'' Quinze minutes de pause. Veuillez ne pas vous éloigner du périmètre de sécurité. Ne vous séparez pas de vos talkie-walkie. Rappelez vous, ici, la foule est hostile ! ''

J'observai ce petit homme d'un air désespéré. Cela faisait au moins la cinquantième fois qu'il nous répétait la même chose, j'en avais ras-le-bol. Surtout que nous nous trouvions dans le district 1. Et que par conséquent, il n'y avait qu'une foule de gens qui nous adoraient, et pas de psychopathes équipés de fourche et qui souhaitaient nous trancher les oreilles. Rien que de bons partisans du Capitole. Je soupirai d'un air exagéré et tournai les talons. Je sentais le regard des autres mannequins peser dans mon dos, ainsi que celui lourd et appuyé du réalisateur. Je commençai à m'éloigner, sans un mot.

'' Mlle Blackbird ? Vous n'avez pas entendu le reste des consignes de sécurité et.. ''

J’accélérai le pas. Je n'en avais strictement rien à faire, de ses petits conseils et de ses consignes à la con. Tout ce que je voulais, c'était découvrir un peu plus ce qui se trouvait ici. C'était la première fois depuis longtemps que je tournai une quelconque page de pub hors du Capitole, et ce sentiment de liberté qui m'envahissait lorsque je regardai les plaines qui me semblaient infinies était bien plus important pour moi que tout le reste.

'' Miss Blackbird ! ''

Ce ton insistant m’écœura. Il ne comprenait donc pas que je me moquai éperdument de tout ce qu'il avait à dire ? Sans me retourner d'avantage, je me mis à courir pour échapper à ces voix qui m’oppressaient. Je m'enfonçai dans la fourrée qui entourait le lieu de tournage avec l'impression d'être la reine du monde. Une vraie gamine à qui on offrait son cadeau de noël.

Par chance, ce n'était ni un spot pour des sous-vêtements, ni pour une robe extravagante, moche, et hors-de-prix. J'étais vêtue avec les même fringues que portaient les tributs de la dernière édition lorsqu'ils s'entre-tuaient dans l'arène. Nous étions censés représenter ces personnes s'entretuant, pour rappeler au peuple que les Hunger Games étaient toujours là, à les guetter pour la prochaine moisson, que leur calvaire ne prenait jamais fin. Encore une idée fabuleuse du président Snow.

Le vent glacé giflait mon visage, mes cheveux s'emmêlant n'importe comment, au grès de leurs envies. Je me sentais libre. Le talkie que j'avais dans la main crachottait des paroles incompréhensibles que j'ignorai délibérément. Ils pouvaient tous aller se faire voir, haha. Le froid me mordait les joues comme jamais auparavant. Le Capitole entier était chauffé en hiver pour se protéger de la neige. De toute façon, chez nous, il ne neigeait pas. Ou alors, c'était de la neige artificielle, parfois même colorée, pour faire plus original. Mais la neige qui crissait sous mes pieds était bien réel, cette fois. Elle était même blanche. Et non pas rose fuchsia ou bleu roi. Et je profitai pleinement de cet instant.

Brusquement, sans prévenir, une silhouette se dressa devant moi. Je n'eus même pas le temps de réagir que je lui rentrai dedans de plein fouet. En trois secondes, je me retrouvai sur le cul, dans la neige complètement gelée, aux côtés de l'abruti qui ne m'avait même pas averti de sa présence.

Lorsqu'il redressa la tête, ma main alla s'abattre sur son visage, et je lui collai une énorme gifle. Je n'avais même pas eut le temps de réfléchir, mon corps avait pris les devant sur mon cerveau. Comme beaucoup de fois. Je me relevai rapidement, le corps endolori.

'' T'es complètement con ou quoi ?! ''

Je lui hurlai au visage sans réfléchir d'avantage. J'avais besoin de me défouler. Je n'aimai pas qu'on me rentre dedans. Et je n'aimai pas non plus passer pour une conne ou me retrouver dans une situation ridicule, même si c'était de ma faute. Je ne pensais même pas une demi-seconde à ce que ce mec à la gueule d'ange qui devait faire deux têtes de plus que moi pouvait penser. Pour moi, il était dans son tort, point.

Plus que six mois pour les Jeux. Comme il avait hâte. Hâte à la Moisson, hâte à se porter volontaire avec sa très chère Darcy, hâte à entrer dans l'arène et commencer à tuer. En attendant, il lui fallait s'entraîner. Tous les jours. A toutes les disciplines. Aujourd'hui, ça avait été l'épée, dans la neige. Ce temps était parfait pour apprendre à se débrouiller dans des conditions extrêmes. Même s'il doutait qu'ils aient droit à la toundra glaciale. L'année où l'arène avait été un désert de glace, avait été particulièrement ennuyeuse, la plupart des tributs étant morts de froid. Aucune gloire pour le vainqueur de cette édition là. Le jeune homme ne savait d'ailleurs pas ce qu'il était devenu. A moins que ça ne soit une fille ? Bah. Qu'importait. S'il ne s'en souvenait plus, c'est qu'il y avait une raison. Pourtant, il les connaissait presque par cœur, les soixante-quinze éditions des Hunger Games. Il les avait étudiées sous toutes leurs coutures, histoire d'observer les différentes tactiques, modes de survie, bref. Psychologiquement, Harding était pire que prêt à aller dans l'arène. Et physiquement également. Il voulait que son édition soit mémorable, qu'il y ait quelque chose d'intéressant. Pas comme cette année où les carrières avaient fait un score plus que minable. Non mais... Ils sortaient d'où ces tributs ? Sérieusement, même cette gamine de douze ans qui venait du huit avait mieux fait qu'eux ! C'était pour dire. Il rejoignait son domicile après un entraînement pas trop mauvais. Mains dans les poches pour les protéger du froid, tête rentrée dans son écharpe, il marchait d'un pas vif dans la neige qui crissait sous ses pas. C'était étrange comme sensation. De poser les pieds dans la neige. Sans qu'il n'y fasse attention, on lui rentra dedans de plein fouet. Une fille. Inconnue, se trouvait par terre. Lui avait su garder son équilibre, et il la toisait sans même penser à lui proposer de l'aide.

Sans prévenir, elle lui colla une baffe en se relevant. On ne pouvait pas dire qu'il ait senti grand chose, vu le froid qui engourdissait ses joues. La brûlure due à la douleur arriverait plus tard. '' T'es complètement con ou quoi ?! '' Il la regardait, sourcil relevé pour marquer son incrédulité et son irritation dû au comportement de la fuyarde. Non mais pour qui se prenait cette pimbêche ? Et puis d'où elle sortait comme ça ? Étrangement, sa tête n'était pas inconnue au jeune homme, qui pourrait jurer l'avoir déjà vu quelque part. Pourtant, il n'arrivait pas à mettre un nom dessus. C'était fort dommage, la demoiselle était fort agréable à regarder. Mais en fait, Harding n'en avait cure. Il resta silencieux, la fixant quelques instants en se demandant que faire. Si un homme s'était trouvé à la place de cette fille, il est clair qu'il l'aurait tabassé pour le punir, ce qui lui aurait permis de se défouler par la même occasion. Or là, il s'agissait d'une parfaite inconnue, clairement pas du district. Après tout, il les connaissait toutes, les jolies filles du coin. Une minette comme celle en face de lui, ça ferait longtemps qu'il aurait essayé de mettre le grappin dessus. Soudain, il eu comme un flash. Il se rappelait enfin où il l'avait vue. Dans des publicités à la télévision. Pour un peu tout et n'importe quoi à vrai dire. Une célébrité du Capitole hein ? Juste pour essayer de ne pas s'attirer les foudres des gens importants, il pouvait concevoir de ne pas lui faire de mal. Ce qui ne l'empêcherai en rien de se montrer odieux et désagréable. Ou charmant. Enfin, il aviserait quand le moment viendrait. Un fin sourire s'étira sur ses lèvres, tandis qu'il jetait de rapides coups d’œil à droite, puis à gauche. Seuls. C'était parfait. Le jeu pouvait commencer. « Ça t'arrive de regarder où tu marches toi ? » dit-il finalement après plusieurs minutes de lourd silence. Un nouveau sourire narquois s'afficha sur son visage. « Je me demande ce qui pourrait arriver si j'allais trouver les gens avec qui tu es venue pour leur dire que tu t'amuses à attaquer les honnêtes citoyens. » continua-t-il en faisant quelques pas autour de celle qui serait sa victime de la journée, la détaillant de haut en bas. Pourquoi portait-elle les vêtements des tributs ? C'était ridicule, ça ne mettait pas du tout sa silhouette en valeur. « Et c'est quoi cette tenue ? T'es pas un peu trop vieille pour jouer aux Hunger Games ? » soupira-t-il en insistant sur le mot vieille. Il roula des yeux en ricanant. « T'as vraiment l'air stupide. » lâcha le jeune homme en haussant des épaules. « Pousse toi de là, tu gênes. » continua-t-il en avançant, bousculant la jeune fille d'un coup d'épaule. Il était curieux maintenant, il voulait savoir exactement d'où elle venait, et sa trace ne serait pas bien difficile à suivre, avec toutes ces empreintes dans la neige. Enfin, c'est ce qu'il laissait transparaître en tout cas. Qu'il se fichait de la fille. Il savait comment étaient ces gens, toujours à vouloir être au centre de l'attention. Le fait de les snober, ça ne pouvait que les inciter à s'énerver, et c'était ça qui était amusant.

La sensation de la neige gelée contre ma peau était fortement désagréable. Je me relevai, prodigieusement agacée et collai à l'inconnu une énorme claque. Sa joue ne tarda pas à rougir, mais il resta silencieux. Je le toisai pendant quelques minutes, tandis qu'il restait complètement muet. Seul l'expression de son visage montra que ma présence l'agaçait. Et bien comme ça, le sentiment était réciproque ! Je serrai le poing, sans cesser de l'observer, avec l'impression persistante de m'être retrouvée face à un attardé. Ben quoi ? Il a perdu sa langue, le bonhomme ? Il pourrait au moins s'excuser de s'être mis en travers de mon chemin. Je croise les bras, profondément agacée, pendant qu'il regarde autour de nous. Quoi ? Il cherche à savoir si il peut me casser la gueule en toute discrétion ? Rien que cette idée me fait sourire intérieurement. Je pourrai peut être lui casser le nez.

« Ça t'arrive de regarder où tu marches toi ? »

J'hallucine. C'est lui qui m'est rentré dedans, et pas l'inverse. J'arque un sourcil moqueur et lui rit au nez. Pauvre petit carrière inconscient. Car carrière, il l'est, oui. Il suffit de jeter un seul coup d’œil à son corps musclé. On dirait presque qu'il a été façonné pour les jeux. Ça ne m'aurait pas étonné de le voir se porter volontaire l'année prochaine.

« Je me demande ce qui pourrait arriver si j'allais trouver les gens avec qui tu es venue pour leur dire que tu t'amuses à attaquer les honnêtes citoyens. »

Les gens avec qui je suis venue. J'en avais presque oublié l'équipe de tournage, dis donc. Je balayai négligemment quelques flocons qui étaient venus s'accrocher au tissu de ma tenue, comme si ce qu'il disait ne m'intéressait absolument pas. Ce qui aurait été le cas, d'habitude, si je n'avais pas reçu la menace de Nox qui m'ordonnait de me calmer. Au fond, les gens avaient raison. Dès que le Capitole n'aurait plus besoin de moi, ils me jetteraient. Si je commençai à faire parler de moi dans les districts ou à abîmer des potentiels tributs, nul doute qu'ils pouvaient me virer et me remplacer par une autre. Je me mordillai l'intérieur de la joue, inconsciemment.

« Et c'est quoi cette tenue ? T'es pas un peu trop vieille pour jouer aux Hunger Games ? T'as vraiment l'air stupide. »

Je reposai mon regard sur lui et levai les yeux au ciel.

'' Vieille ? On ne me l'avait jamais faite, celle-là. Quoi que.. Si je me souviens bien, ma petite sœur m'a dit la même chose. Elle a quatre ans. Et toi ? ''

Rétorquai-je en sifflant, feignant l'admiration, avant de me mettre à ricaner, me moquant ouvertement de lui. Non mais il se prenait pour qui, le bellâtre ? Une seule gifle ne lui avait pas suffit, il en redemandait ? Moi je n'avais rien contre. Je voulais bien frapper sa tête à claque à volonté, moi.

Il s'avança vers moi et me mis un coup d'épaule. « Pousse toi de là, tu gênes. ». Il abandonnait déjà la partie ? Pauvre petit. La seule chose qui me dérangeait, c'était qu'il semblait suivre mes traces. Allons bon. Il comptait remonter jusqu'au lieu de tournage ? Je lui agrippai l'épaule, légèrement inquiétée.

'' Tu fais quoi là ? Tu te trompe de sens, ton chemin c'est de l'autre côté ''

Mon ton était arrogant. Je ne voulais pas qu'il voie que je paniquai. Dans un élan d'inspiration, et pour l'empêcher d'avancer, je me jetai sur son dos et agrippai à ses épaules, essayant de le faire tomber de toutes mes forces. Je ne voulais pas d'emmerdes.

Il la trouvait assez amusante finalement. Un peu étrange, et déjà chiante, mais elle semblait être une bonne source de distraction pour le reste de la journée. Du moins il l'espérait. '' Vieille ? On ne me l'avait jamais faite, celle-là. Quoi que.. Si je me souviens bien, ma petite sœur m'a dit la même chose. Elle a quatre ans. Et toi ? '' il haussa les épaules en roulant des yeux. C'était là tout ce dont elle était capable ? Comparer Angus à une fillette de quatre ans ? Il ricana, sans pour autant lui répondre. Bon, peut-être pas si drôle finalement. Elle lui agrippa l'épaule lorsqu'il commença à avancer vers l'endroit d'où elle venait. '' Tu fais quoi là ? Tu te trompe de sens, ton chemin c'est de l'autre côté '' quoi ? Il eut un petit rire. En fait si, elle était drôle. Elle devait être une de ces actrices de films comiques, ou quelque chose dans le genre. Enfin, c'était pas possible d'être comme ça au naturel.

« J'ai encore le droit d'aller où bon me semble. » maugréa le jeune homme en se dégageant de sa faible prise d'un nouveau coup d'épaule. Il entreprit ensuite de reprendre son chemin. Seulement l'inconnue ne semblait pas spécialement vouloir qu'il aille où que ce soit. Elle lui sauta sur le dos, sans doute dans l'espoir de l'arrêter. En fait, ça l'amusa plus qu'autre chose sur le coup. Elle agissait comme une enfant qui faisait un caprice, et qui voulait faire céder ses parents histoire d'avoir un bonbon ou autre truc de gamin.

« Hey t'essayes de faire quoi là ? » Demanda-t-il en manquant de perdre l'équilibre tandis qu'il essayait de la faire tomber. Non mais, c'était quoi son problème à cette fille ? Il roula des yeux en soupirant. Angus se demandait si elle n'était tout simplement pas débile. Peut-être qu'au final, ils l'étaient tous au Capitole ? A force de se pavaner et de ne penser qu'à s'amuser, ils avaient perdu toute forme d'intelligence. En ayant assez de l'avoir sur le dos, il se laissa tomber en arrière, pour la faire atterrir lourdement dans la neige. Rapidement, il se retourna, faisant en sorte de l'immobiliser. Il aurait presque de la compassion pour elle, ses vêtements allaient s'imbiber d'eau, et elle risquait d'attraper froid. Pauvre petite chose. Il eut un nouveau sourire en coin. D'un geste lent, il dégagea une mèche de cheveux, et frôla son cou du bout des diogts.

« Si j'étais toi, je ne m'amuserai pas à ce petit jeu là. Tu n'as aucune idée de ce dont je suis capable. » lui susurra-t-il dans le creux de l'oreille, tandis qu'il l'empêchait toujours de bouger. Elle avait presque réussi à l'énerver, mais le jeune homme se trouvait être dans un bon jour aujourd'hui, et rien ne semblait pouvoir venir entacher sa bonne humeur. Elle pouvait cependant s'estimer heureuse, il n'avait pas l'intention de lui faire du mal. Pas si elle le laissait tranquille. En revanche, Harding ne donnait pas cher de sa peau si elle continuait à être aussi insupportable. Avec un sourire en coin, le jeune homme déposa un baiser sur sa joue, avant de se redresser et de lui lancer un regard entendu.

« Maintenant mademoiselle l'inconnue, je vais aller voir là-bas, sauf si tu arrives à m'arrêter. » lança-t-il en haussant les épaules. Il lui lançait un défi, histoire de s'amuser et de passer le temps. Elle pouvait bien s'y prendre comme elle le voulait pour le convaincre, il s'en fichait pas mal. Il voulait simplement voir de quoi elle était capable, et jusqu'où elle était prête à aller. Il se doutait qu'elle n'allait pas se battre avec lui, après tout, les gens du Capitole ne se battaient pas, ils se contentaient de regarder les autres le faire.

Spoiler:

Au fond, Nox avait peut être raison. J'avais vraiment un don pour chercher la merde. Et pire, un don pour la trouver. Je levai les yeux au ciel tandis qu'il ricanait. 'Pouvait pas dégager, le blondinet ? J'avais pas encore fini de visiter le district. Cela faisait seulement environ deux minutes que je l'avais devant moi, et pourtant, j'avais déjà envie de lui écraser la tête dans la neige. Insupportable, le mec.
Il commença à se détourner, et, pour ne pas choisir la facilité, décida de me rentrer dedans au lieu de me contourner. Eh, quoi ?! Il est con ce gosse ou quoi ? Je me retournai pour l'observer partir, satisfaite, jusqu'à ce que je me rende compte qu'il avait changé de direction. Pire, il semblait suivre les traces que j'avais laissé dans la neige en courant comme un lapin sans réfléchir. Pitié. Il comptait remonter jusqu'à ou, comme ça ? Jusqu'au lieu de tournage ? Pour ensuite aller balancer que je l'avais '' agressé '' ? Je me figeai un instant, le cerveau en ébullition. Il ne fallait absolument pas qu'il raconte ça au petit bonhomme trapu qui s'occupait du spot publicitaire. Enfin, surtout, il ne fallait pas que cela remonte jusqu'à Nox. Or, Nox savait tout et entendait tout.

Je me jetai sur son dos et agrippai ses épaules de toutes mes forces pour le jeter à terre. J'avais sans doute l'air ridicule, là, perchée sur son dos. En fait, je n'en avais réellement rien à foutre. Mon avenir était en jeu, là. Il grogna. « Hey t'essayes de faire quoi là ? ». A ton avis, connard. Je cueille des pâquerettes ? Je levai les yeux au ciel, plus qu'exaspérée,
pesant de tout mon poids sur son dos, sans prendre la peine de répondre à sa question, qui n'en était pas une de toute manière. Il manqua de tomber, et un sourire en coin s'étira sur mes lèvres. Je sentais qu'il perdait prise, il titubait. D'un coup, il tomba en arrière, et m'écrasa de tout son poids. J'eus le souffle coupé. Oh putain. C'est qu'il était lourd, le bonhomme. Je peinai à reprendre ma respiration.

Il se retourna rapidement, tandis que j'essayai de bouger. Ce qui m'était dorénavant impossible, puisqu'il m'écrasait de tout son poids. Mon bras était coincé derrière mon dos, ce qui était plutôt douloureux. Je grimaçai. L'eau commençait à imbiber le tissu de la tenue. Je sentais le tapis de neige glacé contre mon dos. Je tentai de dégager mon bras, lentement. Il pesait son poids, le blondinet. J'abandonnai, me contentant de le fixer d'un air dédaigneux.

'' Tu te bouge, oui ?! ''

J'articulai ça difficilement, reprenant mon souffle avec peine. Je le vis approcher sa main de mon cou, lentement. Le contact de ses doigts contre ma peau m'arracha un frisson.

« Si j'étais toi, je ne m'amuserai pas à ce petit jeu là. Tu n'as aucune idée de ce dont je suis capable. »

Ses paroles logées au creux de mon oreille m'arrachèrent un sourire moqueur. Ce dont je suis capable. De quoi pouvait-il être capable, ce beau petit carrière ? En réalité, j'étais agacée par son attitude. J’attendais simplement qu'il daigne se remuer. Le tissu de mes fringues de tributs était complètement trempé. Je comprenais soudain ce qu'avaient dû ressentir ces tributs, lors de l'édition qui s'était déroulée dans un paysage neigeux. Ils étaient presque tous morts de froids.

Je vis son visage se rapprocher lentement du mien. Il déposa un baiser sur ma joue avant de se redresser. Je gardai un visage impassible, comme si tout m'était égale. Ce qui n'était pas du tout le cas. Je ne supportai pas qu'on me touche.

« Maintenant mademoiselle l'inconnue, je vais aller voir là-bas, sauf si tu arrives à m'arrêter. »

Il se releva enfin. Je me levai aussitôt et d'un geste négligeant, dédaigneux, j’époussetai la neige qui était venue se coller sur mon uniforme de tribut. Puis, je reposai mes yeux sur lui. Alors, il me défiait ? Je me retenais de rire. Il se détourna et fit mine de repartir sur ses traces. Un doute horrible m'assaillit. Et si je n'arrivai pas à l'arrêter ? Et si Nox m'envoyai réellement dans un de ces camps de travail de Panem ? Il me l'avait presque promis. A la moindre connerie. Ce blondinet inconnu tenait un gros morceau de ma vie entre ses mains, et j'avais horreur de ça.

J'étais en ébullition. Je savais que tenter quoi que ce soit du genre me battre avec lui serait vain. Sans réfléchir d'avantage, je me penchai et amassai de la neige entre mes doigts congelés et rougis. Je formai une boule de neige parfaite, et là lui lançai en visant sa nuque. Et puis, j'attrapai la seule chose qu'il me restait, soit, le talkie-walkie qui ne faisait plus aucun bruit, et le jetai contre son crâne de toute mes forces. Il allait le sentir passer, celui-ci.