraînement. Alors elle avait tout intérêt à s'excuser. Déjà qu'on s'aime pas beaucoup alors là ça risque d'être la goutte d'eau qui va faire déborder le vase. Et puis son ton ne me plaisait pas du tout.

Peut-être qu'elle craignait pas son père et que du coup elle n'avait peur de rien. Mais là il fallait qu'elle se méfie. Et puis elle pouvait donner des leçon à qui elle voulait. Moi on me la fait pas. J'avais vécu pire. Alors son père j'en avait rien à foutre. Et puis il ne pouvais pas me faire pire que ce que j'avais vécu et que je continuais à vivre. Alors son petit air condescendant avec sa morale à deux balle elle pouvait se la garder.

Je ne lâchais pas son regard et lui lançais d'une voix aussi froide que la sienne :

"Ton père ? Et ben vas-y qu'est-ce que tu attend ? Va le chercher. Je quitterais pas ce lieu. Promis je t'attend sagement là. Tu sais j'ai pas peur de lui. Des coups de fouets tu parles. J'ai vécu pire alors c'est pas ça qui risque de me faire peur. Alors quoi vas-y cour chercher papa gamine. Je bougerais pas je te dis."

Je levais les mains face à son visage et enlevais mes gants. Je la laissais observer ce que j'avais subit. Peut-être même que son père en avait entendu parlé et qu'il s'était moqué de moi devant elle sans me nommer. Je la laissais regarder mes mains en train de cicatriser de la crucifixion qui avait été la mienne. Alors vraiment des coups de fouet. Et ben j'attendais de voir tien.