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 fire in the blood. (brothers)

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fire in the blood. (brothers) Vide
MessageSujet: fire in the blood. (brothers)   fire in the blood. (brothers) Icon_minitimeDim 24 Fév - 23:58




we are the angry and the desperate

Il coule encore à flots, l'alcool. Deux verres sur une table, la bouteille, déjà à moitié vide qui attend, non loin. Et vous deux. Toi, Lincoln. Elle, une pauvre fille du District trois. Ce n'est qu'une parmi tant d'autres, qu'une jeune femme sans histoire particulière, une autre de tes proies, une autre qui a osé te suivre jusqu'à chez toi, à la fameuse maison du vainqueur de la 58ème édition des jeux de la faim. Elle a été assez stupide pour se laisser entraîner, assez naïve pour croire que tu serais différent, avec elle. Ce genre de conneries, c'est pour les contes de gamine paumée, et toi, tu es loin d'être un prince charmant. Tu bois, elle t'imite, et vous restez là à vous regarder dans le blanc des yeux, chacun d'un côté du bar de la cuisine. Vous pouvez attendre longtemps, dans le silence, à vous chercher du regard. Vous pouvez continuer à parler comme ça, de manière sourde, sans même ouvrir la bouche.

Mais au bout d'un moment, tu cèdes. Non Lincoln, tu ne résistes pas bien longtemps à la tentation, à elle qui se joue de toi depuis quelques longues minutes déjà. Tu aimes le jeu, mais, il ne faut pas trop pousser non plus. Tu n'es qu'un homme. Tu n'es que toi. Un curieux sourire vient étirer tes lèvres, tu termines en vitesse le fond de ton verre, et tu fais le tour du bar de bois, revenant derrière elle. La brune cambre légèrement le dos, jetant doucement la tête en arrière. Tes doigts glissent sur sa peau ambrée, toujours couverts d'une pellicule de sang tout aussi invisible qu'indélébile. Et ainsi soit-il, dit-on ; une autre pauvre folle qui aura fini dans le lit de l'ancien vainqueur. Une de plus. Une parmi des centaines.

Un minimum patient, tu attends sagement qu'elle ait fini son verre, avant de l'entraîner dans le salon. C'est qu'elle aime se faire attendre, elle sait se faire désirer. Mais la patience, c'est bien la dernière de tes vertus, alors tu entreprends de faire glisser le maigre morceau de tissu de ses épaules. Elle fait passer une main sur la tienne, comme pour essayer de t'arrêter, mais toi, tu continues. Tu poursuis ton action, puisque après tout, c'est toi qui décide, ici. En fait, non, c'est toi qui décide tout court. « Tu crois pas que tu vas un peu vite... » Tu souris bêtement, t'en as rien à faire, de ce qu'elle peut penser. Si seulement elle comprenait à quel point tu t'en fous, de l'étiquette qu'elle doit mentalement te coller. Qu'est-ce qu'elle croit, hein ? Qu'elle va être la seule et l'unique ? Qu'elle a réussi à toucher ton petit coeur ? Ouais, faudrait-il encore que tu en aies un. Comme tu le penses depuis qu'elle a franchi le pas de la porte ; elle n'est là que pour la nuit. Demain matin, elle retournera vaquer à ses occupations, à faire ce qu'elle veut de sa vie de misère. Et toi, tu te contenteras de faire comme si elle n'existait pas. Tu l'oublieras, comme tu as si bien oublié les autres. Tu la croiseras dans la rue, sans un regard, sans un mot. Sans rien. Le coup d'un soir, comme beaucoup se plaisent à appeler cette pratique.

« Tu sais, on dit des choses sur toi... » Ah mais ça, c'est pas nouveau. Tu retiens un ricanement sarcastique, mais un large sourire vient tout de même étirer tes lèvres. Bien sûr qu'on dit des choses sur toi. Tout le monde dit des choses sur les frères Hyde-Earnshaw. « ... On m'a dit que tu étais fou. » C'est bien peu dire. Tu l'es, même si tu refuses de l'admettre. Tu n'es plus le gentil petit Lincoln, celui qui se contentait de tuer les rats. Maintenant, tu fais même dans l'humain ! Alors, oui, il y a du progrès. Et plus tu progresses, plus tu deviens dingue, sans même t'en rendre compte. Ça te prend de manière vicieuse, ça t'empoisonne, et tu ne fais rien contre. Tu ne cherches même pas à agir, car d'après toi, c'est trop tard pour faire marche arrière, tu as déjà atteint le point de non retour. Dommage. « ... Fou comme ton grand frère, là... » Tes lèvres qui jusque là, se baladaient sur la peau brûlante de son cou, ont arrêté leur ascension. Elle est inconsciente, totalement inconsciente. « Todd. Il s'appelle Todd. Il n'est pas fou. » Ou du moins, il ne l'est plus, maintenant qu'il est sagement endormi six pieds sous terre, à se décomposer au fil des jours. « Oui, enfin... Il était quand même... » Comme dégoûté, tu la repousses soudainement, contre le meuble. « Il n'est pas fou, je ne suis pas fou non plus. Si c'est pour taper la discussion, tu peux dégager d'ici. » Elle se retourne, comme offusquée. Elle te regarde, de ses grands yeux sombres, accusatrice. Toi, tu restes planté là, sans ciller, le regard dans le vague, comme toujours. Tu serres les mâchoires, tu prends sur toi, même si c'est pas facile. Tu prends sur toi, comme toujours. « J'essayais juste de parler. Mais tu sais quoi, si tu le prends comme ça, ouais, je me casse. Pauvre con. » Et bam, c'est la gifle. Tu tournes la tête sous le coup, et tu grognes un peu. C'est ça, qu'elle s'en aille, t'as pas besoin de ça. T'as pas besoin de cette pseudo-psy, franchement, elle s'est prise pour qui, hein ? Allez, laisse-la s'enfuir.

Sauf que, non. Comme toujours, dans ce cas de figure, ton ego en prend un coup, et il agonise doucement, alors que tu n'oses pas réagir. C'est cette courte période de latence, le calme avant la tempête. Il est encore temps de prendre la fuite pour elle. Hé bien non, naïve comme elle peut l'être, elle reste devant toi, à attendre. Bam. Trop tard, le coup cette fois, il vient de toi ; ta main vient violemment s'écraser contre sa joue. Elle perd un peu l'équilibre, elle vacille un instant, et reporte son regard horrifié sur toi. Tu sens la haine dans ses yeux, la colère, peut-être un peu de peur aussi. Le monstre a encore frappé. « En réalité, t'es aussi taré que tes frères, et tu sais quoi, tu crèveras comme l'autre ! Enflure ! » Elle tient sa joue, comme pour apaiser la douleur lancinante que tu viens de lui infliger, et elle part d'un pas pressé, par la porte. Toi, tu pètes un câble, ça y est, tu deviens dingue. Des milliers de suppositions te bouffent l'esprit, tu décapsules. Alors c'est ça qu'elle pense, vous méritez tous de crever. Et si c'était une rebelle, hein ? T'en sais rien, mais tu ne peux pas t'empêcher de penser qu'en effet, c'en est une. Et pourquoi pas une de ceux qui ont tué ton aîné, hein ? Pourquoi pas celle qui a voulu égorger Salem ? Tu te rends compte, à quel point tu peux rentrer dans tes hypothèses farfelues ? Résultat, tu ne sais plus en t'en es. Résultat, elle a intérêt à craindre pour sa vie ; le loup part à la traque.

Tu sors de chez toi, sans plus attendre, lui emboîtant le pas. Tu vas lui faire bouffer ses paroles, à cette pauvre conne. En deux-trois pas, tu la rattrapes, elle n'a pas fini de traverser la pelouse, tu la chopes par les cheveux pour la balancer à terre. « Qu'est-ce que t'as dit ? Hein ? Qu'est-ce que t'as dit ? » Tu lui craches tes mots au visage, violent. C'est reparti pour un tour, le feu est à nouveau dans tes veines, il te monte à la tête, te crame le peu de raison qu'il te reste. Même pas une once de pitié, pour te retenir, rien. Elle peut toujours chialer, elle peut toujours appeler de l'aide, personne ne viendra. Personne. Car la nuit est tombée depuis longtemps, car tu es hors de toi, et tout simplement incontrôlable. Parce qu'elle a choisi de venir ici, d'elle même. « Mais t'es complètement dingue, laisse-moi, laisse-moi je t'ai dit ! » Et hop, qu'elle rajoute un peu d'huile sur le feu. Dingue. Dingue. Fou, malade. Tant de superlatifs que l'on pourrait t'attribuer. Tant de mots que tu ne peux plus supporter. Que tu ne veux plus entendre. « DINGUE ? Tu veux que je te montre ce que c'est, d'être dingue ? » Tu viens t'accroupir à côté d'elle. « Me touche pas, espèce de monstre ! » Le mot de trop. Tu l'attrapes encore une fois par les cheveux, la ramenant contre toi, et tes bras se referment par derrière, comme un étau de fer, autour de son petit cou. Tu ne veux pas la tuer, elle ne le mérite pas. Mais sur l'instant, c'est trop dur de réfléchir. C'est trop dur de te raisonner. Elle se débat, elle s'agite, une de ses mains vient dans ton visage, mais tu continues. Ça te soulage, étrangement. T'es trop fort pour elle, elle n'a plus qu'à courber l'échine, à s'excuser, à te supplier. Mais comment, alors qu'elle ne peut plus prononcer un mot, hein ? 10 secondes avant qu'elle ne perde connaissance. « Alors, tu fais moins la maligne hein ? » 3 minutes avant qu'elle ne décède. « HEIN ? » Elle résiste, encore. Toi, tu insistes. Personne ne viendra la sauver à temps.

Enfin, ça, c'est ce que tu crois.
gifs ; tumblr & musique ; prayer of the refugee - rise against.
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MessageSujet: Re: fire in the blood. (brothers)   fire in the blood. (brothers) Icon_minitimeLun 25 Fév - 12:11


And the day pressed on like crushing weights.

Le cliquetis régulier de l’horloge résonnait dans le silence du bureau de Salem. Ce petit bureau, situé en arrière boutique de son bar, dans lequel il tenait tous les comptes, et gérait toute l’intendance de son enseigne. En général, personne ne se risquait à venir l’y dérangeait, sauf si une baston se profilait à l’horizon, ou qu’un homme posait un regard un peu trop insistant sur sa petite serveuse. Le reste du temps, il y gérait ses chiffres, en paix. De temps à autres, il faisait une petite apparition dans le bar en lui-même, servait quelques boissons, et repartait. Courant d’air, patron invisible mais respecté, craint parfois même. Lorsqu’il arrivait que certaines personnes ne s’embrouille dans son établissement, les poings de Salem réglaient fort heureusement la plupart des conflits ; de ce genre même de punition qui vous reste à l’esprit et qui ne vous donne pas envie de recommencer, à moins d’être un peu masochiste. Certains l’étaient. D’autres beaucoup moins, et n’osaient plus remettre les pieds dans cet établissement. Du temps de Todd, les choses étaient encore plus simple. Il vivait la moitié de son temps chez son frère, et c’était lui qui faisait la police. Salem restait assis, un simple petit geste, un simple petit mot, et Todd déboulait dans la pièce principale. Il pétait en général une ou deux chaises, voire un pied de table, mais la flemme de Salem n’était pas trop perturbée ; rien n’aurait pu aller mieux. Il lui suffisait d’un mot, un simple petit mot, et son frère arrêtait de cogner. Il assénait la sentence, les menaces. Et les débiles crasseux du District Trois repartaient bien souvent la queue entre les jambes, comme des chiens galeux.

Todd. Todd avait été le garde du corps parfait, l’homme qui frappait lorsque Salem n’avait pas envie de le faire. Todd n’avait vécu que pour cela ; frapper, dévaster, encore frapper, détruire. Frapper, toujours frapper. Laisser le sang couler le long de ses doigts, gicler sur son visage, cracher sur le faciès des autres. Todd était un homme violent. Salem, lui, était un homme de violence. Nuance douce, futile, mais tellement évidente lorsqu’on les voyait à l’œuvre, tous les deux. Salem ne s’occupait de frapper que lorsque Todd ne pouvait pas, qu’il avait déjà les mains prises. Ou bien s’il décidait fermement qu’il allait s’en mêler, alors même que son frère aurait bien pu s’en charger, c’était qu’il y avait une excellente raison. Pire que cela même ; l’heure était grave. Lorsque Salem et son flegme légendaire laissaient place à Salem, son poing américain et sa lame de rasoir, on donnait en général peu cher de la peau des victimes. Et pourtant, tout homme de violence qu’il était, il avait aussi ses poings faibles. Deux semaines passées, allongé sur un lit d’hôpital, à ne presque pas pouvoir se lever. Deux semaines, à attendre que les chairs guérissent, que les plaies cicatrisent, et qu’enfin il puisse sortir et se venger. Le colosse en apparence indestructible avait encore une fois prouvé sa force. Mais également toutes ses faiblesses.

Les doigts de Salem glissèrent le long de la cicatrice blanche qui tranchait avec la peau plus foncée de son cou. Il ne s’y attarda pas longtemps, reprenant en main son stylo plume, terminant ses comptes. Il avait failli y rester, cette nuit-là. Si Hildegarde n’était pas passée par là, il y serait d’ailleurs très certainement mort. Le dos lacéré, les côtes cassées, la gorge tranchée. Comme un vulgaire chien, il se serait éteint dans cette ruelle pourrie, sans même avoir le temps de tuer les types qui avaient mis fin aux jours de Todd. Et pourtant, il avait survécu. Il avait passé quelques temps à l’hôpital, et depuis, il était assigné à la paperasse des Pacificateurs, Hilda tenant bien trop à son petit soldat pour l’envoyer se faire charcuter alors qu’il avait encore du mal à tourner trop franchement et trop rapidement la tête. La paperasse, ça l’avait vite gonflé. Il avait délégué les taches, et se faisait les interrogatoires. Soient-ils propres ou sanglants, d’ailleurs. Les tortures physiques lui faisaient plus de bien que les tortures psychologiques, en tant que petit être taciturne qu’il était. Et pourtant, tout ce quotidien commençait à le faire chier. Il avait récupéré. Ses côtes ne le faisaient presque plus souffrir, il pouvait à nouveau déployer sa force sans grand problème, tourner la tête comme il l’entendait malgré la fragilité de sa peau, et faire ce qui lui plaisait. Mais non. Pour le moment, il se contentait de couper des doigts et des oreilles, et de toujours chercher de nouvelles techniques de torture plus efficaces. Triste quotidien.

D’un geste simple, il ferma son cahier de comptes, rangeant ses petites affaires, ainsi que tout son argent. Il enferma celui-ci dans une petite mallette qu’il rangea sous une latte de parquet, après avoir veillé à ce que personne ne l’épie. Il se redressa ensuite, prenant tout son temps, rabattant les manches de sa chemise sur ses bras. Il sortit de la pièce, refermant la porte à clé derrière lui. Il glissa la petite clé dans sa poche de pantalon, et fit quelques pas vers le bar. Peu de clients étaient encore installés. Trop peu pour qu’il ne décide de conserver l’établissement ouvert. Lentement, il se tourna vers son employée, avec l’intention de lui dire de fermer. Cependant, le regard qu’elle était en train de lui jeter le stoppa net. Il fronça doucement les sourcils. Personne ne s’intéressait à elle dans le bar, et aucun ne semblait en proie de causer du grabuge. Alors quoi ? Il se perdit dans son regard. Elle inclina légèrement la tête sur le côté, comme pour lui faire comprendre quelque chose. Ses prunelles bleutées étaient larmoyantes, presque suppliantes, mais tout autant remplies d’inquiétudes que de tristesse. Il y avait quelque chose. Quelque chose qu’elle ne voulait pas dire, mais qui était bien là. Et, soudain, Salem serra les dents. Elle se mordit la lèvre, tandis qu’il laissait échapper quelques mots, d’une voix froide et assez sèche. « Y a combien de temps ? » Elle déglutit doucement, mal à l’aise. « Une demie-heure, j’en sais rien… » Salem renifla rapidement, jaugeant rapidement les clients du bar. Aucun ne lui ferait du mal, mais il n’avait confiance en personne. « Tu fermes. » ordonna-t-il, alors qu’il sortait précipitamment, attrapant au passage sa veste pour ne pas trop avoir froid. Il l’enfila en descendant les petites marches du perron, et prit immédiatement la direction du village des vainqueurs. Inquiet.

Depuis la mort de Todd, Lincoln était devenu encore plus paumé qu’il ne l’était déjà. Et depuis l’épisode Salem et les rebelles, sa rage avait atteint un tel niveau qu’il pétait les plombs à tout prétexte. Devenait plus violent que de nature. Et il avait beau être son jumeau, Salem se plaisait à jouer les grands frères. À l’empêcher de faire les pires conneries de sa vie. Mais au fond, que pouvait-il réellement faire ? Il lui était impossible de le suivre à chaque pas. Il ne pouvait que le surveiller, mais devait le laisser vivre. Pourtant, ce soir, le regard inquiet de sa petite serveuse lui avait confirmé ce qu’il redoutait ; Lincoln avait encore fait quelque chose. Quoi ? Salem n’en savait foutrement rien, mais préférait s’assurer par lui-même que ce n’était rien de grave. Il était passé il y avait environ une demie-heure, et devait maintenant être rentré chez lui. Salem craignait ce qu’il allait découvrir. Ce que son frère allait encore avoir inventé. Peut-être que ce n’était rien de grave. Peut-être qu’il aurait une agréable surprise. Et peut-être, au contraire, qu’il devrait intervenir. Il n’en savait rien, et ne saurait pas avant d’arriver. Alors pourquoi tergiverser ?

Les mains dans les poches, marchant à une allure soutenue malgré la petite douleur qui le lançait régulièrement au niveau des côtes, Salem arriva finalement au village des vainqueurs. Et, là, ce qu’il vit lui glaça le sang. Une fille. Bien entendu. Qui cherchait à s’enfuir. Il plissa les yeux, étant bien trop loin pour distinguer les traits de leurs visages. Il vit son frère l’attraper, l’empoigner. La fille se mit à hurler. Lincoln enroula ses bras autour de son cou. Et commença à l’étouffer. Le sang de Salem ne fit qu’un tour dans ses veines tandis qu’il s’approcha d’un pas rapide, sans pour autant courir. Arrivant par derrière, sans que son frère ne puisse le voir, sa voix claqua dans l’air froid de la nuit, sans appel. « Lâche-la. » Mais cela ne suffira pas, et il le savait pertinemment. Mais que pouvait-il faire d’autre ? Déjà, il voyait la jeune femme changer lentement de couleur. Elle ne pouvait continuer de se débattre comme cela. Il n’avait pas envie d’intervenir, mais commençait à se demander si c’était réellement une option qui s’offrait à lui. Il n’avait pas envie de frapper son frère ; mais Lincoln saurait-il, lui, retenir ses coups ? « Laisse-la tranquille. » De quoi cette fille avait-elle pu parler ? De sa folie ? De Todd ? De toutes ces rumeurs qui coulaient sur le nom de Hyde-Earnshaw ? Probablement. Tout était devenu un sujet sensible ; les nerfs à fleur de peau empêchaient Lincoln de raisonner. Et Salem le savait.

Il n’était plus qu’à un mètre d’eux, et n’avait toujours pas décidé ce qu’il allait faire. Ses mains étaient sorties de ses poches, non armées, et il n’avait pas plus envie de frapper son frère que cela. Mais Lincoln ne pouvait pas être raisonné. Pas ces derniers temps. Il se perdait lentement dans les tumultes agités de la noirceur de son âme, de sa vengeance, dans cette sombre folie qui le rongeait comme un mal lent et douloureux. Il était plus perdu que jamais. Et Salem n’avait malheureusement pas grand chose à faire pour empêcher cela. Ses gestes s’enchaînèrent sans qu’il n’ait le temps d’ordonner quoique ce soit au moindre de ses muscles. Arrivant par derrière, son bras droit se glissa sous celui de son frère, remontant jusqu’à ce que sa main ne se referme autour de son cou. Son bras était obligé d’être levé par le mouvement, et Salem le savait. Il allait devoir relâcher la fille. Vivement, il frappa la nuque de Lincoln à l’aide de son coude, pour le faire définitivement lâcher. D’un coup d’épaule, il repoussa la fille. Déployant sa force, il repoussa son frère vers l’arrière, avant de lâcher son cou. Il n’avait aucunement l’intention de l’étrangler. Il n’avait aucunement l’intention de lui faire du mal. Il n’avait jamais voulu le frapper, mais y avait été obligé. Ses doigts glissèrent pour attraper le col de son jumeau, le repoussant sur quelques pas. Il finit par donner une petite impulsion, le lâchant, le forçant à reculer encore un peu par son mouvement. Il se stoppa, le regardant fixement, impassible en apparence, bouillant intérieurement. Il ne s’inquiétait pas le moins du monde de ce qu’il pouvait arriver en cette seconde même à la fille. Rien ne comptait plus que son jumeau. Elle, elle retrouverait son souffle, récupèrerait quelques minutes, et partirait. Fort probablement. À moins qu’elle ne soit complètement demeurée, ce qui était une option à ne pas écarter non plus. Provoquer Lincoln relevait du suicide, et elle venait d’en faire la très franche expérience. Elle l’avait cherché, bien que la réaction du Pacificateur ait été excessive. Salem le savait. Et il se foutait bien de ce qui allait maintenant arriver à cette idiote. C’était de Lincoln dont il s’agissait.

Lincoln, qu’il regardait dans le blanc des yeux. Lincoln, qu’il venait de frapper pour le forcer à lâcher. Son frère jumeau, malgré leur lien qui avait toujours été bien étrange, et incompris par tous. Lincoln restait son frère. « Calme-toi. » Voix dure, mais compatissante en même temps. De ce genre de ton neutre qui ne trahissait ni colère, ni pitié, ni rien qui puisse s’apparenter à un sentiment. Lincoln devait se calmer. Salem se devait de lui demander. Cela n’avait jamais fonctionné autrement entre les deux frères. Pourtant, Lincoln n’était pas Todd ; et cela, notre Pacificateur le savait. Raisonner son jumeau était différent. Une toute autre guerre. Pourtant, cela n’avait pas d’importance. Cela n’en avait jamais eu.

S’ils devaient s’expliquer, ils s’expliqueraient. Lincoln était suffisamment grand pour dire ce qu’il pensait. Contrôler ses actes était une autre histoire. Une histoire dans laquelle Salem glissait son mot depuis de longues années déjà. Il n’y avait pas d’autre solution. Peut-être un jour y en aurait-il une autre, il n’en savait rien. En attendant, c’était à lui de raisonner son frère. Todd n’était plus là. Il était le dernier à pouvoir le faire.

C’était à lui. À lui, et à lui seul.
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MessageSujet: Re: fire in the blood. (brothers)   fire in the blood. (brothers) Icon_minitimeVen 8 Mar - 21:24

Tout aurait pu être si simple, si tu avais essayé. Essayé de lui ressembler, à lui, à Salem. Si tu l'avais écouté, si tu avais tenté de devenir quelqu'un de meilleur. Non, au lieu de ça, tu t'es carrément laissé aller, sans chercher à te raccrocher à quoique ce soit, à part les idées tordues et sanglantes de Todd. Regarde ce que tu es aujourd'hui, tu es peut-être fier de toi ? Loin de là. Car, quoique tu leur dises, quoique tu fasses, que tu puisses leur baratiner, tu ne te sens pas bien, au plus profond de toi. T'as cette douloureuse impression d'être un bon à rien, juste un autre pantin pour tirer sur les populations. Une autre marionnette du Capitole, pour détruire et décimer des familles entières. T'en viens même à te dire que ça te plaît, comme boulot... Mais au fond, qu'est-ce que tu recherches ? Plus rien, maintenant. Autrefois, tu aurais demandé qu'on te laisse tranquille, que l'on t'oublie. Et peut-être que là, Dieu, il t'aurait donné ta chance. Peut-être que tu aurais pu te racheter. Non, il a fallu que tu l'écoutes, lui, et que tu le suives, que tu sombres pour continuer à chuter, dans le gouffre de la décadence. Tu as vu où tout cela t'a mené ? Tu essayes de tuer une pauvre gamine un peu trop naïve. Tu as pété les plombs, encore une fois. Ce n'était rien, pourtant. Autrefois, tu aurais laissé passer, tu en aurais même rigolé. Mais maintenant, c'est une autre histoire, une toute autre affaire. C'est comme si tu traquais le moindre prétexte pour péter un câble, et faire du mal aux autres. C'est comme si blesser les autres était devenu un passe-temps. Et quelle blessure tu vas lui faire à celle-là, si elle reste dans tes bras plus longtemps...

« Lâche-la. » Cette voix, que tu pourrais reconnaître entre mille. Un ordre, un seul, qui siffle jusqu'à tes oreilles. Tu n'as pas besoin de te retourner, tu sais parfaitement qui vient de s'incruster dans cette petite scène de film d'horreur que tu nous joues. Salem. Ton jumeau. Qu'est-ce qu'il fout là ? Tu n'en as aucune idée. Peut-être l'autre-là, sa petite serveuse, qui t'a encore balancé. Faudra que tu lui en touches deux mots, gentiment, mais tout de même. Bref, tu ne prends même pas le risque de te retourner, tu sais parfaitement que c'est lui. Et puis, tu es trop concentré sur la proie qui commence à virer au rouge, entre tes bras. Elle résiste, mais tu es en position de force, c'est dommage, mais de toute façon tu gagnes toujours. Tu n'es pas décidé à la lâcher, et l'autre l'a certainement compris. Comme si deux mots allaient suffire. Surtout venant de lui, ton frère. « Laisse-la tranquille. » Ah, mais il peut continuer longtemps, à essayer de te dissuader de faire une telle connerie, il peut poursuivre, avec mille mots : aucun ne serait de trop pour tenter de te raisonner, Lincoln.

Mais qu'est-ce que tu cherches, au final ? Le but n'est plus le même, avoue-le. La tuer, ce n'est que l'objectif secondaire, puisque tout ce qui t'intéresse, c'est l'affront. Avec cette garce, avec ton frère. Tu ne sais même plus pour qui, pour quoi, contre qui tu te bats. Tu te bats, c'est tout. Contre toi-même parfois, et actuellement, tu es dans une de ces phases où la rage prend le dessus : aveuglé par ta haine, tu irais jusqu'à frapper ton propre jumeau. Tu devrais avoir honte, mais tu n'y arrives tout simplement plus. Enfin, toujours est-il que l'affrontement, il est bien là : Salem a bien compris, depuis un sacré bout de temps déjà, que les mots ne suffisent pas avec toi. Alors, il passe à l'action, contre ta volonté. « Put... » Même pas le temps d'achever cette exclamation que tu te retrouves, pris d'assaut par un frère qui cherche à te dégager de là. Tu résistes, que cela lui plaise ou non, tu ne veux pas abandonner la pauvre fille qui lentement, agonise dans cette étreinte mortelle. Mais, rends-toi à l'évidence, il domine pour le coup, alors, tu es bien forcé de lever le bras, c'est mécanique. Elle en profite pour se décaler un peu, et toi, tu es à la merci de ton aîné. Il ne va pas te faire de mal, tu le sais bien, ce n'est pas dans ses intentions. Il n'aime pas te frapper Salem, et c'est là un grand avantage pour toi. Tu sais qu'il n'hésitera pas à répondre aux coups si un jour, tu venais à le blesser. Mais pas là. Pas sans réel motif. Un coup sec dans la nuque te déstabilise, légèrement sonné, tu te laisses faire. Il te repousse un peu plus loin, et non sans difficulté, tu restes droit. Il a réussi, il est fier de lui ? Il a gagné. Il a pris le dessus sur toi, comme souvent. Comme toujours, même.

« Calme-toi. » Un ton qui caractérisait si bien Salem, dans toute sa neutralité. C'est un ordre qui peut vouloir dire bien des choses, qui peut se montrer à la fois si agressif, si calme aussi. C'est un ordre que tu peux interpréter de bien des manières, mais comme toujours, c'est de la pire que tu l'entends, cette demande. « Non ! Non, j'ai pas envie d'me calmer ! Dégage Salem ! » Des mots qui piquent, qui brûlent, et surtout des mots que tu ne penses pas. Tout ce que tu veux, sur l'instant, c'est la détruire elle. Tu veux casser du rebelle, comme toujours. Mais qui te dit qu'elle en est ? Ton subconscient, ta folie. Elle te glisse quelques mots dégoulinant de haine à l'oreille, et voilà que tu t'exécutes, sans même chercher à tirer le vrai du faux. Tu réagis au quart de tour, comme toujours. La petite brune reprend lentement ses esprits, pendant que tu craches ton venin sur ton jumeau. Il n'a rien à faire là, et tu lui fais comprendre. Pas trop tendrement, mais faut pas chercher avec toi ; t'es loin d'être un ange. Tu es bien loin de prendre des gants, il doit avoir l'habitude, depuis le temps. « Qu'est-ce que tu fous là, encore hein ?! Combien de fois j'te l'ai dit, j'ai pas besoin de toi, casse-toi ! » Casse-toi, parce que j'ai pas fini de démonter l'autre. Tourne le dos, que je puisse à nouveau lui sauter dessus, que je puisse la finir. Dégage, que je puisse l'achever, que je puisse compter une nouvelle tête, sur l'étagère de mes trophées de guerre. Voilà ce que tu veux clairement lui faire comprendre, même si tu sais pertinemment qu'il ne va pas partir tant qu'il n'aura pas la garantie que tu vas te tenir tranquille.

Tu gardes tes yeux plantés dans les siens, tu ne veux pas le lâcher du regard. Tu veux qu'il comprenne, qu'il intègre profondément que tu veux qu'il s'en aille. Tu ne veux pas en arriver aux mains, pas avec lui. Même s'il t'a fait mal, même si lui t'a frappé. Même s'il se mêle de ce qui ne le regarde pas, tu ne veux pas le blesser, il ne le mérite pas. Tu hésites un instant, mais pourtant, sans le lâcher du regard, tu esquisses un geste vers la jeune femme. Tu t'autorises même un regard pour cette dernière. Elle semble paniquée, mais elle ne bouge pas. Et là, deux solutions s'offrent à toi ; la laisser partir pour t'en prendre à ton frère. S'en prendre à elle pour t'en reprendre plein les dents. Les deux solutions sont alléchantes, et c'est ironique quand tu penses ainsi. Mais en agissant ainsi, ton jumeau t'a mis hors de toi. Écartant les bras en l'air, tu te concentres plutôt sur ce dernier. « Et puis, d'abord, tu m'suivais ? J'ai pas besoin d'une nourrice Salem ! Je m'en suis toujours tiré tout seul, et de toute façon, t'as rien à m'dire, t'es mon frère, pas mon père. » Pendant que tu déverses ton venin, encore, au pied de ton aîné, l'autre garce se fait la malle. Bien, super. Tout ce dont tu avais besoin, pour bien conclure la soirée. Tu serres les dents, parce que c'est trop pour toi, tu vas craquer. Glissant tes mains sur ta nuque, tu essayes pourtant de te calmer, c'est pas aussi simple, apparemment. « Putain t'es fier de toi ? Elle s'est barrée maintenant ! » Et la voilà, la rage, qui te prend à nouveau aux tripes. Un coup de sang, et plus par impulsion qu'autre chose, tu t'approches de ce reflet qui se tient devant toi, et tu le pousses brusquement en arrière.

« Tu fous toujours tout en l'air de toute façon ! » Quelques cris, dans la nuit. C'est ta voix qui brise encore le silence, son silence. Ce silence qui pèse, comme un rideau de fer depuis votre naissance, entre vous deux.


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MessageSujet: Re: fire in the blood. (brothers)   fire in the blood. (brothers) Icon_minitimeDim 17 Mar - 11:56


Feel the poison of rage in your bones.

Chaque fois que Salem posait les yeux sur son frère, il avait beau tenter de le nier, il souffrait. Le voir ainsi, perdu, égaré dans le fil de ses propres pensées, ne faire qu’un avec sa folie, l’embrasser pour mieux l’abriter. Lincoln n’était plus que l’ombre de lui-même, l’ombre de l’homme qu’il avait été, ou plutôt du jeune garçon qu’il avait été. Et Salem avait beau essayer de vivre avec, de l’accepter, de l’aider du mieux qu’il pouvait, il n’avait rien en commun avec son jumeau. Si ce n’était leur physique. Et la souffrance d’avoir perdu Todd, comme le reste de leur famille. Ils étaient seuls au monde, mais la seule chose qui les rattachait se résumait aux liens du sang. Ils n’avaient jamais été proches, et depuis bien longtemps, le peu de lien qui les rattachait avait volé en éclat. Ils étaient désormais deux entités à part, et ne pouvait rien faire si ce n’était s’affronter, personnalités opposées, cœurs explosés. Ils s’entredéchiraient, chaque jour que le bon dieu, faisait, et ce malgré l’amour qui les liait, cet amour qu’ils niaient, chacun de leur côté. Ou tout du moins Lincoln. Salem, lui, aimait son frère, le savait, et l’assumait. Il n’approuvait aucun de ses actes, surtout en ces temps de guerre, et savait que cela ne ferait qu’empirer avec ce qui était arrivé ; mais comment pouvait-il changer cela ? Ils n’avaient plus quinze ans, ils n’étaient plus des enfants. Chacun d’entre eux avait vécu le pire à sa manière, et en était ressorti plus fort, plus renfermé, plus arrêté dans ses opinions, campé sur ses positions. Et le résultat était là. Ils se disputaient. Ils entraient en conflit, une nouvelle fois. Pour la simple et bonne raison que Lincoln s’apprêtait à ôter une vie. Et que cela, Salem n’avait pu l’accepter.

Faisant face à son frère, le Pacificateur conservait son attitude droite et déterminée, ses yeux plongés dans les siens, son ton calme l’incitant à en faire autant, et à se laisser embrasser par la sérénité. Chose totalement impossible pour quelqu’un à la personnalité aussi fougueuse que son jumeau. Lincoln était un électron libre, un élément indépendant, une force de la nature. Sa folie pourtant douce le propulsait à des kilomètres de la raison, de l’entendement. Et au fond de lui, notre homme savait pertinemment que le combat qu’il menait était perdu d’avance. Mais il refusait de l’abandonner, de baisser les bras. C’était de son frère qu’il s’agissait. Et il se battrait jusqu’au bout. Les mots de Lincoln claquèrent à ses oreilles, n’ébranlant pourtant pas le moins du monde sa silhouette calme et posée. Les mains hors des poches, un poing détendu, l’autre plus crispé, notre Pacificateur regardait sans ciller son vis-à-vis. Qu’il s’énerve. Cela ne changerait rien. Il y avait tout un monde qui les séparait, un océan avait éloigné leurs deux caractères tempétueux depuis bien longtemps. Lincoln s’énervait, griffait, mordait, avant de sombrer dans sa folie meurtrière. Salem massacrait, sans avertissement préalable, brutalement, alors que personne n’aurait rien soupçonné. Mais face à son frère, jamais cela n’arriverait. Face à son jumeau, il saurait se maîtriser. Une nouvelle phrase jaillit d’entre les lèvres du vainqueur des jeux. Salem serra doucement les dents, avant de laisser sa réponse filtrer hors de sa gorge, sifflement perfide et mauvais. « Toi non, mais cette idiote oui. » Le ton était clair, la phrase sans appel. Il se fichait de ce qui pouvait arriver à cette fille, bien entendu, seul Lincoln importait. Mais s’il voulait éviter le pire, il se devait de l’empêcher de massacrer cette pauvre naïve. Qu’avait-elle cru ? Qu’en venant ici, ce soir, avec l’ancien vainqueur à la réputation sulfureuse, elle s’amuserait ? Qu’elle pourrait chatouiller les limites de sa folie et s’en sortir indemne ? Elle ne le connaissait pas. On disait Lincoln fou, mais ce n’était pas une attraction ; rien n’énervait plus Salem. Lui aussi avait envie de lui faire manger la pelouse, à cette dinde. De l’étrangler, de lui éclater la cervelle d’un coup de poing américain. De faire couler son sang. De lui briser les tibias à coups de talon. De défendre son frère, quoi qu’il arrive, et quoi qu’il puisse lui en coûter. Pourtant il ne le ferait pas. Il avait cette flemme permanente, qui décontractait chacun de ses muscles lorsque la colère pointait le bout de son nez, et qui lui donnait cette particularité de ne pas exploser avant que la coupe ne soit réellement pleine. Ce trait de caractère si impressionnant qu’était son sang froid, et son don à ne jamais s’énerver verbalement. Il n’était pas un surhomme. Il avait tout bonnement et simplement la flemme.

Lincoln explosait. Salem l’écoutait, subissait, l’air toujours aussi désintéressé, détaché. Cependant, il conservait ce regard dur et poignant, qui montrait toute son implication, et toute sa détermination à calmer la folie de son frère pour la soirée. Son jumeau s’énervait. Il levait les bras au ciel, criait. Se plaignait qu’il n’avait pas besoin d’une nourrice, qu’il s’était toujours débrouillé seul. Au fond de lui, Salem grognait. En apparences, rien n’était visible. Mais lui non plus n’avait pas besoin de nourrice, et n’en avait jamais eu besoin. Il comprenait le sentiment de son frère, mais ne pouvait décemment pas le laisser faire des écarts comme c’était le cas. S’il tuait cette fille, la guerre n’en serait que plus alimentée, et cela pousserait les habitants qui la connaissaient à haïr un peu plus les Pacificateurs. Et dans un calcul purement politique, ils n’avaient pas besoin de cela en temps de conflits. Et c’était sans parler de l’aspect familial. Jamais Salem n’aurait toléré que son frère ôte la vie comme cela, aussi simplement. Il savait qu’il le faisait déjà. Mais pas là. Pas ce soir. Pas alors qu’il veillait sur lui. Le jeune vainqueur pouvait dire absolument tout ce qui lui faisait plaisir ; très bien. La fille s’était barrée ? Tant mieux. Son frère ne pourrait plus lui faire du mal, tout du moins pas ce soir. Et à vrai dire, Salem ressentait un plaisir menu mais indescriptible à la savoir partie. Il n’y avait plus qu’eux. Plus que Lincoln, et lui. Face à face. Comme cela ne se produisait plus assez. En colère pour l’un, grondant et menaçant pour l’autre. Deux frères, deux moitiés. Qui n’avaient absolument rien pour se compléter. Et tellement tout à la fois.

Les mains de Lincoln se posèrent sur son frère, le repoussant brutalement en arrière. Salem oscilla, quelques pas se perdirent sur la pelouse, alors qu’il se laissait faire. Il n’avait aucune intention de lui rendre les coups. Pas maintenant. Pas ce soir. Ou alors, son jumeau aurait réellement dépassé les bornes, et il ne pourrait plus rien garantir. Mais pour le moment, la flemme empêchait encore chacun de ses muscles de réagir, puissante, contrôle indispensable pour éviter au sang de couler autour de lui à chaque petite frustration. Tout gâcher ? Salem gâchait tout ? Son regard se posa dans celui de son frère, perçant, agressif, menaçant. Seule partie de lui qui reflétait sa colère et sa haine envers ce que le vainqueur pouvait être en train de lire. Et pourtant, contrairement à ce que trahissaient ses yeux, il n’explosa pas. Jamais. « Foutre en l’air quoi ? La mort d’une pauvre fille, parce que tu n’es pas capable de contenir ta frustration et ta colère à la moindre remarque vexante ? » Il n’était pas là lorsque tout avait éclaté, mais se doutait bien du genre de remarques qu’elle avait pu faire. Les rumeurs courraient sur les frères Hyde-Earnshaw, leur folie, leur dangerosité. Salem n’y prêtait pas attention, et s’en moquait même éperdument. Mais Lincoln, lui, les vivait bien différemment. Et là résidait la grande partie du problème. « Grandis, un peu. Tu ne peux pas tuer quelqu’un à chaque fois que tu es en colère. » Sa voix était sombre, monotone, placée sur le bon ton, et posée. Il ne rentrerait pas dans la rage écrasante et étouffante de son frère. Mais cela ne l’empêcherait pas de répliquer. « Ou tu finiras par te faire tuer, toi aussi. » Atroce vérité, et pourtant si simple.

Si Lincoln continuait comme cela, il viendrait un jour où lui aussi subirait les foudres d’une colère accumulée chez les habitants passifs du district. Ces pauvres moutons ne réagissaient pas encore, mais les tyrans finissaient toujours par tomber, uniforme blanc ou pas.

Si Lincoln n’arrêtait pas, il finirait par se faire tuer. Comme Todd. Comme lui-même. Il mourrait. Sa seule erreur ayant été sa douce folie, et la violence qu’il embrassait comme une vieille amie, dès que l’occasion se présentait. Triste fatalité. Triste vie.
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MessageSujet: Re: fire in the blood. (brothers)   fire in the blood. (brothers) Icon_minitimeMar 23 Avr - 21:29

nothing but an aching soul.

Qu'il parvienne à rester aussi calme, ça t'énerve. Ça t'agace, ça te bouffe. Comment il fait, hein ? Tu n'en sais rien, et c'est certainement ça qui te prend la tête par-dessus tout. Il ne réagit pas, à rien, et toi, tu réagis trop. Rien de bien équilibré en clair. Tu lui fais remarquer que tu n'as pas besoin de lui. Que tu t'en fous littéralement, qu'il s'inquiète pour toi ou pas. T'es indépendant, t'as jamais demandé son aide ou quoi, même si à l'intérieur il y a cet autre Lincoln, ligoté et bâillonné qui appelle désespérément à l'aide. Ce Lincoln un peu trop faible à ton goût. Ce Lincoln qui t'aurait fait perdre les jeux. Ce bon garçon souriant et altruiste, que tu tues à chaque crime que tu peux commettre. Le silence retombe, lourd, pesant. Il s'immisce entre vous deux, et creuse un lac infranchissable. Chacun reste planté sur sa rive à dévisager l'autre ; toi, tu regardes Salem sans réellement le voir. Lui, il continue de te fixer avec cet air toujours aussi désintéressé. Toujours aussi passif. Il scrute la bête de foire, le monstre qui se donne en spectacle. Son frère. Et comment peut-il encore te considérer ainsi, alors qu'au final, vous n'avez en commun que le physique. Ton sang ne fait qu'un tour quand le sien reste de glace, en un flot régulier qui coule dans chacune de ses veines. Tu l'envies parfois. Tu te dis que tout irait mieux, si tu savais être aussi calme. T'as essayé, t'as perdu ; inutile de t'entêter, tu ne peux pas lui ressembler. Il est la raison quand tu es la folie. Il est le calme quand tu es la tempête. Il est l'homme quand tu demeures la bête. Quelque part, tu en viens à le haïr, pour sa manière d'être si froid, si parfait. Mais ça ne dure jamais longtemps, car quoi que tu en penses, il est ton frère.

« Toi non, mais cette idiote oui. » Tu souris imperceptiblement, rien qu'un peu, en écoutant chacun de ses mots. Non pas car tu te sens bien. Ni même car tu es heureux. Ce n'est qu'un autre de ces sourires totalement faux et hypocrites, qui dégoulinent de cette folie qui te caractérise. Douce tare qui te détruit, à chaque nouveau jour. Au moins, il reconnaît que tu n'as pas besoin de lui, même si tu doutes de la véracité de ses propos. Elle non plus, elle n'a pas besoin d'un héros. Elle n'a pas besoin de quelqu'un pour venir la sauver des crocs du grand méchant loup. Dans la vraie version, Scarlett se fait manger, et paf, fin de l'histoire. Il n'y a pas de chasseur, ni de bûcheron, pas de sauveteur. Dans la vraie version, il n'y a pas Salem. Et pourtant il est bien là, droit devant toi à protéger par quelques paroles teintées de bon sens l'autre garce qui ne le mérite pas le moins du monde. Il t'énerve d'autant plus. Il se mêle de ce qui ne le regarde pas - enfin, pas directement. Les conneries que tu peux faire, elles n'auront de répercutions que sur ta personne. Du moins, c'est ce que tu t'enfonces dans le crâne pour t'en persuader. Erreur fatale. Tu es bien trop dans ton truc pour te rendre compte que, en agissant de la sorte, tu entraînes Salem dans ta chute. Salem qui garde la tête à la surface pour s'en tirer, qui tente de t'aider à remonter toi aussi, au-dessus de cet océan qui t'étouffe et t'attire, au plus profond. Océan déchaîné, reflet de la vie désastreuse que tu t'es créée, répondant au doux nom de folie. Trop con pour t'en rendre compte, tu tires la main de ton jumeau vers le bas, l'entraînant lui aussi vers le fond.

Tes mains se posent sur l'autre, tu le repousses brusquement. La garce a pris la fuite, désormais, c'est entre vous deux. Et seulement entre vous deux. Il te rend dingue, car il l'a laissée partir. Il t'a empêché de finir ton bouleau. Et quel bouleau alors, pas des moindres. Il n'apprécie pas le geste, mais ne le fait pas savoir explicitement. Tu le sais juste car tu le connais bien, le Salem. Tu sais lire dans les yeux, tu sais comprendre quand tu vas trop loin. Et à cet instant précis, la limite entre ce qu'il t'autorise ou pas devient bien floue. Son regard se fait aussi sombre que le tien, aussi menaçant. Tu joues avec le feu, tu passes ta main dans la flamme, mais tu ne te brûles pas ; pas encore. Tu exploses, il reste impassible. Comme toujours. « Foutre en l'air quoi ? La mort d'une pauvre fille, parce que tu n'es pas capable de contenir ta frustration et ta colère à la moindre remarque vexante ? » Ouais, précisément. Tu passes nerveusement tes mains dans ta nuque, enfonçant le bout de tes doigts dans la peau, comme pour te distraire. Tu exerces une forte pression, tu essayes de faire passer cette boule de colère ailleurs que sur l'autre. Oui, t'es frustré. Tous les jours de ta foutue existence, tu es frustré. À chaque matin où t'ouvres les yeux, tu es d'avance énervé. Mais qu'est-ce que tu y peux ? C'est la vie, pas le paradis. T'es pas capable de digérer les remarques acérées des autres, et qu'est-ce que tu y peux, hein ? C'est dans ton caractère. « Oui ! Exactement même ! Et tu sais quoi, si ça te plaît pas Salem, tu peux aussi dégager ! J't'ai déjà dit que j'avais pas besoin de toi, de tes conseils, de tes bonnes paroles d'accord ? Peut-être que tu t'en tapes toi, qu'on crache sur ton nom. Pas moi. » peut-être que tu t'en fous toi, de passer pour un dingue. Toi aussi, ça t'indiffère, au final. Tu digères, une fois et deux, mais pas trois. Tu exploses, tu t'imposes et les choses partent en live. « Grandis, un peu. Tu ne peux pas tuer quelqu'un à chaque fois que tu es en colère. » Si, justement. C'est bien toi ça, pas vrai ? « Ou tu finiras par te faire tuer, toi aussi. » Tu tiques un peu. Tu secoues imperceptiblement la tête. T'es déjà mort, de toute façon. Tu n'es qu'une masse mouvante, un amas de chairs et d'os qui s'active pour une cause qu'on lui a intégrée dans le crâne. T'es rien de plus qu'un automate qui tombe, qui se rattrape, qui s'exécute. « Faut bien crever de quelque chose de toute façon, et puis au final, qu'est-ce que ça peut te faire hein ? » à peine s'échappent-ils d'entre tes lèves que tu regrettes déjà tes mots. T'aurais pas dû dire ça, tu le sais parfaitement. Amère, la culpabilité te ronge.

Et merde, au final. T'en as ras-le-bol d'accepter tout le temps qu'il te réprime. Ras-le-bol de te plier en deux parce que oui, c'est l'aîné. De combien d'années déjà ? Quelques minutes seulement. D'où est-ce qu'il peut t'interrompre comme il vient de le faire ? De quel droit est-ce qu'il le fait, hein ? Le trop plein de haine remonte, pousse au fond de ta personne, et bloque toujours dans ta gorge. Tu as cette furieuse envie de lui dégueuler au visage, toute la colère du monde que tu sembles porter sur tes épaules depuis tellement longtemps déjà. Envie de l'accuser, de lui balancer des faits, même s'il n'y est pour rien. Juste parce que ça fait du bien de se défouler. Juste parce que c'est lui qui est là, au mauvais moment. Comme toujours. « Qu'est-ce que t'essayes de faire d'abord ? Me protéger ? J'me débrouille très bien seul. C'était Todd qu'il fallait sauver, pas moi. » Tu secoues la tête, et tes yeux s'embrument doucement. Todd. Todd. Ce cher Todd qui te manque tant, abattu douloureusement et comme un chien par les rebelles. « Moi je suis déjà loin Salem. J'suis déjà mort, le jour où je suis rentré dans cette arène, j'ai signé mon arrêt de mort, tu piges ça ? La partie est finie depuis longtemps pour moi. » La rage luit encore dans tes yeux, folie tout aussi meurtrière que passagère. T'en peux plus, tu décapsules, comme à chaque fois. Être raisonnable, se contenir, toutes ces conneries, c'est pas pour toi. C'est plus pour toi, simplement.

Remettant un peu le col de ta chemise, tu essayes de te calmer, un minimum. Il est temps de lui souhaiter une bonne soirée, et de vous abandonner, tu sais que sinon, tout va repartir n'importe comment. Et malgré tout ce que tu peux dire, Salem est certainement la dernière personne que tu veux blesser. « Maintenant, dégage d'ici d'accord ? Retourne sauver les gonzesses en détresse, protéger tes orphelins, va donc faire c'que t'as pas été foutu de faire pour ton propre frère. » Une dernière salve acide de mots à l'adresse de ton jumeau. Paroles assassines, c'est à peine si tu te rends compte que tu lui renvois toute la responsabilité pour la mort de Todd. Car c'est plus simple d'accuser les autres, quand soi-même, on se sent grandement coupable. Tu ne desserres que peu les mâchoires, et tu le lâches du regard pour faire demi-tour, et rejoindre l'immense baraque qui te fait face, la tienne. Trop grande, trop vide. Comme toi, Lincoln.

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MessageSujet: Re: fire in the blood. (brothers)   fire in the blood. (brothers) Icon_minitimeSam 4 Mai - 14:43


I want to reconcile the violence in your heart.

C’était si compliqué. Depuis qu’ils étaient petits, la guerre avait toujours été présente. Chacun des jumeaux était d’une trempe qui lui était propre, et aucun des deux ne s’était amélioré avec l’âge. On aurait pu croire qu’en grandissant, ils mûriraient. Qu’en mûrissant, ils se seraient rapprochés, mieux entendus. Mieux compris. Cela semblait pourtant être peine perdue, une cause finie depuis bien longtemps. Lincoln s’était enterré dans cette folie profonde qui caractérisait désormais entièrement son être. Il était devenu cette carcasse vide, se remplissant à mesure que le temps passait d’un venin dangereux, poison brûlant dans ses veines. Le poison de la folie. Salem, lui aussi, s’était vidé. Il était devenu un zombie, le genre de personne que l’on préfère éviter lorsqu’on le croise dans la rue. On change de trottoir, on s’éloigne. Comme si inconsciemment, on sentait le poids de cette lame de rasoir au fond de sa poche, le poids ce poing américain avec lequel il aimait jouer pour se détendre. Inconsciemment, on préférait rester au loin, et ne pas chercher les ennuis. Ne pas prendre le risque de mettre sa vie en danger pour l’aborder, ou se confronter à lui. Au final, c’étaient les bienfaits de la solitude qui l’emportaient. Salem n’avait plus à penser à tout ce qui aurait pu le préoccuper ; à ses relations avec le monde extérieur. Il était une coquille vide depuis bien longtemps déjà. Personne n’avait jamais compris, personne ne semblait l’avoir réellement remarqué. Il était mort en même temps que son jumeau, lorsque celui-ci avait été appelé pour les Jeux. Lincoln Hyde-Earnshaw était parti. Et sans s’en rendre compte, il y avait emmené son frère. Et ni l’un ni l’autre n’en étaient jamais revenus. Lincoln se laissait habiter par la folie. Salem, lui, s’était laissé envahir par la haine. La colère et la rage. Ces sentiments si habilement dissimulés derrière son masque d’impassibilité, alors que chaque pas qu’il faisait en laissait une petite traînée derrière lui. Il n’était qu’un monstre ; peut-être avaient-ils raison. Todd avait perdu les pédales, mêlant sa violence et sa folie brutale, pour devenir l’un des Pacificateurs les plus incontrôlables du District Trois. Lincoln était devenu le chien enragé sagement contrôlé, et gardé sous clé. Capable d’exploser, mais tout autant de se contenir. Et Salem. Qui n’explosait jamais. Jamais vraiment. En perpétuelle retenue. Se forçant à adopter la conduite qui aurait pu sauver Todd, celle que Lincoln aurait dû tenir pour éviter de s’attirer perpétuellement des foudres qui n’auraient pas dues être siennes. Au final, à quoi rimait ce jeu qui dirigeait leurs vies ? Essayer de rester droit, essayer de sauver Lincoln, inlassablement. Y avait-il seulement quelqu’un sur cette planète pour se rendre compte de l’horreur que vivait également Salem depuis le retour de son frère ? Il intériorisait. Il gardait tout pour lui, bombe à retardement depuis plusieurs années. Les temps restaient, s’écoulaient. L’eau coulait sur les ponts. Elle emportait tout, disait-on. Balivernes. Elle n’emportait rien du tout. Elle ne faisait qu’accroître cette souffrance qui rongeait notre jumeau, qu’empirer la folie qui animait le second. L’eau coulait sous les ponts, éloignant à chaque seconde un peu davantage les rives sur lesquelles ils s’efforçaient de rester debout, droits et solides. Deux rocs à qui on ne laissait pas la possibilité de montrer leurs sentiments ouvertement, à qui on ne laissait pas le droit d’être compris. Le temps les éloignait. La mort de Todd avait creusé un fossé qui semblait ne plus pouvoir être comblé. Et ce soir-là, cœurs vidés, esprits ravagés. La bombe au fond de Lincoln venait d’exploser. Et celle qu’abritait Salem menaçait.

Torture, désespoir. Salem fronça les sourcils, reculant légèrement la tête. Les mots s’échappaient d’entre les lèvres de son jumeau, alors qu’il ne savait même plus s’il les entendait réellement, ou si tout ceci allait directement droit à son cœur. Crevant les barrières, explosant les os de sa cage thoracique, consumant de manière instantanée son muscle cardiaque. Il n’avait pas droit de dire cela. Il n’en avait pas le droit. Parler de Todd. Comment osait-il ? C’était Todd qu’il fallait sauver. Un battement avait dérapé, alors que Salem avait tenté de conserver une inspiration contrôlée. Presque en vain. Il avait écouté les paroles de son frère, n’ayant le cœur de l’interrompre. En étant totalement incapable, sauf s’il avait pu s’énerver. S’il avait su sortir de ses gonds, et le rappeler à l’ordre. Il aurait pu lui dire qu’il n’était qu’un abruti, qu’un con. Lui dire qu’il ne comprenait rien, et qu’il ne faisait que se faire souffrir davantage à énoncer tout cela. Parler des Jeux, parler de sa mort. Un des yeux de Salem se ferma brièvement léger réflexe nerveux, tentant d’ensevelir la colère et le chagrin, mêlés pour donner à cette seconde précise la pire des rages. Il détourna le regard, une fraction de secondes, avant de le reposer sur Lincoln. Lincoln, qui n’en avait pas fini, et qui explosait littéralement. Il remettait le haut de sa chemise en place, tic nerveux pour tenter de se détendre, lui aussi, probablement. Et il continuait. Son venin se déverser, acide dévorant le cœur encore battant de son frère. Arrête, Lincoln. Arrête ça. Arrête de faire comme si tu ne comprenais rien, arrête de tout faire pour le blesser. Arrête, je t’en prie. Arrête, avant qu’il ne soit trop tard. Arrête.

C’est trop tard. Tout est terminé. Le poing s’est écrasé dans le visage de Lincoln, brutal et sans retenue. Il n’a pas voulu faire ça, non… Il ne l’a pas fait, c’est impossible … Et pourtant. Pourtant, les faits sont là. Ses doigts repliés et contractés, balancés à pleine puissance dans le visage de son frère jumeau, au point de probablement lui en faire saigner un peu la lèvre. Il s’en fiche, réellement. Aussitôt, il a voulu se reculer. Voulu, seulement. Ses deux mains ont agrippé ce col que Lincoln s’était évertué à remettre en place. Il l’avait attiré à lui, tenant son visage à quelques centimètres du sien. Son expression était tout aussi fermée qu’avant, seuls ses yeux débordaient de toute la rage et de toute la rancœur qu’il pouvait avoir en cet instant précis. Les mots s’échappèrent d’entre ses lèvres fines, grondants, menaçants. « Je ne suis pas responsable de la mort de Todd. » Contrôle-toi, Salem. Ne rentre pas dans ce jeu. Contrôle-toi … Brutalement, il repoussa Lincoln, reprenant une inspiration plus maîtrisée, reculant d’un pas. Il le fixait toujours. La culpabilité commençait déjà à monter, alors qu’il prenait conscience d’avoir frappé la seule personne dont il voulait la sécurité, dans tout Panem. Il fixa lentement son jumeau. Seuls ses yeux laissaient transparaître toute la rage et la rancœur qui pouvaient l’abriter, alors qu’il poursuivait, froid et assassin. « Je n’y suis pour rien, je t’interdis comme si tout était de ma faute. » Il avait levé un doigt accusateur vers son frère, la voix toujours calme, mais légèrement tremblante sous le coup de la colère. « Tu étais où, toi, à ce moment-là, hein ? Quand on l’a enlevé, t’étais où ? T’aurais pas pu aller le chercher, toi aussi, non ? Au lieu de boire, et de faire tes conneries habituelles. Pourquoi ce serait de ma faute, plutôt que de la tienne ? » Il n’avait pas élevé la voix, mais la colère était réellement palpable. Lincoln était là quand on leur avait livré Todd déjà agonisant. Mais le reste du temps, où était-il ? « Si tu es si sûr de toi, si tu es persuadé de ne pas avoir besoin de moi, alors assume, bon sang. Tu es responsable de sa mort. Tout autant que moi. » Il avait finalement haussé un peu la voix, avant de reculer encore d’un pas, le torse secoué par sa respiration colérique et dévastée. Il ramena ses deux mains le long de son corps, serrant les poings à s’en faire trembler le reste des bras. Pourquoi se disputer ? Pourquoi est-ce qu’ils n’arrivaient donc jamais à s’entendre ? Finalement, les poings de Salem se décrispèrent. Il déglutit lentement, secouant la tête. « Et si tu crois à être le seul qui est mort aux Jeux lorsque t’es parti, il serait peut-être temps d’ouvrir les yeux. Et d’arrêter avec cette putain de lâcheté derrière laquelle tu te caches à longueur de journée, tout en prétextant être parfaitement capable de te débrouiller. »

À quoi est-ce que cela rimait ? C’était blessant. C’était voulu. Il lui avait fait mal. Et il voulait lui rendre la monnaie de sa pièce, tout en détestant si intensément ce qu’il faisait. Il voulait lui rendre cette putain de monnaie, et lui faire comprendre que lui aussi avait souffert. Lincoln ignorait que Todd et Salem s’étaient battus après la Moisson. Il ignorait la souffrance qui avait pu agiter le cœur de son jumeau. Il ignorait tout. Jamais notre Pacificateur ne l’avait aidé, cela dit. À tout garder pour lui, à intérioriser. Mais c’était trop simple. Trop simple de tout remettre sur son dos, trop simple de le laisser écoper de toutes les responsabilités, alors qu’à côté il réclamait qu’on le considère comme quelqu’un de responsable. Qui d’eux deux était réellement coupable de la mort de Todd ? Ni l’un, ni l’autre. Ou peut-être bien eux deux. Personne ne le saurait jamais. Et au fond, cela n’avait pas la moindre espèce d’importance.

Todd était mort. Leur frère était parti. Ils étaient seuls, désormais. Et toutes les disputes du monde n’y changeraient jamais rien.
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MessageSujet: Re: fire in the blood. (brothers)   fire in the blood. (brothers) Icon_minitimeJeu 16 Mai - 17:13

how close am i, to losing you.

Tu t'éloignes, toujours plus loin. Tu te dérobes à la réalité pour éviter la situation actuelle, tout ce qui peut bien t'échapper depuis ton retour, depuis la mort de Todd plus particulièrement. Tu n'as plus aucun contrôle, sur rien, et encore moins sur toi-même. Et ça, ça te désole vraiment. Alors tu fais ce que tu sais faire de mieux ; prendre la fuite. Agir, et ignorer les conséquences. Repousser à demain, ce à quoi tu aurais dû être confronté aujourd'hui, et les jours précédents. En revenant des jeux, tu marchais déjà en équilibre sur une poutre, et aujourd'hui, c'est sur un fil, que tu joues les funambules. Chaque jour qui s'écoule, chaque minute qui s'égraine de manière vicieuse à la pendule, fait que ce foutu fil s'amincit. Et bientôt, lorsque cette maigre cordelette viendra t'entailler les pieds, tu tomberas dans le vide. Et tout sera fini, pour de bon. Tes yeux brillent dans la nuit, de colère, de fatigue aussi. T'en peux plus de lutter dans le vide, d'essayer d'avancer continuellement pour rester sur place. La solution de la facilité est bien plus douce, bien plus agréable, alors tu te laisses bouffer par la folie. Elle te dévore de l'intérieur, elle t'épuise et toi, t'es bien trop aveugle pour t'en rendre compte. Tu es perdu. Plus que tu ne l'as jamais été. Tu le regardes lui en face, et tu l'envies, car lui, il a réussi. Non, ce n'est pas un saint. Non, ce n'est pas le gentil petit garçon qu'il a pu être. Il n'est que lui, que Salem. Et il est bien plus que toi en même temps. Parce que lui sait se maîtriser, lui sait rester calme. Lui savait calmer Todd quand toi, tu le regardais faire en ricanant sournoisement. Lui est modéré. Lui est toutes ces choses que toi, tu as balayé depuis longtemps du revers de la main. C'était bien de les ignorer ces choses, mais pendant un certain temps seulement. Et aujourd'hui, alors que tu t'es battu pendant des années pour les récupérer sans jamais les retrouver, aujourd'hui, tu te rends compte que c'est bien trop tard, et tu comprends tout le sens de ta connerie.

Tes yeux brillent oui. Ils reflètent le vide, le néant, tout ce qui t'entoure et te constitue en même temps. Ils ne demandent qu'une chose ; qu'on t'achève. Parce que t'as bien trop donné, tu veux juste un peu de repos maintenant. Quelques jours, quelques années, une éternité. Tu ne demandes pas grand-chose. Mais tu sais pertinemment que personne ne te fera jamais ce plaisir, parce que tu as versé trop de sang, tu as trahi, menti et bousillé des vies. Et ça t'a amusé, c'est bien ça le pire. C'est bien pour ça, qu'ils ne t'excuseront jamais. Pas de pardon, pas de rédemption. Maintenant tu payes au centuple les magouilles que tu as pu faire, parce que tu le mérites. Parce qu'ils pensent sincèrement que tu le mérites. Peut-être que c'est vrai. Très certainement même. Et tout le monde le sait, la seule sentence acceptable pour un monstre comme toi, c'est être condamné à vivre, jusqu'à attendre l'ultime délivrance. Tu pourrais disparaître, c'est pas bien difficile. Mais c'est pas dans tes gênes, c'est pas dans ton sang, ni dans ton éducation, d'abandonner une cause que tu sers « noblement ». Défendre le Capitol à la rigueur, tu t'en fous. Tu as un objectif bien plus important figé à l'encre indélébile dans les tréfonds de ta personne. Venger Todd. Tuer des rebelles. Surveiller Salem. Venger Todd. Tuer des rebelles. Surveiller Salem. Et cette boucle vicieuse, combien de fois est-ce que tu en as fait le tour, hein ? Un millier de fois certainement, sans qu'elle ne se boucle pour autant. C'est ta motivation, ton combat, et c'est tout ce qui compte. Surveiller Salem. C'est plutôt lui qui te surveille, lui qui est toujours là quand il y a un problème. C'est lui qui assure le gardiennage et qui dit stop, quand tout va trop loin. Et c'est lui qui subit ta colère, aujourd'hui encore. Pauvre Salem. Pauvres jumeaux.

Il n'y a rien dans la nuit, sauf deux frères qui se déchirent dans une dispute affreuse. Des mots sont balancés sans aucun tact, on blesse l'autre, pourvu que ça lui fasse mal. Un peu au moins. Et ça, c'est surtout toi Lincoln. Car oui, c'est toi qui met le feu aux poudres, toi qui lui colles la responsabilité pour la mort de Todd sur le dos. Car tu te sens coupable toi aussi, et que c'est plus facile de se dire que quelque part, c'est de la faute des autres. Ça t'enlève un poids, c'est sûr. Mais à quel prix hein ? Salem bat nerveusement d'un oeil. Tu sais ce que ça veut dire, c'est un de ces tics nerveux qui, comme une alarme, te dit stop. Mais non, il faut que tu continues, que tu pousses la chose, plus loin encore. Quel con. Puis, il frappe. Ça y est, ton vis-a-vis explose lui aussi. Son poing vient cogner ton visage, perturbant au passage ton équilibre. Tu fais un pas en arrière, puis deux, en essayant de digérer le coup qui t'a fendu la lèvre. Ça y est, Salem aussi, il a explosé. La douleur est bonne, c'est presque jouissif qu'il t'ait frappé. C'était ce qui te fallait apparemment, pour que tu daignes revenir à ta place. « Je ne suis pas responsable de la mort de Todd. » Mais si Salem tu l'es tout autant que moi. Des mots qui se font sourds, qui restent bloqués au fond de ta gorge. Il te fait peur. Réellement. « Je n'y suis pour rien, je t'interdis comme si tout était de ma faute. » Le voir s'énerver ainsi, l'entendre te cracher au visage comme ça. C'est un millier de fois plus douloureux que le coup qu'il a pu t'envoyer. Et c'est encore de ta faute. Comme toujours. « Tu étais où, toi, à ce moment-là, hein ? Quand on l'a enlevé, t'étais où ? T'aurais pas pu aller le chercher, toi aussi, non ? Au lieu de boire, et de faire tes conneries habituelles. Pourquoi ce serait de ma faute, plutôt que de la tienne ? » Mais tu peux continuer Salem, remue le couteau dans la plaie, comme si ça n'avait pas d'importance. Et c'est à ce moment que tu regrettes d'avoir lancé le sujet. C'est à cet instant précis que tu te rends compte à quel point tu as été dur avec lui. C'est maintenant que tu prends le revers de la médaille. Médaille de la connerie. Ses mots tombent au fond de ton petit cœur, remuant un peu les ruines qui le constituent. Et à quoi est-ce que ça vous mène tout ça, hein ? À rien. Sauf à vous détruire un peu plus mutuellement. Tu ne réponds rien, rien à part ce lourd silence qui en dit long sur ce que tu penses. Il a raison. T'aurais dû être là toi aussi. T'aurais dû chercher à le retrouver, plutôt que de t'apitoyer sur ta pathétique existence autour d'un énième verre. Plutôt que de faire tes 'conneries habituelles', comme il te le rappelle si bien. « Si tu es si sûr de toi, si tu es persuadé de ne pas avoir besoin de moi, alors assume, bon sang. Tu es responsable de sa mort. Tout autant que moi. » Et ça y est, la sentence tombe, la vérité triomphe comme toujours. Vous êtes tous les deux responsables. Toute cette colère, toute cette haine, tout est brusquement retombé dans tes veines. Ton rythme cardiaque est de nouveau, tout ce qu'il y a de plus normal. Il en va de même pour ta respiration. À croire que le coup t'a remis les idées en place. Les situations sont inversées ; il est énervé, tu es tout ce qu'il y a de plus calme. Ta vision devient un peu floue, derrière cette fine pellicule d'eau qui te brûle les yeux. Jusqu'à quand, ce petit jeu, hein ? Jusqu'à ce que l'un ou l'autre - ou plutôt les deux - se retrouve anéanti, c'est ça ? C'est pourtant pas ce que tu veux. Et c'est ce que tu fais.

Tu restes figé sur place. Tu te contentes de les détailler, lui, et cette nervosité exacerbée qui ne lui ressemble pas. T'es content, t'as gagné ? Tu l'as fait exploser. Et maintenant, tu regrettes amèrement. Putain oui, tu regrettes. Tu lui as fait mal, autant qu'il a pu te faire mal. Et tout ça pour quoi ? Pour rien. Ça ne va pas ramener Todd à la vie, que de débattre sur cette responsabilité commune. Cruelle vérité. « Et si tu crois à être le seul qui est mort aux Jeux lorsque t'es parti, il serait peut-être temps d'ouvrir les yeux. Et d'arrêter avec cette putain de lâcheté derrière laquelle tu te caches à longueur de journée, tout en prétextant être parfaitement capable de te débrouiller. » Tu secoues la tête. Non Salem, arrête Salem. Arrête parce que ça commençait à aller mieux. Arrête parce que j'avais cette sensation d'être calme, pour la première fois depuis longtemps. Calme, mais d'autant plus dévasté de l'intérieur. Ses mots, il les inscrit au fer blanc, comme d'habitude, quelque part dans cet amas de chairs déglinguées. Il peut être fier de lui, il a gagné. « Parce que t'es pas lâche toi, Salem ? Non t'as raison. Tu sais quoi, t'as raison, comme d'habitude. T'es parfait toi Salem. Tu parles pas, tu obéis aux ordres, t'as réussi ta vie. C'est bien. Sincèrement, je suis heureux pour toi Salem. Parce que sur les trois, y'en aura eu au moins un de réussi. » Ta voix est terriblement froide, calme. C'est pas toi ça. Ça n'a jamais été toi. « Mais toutes tes conneries de modération là, à toujours être trop calme, trop silencieux. Ça aussi, c'est lâche. » Tu desserres les molaires, essuyant ta lèvre inférieure du revers de ta main. Ouais, il t'a pas loupé.

Tu baisses les yeux un court instant, regardant tes mains par défaut. Qu'est-ce que vous avez fait, hein ? « Et merde Salem ! Comment est-ce que je peux comprendre ce qui se passe dans ta tête si tu dis jamais rien, hein ? Des fois, j'ai juste cette putain d'impression que t'es qu'un étranger. J'suis peut-être lâche, mais à quoi je dois me raccrocher hein, si la seule personne encore là pour moi n'est rien de plus qu'un fantôme, hein ? Je peux pas t'en vouloir Salem. J'sais que t'a souffert autant que moi, de toutes ces conneries. J'sais que je suis qu'un putain de fardeau pour toi. Mais si tu m'dis pas ce qui ne va pas, j'vois pas comment je peux le deviner. Je vois pas comment faire en sorte que les choses aillent mieux, si ça ne va déjà pas avec mon frère. » Tu hausses les épaules, presque neutre. Tu ne veux plus lui faire mal, non. Tu veux juste le secouer. Lui faire comprendre que des fois, son silence, c'est trop. Que tu peux pas t'en sortir comme ça. Tu ne lui demandes pas d'être toujours là pour toi, non. Tu ne lui demandes pas de te raconter la pluie et le beau temps. Tu veux juste qu'il le dise clairement, quand quelque chose ne va pas, plutôt que d'agir de manière détournée comme il l'a fait ce soir. Du bout des doigts, tu lui montres ce qu'il t'a fait ; cette lèvre explosée qui continue à saigner, encore un peu. « T'as vu à quel point les choses doivent déraper, pour que tu daignes l'ouvrir ? » Les coups, la haine, la colère. Comme s'il n'y avait que cela pour alimenter vos conversations. « Alors non, j'peux pas me débrouiller seul, tu vois. Mais on dirait que j'ai pas tellement le choix. » Et sur ce, tu te détournes une dernière fois pour retourner à l'intérieur.

La porte lui est grande ouverte, il le sait. Toi, tu es las d'attendre dehors, las de vous auto-détruire.

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